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Nouveaux râteliers du
dentiste français.
Thomas Rowlandson à
Londres 1811 |
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QUELQUES DÉFINITIONS
Dans le domaine des dents artificielles il convient de revoir quelques
définitions en accord avec les préconisations de la Cité de la Céramique à
Sèvres.
Les Céramiques sont des terres d’origine argileuse cuites. Les pièces en
céramique sont réalisées par solidification à haute température d’une pâte
humide plastique d’origine minérale.
La porcelaine est une céramique d’une pâte à base de Kaolin, de feldspath
et de silice, cuite au minimum à 1250°c. Classiquement on distingue la
porcelaine dure et la porcelaine tendre en fonction principalement de son
taux de silice. D’une manière générale toutes les dents artificielles en
céramique sont des dents en porcelaine de par leur composition et
cuisson.
Au 18ème le terme de « dent terro-métallique » fut employé en
accord avec cette céramique riche en oxydes métalliques, mais difficilement
classifiable en porcelaine, car pas assez riche en silice.
Plus tard le terme de « dent minérale » fut aussi beaucoup utilisé et
correspond bien à la céramique dentaire.
RAPPEL HISTORIQUE
Resituons les touts débuts des dents prothétiques en céramique,
minérales, terro-métalliques comme elles furent nommées à leur naissances.
Dans les années 1770 un apothicaire de St Germain en Laye, Alexis
Duchateau, ne supporte plus l’inconfort et les inconvénients de ses
prothèses dentaires en ivoire. Sa profession le met souvent en contact avec
des céramistes pour différents ustensiles professionnels. Or la porcelaine
ne prend pas les odeurs, est inaltérable et relativement résistante. D’où
l’idée de se faire fabriquer des dentiers en porcelaine. C’est probablement
en 1779 que Duchateau contacte la manufacture de Mr Guerhard, porcelainier
rue d’Angoulême à Paris, pour se faire réaliser des dentiers en porcelaine.
De nombreux problèmes techniques de fabrication et d’inconforts buccaux
l’amènent à s’associer, d’ailleurs pour une très courte période, avec un
dentiste parisien Nicolas Dubois de Chémant (1753- après 1826) pour adapter
ses prothèses. Celui-ci reprend les expérimentations à son compte.
L’importante contraction de la céramique à la cuisson rend les dentiers
inadaptés aux tailles réelles des maxillaires. Il travaille à la confection
de prothèses en porcelaine en essayant différentes sortes de porcelaines
existantes, comme en témoignera son mémoire pour l’obtention de son futur
brevet. C’est alors que Dubois de Chémant a l’idée de réaliser des dents
unitaires en porcelaine évitant ainsi l’inconvénient de rétraction massive
de pièces unitaires importantes. Dents unitaires qu’il montera sur des bases
en ivoire ou mieux sur des bases métalliques. Il comprend que plus un objet
est petit, moins la rétraction de la céramique est importante à la cuisson,
l’idée lui vient de fabriquer des éléments séparés que l’on assemble par la
suite. Il est probablement le premier à mettre ce concept en application
pour la céramique.
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Prothèse imputrescible
mandibulaire à barre
cingulaire
ajustable.
Fin 18ème. |
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Paire de complets monobloc imputrescibles
avec ressorts
de sustentation. ca.1800. |
Dubois de Chémant publie en 1788 : « Dissertation sur les avantages des
dents et râteliers artificiels incorruptibles et sans odeurs » Puis suivront
pendant plusieurs années des rivalités et procès avec de nombreux confrères.
En 1790 il travaille en étroite collaboration avec la Manufacture Royale de
porcelaine de Sèvres où il dispose d’un petit four pour ses
expérimentations. Le 6 septembre 1791 Dubois de Chémant obtient un « Brevet
pour 15 ans pour la fabrication de dents et râteliers de pâte crue ». Ce
brevet est étayé d’un mémoire du 3 septembre 1791 où il décrit sa démarche
expérimentale, la composition et mise en œuvre de sa fabrication. (Pour plus
d’information voir sur ce site :
158 dents par Dubois de Chémant à la manufacture royale
de porcelaine de Sèvres ). Les archives de la manufacture permettent de
déterminer que l’ensemble de ses 158 dents a bien été effectué à cette
époque entre le 20 septembre et le 16 décembre 1791.
Avec cette production il faut souligner l’Idée géniale d’équiper ses
dents d’un système d’ancrage en fil de platine pour immobiliser ces dents
unitaires. Déjà en 1791 Dubois de Chémant connaissait les affinités des
coefficients de dilatation entre la porcelaine et le platine. Il utilisa
cette particularité dans la fabrication de ses dents car 133 dents sur 158
comportent des anneaux de platine inclus dans la pâte. Le platine est un
métal nouveau à l’époque (1748). Il est très tenace, ductile, élastique, peu
dilatable avec le même coefficient que le verre. La liaison avec les dents
en céramique est donc facilement assurée et stable lors de la cuisson des
dents
Ces 158 dents sont toujours conservées au musée de Sèvres. Grâce à
l’institut national de la céramique, on a la connaissance exacte de la
composition chimique d’une des toutes premières dents artificielles en
céramique. Nous avons la preuve de l’emploi du platine par Dubois de Chémant
pour les attachements des dents céramique 15 ans au moins avant Fonzi. Cet
ensemble étayé par de nombreuses archives et documents complète nos
connaissances sur cette période historique pour les progrès de la prothèse
dentaire, dont Nicolas Dubois de Chémant est un des personnages clef.
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Nicolas Dubois de
Chémant (1750-1826) |
Puis surviennent de nouvelles péripéties avec ses confrères, notamment
Dubois Foucou. En cette période révolutionnaire difficile, les privilèges
qui lui sont accordés par la manufacture (fourniture de pâte de porcelaine
crue, mise à disposition d’un four de cuisson) lui sont alors retirés.
Eprouvé par cette période Dubois de Chémant s’exile à Londres début 1792 et
s’installe à Soho, 2 Frith street. Il fait publier en 1797 une traduction en
anglais de son ouvrage. Il acquiert une réputation remarquable. Après 1822
il revient s’installer à Paris, au 7 rue Vivienne. On perd sa trace après
1826 car ses dernières années sont assez mouvementées entre Londres et
Paris.
Sa technique de la porcelaine céramique en Art Dentaire est complétement
divulguée. De nombreuses améliorations seront ensuite apportées notamment
par Fonzi, dentiste, céramiste et remarquable commerçant. Dubois de Chémant
est à l’origine des débuts d’une fabrication de petites séries industrielles
des dents céramique. Il eut peut-être des contacts avec Claudius Ash à
Londres, et certainement avec les Etats Unis avec l’apport de ses méthodes
en céramique grâce à deux français : Le Breton dans les années 1794-1798,
puis A. Plantou en 1817.
DUBOIS FOUCOU, FONZI ET LES AUTRES
Nous avons vu que les travaux, les réalisations et publications de Dubois
de Chémant avaient entrainé de très vives réactions de confrères parisiens.
En effet dès 1788 il doit riposter à différentes attaques, surtout après sa
consécration le 6 septembre 1791 par l’obtention d’un brevet pour 15 ans
d’exploitation de la céramique pour dents prothétiques. C’est le très
puissant Dubois Foucou, dentiste de la Cour, qui au cours de cette période
va jouer un rôle important. Un combat pour prévalence de brevets, pour ego
surdimensionné, pour être toujours et encore le « premier », le
« meilleur ».
Guiseppangelo Fonzi (1768- 1840) est né en Italie dans les Abruzzes. Il
apprend son métier de dentiste sur les places publiques napolitaines, voyage
beaucoup, passe par l’Espagne et il arrive à Paris en 1795. Avec un vrai
sens pratique il s’intéresse aux dents imputrescibles. Il réalise quelques
pièces, étoffe les choix esthétiques, et surtout améliore la rétention des
dents céramique avec différentes possibilités de systèmes de fixation aux
bases métalliques tout en comprenant l’utilité de l’usage du platine. Il
serait aussi à l’origine de crochet souple de rétention prothétique.
En 1807, à l’Académie des Sciences, Fonzi présente brillamment tous ses
systèmes d’améliorations et d’adaptations prothétiques des dents minérales
ainsi que des techniques de réalisations de plaques dentaires métalliques.
Ces bases sont des supports pour les nouvelles dents céramique, avec
d’importantes améliorations esthétiques par l’utilisation de nouveaux
colorants oxydes métalliques et par l’apposition d’une couche de silice
translucide pour glasage. Cette remarquable présentation faisant progresser
significativement la prothèse dentaire, Fonzi remporte un important succès
déchainant une fois de plus certains dentistes parisiens dont Dubois Foucou
qui lui lance un véritable défi en 1808. Fonzi lui répond par une lettre
ouverte publique très documentée et se permet même de proposer de fournir à
tous ses confrères, y compris Dubois Foucou, les nouvelles dents céramique
dont ils auraient besoin !
Nous sommes en 1808, c’est la première proposition de vente de dents
céramique auprès de dentistes et les vrais débuts vers une production
industrielle de dents prothétiques.
Fonzi retournera en Italie, puis dans toute l’Europe et de nouveau à
Paris en 1826 pour présenter son neveu comme successeur, de retour à
Barcelone en 1836 il y décèdera en 1840. Un véritable européen avant
l’heure.
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Giuseppangelo Fonzi
(1768-1840).
Collect. italienne. |
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Cents originales par Fonzi. Col Manassero. ca.1810. |
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Dents céramique dites à tube, originales par Fonzi.ca
1810.
Col Burello. |
On va retrouver Dubois Foucou en 1812 qui, de manière anonyme, organise
un concours par l’intermédiaire du « Journal général de médecine, de
chirurgie et de pharmacie » visant à répondre à cinq questions « à propos de
la porcelaine considérée comme adaptée à la fabrication des dents
artificielles ». En Janvier 1814 le journal publie le résultat du concours :
seulement deux communications ont été adressées au jury. La première par
Maggiolo de Nancy, très intéressé par le sujet et qui remporte la prime. La
seconde par Vittorio Cornelio (1755-1830), praticien turinois passionné
depuis 35 ans par la céramique, donc lui aussi un précurseur. (Pour plus
d’information sur Fonzi, Cornelio et Dubois Chémant consulter notre
présentation au sein de la SFHAD) Signalons trois
autres dentistes parisiens qui eurent beaucoup d’influence pour les
nouvelles dents céramique à cette époque : Joseph Audibran , Christophe
François Delabarre et surtout F.Maury . Ce dernier dans son traité de
« l’Art du dentiste » de 1833 décrit très précisément sur huit pages les
techniques de fabrication des dents imputrescibles.
PRODUCTIONS DE DENTS MINÉRALES ET ÉTABLISSEMENTS DE FOURNITURES DENTAIRES
Nous allons voir que la production et la commercialisation des dents
céramique a joué un rôle déterminant pour la création et le développement de
certains établissements de fournitures pour dentistes. Tous ces
établissements commencèrent leurs activités en ce début du 19ème
accompagnant et participant au développement et progrès de la chirurgie
dentaire.
Pour Claudius ASH & sons à LONDRES
En 1814 Ash est répertorié « Silversmith and Jeweller, 64 St James street
» à Londres, donc comme orfèvre et bijoutier. La tradition veut que ses
connaissances d’orfèvre, performant en adaptations de pièces en or, aient
amené ce bijoutier à réaliser des prothèses dentaires sur demande (notamment
des plaques estampées or avec soudures de rétentions). 1820 serait la date
officielle de la fondation de la maison Claudius Ash & sons. En 1835
Claudius Ash & sons se trouve installée au 9 Broad street, Golden square à
Londres et
en 1840, comme en 1844 à cette même adresse, Claudius Ash & sons est
répertoriée « manufacturers of mineral teeth. Il faudra attendre 1859
pour que Claudius Ash & sons, au 6, 7, 8, 9 Broad street, soit enregistrée «
manufacturers of mineral teeth and dental materials ». Puis avec une
extension rapide et importante au Royaume-Uni comme à l’étranger ce sera en
1865 la sortie du premier catalogue illustré de la firme.
C’est vers 1837 que Claudius Ash organisa sa première fabrication
industrielle de dents céramique. Dubois de Chémant a-t-il eu des contacts
avec Ash ? C’est assez probable car le monde dentaire était relativement
étroit à Londres à cette époque où il exerça plusieurs années.
Donc à l’origine, 1840 1844, cette prestigieuse Maison est bien
répertoriée « Manufacturers of mineral teeth ». Dans les premières pages
d’un remarquable catalogue de 1853, rareté disponible
sur ce site, nous constatons que
déjà dans ce premier catalogue les « Mineral teeth » occupent quasiment
toute la page 11 avec, remarquons, toujours en page 15 la possibilité de se
fournir en dents animales : Sea horse teeth, sea cow teeth, whales teeth !
C’est donc avec une certaine émotion que nous pouvons feuilleter ce
remarquable catalogue de 1853 illustrant les débuts prometteurs de la maison
Claudius Ash & sons qui jouera un rôle déterminant pendant plus de cent
cinquante ans pour la promotion de la profession dentaire dans toute
l’Europe.
Dans leur premier catalogue illustré de 1865 on trouve un
descriptif de pas moins de six pages sur des dents porcelaine dont « ils
sont marchands et fabricants » avec aussi un choix de dents d’importation
américaines.
Pour Louis Alexandre BILLARD à PARIS
C’est le Dr Louis Alexandre Billard (1808-1884), médecin dentiste, qui
fonda à Paris en 1834 la première fabrique de matériels et dépôt dentaire.
Il y vendait aussi des dents porcelaine et de l’instrumentation. Dès 1831,
très intéressé par les dents minérales, il édita un opuscule :« Des dents
minérales, ou considérations générales sur les différentes substances
employées à confectionner les pièces dentaires artificielles ». Sans aucun
doute cette production de dents a participé au dynamisme de cette maison. On
retrouve d’ailleurs encore des dents avec le marquage spécifique de la
maison. Son fils E.Billard et son neveu A.Heymen Billard donnèrent un essor
tout particulier à cet établissement jusqu’au XXème siècle. Cette maison
était suffisamment importante et dynamique pour revendre et importer du
matériel d’autres fournisseurs, mais aussi pour produire à partir des années
1870 une fabrication Billard tant en petite instrumentation, qu’en gros
matériel comme les fauteuils et meubles.
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1842 : 18 rue de l’ancienne comédie. à Paris
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1854 : 8 rue cassette
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1870 : 29 rue Coquillère (Dr Billard et fils)
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1895 : 4 Passage Choiseul (A.Heymen-Billard) son neveu
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1896-1919 : Louis LEMAIRE, successeur de Mme Vve Heymen
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1919-1963 : André LEMAIRE
Dans le catalogue de la maison de 1895 le choix des dents de la marque ƎB
Billard et des dents d’importations américaines, anglaises ou même
naturelles ! est considérable.
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Dents
porcelaine certainement
par Billard , rue Coquillère
en 1870. |
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Fabrication française de dents minérales : fractionnement
du feldspath, préparation des moules,
pression et cuisson
des dents, encartonnage des plaquettes,
contrôles de la
production. |
Pour Samuel Stockton White à Philadelphie
C’est en 1817 que furent vraiment introduites les premières dents en
porcelaine céramique en Amérique, de provenance française, par le Dr
A.Plantou de Paris et qui fut sans doute aussi le premier initiateur d’une
nouvelle production locale de dents artificielles en divulguant les travaux
de Dubois de Chémant. Un autre français Lebreton, autre connaissance de
Dubois de Chémant, aurait produit aussi quelques dents dans les années
1794-1798. Il n’est pas impossible que John Greenwood en provenance de
Londres en 1807 ait aussi importé quelques dents minérales. Vers 1822
Charles W.Peale s’essaya à sortir des dents céramique ainsi qu’Henry Villers
de Boston trois ans plus tard. Mais c’est incontestablement Samuel
W.Stockton qui dès 1825 à Philadelphie fut le premier à s’imposer par sa
production de dents en porcelaine céramique.
Comme en Europe, les praticiens ont vite compris l’intérêt de ces
nouvelles dents prothétiques et le sujet était très porteur en innovation,
en devenir et donc en volume d’argent à faire. Historiquement il est
classique de noter et citer les praticiens américains qui se sont illustrés
dans cette promotion des dents minérales : Joseph E.McIllhenny (1826),
D.C.Ambler, J.R.Spooner (1828), J.F.Flagg (1830), Shearjashub Spooner (
1831),Daniel Hardwood, Joshua Tucker (1833), James Alcock, John Allen (1835)
et Elias Wildman(1837).
Intéressons-nous plus particulièrement à Samuel Stockton White né en 1822
en Pennsylvanie. Il entre à 16 ans comme apprenti pour cinq ans chez son
oncle S.W.Stockton ce fameux fabricant de dents artificielles à Philadelphie
depuis 1825. En même temps il suit des stages chez un dentiste le Dr J.De
Haven White. En 1843-1844 il s’installe comme dentiste, avec son frère
James, tout en continuant à assurer un service en la fabrique de dents
minérales. Au début Samuel sculpte lui-même les modèles de dents à cuire,
mais devant le succès de la production il se décide, en 1846, à arrêter son
exercice dentaire pour se consacrer uniquement à la fabrication des dents
céramique et des produits dentaires.
Il s’associe avec Asahel Jones de New York et John McCurdy de
Philadelphie pour fonder la société « Jones, White and McCurdy ».
Naturellement on ne se limite plus à la production de dents céramique et on
se diversifie aussi dans les fournitures dentaires. Développement
considérable avec des installations importantes sur tout le territoire des
USA : New York, Boston, Brooklyn, Chicago.
Petit aparté avec John Chevalier, coutelier d’origine suisse, qui
s’installe en 1833 à New York fabricant et vendant des fournitures
exclusivement pour les dentistes. Il fait paraitre un catalogue dentaire en
1855, le premier aux USA. Trois rubriques font mention de dents porcelaine
dont il est le représentant et revendeur : Il y mentionne qu’il dispose pour
les dentistes de quinze à trente mille dents en magasin !
Revenons en 1861 avec Samuel qui rachète les parts de ses associés. En
1865 la « Samuel Stockton White Manufacturing Co. » distribue des produits
dans le monde entier, compte deux cents employés avec une production
mensuelle de 400 000 dents !
Sous l’impulsion de Samuel la société va encore se développer. Lors de
son décès en 1879 il sera gravé sur sa tombe : « Gravesite of Samuel
Stockton White (1822-1879) dental manufacturer of indestructible porcelain
teeth, his S.S.White manufacturing company fonded 1844 was the largest
dental supply company in the world. » On retrouve incontestablement dans
cette épitaphe l’importance de la fabrication des dents en porcelaine
céramique.
Avec son frère et son fils la société continue à s’agrandir et en 1881
elle rachète 60% des parts de la Johnston Brothers de New York, spécialisée
dans les fauteuils dentaires et le gaz NO² liquéfié destiné aux anesthésies.
La fusion des deux sociétés crée la « Samuel Stockton White Manufacturing
Company » bien connue sous la dénomination internationale : « SSWhite » avec
le logo SSW insculpé sur son instrumentation. La SSW continue sa
progression, en 1911 son capital est de 5 millions de dollars et elle
emploie 1700 personnes sur l’ensemble des sites de Staten Island, Frankford
et Philadelphie avec des succursales dans toutes les capitales mondiales.
La crise de 1929 entraine des problèmes de production des dents céramique
avec des crampons en platine, métal devenu trop cher, de plus de nouvelles
lignes esthétiques voient le jour et la demande chute avec une concurrence
importante. SSW ferme sa division de dents artificielles céramique en 1937
laissant le terrain à des sous-traitants. On abandonne les origines de la
société. « Business is business ! ».
En 1905 avait été créée une « industrial division » spécialisée dans les
câbles gainés flexibles de transmission, qui étaient à l’origine du succès
des tours dentaires à pédale. Cette division sera très active pendant la
deuxième guerre mondiale. La SSWhite dans les années après-guerre
développe d’excellents concepts devenant incontestablement la plus
grande société mondiale dentaire. Elle est le plus important employeur
de Staten Island.
Puis différentes circonstances feront en sorte qu’en 1968 la SSW
abandonnera définitivement le domaine dentaire pour se consacrer à son
industrial division qui deviendra en 1988 la « S.S.WhiteTechnologies. Inc. »
société toujours en activité.
Ces trois évocations historiques nous rappellent l’importance du
département des dents céramique dans la création et le brillant devenir de
ces trois sociétés internationales.
Acquisition par l’ASPAD d’une collection de dents minérales
Après cette approche historique de cette époque bien connue des
historiens nous nous apercevons qu’en réalité dans les collections il existe
assez peu de matériel, et notamment de dents minérales, à notre disposition
pour cette période 1780-1914
Nous avons eu la chance de pouvoir repérer et récupérer toute une
collection de plus de deux cents dents minérales unitaires datables de la
première moitié du XIXe siècle permettant d’apprécier la grande variété de
production des dents céramique : nombreux modèles de dents unitaires,
prothèses complètes entièrement en céramique d’une seule pièce montées avec
leur antagoniste en articulation, prothèses partielles et plaques estampées
avec montage de dents unitaires. Seuls quelques marquages permettent d’en
attribuer avec certitude à la maison Billard de Paris. Cet ensemble
remarquable fut présenté lors d’une exposition temporaire « Frammenti di
storia » organisée par le Pr Fernando Gombos au musée Correale de Sorrente
en 2012 et toujours visible sur expo92.htm. Un collectionneur turinois y présentait aussi un ensemble de
dents minérales venant avec certitude, par l’intermédiaire du Dot. Vincenzo
Guerini, des séries originales de Fonzi.
On peut essayer de distinguer cinq périodes pour la production des dents
céramique prothétiques :
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1780-1820 : Les touts débuts, les expérimentations. Les pionniers.
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1820-1850 : Les premières préséries.
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1850-1900 : Dents minérales industrielles petites séries. La
vulcanite.
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1900-1940 : Dents minérales industrielles : rush prothétique.
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1950-2000 : Nouvelles céramiques dentaires et haute qualité
Il est difficile, même avec une certaine expérience, de classer des dents
dépareillées dans ces cinq périodes. Le Dr James Leon Williams, d’origine
américaine et installé à Londres, fait paraitre en 1911 une étude qui
révolutionne la fabrication des dents artificielles. Il a en effet découvert
que les quatre premières incisives haut et bas des populations de toutes les
races se répartissent en trois grands types de formes et que la
configuration des dents s’harmonise avec le type facial d’une population
donnée. Les types de formes des dents artificielles seront désormais
standardisées dans le monde entier suivant les critères de Williams.
Pour prouver l’importance de plus en plus grande des dents prothétiques
pour le commerce dentaire examinons quelques chiffres vertigineux. La
production mondiale de dents céramique en 1914 fut de 121 millions de
dents : 80 millions aux USA, 20 millions en GB, 18 millions en Allemagne. En
1922 elle atteint 700 millions de dents ! La Dentsply Co. USA sortira pour
l’année 1954 : 92 799 000 dents. En 1959 elle produira 250 000 à 400 000
dents par jour !
En 1865 c’était la production mensuelle de SSWhite.
Mais la céramique dentaire, malgré son importance, n’est pas limitée aux
plaquettes de dents artificielles. De nombreuses innovations vont permettre
des restaurations fixes complétement en céramique ouvrant la voie à toute
une spécialité qui fera de la céramique dentaire le procédé de choix pour
encore de très nombreuses années. Evoquons simplement quelques débuts de
travaux de pionniers.
Le dentiste Murphy de Londres publie en 1837 une brochure signalant qu’il
exécute depuis deux ans, donc dès 1835, des obturations invisibles sur dents
antérieures, les premiers inlays céramiques, en réalisant des cuissons de
pâte basse fusion dans des moules en feuilles de platine.
-
En 1889 C.H. Land dépose un brevet pour : « All porcelain Jackett
crown ».
-
En 1898, promotion d’une technique fiable de réalisations d’inlays
porcelaine par céramique basse fusion par N.S. Jenkins.
-
En 1901 C.H. Land propose une haute fusion porcelaine pour Inlay et
Jackett crown.
-
En 1903 Spadling de Detroit réclame la paternité pour sa Jackett
crown porcelain.
- En 1908, 1920, 1928 productions de nouveaux fours électriques
destinés à l’élaboration de la céramique fixe.
Four à céramique de Plaschick, commercialisé par Ash&sons
C1890. Un des premiers fours à t° vraiment contrôlable. |
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Four à céramique dentaire par SSWhite. Four à pyromètre
de grande précision ca1920. D’une grande fiabilité a figuré, avec adaptations
techniques, sur catalogue de 1914 à 1950. |
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Coffret à céramique dentaire :
The Amagalmated dental
co. lmtd
et Ash & sons United Kingdom 1940. |
PRÉSENTATION D’UNE BOITE RÉSERVE DE DENTS PORCELAINE CÉRAMIQUE
PRÉSENTATION D’UNE SÉRIE DE TEINTIERS DENTAIRES
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Teintier céramique et vulcanite Cl. ASH,
Caplain
StAndré. Paris ca1900. |
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Teintier céramique
SSWhite 1910. |
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Teintier pour céramique de montage Justi, USA 1930. |
Teintier céramique Verodens. Ca.1900 |
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Teintiers dents acryliques, après 1950. |
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Teintier Vulcanite dentaire Alston brand dental rubers
par ADCL UK vers 1900. |
CONCLUSION
Ces cent cinquante premières années de dents en céramique ont offert un
remarquable tremplin pour l’Aventure des dents minérales qui continue avec
toutes les nouvelles céramiques dentaires modernes. Matériau exceptionnel
par ses qualités et possibilités techniques, matériau toujours d’avenir avec
déjà un certain passé, la Céramique n’a pas fini de nous étonner et surtout
de nous rendre le sourire.
DOCUMENTATION PHOTOGRAPHIQUE DE
L’ASPAD
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