Jean ii Riolan a fustigé ces deux critiques d’André Du Laurens dans deux passages de ses Opera anatomica vetera et nova. {a}
- Préface des Animadversiones in opus anatomicum Andreæ Laurentii [Remarques sur l’ouvrage anatomique d’André Du Laurens], page 624 :
Propterea non possum probare institutum Colladonis, qui animosè Laurentium insectatur, et acerbè nimis in quæstionibus Physiologicis reprehendit, quas tueri, quilibet eruditus potest. Atque vt occasionem captet contradicendi, primæ editionis librum recensuit, cum tamen postrema editio anni 1600. auctoris manu ficta factaque fuerit, varia voluminis forma in Galliis et Germania excusa, quæ ipsum latere non potuit. At de rebus Anatomicis pauca quædam adspersit, Laurentio sæpius opponens alterum Anatomicorum auctoritates, et picturas. Inde Collado suam ignorantiam in rebus Anatomicis manifestè prodidit.
[Je ne puis donc approuver la manière dont Colladon {b} poursuit rageusement Du Laurens et le reprend trop vivement sur des questions physiologiques que n’importe quel savant peut défendre. Pour saisir l’occasion de le contredire, il s’est en outre fondé sur la première édition du livre, alors que l’auteur l’a lui-même revu et corrigé dans celle qui a paru en 1600 et été imprimée sous plusieurs formats en France et en Allemagne, dont l’existence n’a pu lui échapper. {c} Colladon asperge Du Laurens de quelques reproches en lui opposant trop souvent les sentences et les dessins d’autres auteurs, mais en étalant sa propre ignorance manifeste de l’anatomie].
- Paris, 1649, v. supra première notule {a}, note [26].
- Théodore Colladon, natif de Bourges, était peut-être docteur de Montpellier, mais a principalement étudié à Padoue et à Bâle auprès des meilleurs maîtres de son temps. Il n’est plus connu que pour ses deux tomes de remarques contre les médecins modernes : Adversaria seu Commentarii Medicinales Critici, Dialytici, Epanorthotici, Exegematici, ac Didactici… [Reproches ou Commentaires médicaux critiques, dissolvants, correctifs, explicatifs et didactiques…] (Genève, Jacobus Stoer, 1615, in‑8o) ; le premier tome commence par ses copieuses Observationes in Laurentii Anatomen [Observations sur l’Anatomie de Du Laurens] (pages 1‑336).
- V. note Patin 3/13 pour la réédition de l’Anatomia de Du Laurens (Paris, 1600), dont les illustrations étaient tirées de la Fabrica d’André Vésale.
- Anthropographia, livre i, chapitre vi, page 32 :
Miror quomodo tam lynceus et perspicax fuerit in rebus Anatomicis Petrus Laurembergius, qui in Lauro Delphico, pollictetur se in suo Prometheo, siue libro Anatomico, ostensurum errores notabiles Laurentij supra bis mille : fateor equidem multos errores in opere Anatomico Laurentij offendi, quorum tamen nonnulli benignè possunt excusari. […]
Cùm autem Laurembergij Procestria Anatomica, anno 1619. edita mihi dono dedisset eruditissimus Medicus Paulus Marquartus Schleigel, nunc Professor in Academia Iulia, animaduerti errores 232. Laurentij annotatos, quorum vix triginta merentur reprehensionem, potius hallucinationes dici debent, namque opere in magno, fas est obrepere somnum ; grauiores et inexcusabiles in Laurembergio inueni […].
Parturientes montes, nascetur ridiculus mus.
Vt in Collegio suo Anatomico manifestè demonstrauit se Vmbraticum Anatomicum qui nunquam secuit cadauera, vel peritè secantibus adsitit, curiosus et sedulus spectator.
Ludere qui nescit campestribus abstinet armis.
[Je m’étonne que Petrus Laurembergius, {a} si perspicace anatomiste qui avait un œil de lynx, promette dans son Laurus Delphicus que son Prometheus ou Livre anatomique {b} exhibera les remarquables erreurs de Du Laurens dont le nombre dépasse deux mille. J’avoue moi-même m’être aussi heurté à quantité de fautes dans l’ouvrage anatomique de Du Laurens, dont quelques-unes peuvent être magnanimement excusées. (…)
Quand le très savant médecin Paul Markward Schlegel, qui est maintenant professeur en l’Academia Julia, {c} me fit cadeau des Procestria anatomica de Lauremberg, j’y ai relevé 232 erreurs qu’il avait remarquées dans Du Laurens, dont à peine une trentaine méritait corrections : il s’agissait plutôt de méprises, car opere in magno, fas est obrepere somnum. {d} J’en ai trouvé de plus lourdes et inexcusables dans Lauremberg (…)
Parturientes montes, nascetur ridiculus mus. {e}
En son Collegium Anatomicum {a} il a manifestement fait voir qu’il était un anatomiste de cabinet, qui n’a jamais disséqué de cadavres ou n’a fait que regarder ceux qui savaient le faire, en spectateur diligent et curieux.
Ludere qui nescit campestribus abstinet armis]. {f}
- Peter Lauremberg (Petrus Laurembergius, anatomiste de Rostock, mort en 1639) est notamment auteur de Procestria anatomica [Fortifications anatomiques] (Hambourg, 1619), où il a rudement critiqué Du Laurens, et d’un recueil de 12 essais intitulé Collegium anatomicum [Collège anatomique] (Rostock, 1639) : v. note Patin 26/1023.
- Page 24 du Petri Laurembergii Laurus Delphica, seu Consilium, quo describitur Methodus perfacilis ad Medicinam [Laurier delphien de Peter Lauremberg, ou Avis décrivant une méthode très facile pour accéder à la médecine] (Leyde, Iohannes Maire, 1621, in‑12 de 56 pages).
- V. note Patin 19/340 pour l’Academia Julia, surnom de l’Université d’Helmstedt (Bavière), mais Schlegel a seulement professé à Iéna de 1638 à 1642, avant de devenir premier médecin de la ville de Hambourg.
- « Dans un long ouvrage il est permis de se laisser aller au sommeil » : Horace, L’Art poétique, vers 360.
- « Les montagnes accoucheront, et c’est une ridicule petite souris qui naîtra », ibid. supra, vers 139.
- « Que s’abstienne de l’exercice des armes celui qui ne sait les manier », ibid. supra, vers 389.
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