Jean ii Riolan empruntait à deux philosophes antiques le prolongement de son propos sur les avantages de la vieillesse, contre la jeunesse de Jean Pecquet.
- Platon, Timée, propos de Critias sur les Égyptiens : {a}
« Ils aiment beaucoup les Athéniens, et ils se disent de la même origine. Arrivé à Saïs, Solon, {b} comme il nous l’a raconté lui-même, fut fort bien reçu ; il interrogea les prêtres les plus instruits sur l’histoire des temps anciens, et il reconnut qu’on pouvait presque dire qu’auprès de leur science, la sienne et celle de tous ses compatriotes n’était rien. Un jour, voulant engager les prêtres à parler de l’Antiquité, il se mit à leur raconter ce que nous savons de plus ancien […], supputant le nombre des années et essayant ainsi de fixer l’époque des événements. Un des prêtres les plus âgés lui dit : “ Ô Solon, Solon ! vous autres Grecs vous serez toujours enfants ; il n’y a pas de vieillards parmi vous. ” “ Et pourquoi cela ? ” répondit Solon. “ Vous êtes tous, dit le prêtre, jeunes d’intelligence ; vous ne possédez aucune vieille tradition ni aucune science vénérable par son antiquité. ” »
- Aristote, Éthique, livre i, chapitre iii : {c}
« Chacun juge bien de ce qu’il sait, là il se montre bon juge. Ainsi, quand on est instruit sur un sujet particulier, on en parlera avec compétence ; pour traiter d’une question d’ensemble, il faut avoir une culture générale. Pour cette raison, le jeune homme est peu apte à étudier la science politique, car il manque d’expérience sur la pratique de la vie. Or c’est sur ce point et à ce sujet que portent nos débats. Comme, de plus, il suit volontiers ses passions, il ne prêtera à ces études qu’une attention vaine et sans profit, puisque le but de la politique est, non pas la connaissance pure, mais la pratique. Peu importe d’ailleurs qu’on soit jeune par l’âge ou trop jeune de caractère, car ce défaut d’attention n’est pas facteur du temps, mais conséquence d’une vie dominée par les passions et obéissant à toutes les impulsions. Pour des êtres de cette sorte, la connaissance est sans utilité, comme pour ceux qui n’ont pas le contrôle d’eux-mêmes ; mais pour ceux qui règlent leurs penchants et leurs actions sur la raison, la connaissance de ces questions peut être très profitable. »
- Aristote, ibid. loc. cit. : {c}
« Ce qui prouve la vérité de ce que nous disons, c’est que les jeunes gens peuvent devenir géomètres, mathématiciens, et même habiles dans ces sciences-là, {d} mais on ne les croit pas susceptibles de devenir prudents, parce que la prudence est relative aux circonstances particulières, aux objets de détail, qu’on ne peut connaître qu’à l’aide de l’expérience ; et un jeune homme est sans expérience car il n’y a que le temps qui donne cet avantage. »
- Traduction de Victor Cousin.
- Saïs est une ville du delta du Nil ; v. note [44], lettre de Samuel Sorbière (Sebastianus Alethophilus), pour Solon.
- Traduction de M. Thurot, 1824.
- Pour se moquer de Pecquet, Riolan y a ajouté les musiciens (mais dans les anciennes sciences, la musique était une branche des mathématiques).
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