Résumés des publications 

ANDRIEU (Bernard), Dir. L'invention du cerveau. Anthologie des neurosciences. Press Pocket, Nov. 2002, n°233, 310 p.

Préface de Georges Lanteri Laura, Chef de Service Honoraire à l'Hôpital Esquirol, Ancien Directeur d'Etudes à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.
Avec les collaborations de :

  • Jean-Claude Dupont, Centre Epistémologie, Histoire des Sciences Biologiques et Médicales. Faculté de Philosophie, Sciences Humaines et Sociales Chemin du Thil, 80025 AMIENS Cedex 1

  • Christine Lafon, traductrice, Lycée G. Crampe, Aire sur Adour.

  • Paul Mengal, Professeur de Philosophie à l¹Université Paris XII.

  • Jean-Noël Missa, Université libre de Bruxelles, Fonds national belge de la recherche scientifique.

  • Roberto Poma, chercheur à l'Université Paris XII.

  • Marc Renneville, Centre Interdisciplinaire de Recherches Appliquées au champ Pénitentiaire. Agen

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BLETON-RUGET (Annie), POIRRIER (Philippe). Le Temps des sciences humaines. Gaston Roupnel et les années trente. Paris, Editions Le Manuscrit-MSH de Dijon, 2006, 281 p.

La période de l’entre-deux-guerres marque une étape importante dans la structuration du champ intellectuel, tout particulièrement dans un domaine en cours de constitution : celui des sciences humaines. L’histoire telle que la pratique alors la revue des Annales, la géographie humaine héritière de Vidal de la Blache, l’ethnographie de la France qui cherche ses marques offrent un terrain sur lequel éprouver cette complexité, repérer les stratégies de démarcation et apprécier les apports respectifs. Ce domaine de recherches, qui se structure à l’échelle nationale, porte également très fortement la marque de son temps dans une attention nouvelle accordée au poids des déterminations sociales, au rapport à l’histoire et à la contemporanéité, à la recherche de nouvelles formes épistémologiques. Ces tâtonnements autour de sciences humaines naissantes se sont aussi  faits à une autre échelle. Plus provinciale, moins scientifiquement revendiquée et moins distanciée par rapport à des contextes sociaux et politiques proches. La personnalité et l’itinéraire de Gaston Roupnel illustrent un tel cheminement, à travers une œuvre multiforme. La publication des interventions au colloque Le temps de sciences humaines.

Gaston Roupnel et les années Trente apporte une nouvelle contribution à la compréhension des enjeux d’un contexte dans lequel les sciences humaines tentaient de fonder leur légitimité. La figure de Gaston Roupnel  offre une bonne entrée sur ce qui constituait l’univers partagé de la science, de l’opinion, voire du projet politique, ainsi que sur les conditions d’une reconnaissance officielle dans le champ des sciences de la société.

Annie Bleton-Ruget est maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Bourgogne. Historienne ruraliste, ses travaux s'organisent autour de l'étude des processus de constructions territoriales dans la France contemporaine, dans une démarche qui croise l'histoire sociale, l'histoire politique et l'histoire culturelle. Elle a notamment co-dirigé Pays et territoires, De Vidal de la Blache aux lois d'aménagement et de développement du territoire (Eud, 2002).

Philippe Poirrier est professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Bourgogne. Ses recherches portent sur l’histoire culturelle de La France contemporaine. Il a notamment publié Aborder l’Histoire (Seuil, 2000) et Les enjeux de l’histoire culturelle (Seuil, 2004).

Sommaire :

  • Serge Wolikow : Préface

  • Annie Bleton-Ruget : Introduction

  • Annie Bleton-Ruget : Les enjeux de la " ruralité " dans
    l’entre-deux-guerres : pratiques savantes et usages idéologiques

  • Philip Whalen : Le Régionalisme de Gaston Roupnel, 1931-1945

  • Vincent Chambarlhac : À rebrousse racines. Les chroniques littéraires de

  • l’École Émancipée (1929-1939)

  • Alain Rauwel : Des Burgondes au Téméraire : Johannes Thomasset et le
    mythe bourguignon

  • Ronald Hubscher : Géographie de la campagne française : les trente
    glorieuses

  • Jean Vigreux : De l’usage de l’agrarisme de Roupnel : Passeur malgré lui?

  • Marion Demossier : Entre littérature et objet ethnologique, " Nono " ou
    la construction du vigneron comme archétype de la culture locale

  • Gilles Laferté : Le marché secondaire des postes universitaires : Gaston

  • Roupnel ou les contraintes du recrutement local dans
    l’entre-deux-guerres

  • Jean-Jacques Wunenburger : Gaston Roupnel et le paysage : imaginaire et
    rationalité

  • Philippe Poirrier : L’oubli historiographique : la postérité
    historienne d’" Histoire et destin " de Gaston Roupnel

  • Jean Libis : Une leçon de solitude

  • Philippe Poirrier : Conclusion

L'ouvrage, édité par les éditions Le Manuscrit, est disponible en
version papier et électronique.

http://www.manuscrit.com/catalogue/auteur.asp?idauteur=7581
http://www.manuscrit.com/catalogue/textes/fiche_texte.asp?idOuvrage=8735 

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GUILLEMAIN (Hervé)
Diriger les consciences, guérir les âmes. Une histoire comparée des pratiques thérapeutiques et religieuses (1830-1939), La Découverte, Avril 2006 - L'espace de l'histoire.

Quand elles s’appliquent à la souffrance des âmes, médecine et religion s’opposent-elles ? L’histoire de la folie pourrait s’écrire en retraçant la lente marche vers une « laïcisation de l’esprit » : le prêtre progressivement dépossédé de son pouvoir guérisseur par le médecin, l’âme qui tend à se fondre dans l’univers neurologique, l’inconscient qui surgit avec la psychanalyse au début du XX^e siècle. Pourtant, l’étude des pratiques thérapeutiques, religieuses et laïques, incite à réviser assez largement cette vision schématique. Dans ce livre ambitieux, Hervé Guillemain révèle que la thérapie morale et psychologique des aliénistes et des psychologues doit quelque chose aux pratiques religieuses. Les techniques hypnotiques regardent ainsi du côté de l’exorcisme et la psychanalyse du côté de la confession. On sait peu, par exemple, que, dans l’entre-deux-guerres, des chrétiens jouèrent un rôle important dans la diffusion de la psychanalyse dans la société française. L’histoire des pratiques thérapeutiques de la folie et des troubles psychiques, depuis le traitement moral appliqué dans les asiles d’aliénés au XIX^e siècle jusqu’aux psychothérapies modernes du XXe siècle, apparaît à certains égards comme un nouveau développement de l’histoire des directions de conscience héritées du christianisme. L’auteur montre que le savoir scientifique sur la folie et sur la conscience ne peut être, lui non plus, dissocié de la morale et des concepts religieux et qu’il faut comprendre ensemble le péché et la dégénérescence, le traitement des aliénistes et la théologie morale, la possession et l’hystérie. Il avance que, loin de s’opposer, la médecine, la psychologie et la religion font partie d’une même histoire sociale et culturelle.

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KAESER (M.-A). Les Lacustres : Archéologie et mythe national. - Lausanne : PPUR, 2004. 142 pages. ISBN: 2-88074-587-X 2004

Les Lacustres ont-ils existé? Ce livre répond à cette question en présentant l’essentiel des recherches les plus récentes. Il éclaire tout à la fois la préhistoire et la construction idéologique de l’Etat fédéral suisse. Dès 1854, des découvertes sur les rives des lacs font naître le mythe d’un "peuple lacustre" qui suscite l’enthousiasme. L’attachement pour ces nouveaux ancêtres, inouï et durable, inspire un patriotisme romantique. Il enracine un idéal de liberté et de résistance conciliant le progressisme libéral et la nostalgie du "bon vieux temps". Mais les controverses se déchaînent entre savants. Finalement, les techniques et les méthodes de l’archéologie contemporaine ont bouleversé et affiné notre vision, tout aussi fascinée mais moins exaltée, de trois millénaires de peuplements palaffitiques variés, de la "révolution néolithique" jusqu’à l’aube de la civilisation celtique.

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KAESER (M.-A). L'Univers du préhistorien. Science, foi et politique dans l'oeuvre et la vie d'Edouard Desor. - Paris : L'Harmattan (coll. Histoire des sciences humaines), 2004. 622 pages. ISBN : 2-7475-6409-6

Ressusciter la préhistoire naissante, au cœur du 19e siècle, à l'age d'or de la science triomphante - voilà ce qu'autorise la biographie d'un savant international comme Edouard Desor. Personnalité romantique et complexe, tout a la fois préhistorien, géologue et paléontologue, Desor a connu un parcours tumultueux, qui l'a fait toucher à toutes les grandes causes de son temps. A l'intersection des sciences de l'Homme, de la Vie et de la Terre, on assiste à l'émergence de la préhistoire ; une science qui révolutionnera la perception de l'identité et de la nature humaine.

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DELMAS (Corinne) - Instituer des savoirs d'Etat. L'Académie des sciences morales et politiques au XIXème siècle
Paris, L'Harmattan, collection Logiques politiques, 2006.

Les sciences sociales s'affirment au cours du XIXème siècle. Outils de compréhension et de rationalisation de la société, elles sont étroitement liées à la logique de développement de l'Etat moderne. Cet ouvrage revient sur cette liaison étroite. Analysant la genèse de ces savoirs et leurs conditions d'émergence, il montre combien, en France, leur institutionnalisation académique et étatique contribue à leur affirmation en tant que sciences de gouvernement et savoirs d'expertise au service de l'action publique. En effet, la mise en place, au sein de l'Institut, d'une Académie des sciences morales et politiques qui, pendant plusieurs décennies, exerce un quasi-monopole sur la promotion de ces savoirs, contribue à la « caméralisation » de ces derniers et à la promotion d'un Etat savant. Cette académie, qui compte des publicistes, des universitaires et des hommes d'Etat (hommes politiques et grands commis de l'Etat), constitue un haut lieu du libéralisme regroupant des intellectuels souvent proches du pouvoir. Elle produit une expertise sociale par le biais de concours et enquêtes et met en œuvre des « sciences de l'agir » à la fois empiriques et normatives, pratiques et propédeutiques, orientés vers le conseil au gouvernement, la rationalisation de la décision publique, la réforme sociale et le gouvernement de l'opinion.Ainsi, cet ouvrage éclaire un modèle spécifique de savoir et d'expertise avec ses remises en cause liées à une spécialisation savante et au positivisme mais aussi à une bureaucratisation et à une étatisation de la société

TABLE DES MATIERES

  • INTRODUCTION

  • PREMIERE PARTIE : UN MODELE ACADEMIQUE D'EXPERTISE

    • Chapitre 1 : Une double logique, intellectuelle et administrative

    • Chapitre 2 : La caméralisation des sciences morales

    • Chapitre 3 : Une institution entre savoir et pouvoir

  • DEUXIEME PARTIE : EXPERTISES ACADEMIQUES ET SAVANTES (1871-1914)

    • Chapitre 4 : A la croisée des sphères politique, universitaire et économique

    • Chapitre 5 : A la croisée de multiples réseaux d'expertise

    • Chapitre 6 : Un modèle positiviste du savoir

  • CONCLUSION

  • INDEX

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L'Education nouvelle, histoire, présence et devenir
Annick Ohayon, Dominique Ottavi, Antoine Savoye (ed.)
Quatrième de couverture

L’idée d’une « Education nouvelle » est ancienne. Elle plonge ses racines au moins dans le 18è siècle et s’épanouit déjà à la fin du 19è siècle. On l’oublie trop souvent dans le débat public qui oppose aujourd’hui les pédagogies novatrices à d’autres, supposées traditionnelles. Il est pourtant indéniable que le projet de renouveler de fond en comble l’entreprise éducative est un fait historique caractéristique des sociétés occidentales contemporaines, mieux une composante essentielle de la représentation que ces sociétés ont d’elles-mêmes et de leur projet démocratique.

Face à ce sempiternel désir de « changer l’école », la tâche qui s’offre à notre époque est de repenser l’Education nouvelle dans son histoire diverse et multiple. C’est l’objectif du présent ouvrage. Les contributions qui le composent offeent un nouveau regard sur la nébuleuse de l’Education nouvelle, constituée de théories hétérogènes et de personnalités très différentes.

Elless traitent de ses « prolégomènes » au 19e siècle, puis de ses rapports avec certaines sciences humaines comme la psychologie et la psychanalyse, avant d’aborder le problème de son devenir paradoxal à l’époque contemporaine. En effet, alors que ses idéaux et ses mots même habitent le discours ordinaire du monde éducatif, le sentiment des acteurs de ce mouvement comme de l’historien des idée est que l’Education nouvelle a cessé d’être le moteur de la pensée pédagogique et de l’expérimentation depuis plusieurs décennies.

Ainsi revisitée, l’Education nouvelle pourra constituer une source de réflexion pour le présent, stimuler la pensée de l’éducation actuellement confrontée à des problèmes immenses pour lesquels les ressources théoriques héritées de la seconde partie du 20e siècle semblent inopérantes.

Sommaire
  • Introduction

  • I- Anticipations et prolégomènes

    • Dominique Ottavi / Observer pour connaître : Niccolò Tommaseo et la découverte de l’enfant

    • François Jacquet-Francillon / L'enfant comme personne : un fondement historique de l'Education nouvelle

    • Daniel Hameline / Education libérale contre éducation intégrale: comment qualifier une nouvelle éducation pour le peuple?

    • Jean-François Marchat / Francisco Ferrer, un solidariste libertaire

    • Patrick Clastres  /L’éducation libérale de Victor de Laprade à Edmond Demolins

  • II- Une éducation aux confins des sciences humaines

    • Dominique Ottavi / Roger Cousinet et la société enfantine

    • Daniel Hameline  / L'Institut Jean-Jacques Rousseau (Genève)

    • Francis Danvers / Orienter selon l’Education nouvelle

    • Annick Ohayon / Une querelle revisitée, les applications de la psychanalyse à l’éducation

    • Florian Houssier / Psychanalyse et pédagogies nouvelles: l'exemple de la "Hietzing Schule"

  • III- Parcours, destins et devenirs

    • Antoine Savoye / L’extinction de l’Education nouvelle

    • Nathalie Duval / L'Ecole des Roches dans les années 1960: une institution en crise

    • Jacques Pain / La pédagogie institutionnelle de Fernand Oury

    • Louis Raillon / L'Education nouvelle a-t-elle existé?

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L'HISTOIRE DES SCIENCES DE L'HOMME
Trajectoire, enjeux et questions vives
Quatrième de couverture

L'histoire des sciences de l'homme se développe en France à la croisée des disciplines, de la philosophie et de l'histoire intellectuelle. Interrogations, doutes éthiques, réformisme politique suscitent une réflexion épistémologique. Il s'agit de comprendre quelle est la place de la science dans le monde moderne. Dorénavant l'étude des sciences de l'homme assume une dimension proprement culturelle en modifiant notre perception théorique des systèmes sociaux et en mettant à bonne distance les images vieillies couramment associées à la notion même de science. Un clivage s'est ainsi opéré entre une représentation mémoriale du passé, propre à la commémoration institutionnelle des " héros fondateurs ", et une histoire " historienne " des sciences qui étudie le contexte d'émergence de ces savoirs omniprésents et, souvent, redoutés. Les sciences de l'homme figurent à leur tour une activité de production de l'humain, de ses modèles historiques et de leur incessante transformation.

À l'occasion de ses dix ans d'existence, la Société française pour l'histoire des sciences de l'homme a organisé un colloque international qui s'est tenu à Paris en décembre 1996. Les responsables de ces journées ont choisi d'interroger les opérateurs généraux qui donnent cohérence à un projet commun d'analyse des sciences humaines : la périodisation, les usages historiographiques dans les disciplines, les tendances actuelles de l'épistémologie, le rapport conflictuel des sciences humaines aux savoirs qui les bordent.

Ont contribué à cet ouvrage :

Claude BLANCKAERT, Loïc BLONDIAUX, Jean-Philippe BOUILLOUD, Jacqueline CARROY, Anne-Marie DROUIN-HANS, Claude GAUTIER, Laurent LOTY, Marc RENNEVILLE, Nathalie RICHARD, Marie-Claire ROBIC, Claire SALOMON-BAYET, Roger SMITH, Fernando VIDAL

Histoire des Sciences Humaines
Collection dirigée par Claude Blanckaert

Table des matières
  • Introduction La demande d'histoire. Du détour au parcours / Claude BLANCKAERT p. 9

  • Une unité problématique

    • L'histoire générale des sciences de l'homme. Principes et périodisation / Claude BLANCKAERT p. 23

    • La " science de l'homme " : désirs d'unité et juxtapositions encyclopédiques / Fernando VIDAL p. 61

    • Pour l'histoire des sciences humaines. Perspective anglaise / Roger SMITH p. 79

  • Les disciplines à l'épreuve de l'histoire

    • À quoi sert l'histoire des sciences de l'homme ? / Loïc BLONDIAUX - Nathalie RICHARD p. 109

    • L'histoire de la psychologie entre oubli et mémoire, entre passe-temps et spécialité / Jacqueline CARROYE p. 131

    • Tradition, courants et ruptures : pour une histoire de la géographie en tension / Marie-Claire ROBIC p. 159

  • Philosophie et sciences de l'homme : regards croisés

    • Les sciences humaines dans la philosophie des manuels : une dangereuse familiarité ? (France, 1960-1996) / Anne-Marie DROUIN-HANS p. 183

    • L'épistémologie des sciences sociales aujourd'hui. Remarques sélectives sur quelques débats actuels / Jean-Philippe BOUILLOUD p. 219

  • Frontières de la science

    • Penser la transformation des rapports entre le scientifique et le non scientifique / Laurent LOTY - Marc RENNEVILLE p. 247

    • L'autonomie problématique de l'économie vis-à-vis du politique. Un débat exemplaire : Mercier de La Rivière et Mably / Claude GAUTIER p. 265

    • Le style et l'objet / Claire SALOMON-BAYET p. 283

  • Index des auteurs cités p. 293

  • Ont participé à ce volume p. 305

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La culture est-elle naturelle ?
Albert Ducros, Jacqueline Ducros, Frédéric Joulian (dir.)

Dans les forêts d'Afrique, des chimpanzés utilisent des outils comparables à ceux des hommes, en fabriquent même. Les variations observées entre les outillages de différentes communautés de primates s'analysent désormais en termes de tradition ou de culture.

Cette approche - qui aurait été incongrue il y a vingt ans - a bousculé, grâce aux études de terrain, la conception d'un monde animal opposé à celui de l'homme : aujourd'hui, les artefacts et les comportements des premiers humains s'interprètent plus volontiers dans un cadre écologique que dans celui de l'économie ou de la culture.

La culture définie comme « propre de l'homme » est aujourd'hui remise en question. L'évolution de disciplines diverses : ethnologie, préhistoire, éthologie, anthropologie biologique, sociobiologie, histoire des sciences apportent des éléments nouveaux au vieux débat « nature contre culture ».

Devant cette situation nouvelle, les disciplines travaillent encore isolément : les sciences naturelles d'un côté, les humanités de l'autre, « la nature face à la culture ». Or ce livre réunit des chercheurs soucieux de dépasser les barrières disciplinaires pour comprendre le phénomène culturel, en décrivant la constitution de cette notion dans le passé, ses apports dans différents secteurs du savoir et en exposant les données récentes de l'éthologie et de la préhistoire. Le lecteur rencontrera les réflexions, encore peu répandues en français, qui abordent les fondements naturels de la culture, ses différentes formes et ses dimensions historique et épistémologique pour éclairer l'interrogation paradoxale : « la culture est-elle naturelle ? »

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Le terrain des sciences de l'homme
Claude Blanckaert (dir.)
AVANT - PROPOS

Les savoir-faire constituent l'un des domaines de recherche les plus insondables, les plus intéressants aussi de l'histoire des sciences humaines. Rejetés du côté des pratiques, ils n'évoquent pas spontanément le support d'une connaissance, plutôt la boîte à outils du bricoleur. L'alliance du savoir et du faire est-elle contre nature ? L'un paraît associé au travail d'abstraction, l'autre à une démarche concrète, adaptative ou aléatoire. A cause du partage presque objectivé entre ces deux termes, on tient souvent que les « savoir-faire » précèdent chronologiquement les « savoirs » tout court.

Les historiens des sciences ont pris longtemps le parti de les rejeter dans une sorte de « préhistoire » précédant tout critère fondé sur des constructions théoriques. C'est une erreur d'interprétation qui appelle d'autres négociations de notre rapport au passé. Depuis une dizaine d'années, l'histoire des sciences humaines s'est particulièrement consacrée à l'étude des pratiques et médiations instrumentales qui favorisent l'accroissement des connaissances empiriques. Dans la mesure où le « terrain » est tenu pour l'arbitre de la validité théorique de l'anthropologie, de la géographie, etc., les circonstances de l'enquête et les formes d'enregistrement des données d'observation méritent un examen attentif et une mise en perspective historique.

A l'origine de cette publication collective, la Société Française pour l'Histoire des Sciences de l'Homme (SFHSH) avait organisé, en mars 1992, un colloque international sur les « Questionnaires et guides d'enquête ». Il s'agissait d'analyser, sur des études de cas, comment des directives de recherche transforment le statut de l'observateur entre le XVIIIe et le XXe siècle. Il s'agissait encore d'approfondir la rhétorique propre aux instructions scientifiques et leur cadre intellectuel de référence, pour mieux comprendre l'évolution d'un genre cognitif et, éventuellement, la sociologie de ses utilisateurs. La codification du travail empirique nous mettait enfin dans l'obligation de tenir à égale distance deux instances fondamentales, et comme deux moments parfois confondus, de l'expérience de terrain : en amont, le savoir-voir, en aval le faire-savoir.

D'hier à aujourd'hui, les opérations qui se déroulent sur le terrain paraissent ainsi, avec quelque recul, revêtir un autre enjeu historiographique que la simple utilisation de normes méthodologiques. Celles-ci nous indiquent, en effet, un certain état du champ professionnel, de ses exigences comme de ses présupposés. D'une manière générale, l'étude des instruments est souvent rejetée du côté des techniques, moins constitutives des savoirs qu'assignées à un rôle ancillaire. Pour l'historien des sciences humaines, l'intérêt du terrain réside dans cet entre-deux où s'équilibrent de manière instable la compétence personnelle, instruite mais chargée d'affects ou de préjugés idéologiques, et sa restitution narrative au service d'une communauté de recherche. Tel est le destin du voyage scientifique, l'expédition à la mode ancienne ou le terrain moderne, qu'il représente un objet central et un exemple-type de ce que nous avons pris l'habitude d'appeler, faute de mieux, des « savoir-faire ».

L'ouvrage est donc centré à la fois sur le type discursif des instructions, leur composition ou contenu doctrinal, et sur leur usage en situation. En somme, il dessine les contours possibles d'une épistémologie de la curiosité dont je propose, en ouverture, quelques lignes de force.

Claude Blanckaert

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L'Association française pour l'avancement des sciences (AFAS) :
Diffuser et promouvoir les sciences (1872-1914)
Hélène Gispert (textes rassemblés et présentés par)

Provoqué par la défaite française dans la guerre de 1870, un véritable séisme géopolitique préside à la naissance de la Troisième République. Les courants critiques à propos du mode de formation des élites par les seules humanités classiques, les aspirations à reconsidérer la place et le rôle des sciences et des techniques pour l'avenir du pays, s'affirment d'autant plus fortement que la supériorité scientifique de la Prusse est rendu responsable de sa victoire.

Il s'agit alors de revendiquer, puis, après la chute de l'Ordre de moral et la venue au pouvoir des Républicains, d'affirmer une nouvelle alliance du pouvoir avec les scientifiques et les milieux industriels, alliance revendiquée depuis longtemps en France, mais toujours de façon marginale. La Troisième République naissante cherche alors à se développer, à développer la puissance de la France, en s'appuyant sur la Science, nouvel étendard de la République. C'est la France de Jules Ferry, de l'introduction des sciences (y compris les sciences agricoles) dans l'enseignement primaire et leur développement dans le secondaire. C'est aussi la France de l'Association française pour l'avancement des sciences (AFAS), 'uvre commune de milieux industriels, bancaires, commerciaux et de milieux scientifiques, créée en 1872, où la science est pensée et promue comme facteur de progrès industriel, social, et, en conséquence, de consensus politique et social.

C'est à cette association qu'est consacrée la publication L'Association française pour l'avancement des sciences, Diffuser et promouvoir les sciences (1872-1914) du Groupe d'histoire et de diffusion des sciences d'Orsay (GHDSO) parue en septembre 1998. Développant ses initiatives scientifiques sur un terrain non académique, l'AFAS regroupe, au cours de la quarantaine de congrès annuels qui se tiennent dans la France entière entre sa création et la première guerre mondiale, près de 5000 intervenants. Ceux-ci y présentent plus de 16000 communications qui relèvent soit des sciences mathématiques (dont navigation et génie civil et militaire), soit des sciences physiques et chimiques, soit encore des sciences naturelles au nombre desquelles les sciences médicales et l'anthropologie qui sont les domaines les plus investis par les intervenants, soit enfin des sciences économiques avec l'agronomie, la géographie, l'économie politique et statistique, l'hygiène et la médecine publique, la pédagogie.

S'attachant, à la fois, à l'étude des auteurs et des contenus de ces interventions recensées et publiées en partie dans des comptes rendus annuels, une équipe pluridisciplinaire d'historiens et de philosophes des sciences, des sciences dites dures comme des sciences de l'homme ou de la société, ont cherché à confronter la diversité de l'action et des discours de l'AFAS dans différents domaines disciplinaires particuliers. Le rapport d'étape qu'ils publient aujourd'hui exposent les premiers résultats de cette recherche. Au travers d'interrogations sur la professionnalisation de la vie scientifique, les rapports de la science au politique, la diffusion des sciences, les relations sciences et industries, le rôle de la province, etc, se dégagent des éléments de réflexion originaux sur les conceptions et les pratiques de la science dans la société française des débuts de la Troisième République.

Pour commander, s'adresser à Paris Onze édition - Université de Paris-Sud - Bât. 338 91405 Orsay-cedex, fax : 01.69.15.78.29  prix : (60F plus le port)

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La découverte et ses récits
Jacqueline Carroy et Nathalie Richard (dir.)

Les textes qui constituent cet ouvrage sont issus d'un colloque organisé par la Société française pour l'histoire des sciences de l'homme qui s'est tenu à Paris du 30 mai au 1er juin 1995. Nous avions proposé aux intervenants « d'explorer le statut problématique de la découverte en sciences humaines en analysant des récits de découverte, récits fictifs (romanesques) et récits autobiographiques qui se veulent non fictifs. Les premiers, demandions-nous, constituent-ils une "matrice narrative" pour les seconds, ou vice versa ? Quelle est la structure narrative, mais aussi la visée de textes, qui, quel que soit leur statut, renvoient à une reconstruction ? Dans certains cas, la pratique autobiographique peut être plus essentiellement liée à l'expérience de la découverte, lorsque le savoir s'élabore à partir de l'auto-observation. Cette autobiographie-découverte a-t-elle un statut différent des autres récits ?»

Ces questions avaient pour but de mieux cerner un imaginaire, sans poser la question de l'existence de quelque chose d'inédit qui serait découvert. Mais les travaux réunis ont démontré qu'on ne peut aisément éluder des interrogations sur « l'authenticité » de la découverte. C'est pourquoi nous avons choisi de mettre les textes en scène selon qu'ils ont interrogé plutôt l'imaginaire ou la réalité de la découverte. Il s'agit bien là d'une mise en scène, puisque nous avons regroupé et fait se répondre les articles dans un ordre qui diffère de celui des communications présentées au colloque de 1995. Cet ordre est issu d'une certaine lecture : plus que par leur contenu, nous avons tenté de classer les contributions en fonction de la posture que chaque auteur nous a semblé adopter face à la question de la découverte et de ses récits  .

Certains auteurs s'affrontent directement à l'émergence de l'inédit dans les sciences humaines. David Allen et Jacques Postel se proposent ainsi de restaurer la figure d'un inventeur inconnu, Sigbert Ganser, dans une perspective où la recherche historique rencontre des enjeux brûlants de la  psychiatrie et de la psychopathologie contemporaines. Ils racontent les vicissitudes de la découverte d'une forme d'hystérie crépusculaire qui a été, au fil du temps, mésinterprétée et occultée.

Laurent Mucchielli entreprend de déconstruire le récit de la découverte du rôle de la religion dans la vie sociale par Emile Durkheim et de le réécrire à l'aide outils empruntés à la psychologie. Il a recueilli dans sa correspondance des allusions à un mal-être personnel qui lui permettent de proposer comme instrument d'analyse la notion de névrose créatrice.

Geneviève Vermès, quant à elle, fait le récit des conditions dans lesquelles Ignace Meyerson a créé le projet d'une psychologie historique et tenté sa mise en oeuvre. Elle montre aussi que cet acte isolé est devenu une « découverte » grâce aux récits de Jean-Pierre Vernant. Celui-ci s'est mis en posture de témoin de l'invention meyersonnienne pour mieux en légitimer l'exportation à l'histoire. Ce faisant, il a pu se présenter lui-même comme le fondateur d'une nouvelle manière de faire de l'histoire.

D'autres auteurs se sont interrogés sur l'expérience vive de l'acte de découvrir. En effet, la publication scientifique n'est à leurs yeux que l'endroit visible, public, d'un envers plus intime et plus privé. Ce vécu serait d'autant plus difficile à dire et à décrypter que le sujet de l'énoncé est aussi celui de l'énonciation. Parfois l'expérience personnelle est physiquement indicible sur le moment, comme dans le cas du savant devenu aphasique que nous décrit Gabriel Bergounioux. Par la suite, le malade redevenu savant pourra écrire ce vécu et l'utiliser comme matériau d'une découverte ou d'une redécouverte.  Parfois encore l'intimité de la découverte, face noire et inavouable du récit public, est difficile à décrypter. Françoise Couchard tente ainsi d'interpréter la « découverte » des mythes de procréation chez les Trobriandais par Bronislav Malinowski. Celle-ci impliquerait un double aveuglement de l'ethnologue, par rapport à sa propre sexualité et par rapport à la fonction réelle de ces mythes dans la société mélanésienne.

Gérard Lagneau aborde enfin un cas limite : celui d'une entreprise collective où l'écriture de l'expérience personnelle donne matière à découverte. C'est ainsi que l'école de sociologie polonaise est partie, dans l'entre-deux-guerres, en quête d'une identité nationale brouillée à travers l'exploitation massive d'autobiographies de commande, censées donner accès à une parole authentique du peuple polonais.

Certains auteurs ont choisi d'analyser des reconstructions a posteriori d'une expérience de la découverte. Celles-ci peuvent donner lieu à des fragments écrits à la première personne insérés dans le fil du discours scientifique ou à des auto-présentations autonomes. Il en est ainsi des Antiquités celtiques et antédiluviennes où Jacques Boucher de Perthes brosse un « autoportrait en Découvreur » dont Jean-Yves Pautrat révèle l'artifice. Il en tire une réflexion épistémologique sur la « réalité » de la découverte de la préhistoire. Paule Petitier compare deux fragments dans lesquels Augustin Thierry et Jules Michelet racontent leur découverte de l'Histoire. Le premier, montre-t-elle, élit dans sa jeunesse un épisode autobiographique pour mieux affirmer l'irrésistibilité de sa vocation scientifique, tandis que le second mobilise des archétypes mythiques pour se constituer une biographie qui assigne à l'historien la dangereuse mission de ressusciter les morts.

Dans les deux cas, le récit de découverte est un moyen de décrire un rapport au passé qui induit une nouvelle manière de faire de l'histoire. Néanmoins, le récit dont l'ambition est la plus extrême est peut-être celui du vieux Sigmund Freud devenu chef d'école. Sa tentative «d'auto-sanctification » va plus loin encore qu'une biographie ou qu'une confession hagiographique. Jean-François Chiantaretto, analysant «Autoprésentation », montre comment Freud instaure une coïncidence entre la genèse de la psychanalyse et l'histoire reconstruite de sa vie. Il s'y présente comme le seul acteur, le seul témoin, et par conséquent le seul historien possible d'une découverte dont il verrouille les interprétations.

D'autres auteurs de ce volume se sont intéressés aux « romans de la science » qui se lisent dans des biographies romancées ou dans des fictions romanesques. Sophie-Anne Leterrier raconte comment s'est construite autour de Jean-François Champollion une véritable légende, toujours vivace de nos jours. Elle confronte cette légende à une reconstruction historienne de la découverte et de sa réception. Elle montre aussi comment Champollion, sans être tout à fait dupe du mythe, l'entretient pour en tirer des bénéfices. Claude Blanckaert s'est plongé dans un vaste corpus de « romans scientifiques » pour analyser les procédés littéraires qui, sous la figure de l'homme-singe, permettent de vulgariser la découverte de l'Evolution. Il montre que l'on ne peut s'en tenir à un simple inventaire. Car les personnages en apparence antagonistes du savant et de l'homme-singe en viennent parfois à se confondre dans une égale monstruosité. Ainsi le « merveilleux scientifique » n'est-il que la face scientiste la plus visible d'une littérature traversée de sourdes inquiétudes.

D'autres contributions affirment que le scénario des récits de découverte se construit à partir d'éléments narratifs dont les origines remontent parfois très loin. L'émergence du nouveau ne pourrait s'écrire, se penser, voire se produire, qu'à l'aide de matériaux si familiers qu'ils en paraissent souvent intemporels. Certains auteurs ont ainsi cherché à identifier quelques lieux communs ou topoï et à leur redonner une histoire. Ils esquissent ainsi une « poétique », c'est à dire, pour reprendre le sens étymologique du mot grec, une réflexion sur l'acte de fabrication des discours. A partir de l'analyse historique et structurale d'un court extrait de Cesare Lombroso, Marc Renneville dévoile les postulats esthétiques et cognitifs qui à l'époque, à l'insu parfois de l'auteur et de ses lecteurs, confèrent au récit un effet de réel et à la découverte une autorité sans commune mesure avec sa validité. L'historien est alors renvoyé à la question d'une rhétorique de l'imaginaire et de présupposés infra-théoriques qui assurent à la découverte un horizon de séduction et d'attente.Partant de deux récits, celui de l'historien qui ouvre l'armoire aux archives et celui de l'autodidacte qui découvre le livre, Jacques Rancière soutient que l'on n'arrivera jamais à les analyser seulement en termes d'histoire sociale et culturelle. Car ces narrations sont fabriquées avec des mots et avec des muthoï, qui traversent le temps et les expériences singulières. Il n'y a « rien de caché dessous » et ils constitueraient paradoxalement la butée de l'explication historienne qui néanmoins la rendent possible, comme ils rendent possible toute écriture. Jacques Rancière suggère de ce fait qu'il existe un en-deçà de l'imaginaire.

Ainsi les textes réunis dans cet ouvrage ont dépassé de diverses manières la problématique de notre appel à communication. Nous avions souhaité ne pas poser la question de « l'existence d'authentiques découvertes » en sciences humaines. Mais les contributions des auteurs nous ont montré à bon escient qu'on ne pouvait totalement l'éluder et il nous a fallu la reconsidérer. Notre postface se fera l'écho de ces réflexions...

Jacqueline Carroy et Nathalie Richard

TABLE DES MATIERES

   

La découverte et ses récits

Jacqueline CARROY
Nathalie RICHARD
3

Ont contribué à ce volume

  9

Poétique de la découverte (I)

   

Lumière sur un crâne ? Une lecture spéculaire de la découverte de l'atavisme criminel

Marc RENNEVILLE. 15

Récits de découverte

   

Le syndrome de Ganser : une découverte oubliée ?

David F. ALLEN
Jacques POSTEL
39

Autour de la « révélation » d'Émile Durkheim. De l'inscription biographique des découvertes savantes à la notion de « névrose créatrice »

Laurent MUCCHIELLI 57

La double fondation de la psychologie historique : Ignace Meyerson et Jean-Pierre Vernant

Geneviève VERMES 97

Écriture de soi, écriture de la découverte

   

L'aphasie des aphasiques

Gabriel BERGOUNIOUX 113

Les Trobriandais et leur ethnographe, ou la découverte ambiguë des mythes de procréation par Malinowski

Françoise COUCHARD 131

L'autobiographie et l'école de sociologie polonaise : découverte de soi, découverte de l'autre, ou découverte de la Pologne ?

Gérard LAGNEAU 147

Autoportraits en Découvreurs

   

Autobiographie, récit fondateur et histoire de sa genèse : du psychanalyste au saint. A propos de l'« Autoprésentation » de Freud

Jean-François CHIANTARETTO 159

Boucher de Perthes : l'invention de l'homme antédiluvien, ou comment devenir un auteur

Jean-Yves PAUTRAT 173

La découverte du passé chez Augustin Thierry et Michelet

Paule PETITIER 195

Romans de la science

   

Le roman de la science : l'homme-singe littéraire et son savant

Claude BLANCKAERT 213

La découverte de Champollion

Sophie-Anne LETERRIER 247

Poétique de la découverte (II)

   

Du lieu du texte au séjour des morts. L'autodidacte et le savant

Jacques RANCIERE 269

Postface

   

Le cercle d'une posture critique : le savant, l'historien et la découverte

Jacqueline CARROY
Nathalie RICHARD
281

Index des auteurs cités

  309

Table des matières

  317

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La préhistoire en paroles et en actes
Noël Coye

Science des origines, la préhistoire ambitionne, depuis le XIXe siecle, de renouveler la chronique de l'humanité. Mais, alors qu'elle s'élance à la poursuite des millénaires écoulés, il est une autre histoire qu'elle s'attache a restituer: celle de sa propre origine en tant que discipline. Dès le départ, un dialogue s'est ainsi instauré entre la préhistoire telle qu'elle se fait et la préhistoire telle qu'elle se raconte. C'est ce dialogue qu'explore cet ouvrage, sur une période recouvrant largement les temps de fondation de l'archéologie préhistorique et s'achevant à la veille de l'émergence des grandes écoles modernes françaises de préhistoire.

A la fois réflexion sur l' histoire de l' archéologie préhistorique et sur le travail de l'archéologue, cet ouvrage tente de penser ensemble ces deux démarches sans soumettre l'une aux nécessités de l'autre.

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Les revues d'économie en France ( 1751-1994)
Luc Marco (dir.)

L'évolution des revues scientifiques en économie a suivi cinq étapes depuis l'origine de la discipline. La première correspond aux essais précurseurs des physiocrates et de leurs adversaires mercantilistes au XVIIIe siècle : le combat oppose une dizaine de revues. La deuxième se déroule au XIXe siècle: après plusieurs tentatives malheureuses, I'essai des libéraux réussit avec le Journal des économistes en 1841. La troisième étape débute quand Charles Gide crée la Revue d 'économie politique en 1887. Alors se multiplient les titres spécialisés: la Revue économique internationale, la Revue d'histoire économique et sociale, etc. La quatrième étape commence en 1944, avec les nombreuses publications lancées par François Perroux : Economie appliquée, Economies et sociétés, etc. En 1950 parait la Revue économique qui devient la principale revue d'économie en France. La cinquième étape s'ouvre en 1969 quand l'INSEE publie ses Annales. De nombreux titres plus spécialisés ont été créés depuis. Cet ouvrage est consacré a la genèse et à l'actualite de toutes ces revues. Il est destiné aux chercheurs et aux étudiants en sciences sociales. II peut aussi intéresser l'honnête homme.

Les auteurs :

Rolande Borrelly, Richard Boudon, Robert Boure, Yves Breton, Sylvie Diatkine, Xavier Galiègue, Philippe Jeannin, Evelyne Laurent, Luc Marco (dir.), Bertrand Maximin, Marc Pénin, Gabriel Poulalion et Philippe Steiner

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La mesure de l'esprit
Olivier Martin

L'esprit est-il mesurable ? Peut-on quantifier les attitudes, les opinions et les capacités intellectuelles ? Depuis le début du XXe siècle au moins, des psychologues et des mathématiciens ambitionnent de répondre par l'affirmative à ces questions grâce au quotient intellectuel (QI), au coefficient d'intelligence générale (g), aux échelles numériques d'attitudes ou d'opinions? Tous ces instruments visent à quantifier les aptitudes mentales individuelles et, parfois, à en déduire l'existence de différences entre groupes ethniques ou entre sexes.

Comment ces instruments de mesure de l'esprit ont-ils vu le jour ? Quels arguments ont permis d'en assurer le bien-fondé ? L'histoire des formes de justification de la mesure en sciences humaines est aussi celle de l'introduction du formalisme mathématique (notamment statistique) dans ces sciences, et donc aussi celle de la psychométrie.

L'étude de cette histoire, riche en enseignements, permettra au lecteur de saisir comment la question du réalisme des grandeurs psychologiques se pose en psychométrie : quelle crédibilité et quel réalisme peut-on accorder à des grandeurs dont la définition est en partie mathématisée ?

Derrière un éclairage lucide sur les modalités de naissance puis de transformation des méthodes statistiques ou probabilistes, une autre question, toute aussi fondamentale, se pose : quelles sont les conséquences de l'introduction des outils mathématiques sur les sciences humaines ?

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La modernité de Karl Polany
Maucourant J., Servet J. M. et Tiran A. (eds.)
La géographie de Michelet
Paule Petitier

En 1833, un jeune historien publie le Tableau de la France. Comment comprendre cette réflexion originale sur les phénomènes humains dans leur distribution spatiale, cette géo-histoire, à une époque ou la pensée géographique française connait une relative éclipse ?

La géographie de Michelet naît de sa méthode historique; elle en constitue une sorte de manifeste, donnant à lire la carte des savoirs que l'historien mobilise et met en relation (statistique, géologie, biologie, medecine, anthropologie...), laissant appréhender la transposition des modèles de comaissance d'un domaine dans un autre. Elle nous oblige à reconsidérer une division du savoir, un cloisonnement des disciplines, que les esprits de la première moitié du XIXe siecle étaient loin d'admettre.

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La médecine du crime
Marc Renneville

Il s'agit d'une enquête sur les origines de la représentation du criminel malade. La périodisation a été construite à rebours de l'historiographie de la criminologie car elle commence vers 1885 et s'arrête à peu près aux débats théoriques autour de l'anthropologie criminelle et du droit pénal à la Belle-Époque. Elle part d'un contraste : alors qu'il n'existe quasiment pas de discours médical sur le passage à l'acte du criminel dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la volonté d'utiliser la médecine pour lutter contre la criminalité est perceptible dès le début du XIXe siècle. Que s'est-il passé ?

La première partie de l'enquête (1785-1808) établit la logique d'une telle évolution en évoquant la transformation des institutions et des discours sur l'homme qui s'opère entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle. Le passage d'une société d'ordre à une société des individus fondée sur la philosophie politique du contrat social a profondément renouvelé le rapport des individus aux institutions, la question du contrôle social et la légitimité du droit de punir. Cette nouvelle conception du lien social - qualifiée ici d'« idéalisme juridique » - explique à la fois la réforme pénale et la naissance de la psychiatrie. Le paradoxe réside dans le fait que c'est exactement au moment où la démocratie émancipe les individus d'une autorité extérieure (la religion) que les discours savants (droit, médecine, philosophie, anthropologie...) remettent en cause le libre arbitre en invoquant des asservissements intérieurs (liés à l'absence de propriété, à l'âge, au sexe, aux instincts animaux, à la race etc.). L'événement est essentiel car nos sciences humaines contemporaines fondent leur projet sur l'inventaire de ces asservissements.

La seconde partie (1808-1848) décrit le développement de la médecine du crime. Cette étape, qui désigne le passage du stade des énoncés épars à la théorisation, s'incarne essentiellement dans la première moitié du XIXe siècle dans la doctrine phrénologique de Gall et dans la nosographie d'Esquirol. Le mouvement phrénologique français n'ayant suscité aucune recherche d'ensemble depuis l'oeuvre référentielle de G. Lantéri-Laura, on dresse ici un tableau précis de l'évolution de cette science en prenant pour cadre le contexte socio-politique et en faisant intervenir simultanément l'étude des institutions qui lui sont dédiées et la diversité des positionnements théoriques.

La troisième partie (1848-1885) inaugure un moment de diffusion de l'image du criminel-malade, qui s'étend au delà de la seule communauté des médecins pour s'ancrer dans les représentations sociales des élites. Cette nouvelle période est marquée par plusieurs évolutions très importantes. Il y a d'abord la théorie des dégénérescences de Morel qui cherche à surmonter les limites de la classification d'Esquirol et tente de pallier les difficultés rencontrées par les aliénistes dans le champ de l'expertise médico-légale. Il y a ensuite l'essor du positivisme, du transformisme, du lamarckisme et de l'évolutionnisme social. Ce sont là autant de facteurs qui, une fois rappelés, permettent de comprendre les conditions de réception en France de la célèbre théorie du « criminel-né » de Lombroso, la multiplication des études de craniologie criminelle, la « naissance » de la psychologie des foules criminelles et le vote de la loi de relégation des récidivistes du 27 mai 1885, qui clôt symboliquement cette étude.

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The Medicine of Crime
Marc Renneville

This study examines the birth and growth of a medical view in criminality in France. The first part make an inventory of the context on the end of Ancien Regime and it analyses particularly the changes in sciences of man in relation with the new institutions during the French revolution. French physicians and anthropologists took an interest in criminals and theorized their behaviors before the famous italian positivist school. French theorizing in this area developped in the early beginnning of the XIXth century with the concept of Esquirol's « monomanie homicide » and phrenology, the later gaining wide acceptance under the July Monarchy. Paul Broca, leader of anthropology in France, was interested incidentally in the pathology of crime but it is Lombroso's Uomo delinquente, which through the reactions it provoked, led to the development of this type of studies in France. In opposition to Lombroso, the forensic physician Lacassagne created in Lyon in 1885 a review of criminal anthropology which will continue to appear until 1915. His school of « Milieu social », took a very different viewpoint from durkheimian sociology. In fact, Lacassagne wasn't so far from Lombroso than he said, and his approach was also in a medical frame. Morel's theory of degeneration deserves mention for the importance it gained at the end of the century with Magnan, a psychiatrist who « regenerated » the concept of « monomanie homicide » in an « impulsion morbide »

This analyses give an overall view of the most important trends of criminal anthropology. An attempt is also made to unterstand how the medicalization of deviance was possible and it's historical conditions of emergence.

This book is the first referential study on this area. Illustrated with 25 pictures, it contains more than 100 pages of bibliography which will be very helpful for historians and future researches.

KEY WORDS : History of medicine, History of criminology, History of psychiatry, History of anthropology, History of legal medicine, Phrenology, French Revolution, XIXe Century France.

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Maurice Delafosse. Entre orientalisme et ethnographie, l'itinéraire d'un africaniste (1870-1926)
E. Sibeud et J.-L. Amselle

Plus qu'un lourd tribut d'hommages convergents à une figure "tutélaire" de l'africanisme francais, cet ouvrage se veut une immersion dans les contextes politiques et scientifiques de la carrière de Maurice Delafosse (1870-1926). Administrateur des colonies, ethnographe,  professeur à l Ecole des langues orientales, il appartient à ces réseaux savants et coloniaux qui se liguent ou, au contraire, s'affrontent, pour définir les enjeux de la "politique indigene" et les contours d'une érudition coloniale, qui a contribué par exemple a la fondation de l'Institut d'ethnologie de la Sorbonne en 1925. De l'orientalisme à la négritude, son itinéraire est aussi un fil conducteur à travers les strates, successives ou répétitives, des représentations françaises de l'Afrique. Un peu en marge de la tradition africaniste qui s'est fondée sans lui, il nous donne donc accès a l'histoire plus complexe de la constitution des sciences de l' homme dans le contexte de la domination coloniale."

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Un siècle d'archéologie française au Pérou (1821-1914)
Pascal Riviale

Dès le moment où Francisco Pizarro et ses hommes révélèrent au Vieux Monde ses fastes et ses mystères, le Pérou exerça sur l'Europe une fascination devenue proverbiale. Au cours des siècles, la curiosité provoquée par cette lointaine contrée ne devait jamais cesser, oscillant constamment entre la rêverie poétique sur cet empire déchu et les interrogations relatives à la nature de l'homme américain.

Née au XVIIIe siècle, la science ethnologique devait prendre toute sa mesure au XIXe siècle, tandis que les grandes puissances industrielles entreprenaient de mettre le globe terrestre en coupe réglée. Dans cette vaste quête visant à établir « scientifiquement » un tableau classificatoire des peuples et des races, les somptueux vestiges laissés au Pérou par d'antiques civilisations, constituaient une énigme pour les anthropologues de cabinet et les aventuriers de toutes sortes.

En proposant une histoire de l'archéologie française au Pérou, l'auteur montre comment s'est développé puis institutionnalisé un champ de recherche propre à l'américanisme. Il décrit la façon dont se sont organisées la collecte et l'analyse des antiquités péruviennes, à travers un ballet incessant du terrain au laboratoire et du cabinet au musée. Il met en scène tous les acteurs de cette entreprise scientifique (médecins, négociants, marins, explorateurs) qui a cristallisé un certain nombre de querelles théoriques et institutionnelles avant de trouver progressivement la place que nous lui connaissons aujourd'hui dans la recherche.

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Minerva's Message. Stabilizing French Revolution
Martin Staum

In 1795 the heirs of Enlightenment philosophes institutionalized previously constructed models of the social sciences in the Class of Moral and Political Sciences of the National Institute.  The emblem of the Institute was the head of Minerva.  This study analyzes the work of the Class with reference to the complex interactions of knowledge and power in the Revolutionary era.  The theory of representative government, free market economics, and the theory of public education may have been subversive of absolute monarchy in the eighteenth century, but in the new Revolutionary context they became essential tools for the moderate Directory regime.  After the Terror, French intellectuals wished to reduce political and social instability.

The group of the Idéologues took the most well-known road to social stability by founding the social sciences to help inculcate sound habits and the political responsibility of good citizens.  The medical theory of temperament also justified the exclusion of women from political activity.  Among the subjects discussed by the Class was a form of political economy which tolerated a hierarchical society.  At the same time the studies of history and geography employed a four-stage model of social development to confirm a Eurocentric perspective on the world.  Once critical opinions became consoling, if not conservative, expressions enhancing social order or current political goals.

A less well-known counter-current  of deist moralists in the Institute sought their own path to stability in opposition to the Idéologues.  Bonaparte himself, by adopting the Concordat which reconciled the state to the Church, chose a third path to stability.  The abolition of the Class in 1803 showed that the honeymoon between intellectuals and power was very short.

Although the dominant historiographical image of the Revolution is that of a break with the past, prosographical study of members of the Class demonstrates that the social origins of the members and their academic culture changed relatively little when compared to eighteenth-century academicians. Historians should thus recognize the continuity as well as the discontinuity in Revolutionary institutions.

Review by Richard Lebrun, University of Manitoba, for H-France, December 1998.

Martin Staum's Minerva's Message is the culmination of many years of scholarly endeavour studying the French National Institute and in particular its Class of Moral and Political Sciences, established during the French Revolution to replace the academies of the Ancien Regime.  While some of Staum's findings had been published in scholarly journals over the years since 1980 (according to the acknowledgements in the preface, material from eight out of the twelve chapters had appeared in other forms), it is still extremely useful to have this knowledgeable, balanced, and comprehensive treatment of the Institute.

Staum's overall thesis is that although the Class of Moral and Political Sciences (CMPS) was intended to institutionalize the critical social and political culture of the Enlightenment, in the circumstances of the years following its establishment in 1795, it served in fact as a means of ending revolutionary turmoil and strengthening social order.  In making his case, Staum traces the history of the Institute, describes the membership and activities of the CMPS, and provides a helpful overview of French intellectual life during this nascent period of the social sciences.

The Institute's mission, as prescribed in the law of 25 October 1795 that established it, was to conduct research, publish discoveries, correspond with other learned societies, and advise the Directory (i.e., the French government) about "scientific and literary works of general utility and promoting the glory of the Republic" (p. 4). Staum argues that both the CMPS and the government were very conscious of the need to stabilize revolutionary turmoil.  Within the Class of Moral and Political Sciences, there was a vocal minority of Ideologue philosophers who had an ambitious vision of using social science to promote social harmony.  They hoped to tame passions by reason, or re-channel them to socially acceptable goals. The means they envisioned included refining language to eliminate controversy, countering the effects of climate by appropriate legislation, and using the lessons of history to form citizens for intelligent participation in government.  Balancing this technocratic tendency was a genuine commitment to guaranteeing human rights.  It was Ideologue opposition to Napoleon Bonaparte's disregard for civil liberties and their opposition to the Concordat re-establishing the Catholic church which led the government to abolish the entire CMPS in January 1803.

Perhaps because of their opposition to Bonaparte, perhaps because they were the most vocal exponents of Enlightenment traditions in this period, the _Ideologues_ have attracted the most scholarly attention among the members of the Institute.  Staum, however, contends that the majority of the members of the CMPS, let alone the Institute, were indifferent or hostile to the _Ideologue_ project of constructing human sciences on the model of the natural sciences.  He concludes, from a detailed study of the membership of the Class, and from a careful analysis of the activities of _Ideologues_ within the Class (including their role in sponsoring and framing essay prize competitions during these years), that _Ideologue_ control, and even influence, was always quite limited.

Staum's second major theme is that although the self-image of the men of the Revolution (including those who
established the Directory and its institutions) was that they were creating a new political and cultural world, there were is fact many continuities in both practice and discourse between the academies of the Ancien Regime and the Institute.  From the early seventeenth century the French crown had funded academies as a way of encouraging the arts and sciences and enhancing its own prestige.  During the last decades before the Revolution, permeated by Enlightenment influences, Parisian and provincial academies became places where nobles, clergymen, wealthy office-holders, lawyers, physicians, and other members of the upper bourgeoisie discussed moral, political, and social issues.  Academies sponsored essay contests on practical subjects such as hygiene, poverty, education, and legal reform.  If the academies can be portrayed at preparing revolutionary reforms and encouraging independent judgment, they nevertheless remained very embedded in the Ancien Regime culture of precedence and privilege.  Even provincial academies solicited royal charters, honoured the monarchy on ceremonial occasions, and admitted local nobles as honourary members.  After 1789, though they made some efforts to reform their rules, the academies were unable to escape the image of royal patronage and corporate identity.  By 1793, all the Parisian academies had been abolished as aristocratic anachronisms.

When the Institute, with its First Class of Mathematical and Physical Sciences, its Second Class of Moral and Political Sciences, and its Third Class of Literature and Fine Arts, was inaugurated at its first public session in April 1796, spokesmen for both the government and the Institute proclaimed a new relationship between the state and learning in a world in which, in modern terminology, "intellectuals would be truly free under a free government" (p. 13).  It soon became clear, however, that the Directory expected the Institute to promote social and political stability, the war effort, agricultural productivity, and commerce.
Nor was the government really ready to allow unrestricted criticism of its political and social policies.  As early as the anti-royalist coup of Fructidor (of September 1797), a member of the Second Class was purged by the Directors for political reasons. Bonaparte, while able to appreciate and celebrate the scientific contributions of its members, rejected the notion that the Institute serve as a forum for critical thinking, and once in power, he suppressed the Class of Moral and Political Sciences.

So the ambivalent relationship with the French state was one of continuity between the old academies and the Institute. A further continuity, as Staum demonstrates, appears in the membership of the Institute, where the patterns of social origins and careers remained quite similar to the old academies.  The percentage of members of clerical and noble background were somewhat lower in the CMPS than in the old academies, but not dramatically so.  As in the literary academies of the Ancien Regime, scholars and men of letters, leavened by professional and official notables, were usually of non-entrepreneurial bourgeois origin.  Staum's analysis of the career patterns of members of the Second Class shows that thirty-six per cent of the Class had achieved renown before the Revolution, with the Institute, in effect, sanctioning existing prestige.  Even with respect to political opinions, there was no sharp break with the past. Rather, as Staum describes the situation, the Second Class "was a short-lived union of older more established, more conservative or apolitical men in traditional disciplines such as history and geography, with more pro-Revolutionary (though far from politically radical) men in the innovative social sciences" (pp. 48-9).

 There was continuity as well, Staum suggests, in discourse.  For various complicated reasons, in part political, in part having to do with what audiences expected from the public sessions of the Institute, the original vision of the Institute's founders of promoting the Encyclopedist ideal of the unity of knowledge gradually shifted to an emphasis on eloquence, which was characteristic of the literary culture of the Ancien Regime. Poetry proved more popular and less sensitive politically than Ideologue dissertations on the origins and nature of knowledge.

The third major focus of Staum's work is a thoughtful examination of the development of the social sciences during this period.  Arguing that a striking difference between our own era and the eighteenth century is in "the feeling of emancipation that was then attached to the formulation of the human sciences" (p. 14), Staum shows how changing social and political assumptions in the post-Terror years affected the fundamental notions that the Institute thinkers held about the nature and scope of the social sciences.  He suggests that part of the current interest in these thinkers was their willingness to grapple with dilemmas still plaguing the social sciences.  Like many "experts" today, "tainted by the power-bound implications of all knowledge and tempted by the political power to which some felt so close... [members of the Institute] vacillated between maintaining critical autonomy and giving advice to governments, between being technocrats and being defenders of individual freedom" (p. 18).  It is from this critical perspective that Staum, in the latter chapters of his book, traces, in detail, how Institute thinkers wrestled with issues in what would become the field of psychology. Institute members also grappled, inter alia, with questions of moral education, the nature and purpose of history as a science, competition between utility and rights as the foundation for political institutions, and the progress of a science of political economy intended to achieve a better understanding of an evolving commercial society.

Staum's volume is quite complete, with well-chosen illustrations of some the personalities involved, six appendices providing statistical and factual details about Institute members and their activities, fifty pages of end notes, a thirty-page bibliography, and a helpful index.  As usual with McGill-Queen's University Press, the book is well edited and handsomely produced. One fault this reviewer found was a blind reference to "the ill-fated Perrault proposal" (p. 34), which is not explained (1).  In summary, this is a thoroughly researched, well-organized, and clearly written study that can be recommended to anyone interested in the intellectual and institutional history of the French Revolution.

Richard A. Lebrun
University of Manitoba
lebrun@cc.umanitoba.ca

Copyright 1998 by H-Net, all rights reserved.
(This work may be copied for non-profit educational use if proper credit is given to the author and the H-France list.  For other permission, please contact H-Net@h-net.msu.edu)

(1) M. Staum nous offre cette précision : "En effet la référence au projet Perrault pour une académie générale des sciences
et des lettres se trouve à la page 11 de Minerva's Message, mais par erreur manque à la page 34.  La source est Charles Perrault, Mémoires de ma vie (ed. 1909), 34-42, citée dans Roger Hahn, Anatomy of a Scientific Institution: The Paris Academy of Sciences, 1666-1803 (Berkeley: University of California Press, 1971), p. 13.

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Minerva's Message. Stabilizing French Revolution
Martin Staum

Les héritiers des philosophes des lumières ont institutionalisé en 1795 des modèles de sciences sociales dans la Classe des sciences morales et politiques de l'Institut national, dont l'emblème est la tête de Minerve. L' ouvrage analyse les travaux de cette classe à travers l'articulation savoir-pouvoir. Les attaques contre le despotisme monarchique et les privilèges sociaux (y compris la théorie du gouvernement représentatif, l'économie politique du libre-échange et la théorie de l'instruction publique) sont devenues dans ce nouveau contexte des appuis essentiels pour un gouvernement révolutionnaire modéré. Après la Terreur, les "intellectuels " ont voulu réduire l'instabilité politique et sociale. Un premier chemin vers la stabilité sociale est pris par les Idéologues, qui voulaient garantir par les sciences humaines des habitudes saines et la responsabilité politique des citoyens. La théorie du tempérament a aussi justifié l'exclusion des femmes de l'activité politique. Parmi les sujets abordés dans la Classe, on trouve l'économie politique qui tolère une société hiérarchique, tandis que les études d'histoire et de géographie utilisent un modèle du développement social en quatre étapes pour confirmer une optique eurocentrique du monde. Les outils qui étaient autrefois critiques sont désormais porteur d'un message réconfortant, sinon conservateur. Un contre-courant anti-Idéologue dans l'Institut cherche un deuxième chemin à la stabilité par la morale déiste. Bonaparte lui-même a choisi de prendre une troisième voie avec le Concordat qui marque la réconciliation de l'Etat avec l'Eglise. L'abolition de la Classe en 1803 montre que la lune de miel entre les intellectuels et le pouvoir a été très courte...

Bien que l'image dominante de la Révolution soit celle d'une rupture, l'étude prosopographique des membres de la Classe démontre que les origines sociales et la culture académique ont très peu changé par rapport aux académiciens du dix-huitième siècle. Les historiens  sont obligés de reconnaître cette continuité dans les institutions révolutionnaires aussi bien que la rupture.

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Le travail, sciences et société.
Essais d'épistémologie et de sociologie du travail.
François Vatin

L'ouvrage
Depuis quelques années s'est développé un débat sur la possible « fin du travail ». Loin de chercher à fournir une réponse de plus à cette question d'école, ce livre met en ordre un ensemble de réflexion issu de vingt années de recherches sur le thème du travail. Il croise une expérience sociologique alimentée par des recherches de terrain et une démarche épistémologique portant sur deux siècles d'histoire des sciences du travail. Ce dialogue entre l'épistémologie et la sociologie du travail montre à quel point les débats contemporains sont encore marqués par les difficiles conditions d'émergence, au début de ce siècle, des sciences sociales du travail. Celles-ci continuent à porter en héritage, souvent à leur insu, une longue tradition d'étude du travail qui remonte au moins à la fin du XVIIIe siècle. Dans cette tradition, le travail comme objet social ne peut pas être dissocié de sa dimension naturelle, saisie d'abord par la physique, puis par la physiologie et la psychophysiologie. L'hypothèse fondatrice de ce livre est qu'un bilan raisonné de cette histoire des idées est nécessaire à la compréhension des formes modernes du travail et des débats sociaux qu'elles soulèvent.

L'auteur
François Vatin, titulaire d'un doctorat en économie et en sociologie, est professeur de sociologie à l'Université de paris X-Nanterre. Il a publié de nombreux ouvrages qui portent sur l'organisation du travail et son histoire, le secteur laitier, l'histoire de la pensée économique et scientifique du XIXe siècle.

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Dictionnaire des usages socio-politiques, Fascicule 7, Textes réunis par Jacques Guilhaumou et Marie-France Piguet, Paris, Champion, 2003.

Comment se sont formées certaines notions du discours des sciences humaines et sociales tout au long du XVIIIe siècle et à quels contextes théoriques peut-on rapporter les dénominations qui se sont alors imposées ?
Autour de cette question le septième volume du Dictionnaire des usages socio-politiques a réuni sept monographies établies par des auteurs venus d’horizons disciplinaires différents qui, tour à tour, examinent l’expression de l’inédit - socialisme -, l’émergence de concepts neufs - division du travail, production -, le trajet de diffusion d’une formule - grande nation -, le déploiement, la modification ou le changement de registre d’application d’une notion - langue de l’économie politique, travail, charlatanisme -.
Diversifiées dans leurs sources et leurs méthodes, ces études partagent une attention commune à la langue et aux savoirs qui ont motivé la terminologie de plusieurs champs scientifiques du XIXe siècle.

TABLE DES MATIERES

Avant-propos

Jacques GUILHAUMOU

7

Présentation

Marie-France PIGUET

9

Le charlatanisme : une notion univoque aux applications multiples

Daniel TEYSSEIRE

15

De Division of Labour à division du travail. Histoire d’une notion, d’un syntagme et de sa diffusion en France

Christophe SALVAT

39

Histoire et signification d'une expression célèbre : la grande nation (août 1797-automne 1799)

Jean-Yves GUIOMAR

67

Sieyès et la langue de l’économie politique. Un manuscrit inédit

Jacques GUILHAUMOU

83

Production : expression, émergence et diffusion d’une notion

Marie-France PIGUET

117

De société à socialisme : l'invention néologique et son contexte discursif

Sonia BRANCA-ROSOFF
Jacques GUILHAUMOU

143

Travail dans les discours socio-économico-politiques entre la fin du XVIe et le début du XIXe siècles

Annie JACOB

181

Index des noms de personnes

 

199

Dictionnaire des usages socio-politiques (1770-1815)

 

203

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