Le jour de ma vespérie [2][3] est venu. J’ai récité ma harangue qui a duré une heure tout entière, non sans l’impatience de quelques particuliers qui avaient regret de s’y voir maltraités, tels que nos vendeurs de remèdes spécifiques, [4] poudres hydragogues, [1][5] pilules et autres secrets, lesquels pouvaient pourtant s’en aller puisque les portes étaient ouvertes. C’est la coutume des méchants de n’écouter qu’impatiemment qu’on leur fasse leur procès ; mais mon exhortation a plu à tout le reste de la Compagnie. M. Blondel [6] continue à faire le doyen, je crois que ses opposants n’osent poursuivre, quoique Guénault [7] en soit un qui s’est déclaré des premiers contre lui et a fait ensuite signer quelques autres de sa cabale. M. Blondel me dit hier qu’il avait en main une pièce pour faire perdre le procès de Des Gorris, [8] et qu’il ne jouirait jamais du revenu et ne tiendrait jamais la place d’ancien maître : [9] c’est qu’autrefois il passa maître ès arts en l’Université de Paris et fit serment d’être catholique, et n’eût point autrement été reçu ; or est-il qu’il ne fut jamais que huguenot, [10] étant né à Châteaudun [11] de parents huguenots ; et Messieurs de la Grand’Chambre seront bien aise d’avoir ce prétexte pour le condamner. Messieurs de l’Université de Paris ont fait travailler un habile homme nommé M. Du Boulay, [12] Angevin qui a fait par plusieurs années la première dans le Collège de Navarre, [13] à l’histoire de leur Corps studii Parisiensis. [2][14] Enfin le bonhomme M. Perreau [15] est enterré dans Saint-Paul, [16] sa paroisse ; je n’ai pu y assister d’autant qu’il m’a fallu aller à quatre grandes lieues d’ici. Je vous baise les mains et suis de tout mon cœur votre, etc.
De Paris, ce 26e de novembre 1660.