Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
3e de 6 parties, note 37.
Note [37]

Ce que Jean ii Riolan appelait sa « lettre de consolation » (epistola consolatoria) à William Harvey était le début de sa Responsio ad secundam Exercitationem Anatomicam Guil. Harvei de Circulatione sanguinis [Réponse au second Essai de W. Harvey sur la circulation du sang], {a} pages 62‑63. Le passage qu’il en citait, avec quelques modifications mineures, vaut la peine d’être un peu allongé :

Inuidi moriuntur, sed nunquam inuidia, quæ probos, et doctos Viros semper insectatur. Putasne me, qui tuo Operi succedo, expertem istius invidiæ et maledicentiæ ? Multi nostros labores legunt, tanquam nænias et fabulas, nec tamen audent, vel queunt palam eis contradicere. Nos etenim etiam appellant Circulatores per contemptum et ironiam, creduntque plurimum nobis illudere et obstrepere hoc sarcasmo, quod mihi passim obiicitur sed istos homines περιοδευτας, circuitores, circulatoriam artem apud ægros excercentes flocifacio et despicio, famam habent, quam non merentur. Hoc te, et me recreare debet exemplum Columbi, qui suis navigationibus cum nouum orbem detexisset, in aulâ Ferdinandi Regis Hispaniarum irritus fuit, quod sibi arrogaret inuentum, quod aliis ante ipsum innotuerat. Ille coram Rege istos lepidè elusit, quis vestrûm inquit, hoc ouum rectum destituet supra planam istam tabulam. Hoc impossibile cum omnes affirmarent, ille in vno extremo leuiter contusum ouum, rectum stare fecit. Hoc facilè cum omnes clamarent, quis vestrum ante me id fecit ? Sic nouum orbem antea multis cognitum dixisti, sed ante me nemo patefecit. Tu mi Harvee mihi Columbus eris in microcosmo, ex Circulati Sanguinis inuentione. Ego verò Americus Vespucius ero, qui tuis inuentis multa adieci, et noum iter Circulandi Sanguinis adinueni, ac demonstraui.

[Les jaloux meurent, mais la jalousie est immortelle, toujours à la poursuite des honnêtes et savantes gens. Ne pensez-vous pas que je sois épargné par cette envie et cette médisance quand je viens après votre ouvrage ? Bien des gens lisent nos livres en les tenant pour des nénies et des fables, mais ils n’osent ou ne peuvent pas les contredire au grand jour. Par mépris et ironie, ils nous appellent aussi circulateurs, en croyant ainsi beaucoup nous nuire en nous tournant en dérision avec ce sarcasme ; {b} mais je n’en fais aucun cas et méprise ces περιοδευτας {c} ou forains, qui exercent leur charlatanerie auprès des malades, avec un succès qu’ils ne méritent pas. L’exemple de Colomb {d} doit nous distraire, vous et moi : après qu’il eut découvert le nouveau monde au cours de ses navigations, il se mit en colère quand on lui dit, à la cour du roi d’Espagne, qu’il s’arrogeait une découverte que d’autres avaient faite avant lui ; il s’en joua en disant poliment, devant le roi, « Qui de vous fera tenir cet œuf debout sur cette table plane ? » ; comme tous affirmèrent que c’était impossible, il écrasa légèrement une extrémité de l’œuf et le fit tenir droit ; quand tous se mirent à crier que c’était trop facile, il dit « Qui de vous a fait cela avant moi ? » Ainsi avez-vous dit que le nouveau monde était déjà connu, mais que personne ne l’avait montré avant vous. Vous serez pour moi, mon cher Harvey, le Colomb du microcosme, pour avoir découvert le mouvement circulaire du sang ; mais je serai Amerigo Vespucci, {e} car j’ai ajouté beaucoup à vos découvertes, et mis au jour et démontré un nouveau trajet du sang circulant]. {f}


  1. Paris, 1652, v. supra notule {d}, note [11].

  2. J’ai mis en exergue le passage que Riolan a cité, en ajoutant les « fables » (fabulas) aux « nénies » (chants funèbres), « ne peuvent » à « n’osent », et « au grand jour » (palam). Il a remplacé la suite par « et c’est ce qu’on m’objecte à l’envi ».

  3. Périodeutas, marchands ambulants.

  4. Christophe Colomb en 1493, sous le règne de Ferdinand d’Aragon et d’Isabelle de Castille, vnote Patin 41/8229.

  5. Navigateur (Florence 1545-Séville 1512) qui a prolongé et étendu la découverte de l’Amérique (qui lui doit son nom) par Colomb.

  6. Il est permis de douter que ce propos ait consolé Harvey des attaques qu’il endurait depuis la publication de sa découverte.

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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
3e de 6 parties, note 37.

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(Consulté le 07/12/2025)

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