Texte : Thomas Bartholin
Historia anatomica
sur les lactifères thoraciques (1652)
chapitre iii, note 1.
Note [1]

Pierre Gassendi a commenté la découvertes des lactifères mésentériques par Gaspare Aselli dans l’Excerptum Prius, de Nutritione Animalium, in quo inter cætera disseritur de Venis Lacteis [Premier recueil sur la Nutrition des animaux, où il est question, entre autres sujets, des Veines lactées], pages lvj‑lvij : {a}

Nobis quid pridem visum fuisset, cùm non pigeat exponere ; displicuerat primùm, quicquid opinionum fuit commemoratum ; ac impugnaramus præsertim traiectionem illam siue alternantem, siue simultaneam, per rubeas Mesenterij venas, quas nutriendis solùm ipsi Mesenterio, intestinisque destinatas à natura arbitabamur ; tanquam venâ portâ non aliò dicatâ quàm distribuendo sanguini in omnia interanea, quæ non perinde commodè haurire poterant ex causa. Nihil verò necesse est argumenta commemorare, quæ expressa fuere in dissertatione cum Præclaro Merindolo medico nostrate, et Aquensi Professore donec viueret instituta ; quæque eiuscemodi sunt, vt facilè cuique occurrant in mentem. Placuerat deinde quem Porum vulgo appellant Cholidochum, leui immutatione Chylodochum dicere ; scilicet quasi destinatum non tam egerendæ ex iecore choleræ, seu flauæ bili in dodecadactylon intestinum, quàm ingerendo chylo ex hoc intestino in iecur. Primùm enim hæc videbatur via compendiosissima, et pro instituto naturæ, quæ per ambages, quales essent venarum mesaraicarum non soleret incedere, quoties commodè recto ductu posset.

[Je ne suis pas fâché d’exposer ce que j’avais longtemps pensé, bien qu’il m’ait d’abord été désagréable de me remémorer ces opinions. Initialement, j’avais surtout contesté ce trajet alterné ou simultané dans les veines mésaraïques rouges, {b} pensant que la nature ne les avait destinées qu’à nourrir les intestins et le mésentère, tout comme elle avait voué la veine porte à distribuer le sang dans tous les viscères qui ne pouvaient pas être aisément irrigués. {c} Il est néanmoins utile de rappeler les arguments dont j’ai débattu, jusqu’à sa mort, avec Mérindol, très brillant médecin de chez nous qui professait à Aix : {d} nous y échangions sur tout ce qui nous venait à l’esprit ; par un léger changement de lettres, il avait plaisir à nommer chylodoque le pore biliaire que tout le monde appelle cholédoque, {e} jugeant qu’il n’est pas tant destiné à faire couler la bile jaune du foie dans le duodénum, qu’à en faire entrer le chyle dans le foie ; cette voie nous paraissait alors la plus courte et conforme au dessein de la nature, qui n’a pas coutume d’emprunter des détours, tels ceux des veines mésaraïques, chaque fois qu’un droit chemin peut être plus commode]. {f}


  1. Imprimé dans l’Appendix des Petri Gassendi Animadversiones in decimum librum Diogenis Laertii, qui est de Vita, Moribus, Placitisque Epicuri, tome ii, Lyon, Guillelmus Barbier, 1649, in‑4o.

  2. Avant Aselli, la plupart des anatomistes pensaient que ces veines véhiculaient à la fois le sang et le chyle.

  3. Gassendi n’admettait pas la circulation harvéenne du sang.

  4. Antoine Mérindol (1570-1624) était professeur de médecine à l’Université d’Aix-en Provence.

  5. V. note [9], Dissertatio anatomica, chapitre xii.

  6. En d’autres termes, Gassendi défendait l’idée que le chyle arrivait dans le collecteur mésentérique, auquel Aselli avait à tort donné le nom de pancréas, pour gagner le duodénum par le canal de Wirsung et monter dans le foie par le cholédoque. Cette proposition astucieuse, mais aberrante, contournait l’impossibilité de voir les lactifères pénétrer dans le foie.

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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Thomas Bartholin
Historia anatomica
sur les lactifères thoraciques (1652)
chapitre iii, note 1.

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(Consulté le 08/12/2025)

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