Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
4e de 6 parties

Note [18]

« me voici qui viens avec les intestins relâchés », {a} passage difficile de Plaute, Curculio [Le Charançon], acte ii, scène 3, vers 322‑324 :

Perii ; prospicio parum,
os amarum habeo, denteis plenis, lippiunt fauces fame,
ita cibi vacuitate venio laxis lactibus
.

[Je suis mort, ma vue faiblit, j’ai la bouche amère, les dents collantes, la faim rend mon gosier chassieux, {b} tant sont relâchés mes boyaux vides de nourriture]. {c}


  1. V. note [5‑1], première Responsio de Jean ii Riolan, 3e partie, pour la référence à ce vers dans son Anthropographie de 1626.

  2. Dans la sémiologie poétique de Plaute, denteis plenis a laissé Denis Lambin perplexe, page 286 : {i}

    Quid sit habere denteis plenos, aut quid significent dentes pleni, quæro. An denteis plenos dicit, pituitæ plenos ? an saliuæ ? an pulueris ? an bilis effusæ, quæ in os redundarit ? an in voce plenos subest aliquid mendi, et legendum est lippos ? vt sit translatio à morbo oculorum, ad morbum dentium : dentes autem ei ægrotare intelligamus, qui esurit et qui longa inedia cruciatus est ; sic deinceps dixit fauceis lippire fame.

    [Je me demande ce que c’est qu’avoir denteis plenos, ou ce que signifie dentes plenos : est-ce à dire qu’elles sont pleines de pituite, de salive, de poussière, de bile remontée dans la bouche ? Doit-on corriger le mot plenos et le remplacer par lippos, {ii} pour faire la transition entre l’atteinte des yeux et celle des dents ? Nous comprendrions ainsi que celui qui est torturé par la faim d’un long jeune souffre aussi des dents, répétant ensuite que la faim rend le gosier chassieux]. {iii}

    1. Paris, 1576, v. notule {a}, note Patin 13/407.

    2. Chassieux : pleins de chassie, « humidité visqueuse qui sort des yeux et qui colle les paupières » (Furetière).

    3. Denis Lambin était un très savant philologue, mais n’était pas médecin, ce qui excuse la bizarrerie de son commentaire.
  3. Nicolas Gueudeville a commenté ce passage dans sa traduction annotée des Comédies de Plaute, {i} tome troisième, page 60 :

    « Lactibus vient de lactes, et lactes de lacio, terme mort de vieillesse, {ii} et qui de son vivant signifiait attirer. Il est certain que lactes signifie “ les intestins ” ; mais savoir lesquels, c’est sur quoi le Doctorat Hippocratique {iii} n’est pas d’accord. La plus commune opinion est que lactes désigne les menus boyaux où se porte le chyle. Ce terme veut dire aussi ce qu’on appelle ris de veau, et la laite {iv} des poissons par où les mâles sont distingués des femelles, celles-ci ayant des œufs. Quant au sens de Curculion ? il prétend marquer ici que son pauvre ventre, pris sans exception, est vide et pendant. » {v}

    1. Leyde, Pierre vander Aa, 1719, in‑12, avec ce commentaire, aussi peu convaincant que celui de Lambin, sur dentes plenos :

      « les dents pleines, c’est-à-dire, sordidos et impeditos carie, et rubigine, “ sales, et gâtées de pourriture et de rouille ” ; en cela faisant allusion au fer qui, à moins qu’on ne le frotte souvent, se rouille et se salit.” »

    2. Lacire est un verbe latin oublié, mais défini dans le Gaffiot : « attirer, faire tomber dans un piège ».

    3. La Faculté de médecine.

    4. Laitance.

    5. Gueudeville n’établit pas de lien étymologique entre lactes, « intestins grêles », et lacteus, « laiteux » ; bien que troublant, il est fort incertain, même si l’évocation des aruspices par Riolan ne manque pas de quelque pertinence (v. note [5], Experimenta nova anatomica, chapitre ii).


Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
4e de 6 parties, note 18.

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(Consulté le 08/12/2025)

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