Annexe : Sylloge d’Alcide Musnier (1654)
sur les veines du chyle et de la lymphe, note 30.
Note [30]

Dans son Discorso anatomico sur la graisse (Venise, 1644), Cecilio Folli établissait une nette distinction entre le sang et le lait ; {a} j’y ai relevé deux passages qui aident à interpréter ce qu’il écrivait ici à Alcide Musnier.

  • Pages D2 vo‑[D3] ro, Folli commente Hippocrate disant que « lorsqu’on tue une victime, le sang, tant qu’il est chaud, et fluide, et il se coagule quand il se refroidit ; si on l’agite, il ne se coagule pas car les fibres sont froides et glutineuses » : {b}

    Queste sono communi à tutti i misti, e à nostro proposito à tutti gli humori del corpo, e dalla diversità loro succede parimente la diversità delle parti colorite dall’humore, che le guida, non ch’esse siano tali, essendo blanche.

    Il latte contiene anch’egli in se le fibre, e di lui, per esser materia della pinguenide, solamente ragionerò, perche dalla di lui succede la cognitione de gli altri, nella forma, che di loro ragiona Hippocrate nel primo de Dieta, dove minutissimamente raconta il modo della compositione di tutte le parti, come partecipi di questi humori, cioè delle fibre, communicandosi l’alimento dal di dentro alla circonferrenza, e all’opposto, come accennò nel libro de Alimento dicendo.

    [Ces fibres sont communes à tous les mélanges et, selon notre hypothèse, à toutes les humeurs du corps ; leur diversité résulte aussi de celle des parties colorées par l’humeur qui les dirige, qu’elles soient ou non blanches.

    Le lait contient aussi des fibres, en lui-même et de lui-même ; comme il est la matière de la graisse, je ne parlerai que de lui, car en découle la connaissance du reste, sous la forme, dont parle Hippocrate dans le premier livre du Régime, où il explique très minutieusement le mode de composition de toutes les parties, comme participant à ces humeurs, c’est-à-dire des fibres, la nourriture étant communiquée de l'intérieur à la circonférence ; {c} mais il a laissé entendre le contraire dans le livre de l’aliment]. {d}

  • Page [D4] ro, contre ceux qui, après Hippocrate, croyaient que le chyle engendre le sang et que le lait dérive du sang, Folli écrit :

    E per dirne il vero, io difficilmente posso accomodarmi à credere, che ciò ch’è bianco à principio, et deve in fine esser tale, s’habbia à far rosso, per di nuovo ritornar à farsi bianco, dovendosi le parti bianche nutrir del suo simile. E adunque il latte nel Corpo, e si cava dai cibi, e sopra tal fondamento fermo, e sicuro si può sodamente, e veridicamente fabricare la cognitione della pinguedine, osservando pontualissimamente ciò che l’arte perpetua, e indefessa emulatrice della Natura cava dal latte ordinario, ch’esce dalle Mamelle.

    [Et à vrai dire, je peux difficilement me résigner à croire que ce qui est blanc au début, et doit l’être à la fin, virerait au rouge pour redevenir blanc, car les parties blanches doivent se nourrir de ce qui leur est semblable. Le lait qui est dans le corps provient donc des aliments ; et sur une base aussi ferme et sûre, on peut solidement et sûrement établir la connaissance de la graisse, en observant ponctuellement que le corps, en perpétuel et infatigable émule de la Nature, la tire du lait ordinaire, qui sort des mamelles]. {e}


    1. V. note [33], lettre de Thomas Bartholin à Johann Daniel Horst.

    2. Livre ses Chairs, & 8, sur la formation du foie, Littré Hip, volume 8, page 595.

    3. Probable référence au & 10 du livre cité (Littré Hip, volume 6, pages 485‑487) :

      « En un mot, le feu disposa tout dans le corps suivant le mode conforme à lui-même, copie de l’ensemble : le petit envers le grand, le grand envers le petit ; le ventre, très ample réservoir pour le sec et l’humide, donnant à tous et recevant de tous, ayant la vertu de la mer, nourrice des êtres ses nourrissons, mortelle à ce qui est étranger ; à l’entour, une concrétion d’une eau froide et humide ; la voie de l’air froid et chaud ; la copie de la terre changeant tout ce qui y tombe. Consumant et augmentant, il fit une dispersion d’eau ténue et de feu aérien, visible et invisible, séparation du feu concrété, où toute chose portée arrive à manifestation suivant la portion destinée. Là il a créé trois circulations du feu arrivant à l’une et à l’autre en dedans et en dehors : les unes vers les cavités des humeurs, représentent la propriété de la Lune ; les autres vers la surface extérieure, vers la concrétion ambiante, représentent la propriété des astres ; les dernières sont intermédiaires, allant en dedans et en dehors. »

    4. Suit, traduite en latin, une citation des § 21‑24 (Littré Hip, volume 9, page 105) :

      « 21. La nourriture < devient > non-nourriture si elle ne peut pas nourrir ; la non-nourriture < devient > nourriture si elle peut nourrir : nourriture de mot, et non de fait, nourriture de fait, et non de mot. {i}

      22. La nourriture va de dedans aux cheveux, aux ongles, et jusqu’à l’extrême superficie : la nourriture va de dehors et de l’extrême superficie jusqu’aux parties les plus intimes. {ii}

      23. Confluence unique, conspiration unique, tout en sympathie ; toutes les parties en l’ensemble, toutes les parties de chaque partie en particulier, pour la fonction. {iii}

      24. De la grande origine, acheminement à la dernière partie ; de la dernière partie, acheminement à la grande origine ; une seule nature, être et n’être pas. » {iv}

      1. « Il y a telle circonstance où ce qui est aliment ne nourrit pas, et telle autre où ce qui n’est pas aliment en tient lieu et restaure » (interprétation d’Émile Littré).

      2. « La nourriture va du dedans à la superficie et de la superficie au dedans » (interprétation de Littré).

      3. V. note [6], Historia anatomica, chapitre ii.

      4. « Ce qui est vrai du corps vivant l’est aussi de l’ensemble des choses. C’est une même nature que celle des êtres qui vivent et des substances qui ne vivent pas » (interprétation de Littré).
    5. Les acrobaties de Folli sur de fumeux oracles hippocratiques restent difficiles, voire impossibles à suivre ; il n’en a pourtant pas moins pressenti le rapport qui existe entre le chyle, le lait et la graisse.

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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Annexe : Sylloge d’Alcide Musnier (1654)
sur les veines du chyle et de la lymphe, note 30.

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(Consulté le 10/12/2025)

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