Note [35] | |
« Et cela est bien jésuite ». Guy Patin s’est ici trompé de Fabri. Il voulait parler non pas d’Honoré Fabri, jésuite, mais de Johann Fabri, médecin allemand (Bamberg, Bavière 1574-Rome 1629) qui se fixa en Italie où il devint professeur de médecine à Rome puis médecin et botaniste du pape Urbain viii. Parmi ses écrits, on trouve en effet un traité intitulé : Ioannis Fabri Bambergensis, medici Romani, de nardo et epithymo adversus Iosephum Scaligerum Disputatio. Qua plantarum istarum vera descriptio continetur ; Dioscoridis et Ovidii loca declarantur, et a corruptela defenduntur ; medicorum denique et pharmacopœorum honos a Scaligeri calumniis vindicatur… En échantillon des propos de Fabri contre Scaliger, cet extrait de l’épître dédicatoire à Victorio Mervilli, protonotaire apostolique (v. note [19] du Patiniana I‑3) et premier médecin du pape, pages 3‑4 :
Respondi, inquam, paucula, quæ ipse postea libro suo, quo Iosephum L. Cornelia de falsis reum peragit, et furtim in Scaligerorum Veronæ, et Vicetiæ principum familiam irrepsisse coarguit, appingendum et typis æneis in Germania describendum curavit. Sed quoniam eius libri perpauca huc afferuntur exemplaria, complures autem amici videndæ meæ cum Iosepho disceptationis desiderio teneri se oftendunt. [Nous voyons même des grammairiens, à peine capables d’aligner correctement deux mots, vouloir dénoncer comme barbares chacun des anciens, comme Thucydide, Platon ou Démosthène, qui ont tant mérité par leur faculté d’enseigner et par la pureté de leur langue grecque. Mais cela n’est pas tant un avis de philosophe qu’une prédiction de Delphes et un oracle prononcé depuis le trépied de la Pythie. En attestent à l’envi tant l’exemple de maints autres grammairiens et critiques de notre siècle, que celui du dictateur qui règne sur eux, savoir Joseph Scaliger, autrement dit Burdon. Et il n’a pas suffi à cet homme de se mêler de presque toutes les sciences et disciplines, et surtout de rappeler à l’ordre avec la plus extrême arrogance ceux qui s’y sont appliqués avec la plus grande gloire et les félicitations de tous ; il a aussi flétri d’un châtiment censorial les médecins et les botanistes (dont plusieurs de notre temps) ; et sur tous indistinctement, il a jeté l’accusation gravissime de dangereuse ignorance. Mais nous, médecins et botanistes, tenons bon, ce dont nous sommes gré à la plume de notre Caspar Scioppius. {a} En effet, cet homme très illustre était tombé sur le passage des Castigations de Joseph contre Properce, où l’auteur disserte sur le nard et l’épithyme et tire fort insolemment gloire de ce que Dioscoride a rétabli ; {b} alors, parce qu’un usage assidu des livres de Scaliger l’avait instruit, Scioppius n’y a reconnu que de l’ostentation de soi-même mêlée d’infamie, non sans quelque duperie insigne et éhontée ; on a aussitôt accusé Scioppius d’avoir prétendu de très grandes tromperies sur ce passage et de s’être moqué des savants. Mais pourtant, parce que Scioppius est fort étranger à l’extravagance de ces critiques, chacune de ses habiles déclarations a beaucoup servi à révéler et dénoncer Scaliger : il s’est résolu à le faire méticuleusement et point par point, principalement à mon avis quand il s’est prononcé contre le dessein et la réussite de Joseph. J’ai donc écrit à la hâte quelques mots de réponse, pour évidemment ne pas rester muet en ce siècle bavard, scribouillard et bruyant ; car ces vers de Juvénal n’ont jamais été aussi vrai qu’à présent :
J’ai ensuite répondu, dis-je, en fort peu de mots, que le livre de Scioppius met Joseph sous le coup de la loi Cornelia sur les faux, {d} montrant qu’il s’est furtivement glissé dans la famille des Scaliger de Vérone et des princes de Vicence. Voilà ce que Scioppius a pris le soin d’écrire et de faire imprimer en Allemagne. Mais étant donné que fort peu d’exemplaires de son livre ont été divulgués ici, quantité d’amis ont manifesté le désir de voir ma contestation de Joseph].
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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
À Charles Spon, le 16 novembre 1643, note 35.
Adresse permanente : https://numerabilis.u-paris.fr/editions-critiques/patin/?do=pg&let=0097&cln=35 (Consulté le 17/02/2025) |