Texte : Jean ii Riolan
Première Responsio (1652) aux
Experimenta nova anatomica
de Jean Pecquet (1651).
4. Critique des chapitres xi-xii
de la Dissertatio anatomica, note 29.
Note [29]

Il faut reconnaître à Jean ii Riolan d’avoir mis en doute l’existence de l’atrabile, qu’il tenait pour de la bile jaune épaisse et chargée d’impuretés, éliminée par le foie et la vésicule. Pour lui, la mélancolie était une maladie et non une quatrième humeur corporelle (v. note [33], première Responsio, 6e partie). Je n’ai rien trouvé sur les capsules atrabilaires dans son Anthropographia publié dans ses Opera anatomica vetera et nova de 1649, {a} mais elles contiennent des Animadversiones in Casp. Bartholini Anatomia, {b} dont une section est intitulée De Capsulis Atrabilariis [Des capsules atrabilaires (c’est-à-dire surrénales)] (pages 770‑771). Sans nier catégoriquement leur existence, il ne les juge pas indispensables à la vie et conclut ainsi sa diatribe :

Gloriatur Bartholinus se verum inuenisse vsum, aliis Anatomicis incognitum, recipiunt capsulæ humorem biliarum (debebat dicere atrabiliarium ex titulo) crassum, et excrementitium, qui à sanguine in Hepate vel Liene, vel utroque confecto, nondum expurgatus fuit, ubique seruari, et vinci, quia per angustos renum meatus penetrare non potuit, ergo patentiores et liberiores viæ ad capsulas. Quot verba, tit errores, si Lien destinatus sanguini crasso, fæculento, seu atrabilario asseruando, inutiles capsulæ illæ imaginariæ, vel sunt subsidiariæ Lieni. Deberet igitur à Liene ad capsuslas, viam et vasa demonstrare : nam ab emulgentibus interdum à rene ad ipsas atrabilarius humor refluit in venam superiorem, ut deriuetur in capsulas, quale deliramentum. Si ibi cunctatur et effluit quotidie, tingere deberet vrinas nigro colore : non solet natura excrementa maligna tandiu seruare, nisi excernantur, ergo refluit in venas, aut recurrit ad Lienem per circulationem sanguinis ex Harueo et Valæo : atque si sequeris opinionem Valæi, de usu lienis, inutiles erunt tuæ capsulæ atrabilariæ. Ego verò vsum eiusmodi glandularum perquirendum esse reor in Fœtu : sunt enim glandulæ rotundæ, figurâ reni consimilies, succenturiati renuli dicuntur, qui adstant renibus nondum exactè formatis, et cum ipsis exactè communicant. Miror, cur Bartholinus filius Iconem eiusmodi capsularum non expressit.

[Bartholin se glorifie d’avoir découvert leur véritable utilité, jusqu’alors ignorée des anatomistes : les capsules reçoivent l’humeur biliaire (étant donné son titre, il aurait dû dire atrabilaire) épaisse et excrémentielle qui, après avoir été élaborée à partir du sang, dans le foie, la rate ou les deux à la fois, n’a pas encore été purgée ; elle est conservée et retenue dans ces capsules parce qu’elle y a trouvé des méats plus libres et perméables que ceux des reins, qui sont fort étroits. Il y a là autant de mots que d’erreurs : si la rate est vouée à garder le sang épais, bourbeux ou atrabilaire, ces capsules imaginaires sont inutiles ou sont des annexes de la rate ; il faut donc mettre en évidence une voie ou des vaisseaux allant de la rate aux capsules, ce qu’il fait de manière extravagante en disant que l’humeur atrabilaire reflue depuis les veines rénales et parfois depuis le rein dans une veine supérieure, vers lesdites capsules pour y être détournée ; mais si elle y séjourne et s’en écoule quotidiennement, elle devrait donner une teinte noire aux urines. La nature n’a pas pour habitude de conserver très longtemps les excréments nuisibles sans les évacuer ; l’atrabile reflue donc dans les veines ou, selon Harvey et de Wale, retourne dans la rate grâce à la circulation du sang. Si vous suivez l’opinion de de Wale sur la fonction de la rate, vos capsules atrabilaires ne seront d’aucune utilité. Pour ma part, je pense que leur action est à chercher dans le fœtus, chez qui existent de petites glandes arrondies, de forme semblable à celle du rein, qu’on appelle les petits reins annexes ; elles jouxtent les reins qui ne sont pas encore entièrement formés et communiquent étroitement avec eux. {c} Je m’étonne que le fils Bartholin n’ait pas procuré un dessin de ces capsules]. {d}


  1. V. supra note [16].

  2. V. notes [38][40], Responsio ad Pecquetianos, 1re partie, pour d’autres avis de Riolan sur les Bartholin.

  3. Cette piste ne vaut guère mieux que celle imaginée par les Bartholin. Jan Baptist Van Helmont avait nié l’existence de l’atrabile dès 1644 (v. notule {a}, note Patin 17/1120), mais elle n’est sortie de l’imaginaire médical qu’au xviiie s.

  4. Pour dire que Thomas Bartholin n’a pas dû vraiment voir les capsules dont lui et son père, Caspar, ont parlé.

Imprimer cette note
Citer cette note
x
Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Première Responsio (1652) aux
Experimenta nova anatomica
de Jean Pecquet (1651).
4. Critique des chapitres xi-xii
de la Dissertatio anatomica, note 29.

Adresse permanente : https://numerabilis.u-paris.fr/editions-critiques/pecquet/?do=pg&let=1003&cln=29

(Consulté le 30/04/2025)

Licence Creative Commons