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Deux coffrets de
dentisterie par Charrière |
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AGRANDIR)
Nous présentons deux coffrets
dentaires par Charrière à Paris détenus par un membre de l'ASPAD.
FRĒDĒRIC
CHARRIĒRE
Joseph Frédéric Benoît
Charrière est né à Cerniat (canton de Fribourg en Suisse) le 20
mars 1803. Rejoignant ses parents à Paris en 1816 il est engagé
comme apprenti à affûteur repasseur à chez le coutelier Vincent.
A la mort accidentelle de ce dernier il reprend la suite de son
patron au 34/35 cour St Jean de Latran. Il se spécialise dans
les instruments de chirurgie. Il est vite remarqué pour sa
qualité instrumentale par des chirurgiens comme Dupuytren,
Civiale, Ségalas qui lui offrent leurs patronages et de
nouvelles voies de création pour de nombreux instruments. En
1833, il s'installe au n°9 (7 bis) rue de l'Ecole de médecine
dans le quartier des Cordeliers, en 1842 pour s'agrandir
considérablement on le retrouve au n°6, en face dans la même
rue.
Remarquable artisan toujours à la
recherche de nouvelles techniques industrielles, il va mettre
son talent au service de la chirurgie en travaillant à l'Hôpital
directement avec les chirurgiens pour la conception, la mise au
point, la fabrication de tout un arsenal chirurgical novateur.
En 1836-37 il se rend à Sheffield et à Londres pour s'initier
aux techniques de trempe des lames en acier coulé qu'il
améliore. En 1844 la France s'honore en lui attribuant la
nationalité française. Dès 1847 grâce notamment aux premières
anesthésies générales, auxquelles il participa comme pionnier
des inhalateurs, la chirurgie va connaître un développement
considérable.
A cette époque 90 ouvriers
travaillent dans ses ateliers aux Cordeliers, et plus de 150 en
ville dans des petits ateliers familiaux. De plus une grande
partie des pièces sont fabriquées dans le bassin de la
coutellerie de Nogent (Nogent en Bassigny, Haute Marne,
toujours très actif au 21ème siècle) pour être finies
rue de l'Ecole de médecine. Son gendre Eugène Vitry y exploite
une fabrique qui travaille pour lui avec 250 ouvriers. Ce volume
très important de production s'explique aussi par des contrats
de fournitures pour les hôpitaux, les armées et les
administrations, la moitié étant destinée à l'exportation.
La réputation de haute qualité de
la maison Charrière est soutenue par les nombreux prix et
médailles obtenus aux concours nationaux et internationaux
notamment lors des expositions universelles. En effet il y
produit alors de véritables chefs-d'œuvre de maîtrise montrant
le savoir faire de la maison. D'ailleurs chez Charrière se
formèrent des futurs maîtres de la coutellerie médicale comme
Georges L'er, Louis Mathieu à Paris, comme Joseph Leiter qui
s'installa à Vienne et Camillus Nyrop à Copenhague.
En 1852 tout en restant un artisan
très actif, il cède la direction de la maison à son fils Jules.
Mais jules meurt en 1865. Quant à Frédéric Charrière après une
vie bien remplie il décèdera à Paris en 1876. La maison est
reprise en 1866 par deux anciens collaborateurs Louis Robert et
Anatole Collin, pour devenir Collin en 1876 et pour être
absorbée en 1957 par les établissements Gentile qui cesseront
définitivement en 1972.
Frédéric Charrière est
incontestablement un des plus remarquables fabricants
d'instruments médicaux du 19ème siècle. Il sut tout
particulièrement adapter son savoir faire artisanal à
l'évolution des progrès de la chirurgie par sa technicité, par
une exigence de qualité, le goût d'une haute finition en y
ajoutant une recherche esthétique permanente. c'est ce qui fait
que de nos jours ses instruments sont toujours hautement
appréciés pour leur qualité, leur ingéniosité et leur beauté. La
fabuleuse renommée de l'industrie chirurgicale française du
19ème lui doit tout.
UN COFFRET EN MAROQUIN VERT
Il s'agit d'un coffret recouvert
d'un beau maroquin vert à frise et cartouche or, l'intérieur est
garni de velours et de soie rouge. Ce coffret est équipé de
quatorze instruments marqués Charrière. Ce sont des instruments
exceptionnels avec leurs manches ivoire et leur acier finition
haute coutellerie étincelants dans leur écrin à fond rouge. Cet
ensemble en l'ouvrant devant le patient était destiné à produire
un bel effet : c'était déjà de la « communication ».
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Photo 74 019/021/020 : Le coffret en maroquin vert.
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Deux clés
de Garengeot, manches ivoire facettés et tournés, tiges en acier
poli travaillées en facettes diamant. Les crochets de la
petite clé droite se mobilisent à l'aide d'un coulisseau
activé par un ressort interne. Pour la grande clé à courbure
il suffit de dévisser l'axe de rotation du crochet. |
Bel élévateur
acier facetté, virole maillechort, manche ivoire. |
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Double sonde de
Ricci acier facetté diamant. Miroir plan surface argentique,
étrier orientable métal alliage d'argent, manche ivoire. |
Instruments à
main acier, manches ivoire. |
Magnifiques
daviers acier à manches guillochés pour une bonne prise en main. |
Marquage du
coffret. |
Au verso sur le fond en percaline
du coffret on peut lire sur une étiquette : Charrière à Paris. 9
rue de l'Ecole de médecine. Fabricant d'instruments de chirurgie
de la faculté des hôpitaux. L'adresse est importante pour la
datation car on sait qu'avant de passer au n°6 de la même rue en
1842 Frédéric Charrière s'était installé en 1833 au n°9. Ce
coffret est donc sorti des ateliers Charrière au cours de la
période 1833-1842 et différents recoupements nous incitent à
penser autour de 1835.
UN GRAND COFFRET EN NOYER
Il s'agit d'un grand coffret en
noyer à poignée laiton rabattable. L'intérieur garni de
chamoisine éosinée est à deux niveaux. La plaque de serrure
interne est gravée : « Charrière à Paris ».
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Le grand coffret en noyer |
Le plateau supérieur est équipé de
26 instruments à main, corps acier, viroles laiton, manches
ivoire: Une vis de Morrison pour extraction radiculaire, de
nombreuses rugines à nettoyer, des spatules, des curettes, des
fouloirs et cautères. Un porte-fraise et un porte-lime. Un
miroir buccal orientable est entouré de deux lancettes à châsses
en ivoire.
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Le plateau
supérieur. |
Le porte-fraise. |
Le porte-lime. |
Le niveau inférieur est occupé par
treize instruments de chirurgie d'une belle patine : ils sont
frappés Charrière sur les manches en ivoire, ainsi qu'un
bistouri pliable à châsses en écaille de tortue.
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Le niveau
inférieur du coffret. |
Deux clés
de Garengeot à tiges acier coudées, manches ivoire, avec
tournevis pour changer les crochets. |
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Deux
élévateurs acier, dont un pied de biche, manches ivoire
facettés. |
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Pélican type tiretoire à double branche, double positions, manche ivoire,
virole maillechort avec une vis de Morrison. |
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Huit remarquables daviers acier dont deux sécateurs, insculpés
Charrière à Paris dans un ovale sur la sortie d'axe. |
Ce dernier coffret datable autour
de 1850 était suffisamment fourni tant pour la chirurgie que
pour le travail en bouche de l'époque : nettoyages, obturations,
limages et ajustages. Moins prestigieux que celui en maroquin,
cependant ces deux coffrets sont bien représentatifs de la
production de qualité et de haute qualité de la maison Charrière
au milieu du 19ème siècle.
D'une manière générale à cette
époque l'instrumentation dentaire représentait une part
importante de la coutellerie chirurgicale. D'ailleurs depuis
bien longtemps les dentistes avaient recours au savoir faire des
couteliers. De plus l'arrivée des nouvelles techniques de
dentisterie conservatrice entraîna une augmentation considérable
de l'arsenal instrumental dentaire. Les dentistes pas encore
complètement sédentarisés demandèrent des coffrets pour ranger
tous leurs instruments. Pour les couteliers c'étaient
d'excellents clients souvent exigeants sur la qualité. Les
artisans se surpassèrent : l'Art dentaire bénéficia de nombreux
coffrets d'exception.
DOCUMENTATION PHOTOGRAPHIQUE DE l'ASPAD.
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