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M. Thomas Bartholin, à présent recteur de l’Université de Copenhague, salue son vénérable ami M. Johann Daniel Horst, naguère professeur de médecine à Marbourg, désormais très méritant archiatre de Darmstadt. [1][1][2]
De longues années se sont écoulées depuis que nous sommes devenus amis, [2] et c’est avec extrême gratitude et grande joie que vous venez de reprendre cordialement la plume, réparant les préjudices de notre silence mutuel. Sa durée ne m’a pas empêché de vous aimer toujours, mon cher Horst, vous dont le renom vante la droiture et fait connaître les écrits ; et j’admire en vos propos cette érudition que vous avez héritée de votre éminent père, [3] mais que vous avez immensément augmentée. [3] Je ne puis exprimer à quel point votre lettre a ranimé en moi l’affection que j’ai naguère éprouvée pour vous, d’autant qu’elle présente un équitable jugement sur nos vaisseaux lymphatiques [4] et sur les lactifères thoraciques, [5] pomme de Discorde, [4][6] à qui les sentiments de diverses gens [Page 171 | LAT | IMG] réservent un sort inégal. Avant de m’offrir votre plein assentiment, vous agitez pourtant de très savants doutes, que je pèserai soigneusement, avec la même franchise que j’ai trouvée dans votre claire exposition. Vous doutez des lactifères thoraciques dans la mesure où ils sont absents dans l’utérus pour assurer la nutrition du fœtus, peinant à croire qu’il puisse y puiser ses aliments par la bouche. Comme vous, j’en ai personnellement douté car, lors de la grossesse et de l’accouchement, nous n’avons pas encore pu voir distinctement nos lactifères s’insérer dans la matrice. Maints indices, que j’ai publiés, m’en persuadent pourtant, en attendant qu’un heureux génie mette un jour ces voies en évidence, sans nullement douter que l’honneur de cette bonne fortune incombe à un autre que moi. Nous nous fions à Hippocrate quand il dit que, « dans l’utérus, l’embryon suce l’aliment par la bouche », et de probantes démonstrations en ont été fournies par Harvey, dans son Essai lvii sur la Reproduction des animaux, [7] et par moi-même, au chapitre x sur les Lactifères thoraciques. [5][8][9][10] Chez les chiennes gravides, j’ai sûrement plus d’une fois vu des chiots tapis dans l’utérus, qui avaient la bouche ouverte et la langue sortie, avec le même liquide qui stagnait dans leur estomac et que nous tenons pour du chyle cru répandu dans l’amnios ; et il n’y a pas bien longtemps, j’en ai pareillement trouvé dans l’estomac d’un nouveau-né. À n’en pas douter, l’observation atteste que du chyle lacté afflue dans l’utérus et s’en écoule. [11] Vous suspecterez que le mouvement de ce lait vers la cavité utérine est contraire à la nature, [6] mais Hippocrate l’a tenu pour perpétuel dans son livre sur la Nature de l’enfant, [5] car il est habituel à la nature de faire pénétrer dans les matrices une petite portion de graisse adoucie, comme elle fait pour les mamelles : « Ces veines et d’autres analogues se rendent en effet dans les matrices ; puis quand il est parvenu à l’utérus, il a l’apparence du lait et l’enfant en tire quelque profit. » [7][12] Il juge que ces voies sont partagées, mais estime que la matière laiteuse est toujours détournée vers l’utérus pour nourrir l’enfant. Selon la règle ordinaire de l’état gravide, [Page 172 | LAT | IMG] le fœtus nage dans le liquide utérin, qui est une sorte de lait cru : Harvey le défend en maints endroits et donne le nom de colliquamentum à ce qui nourrit le fœtus, contrairement à Aquapendente, qui maintient, dans son Livre sur la Formation du fœtus, qu’il est utile à la lubrification des voies. [8][13] Le chyle lacté se rend donc perpétuellement vers l’utérus, et j’y ajoute qu’il en sort aussi très souvent. La raison en est qu’un embryon sain a besoin d’assurer lui-même sa sauvegarde et son alimentation, mais un utérus clos ferait obstacle à sa sortie, et s’il n’était ouvert et ne permettait pas au liquide de s’écouler goutte à goutte, l’enfant s’en trouverait fort affaibli, ce qui, je pense, s’est produit dans les exemples présentés par Du Laurens, Zacutus, H. ab Heer et d’autres. [9][14][15][16] Les sages-femmes ont d’ailleurs remarqué l’écoulement continu de liquide laiteux qui, chez les parturientes, survient au moment de l’accouchement et avec les lochies. [17] J’ai pensé que ce flux ne pouvait emprunter de voies plus commodes que les lactifères mésentériques [18] voisins de l’utérus pour s’y rendre et en sortir, bien que je n’aie pas encore accompli mon vœu de voir leurs insertions. Les veines utérines mériteront d’être aisément innocentées ; mais si vous l’attribuez aux artères, vous devez admettre soit qu’elles contiennent du chyle ou du lait, comme beaucoup l’ont déjà suspecté, pour des raisons exposées ailleurs, soit que le sang se transforme en lait dans l’utérus, ce qu’on peut difficilement affirmer sans grand préjudice pour les mamelles. [10][19]
La modification des excréments vous mène ensuite à conjecturer que le fœtus ne se nourrit pas de la même façon dans l’utérus et hors de lui, puisque les matières fécales sont différentes chez les nouveau-nés et chez les enfants qui ont tété du lait, ne serait-ce qu’une seule fois ; mais en fait, très savant Horst, cette différence existe à peine. Comme vous savez, quand elle est administrée aux nouveau-nés, l’huile d’amandes douces leur fait expulser le méconium [20][21] et dilue cet excrément épais et brûlé par un long séjour dans les intestins, qui lui donne une apparence distincte. Quand existe une différence, [Page 173 | LAT | IMG] elle doit être attribuée au changement d’air, aux vagissements, [22] aux mouvements, à la respiration plus énergique et à d’autres accidents qu’un enfant affronte une fois né. Les excréments doivent en vérité être semblables puisque l’alimentation n’a pas changé ; et ils le resteront aussi longtemps qu’il ne se nourrira que de lait, avant de consommer d’autres mets. [11] Il est certain que, durant sa vie utérine, le fœtus aspire des résidus par la bouche, comme Hippocrate l’a prédit dans son Livre des Chairs, en prononçant cette sentence : « Ayant les lèvres serrées, il tète à la fois l’aliment et l’air dans l’utérus de sa mère » ; ce qu’il prouve en disant que « quand ils viennent au jour, les intestins des enfants s’avèrent contenir de la matière fécale, dont les hommes comme les bêtes se déchargent le ventre dès qu’ils sont nés. Ils n’en auraient pas s’ils n’avaient pas tété dans l’utérus ; et ils ne sauraient pas téter les mamelles en voyant le jour s’ils ne l’avaient fait dans l’utérus ». [12][23] De fait, la couleur du chyle ou du lait est variable, et la diversité des parties leur fait rendre des excréments divers. Selon Hippocrate, le fœtus ne se nourrit pas seulement de lait dans l’utérus, mais aussi du sang qu’il puise dans le cordon ombilical : [24] aussi dit-il, au livre iv des Maladies, [25] que l’excrément des embryons dérive du lait et du sang qui concourent à leur alimentation. Chez les adultes aussi, le sang se démet de ses excréments par les artères mésentériques [26] et ils s’évacuent dans les déjections alvines ; bien que l’homme soit incommodé par le jeûne, il a surtout tiré ces ordures du chyle, dont il se purge entièrement par maintes circulations, mais qu’il a aussi en partie amassées du fait de sa propre imperfection. [13]
Vous me talonnez en disant que si le fœtus tète du lait dans l’utérus de sa mère, il tétera en même temps les autres humeurs qui l’environnent. Nous ne pouvons douter que tel soit le cas puisque les humeurs excrémentielles abondent ordinairement chez les nouveau-nés : on en trouve beaucoup dans la gorge des chiots, des veaux, etc., et elles sont étrangères au [Page 174 | LAT | IMG] liquide amniotique, comme sont l’herbe et d’autres détritus. Plus ce liquide sera pur et clarifié, moins l’embryon qui y nage percevra d’incommodité à le boire, et s’il s’agit de lait, comme dit Harvey, [14][27] quel danger aura-t-il à le faire ? Si y sont mêlées d’autres humeurs inutiles à la nutrition, la nature agira avec discernement et le fœtus, résolu à préserver ses forces, n’y puisera que ce dont il a besoin. Ainsi les poissons dans les marais, comme guidés par la raison, ingurgitent-ils ce qui leur est utile et dont ils manquent. La nature a appris à tous les animaux à choisir, de manière à fuir les poisons qui sont dans les prairies. Dans l’utérus, l’embryon vit d’abord à la manière d’une plante puis, bientôt après, à la manière d’un animal, et sans être doué de raison, il choisit les aliments qui lui conviennent. La croissance de l’homme imite celle des arbres : selon leurs besoins, leurs racines puisent leur sève dans la terre, qui abonde en éléments variés ; les aliments qu’y captent le platane et le cerisier sont différents et adaptés à la condition de chacun, bien que la composition du sol soit uniforme ; la nature les guide dans leur choix, mais c’est la raison qui détermine les nôtres quand nous sommes adultes.
Voilà ce qui m’est venu à l’esprit pour défendre Hippocrate, en supposant que les nouveaux lactifères jettent beaucoup de lumière sur ce qu’il a dit, et en attendant que d’autres m’aient procuré de meilleures idées.
Votre savante plume en vient ensuite aux lactifères thoraciques, à qui, comme le très brillant Pecquet, [28][29] j’ai assigné la charge de véhiculer tout le chyle en direction du cœur, au détriment du foie ; [30] mais vous élevez des objections spécieuses qu’il m’est facile de lever. Quant aux vaisseaux lactés, dont j’étais convenu, après Aselli [31] et d’autres, qu’ils gagnent le foie, j’ai depuis découvert, après les avoir réexaminés plus soigneusement, qu’ils ne sont pas lactés, mais qu’il s’agit de vaisseaux naturellement transparents qui tirent du foie un liquide clair pour le mener dans le réceptacle du chyle, [32] et les ai appelés lymphatiques. En m’aidant du regard le plus perçant et du scalpel, je n’ai pu observer aucun vaisseau de couleur laiteuse dans le foie ni dans son voisinage, quoique j’aie jadis estimé par erreur que les vaisseaux lymphatiques [Page 175 | LAT | IMG] étaient lactés, ni aucun mouvement de liquide laiteux vers le foie, et la nécessité m’a contraint d’en porter la mauvaise nouvelle à cet organe. [15][33][34] Certains anatomistes, soit en haine de moi, soit par complaisance envers le foie, dont les fonctions se dissipaient contre leur gré, feraient voir à leurs auditeurs qu’il y existe deux rameaux blancs, mais je jurerai par la pierre de Jupiter [16][35][36] que ce sont des nerfs et non des vaisseaux lactés, comme la dissection assidue le leur démontrera. Sous prétexte que, par déférence pour le foie, il m’a jadis semblé les voir, avant ma soigneuse observation des lymphatiques, je voudrais que la nature et moi cessions d’être accusés de crime par les candides arbitres des faits, au nombre desquels j’ai l’honneur de vous compter. Vous me faites aussi remarquer qu’il n’y pas la proportion requise entre nos lactifères thoraciques et ceux d’Aselli, dans le mésentère. Je me souviens en être pareillement convenu jadis dans ma Description des lactifères thoraciques, pour ménager le foie, et Riolan m’a poursuivi de ses remarques. [17][37][38] Je l’ai contré comme il faut dans ma Défense, qui chauffe aujourd’hui sous la presse. [1] Le fait est bien que les grêles rameaux lactés mésentériques peuvent être proportionnés à la capacité du canal thoracique, dans la mesure où il est assez gonflé chez les animaux vivants et où son calibre dépasse celui des uretères. Surtout, le chyle s’y meut progressivement, étage après étage : afin qu’il ne s’engouffre pas d’un seul tenant dans le cœur, la cavité intermédiaire qui y est établie fragmente le volume qui doit emprunter ledit canal. Puisqu’il a plu à la nature d’instaurer cette harmonieuse proportion, elle doit aussi nous plaire.
En revenant aux vaisseaux lymphatiques, vous estimez que le liquide aqueux qu’ils contiennent descend du cœur plutôt qu’il n’y monte car, de mon propre aveu, elle dégoutte en partie dans les reins. Par les ligatures et l’insufflation, j’ai vu que le mouvement de la lymphe se dirige vers le cœur, en montant depuis les parties inférieures que sont le foie, les flancs, etc., mais en descendant des membres et des subclavières. [18][39] À proximité des reins, elle s’écoule avec le chyle, comme l’a observé Pecquet, mais elle ne parvient pas aux reins [Page 176 | LAT | IMG] avant d’avoir accompli une circulation entière avec le sang artériel pour s’y déposer et être filtrée. [40] L’utilité de la lymphe reste incertaine car nous n’avons pas encore suffisamment exploré sa nature. D’instinct nous vient d’abord l’idée qu’il s’agit d’eau pure et simple, et la finesse des membranes qui la contiennent la montre transparente ; mais si on l’expose à la flamme, son eau la plus subtile s’évapore et elle se consolide en gelée, de la même manière que le sérum [41] se sépare du sang après une phlébotomie. [42] J’en ai débattu dans les Vasa lymphatica chez l’homme, en déduisant que ces vaisseaux semblent pouvoir contribuer utilement à la nutrition des parties corporelles, laissant à de savantes gens le soin d’explorer cela plus avant. [19] Je vois que le subtil anatomiste Glisson s’est penché sur la question dans le chapitre xlv de son Anatomie du foie, qu’il consacre entièrement à prouver que la lymphe contenue dans mes vaisseaux lymphatiques provient en partie des émanations du sang qui se sont condensées en traversant les parois des artères, et en partie du refoulement de l’humeur nourrissante qui est apportée par les nerfs. [20][43] J’avais néanmoins estimé qu’entre autres usages, la lymphe sert aussi à diluer tant le chyle que le sang, parce que sans ce véhicule leur déplacement s’interromprait. Vous insistez en disant que la matière liquide qu’on absorbe peut suffire à la dilution ; et ce à juste titre bien sûr, car je reconnais que les boissons et l’humidité contenue dans les aliments procurent la substance de cette lymphe, laquelle est indispensable à sa régénération puisque c’est continuellement que celle qui subsiste après avoir accompli sa tâche se dissipe, en partie par la transpiration insensible, et pour une autre partie, s’écarte vers les reins, le péricarde, etc. [21][44] Par son humidité propre, elle favorise la concoction du sang, pour qu’il n’en soit pas privé par la chaleur du cœur [45] et la sécheresse des esprits, ou par sa propre concoction, qui requiert de l’humidité, ou qu’il ne soit exposé à des intempéries chaudes et sèches, comme on l’observe souvent en disséquant des cadavres tabides, [46] dont le cœur est entièrement desséché, et le sang encrassé et brûlé. [22] Étant donné sa froideur, la lymphe ne peut cependant empêcher ladite coction [Page 177 | LAT | IMG] puisqu’aucune partie d’un corps vivant n’est vraiment froide, sauf par comparaison avec celles qui sont plus chaudes. Je dirai même que l’infusion d’eau un peu fraîche dans un foyer fort chaud modère parfois une coction bouillonnante. [23] Albert Kyper, très brillant et savant professeur de Leyde, [47] ratifie et illustre fort bien mes conjectures dans ses récentes Institutions médicales, livre ii, chapitre xix, sur l’utilité du sérum et de la lymphe, où il tire ce commentaire des principes que j’ai établis : [24][48] L’utilité de la lymphe serait de rafraîchir et d’humidifier non seulement les parties à travers lesquelles elle s’écoule, mais aussi et surtout celles où elle conflue, à savoir le réservoir du chyle et le cœur, où elle n’intervient pas de manière univoque. Quand le chyle passe dans le réservoir, elle en dilue le contenu et emporte vers le cœur tout ce qui reste de chyle fort épais ; surtout aussi, elle empêche que des obstructions ne surviennent dans le réservoir et dans les lactifères thoraciques. Ensuite de quoi elle modère la chaleur du cœur et en y coulant, elle corrige sa sécheresse, ce qui rend le sang plus délié et fluide, et par conséquent plus apte à être digéré et distribué. Et récemment aussi, dans son érudite Anatomie du foie, Francis Glisson, anatomiste de Cambridge, convient que nos vaisseaux lymphatiques, qu’il appelle conduits de la lymphe, transportent un liquide qui profite au sang : Il est certain, dit-il, qu’elle empêche la coagulation du sang ; [49] et puisque sa plus grande partie a déjà été précédemment induite à se volatiliser et s’évaporer, il se joint facilement à la lymphe et aux esprits vitaux [50] qui s’associent à elle, et elle favorise ainsi le mouvement rapide du sang. [25] Les afflux d’humidité ne font craindre aucun dommage dans les artères, puisque la lymphe ne s’y attarde et ne s’y accumule pas, mais elle s’en expurge petit à petit en fin de circuit, par les voies que j’ai citées plus haut, aussi longtemps qu’elle y est naturellement poussée ; mais là où elle est retenue par quelque vice contre nature, elle induit une accumulation d’eau sous la peau. [51] Enfin, vous me sollicitez avec insistance sur une question de grande importance touchant aux modifications qu’il convient d’apporter à la méthode thérapeutique, [Page 178 | LAT | IMG] croyez-vous, dans l’hydropisie, [52] la cachexie, l’atrophie, [53] les fièvres, [54] qu’il ne faudrait plus attribuer au foie, mais aux vaisseaux lymphatiques. J’ai répondu à cette objection dans mes Doutes sur les lactifères thoraciques en démontrant que la méthode thérapeutique, approuvée par la longue pratique des médecins, n’est en rien modifiée, mais se trouve éclairée. [26][55] Le foie doit faire l’objet de la plus grande attention dans les maladies susdites car l’extraction de la bile et celle de la lymphe dépendent de son bon fonctionnement : s’il est défaillant, la bile causera des fièvres en refluant vers le cœur et le reste du corps, et la lymphe n’étant plus séparée du sang, il surviendra une anasarque. [27][56] Il serait extrêmement utile de remédier au rétrécissement des vaisseaux lymphatiques, à leurs solutions de continuité et à leurs autres défauts, pour les rendre accessibles aux effets d’un médicament connu. Après avoir montré le chemin à suivre, je laisse au temps et au génie des hommes le soin de résoudre bien des questions ; des curieux viendront après moi et parachèveront ce que j’ai découvert. Quant à vous pourtant, mon cher Horst, vous méritez tout mon respect pour ne pas condamner les mystères de la nature et pour ne pas prononcer, faute de connaissance plus convaincante, votre vote, dont j’attends pourtant qu’il sera favorable après que les doutes se seront dissipés. J’interviens en faveur de la nature et non de moi-même, lequel vous tenez pour un ami qui accomplit son devoir ; mais en aucun cas pour un tyran qui impose ses opinions, car les esprits sont libres, mais plus un homme est éminent, plus il est prompt à accepter les décrets de la nature. Je vois votre candeur et votre humilité à fouiller ses secrets, et opposerai sagement cela à d’autres demi-savants et jaloux. Croyez-moi, la réputation des précurseurs en empêche beaucoup de solliciter l’approbation de la nature, et ceux qui veulent nous suivront là où nous allons et non là où il faut aller. [28][57] Le foie fait tant les délices des mortels, qu’ils accusent de frauduleuse atteinte à leur pensée quiconque a défavorablement jugé de leur opinion sur les fonctions qu’il a jusqu’ici été convenu d’attribuer à cet organe. Voilà pourquoi [Page 179 | LAT | IMG] ils combattent avec autant d’acharnement pour le foie que s’il s’agissait de leurs autels et de leurs foyers, [29] et ils s’imaginent n’importe quoi pour délaisser la nature à l’avantage du foie. Riolan patauge encore dans ce bourbier : afin que le foie ne soit pas abandonné à la famine, il défend, à l’imitation des Anciens, les vaisseaux sanguins mésaraïques et certifie qu’ils véhiculent le chyle ; vaincu par l’évidence des faits, il admet néanmoins l’existence des lactifères thoraciques, mais en inventant qu’ils ne servent que d’anastomoses aidant aux échanges et à la liaison entre le sang de la veine porte et celui de la veine cave. [58]
Le très éminent M. William Harvey, qui a si hautement mérité de la république anatomique, foule aussi les traces des Anciens. Bien qu’il ait ailleurs fait suffisamment preuve de discernement et de perspicacité, je m’étonne fort de son mépris pour les lactifères, qu’il attaque en les tenant pour de vulgaires veines mésaraïques. Il semble si habité par sa circulation sanguine qu’il n’estime pas les veines chylifères à leur juste valeur. Ainsi ce bon Homère sommeille-t-il souvent, [30][59][60] et pense-t-il que suffit à sa gloire d’avoir enrichi l’anatomie de son immortelle découverte de la circulation. [61] Je ne dirai rien de fâcheux sur cet illustre anatomiste dont j’ai toujours estimé que les travaux sont parfaitement dignes du cèdre. [31] Je crois néanmoins que s’il avait eu le loisir de mettre tout le soin requis pour explorer les lactifères, il aurait jugé différemment ce genre de vaisseaux que tous ont manifestement eu sous les yeux. Il nie que le suc qu’ils contiennent soit du chyle destiné à nourrir les parties du corps, préférant dire « qu’ils surviennent parfois, comme fortuitement, et qu’ils reflètent une alimentation très riche et une digestion de bonne qualité, selon la même loi de la nature qui donne naissance à la graisse, [62] à la moelle osseuse, [63] à la semence, [64] à la pilosité abondante, etc. ; ou de la même façon que la saine résolution des ulcères et des plaies engendre du pus » ; [65] jusqu’à conclure que le chyle « est purement et simplement du lait », comme je l’ai compris de la lettre que vous m’avez donnée. [32][66] Si m’était imposée la nécessité de contredire Harvey, sans lui faire offense, je prouverais, en simple harmonie avec la nature, selon une règle qu’elle a établie et perpétuée, et non pas par hasard, que les veines nouvelles contiennent un suc blanc [Page 180 | LAT | IMG] car il les teinte constamment si on les ouvre dans la période où le chyle se distribue : ce qui survient toujours au moment opportun et chez tous les animaux ne peut être tenu pour fortuit ou rare. En outre, s’il ne s’agissait que du reliquat d’un repas trop copieux, soit il n’apparaîtrait qu’une fois la distribution du chyle achevée, soit il serait visible en permanence car, en raison de leur consommation continue, les parties corporelles se nourrissent sans interruption. Or, l’expérience est contraire à ces deux éventualités, montrant même que la digestion s’accomplit pour la totalité du corps, ce qui explique pourquoi les lactifères n’abondent que dans l’abdomen, mais sont rares dans le thorax et totalement absents dans la tête. On les trouve même chez les animaux malades ou malingres chaque fois que l’estomac digère des aliments. Si les lactifères ne suçaient que la partie la plus grasse du chyle, le reste serait frauduleusement détourné sous la forme d’un suc tout aussi excellent que nécessaire. Il est certain que la graisse n’emprunte en aucun cas des canaux particuliers : la cavité médullaire des os en est certes remplie, mais elle y stagne, comme enfermée dans une mare, sans présenter aucun mouvement manifeste ; et chacun conviendra que la graisse ne se forme pas à partir de la partie la plus grasse du chyle, comme Hippocrate semble l’avoir voulu, suivi par Folli. [33][67][68] Ces vaisseaux particuliers ne contiennent donc pas ce suc blanc par accident, mais par un décret permanent de la nature, et je ne suis pas entièrement hostile à l’idée qu’il s’agisse de lait. Il faut néanmoins explorer plus avant le propos de M. Harvey quand il dit que « ce lait n’est pas du chyle » et que ses vaisseaux ne sont donc pas chylifères. Si nous suivons Hippocrate, le lait est du chyle : dans son livre de la Nature de l’enfant, il enseigne que quand on appuie sur le ventre du lait afflue dans les mamelles ; et il ajoute plus longuement, dans la section iii, livre ii des Épidémies que les mamelles se gonflent des mets et des boissons. [69] Nul médecin ne niera donc que le maître de Cos appelle lait ce qui est élaboré dans le ventre à partir des mets et des boissons, et qu’il s’agit de chyle. Si les essais de Marziano sur Hippocrate ont quelque poids, [70] si les [Page 181 | LAT | IMG] arguments de Castellus, livre ii des Émétiques, [71] sont valides, le chyle se transporte directement aux mamelles avec tout ce qui l’accompagne, bien qu’on n’ait pas encore trouvé les voies qu’il emprunte. [34] Chyle et lait ne diffèrent qu’à peine. C’est une matière unie, où mets et boissons ne sont plus apparents, mais qui est la partie la plus proche et utile de la nourriture et du breuvage, et leur cause efficiente, qui convient à la nutrition de l’enfant comme de l’adulte ; nous recherchons sa présence en nous fiant à sa couleur et à ses autres caractères ; je ne vois rien qui s’oppose à l’idée que le chyle soit du lait ou que le lait soit du chyle, car tous deux sont naturellement blancs et de saveur douce, si rien d’étranger ne s’y est mélangé. Ils ne diffèrent que par leur perfection, comme il se fait pour le sang : le chyle est plus parfait dans les veines mésentériques que dans l’estomac car il a été filtré par l’étroitesse des vaisseaux qu’il a traversés ; de même, on peut dire que le lait est plus parfait que le chyle car il a parcouru un long trajet dans de fins canaux. Harvey désire pourtant que de solides arguments et de claires expériences lui démontrent que « ces veines contiennent du chyle qui y est venu des intestins et nourrit le corps entier ». Je ne discuterai pas la question de savoir si le chyle alimente directement le corps, ou s’il doit préalablement être transformé en sang, suivant une hypothèse qui ne plaît pas à grand monde, mais qui trouvera peut-être un jour des partisans. [35] Je démontrerai néanmoins que le chyle est incontestablement transporté de l’estomac et des intestins vers les veines lactées. On y trouve en effet, à l’état purifié, cette même crème blanche qui résulte de la transformation des aliments dans l’estomac, et elle ne peut y parvenir autrement. La continuité des parties concernées, établie par leurs abouchements communs, me permettra aussi de montrer qu’elles charrient un suc identique. Nul ne doute qu’il s’écoule de l’estomac par le pylore. [72] Trois sortes de vaisseaux peuvent le puiser dans les intestins, qui sont les veines, les artères et les lactifères du mésentère. Il ne s’agit pas de ses veines sanguines parce que 1. jamais il n’est permis d’y observer une trace [Page 182 | LAT | IMG] de liquide blanc, nul ne pouvant certifier ce qu’il n’a pas vu ; 2. la fonction des veines est de transporter le sang et non le chyle ; 3. lesdites veines mésaraïques sont soumises à la circulation et ne font que transporter le sang au foie, comme les ligatures le montrent plus clairement que n’est le soleil en plein midi ; 4. il semble inconsidéré de confondre entre eux des vaisseaux que la nature a distingués les uns des autres ; lactifères et veines mésentériques se montrent toujours différents, les uns étant toujours blancs et les autres toujours rouges. On ne peut se faire l’avocat des artères, bien que certains n’y répugnent pas, et il est hors de doute que s’y comptent aujourd’hui les adversaires des veines lactées. [36] Seuls les lactifères d’Aselli restent donc disponibles pour accomplir la tâche, comme diverses expériences le confirment infailliblement, car on y trouve le même liquide blanc qu’a digéré l’estomac. Je conviens certes qu’il a gagné en pureté, mais la raison en saute aux yeux : le chyle sort continuellement de l’estomac et sa partie qui a été la première élaborée s’en écoule d’autant plus vite qu’elle est plus déliée et moins épaisse ; les déchets les plus grossiers du chyle se déposent ensuite dans les intestins ; puis enfin, les étroits lactifères puisent le chyle épuré, dans une forme qui égale celle du lait, et il ne peut d’ailleurs être emporté s’il n’a pas atteint ce degré de blancheur. Aucune anastomose ne joint les lactifères aux vaisseaux sanguins qui sont les seuls à être présents dans leur voisinage. Le mouvement du suc lacté procède manifestement toujours dans le même sens : pendant la distribution du chyle, succédant à la première coction, les lactifères ne viennent jamais d’un autre endroit que l’estomac, [73] d’où ils s’éparpillent pour gagner le réceptacle et finalement le cœur. Les ligatures des lactifères font très bien voir que leur suc blanc monte en droite ligne non pas vers le foie, qu’aucun d’entre eux n’atteint, mais vers la cavité médiane du chyle, d’où il sort pour gagner le cœur en passant par les lactifères thoraciques ; [Page 183 | LAT | IMG] et quand vous avez lié ces conduits, vous observez comme la grande année de Platon, [74][75] et vous ne verrez jamais du chyle sortir de l’estomac ou des intestins pour se rendre ailleurs que là. J’ignore ce qu’on peut plus clairement démontrer en faveur du chyle. Ce sont des vaisseaux d’un genre particulier, distincts des veines mésaraïques, voisins des intestins, toujours blancs à la façon du chyle, remplis de ce suc au moment de sa distribution et pendant tout le temps de la digestion gastrique ; quand on les lie ils enflent sur leur versant intestinal, mais s’affaissent en aval, du côté de la cavité du chyle. Vous-même, dont le Titan [76][77] a façonné le cœur de la meilleure argile, jugerez si tout cela peut s’appliquer aux vaisseaux sanguins du mésentère, et je me fierai entièrement à votre avis. [37]
M. Harvey nie à présent que les lactifères servent à transporter tout le chyle. [78] Il se fonde sur un certain nombre d’arguments que j’examinerai brièvement, selon ce que j’en ai compris et le temps dont je dispose.
- « L’apparence de ces canaux n’est pas identique chez tous les animaux : chez les uns ils se rendent dans le foie et chez d’autres, dans la seule veine porte, quand chez certains ils ne gagnent aucune de ces deux destinations. [79] Chez les uns, on voit quantité de lactifères dans le pancréas, [80] et chez d’autres, dans le thymus, [81] quand chez certains vous n’en verrez dans aucun de ces deux organes. »
– Réponse. Il n’est pas surprenant de noter quelque diversité de ces branches, car les racines des arbres qui rampent sur la terre ne sont pas non plus toujours en même nombre et également sinueux. Quant à leur insertion, sa constance est absolument hors de doute : d’abord elles se réunissent toutes dans le réservoir pecquétien, chez les bêtes, ou dans des glandes lactées chez l’homme, où elles déversent leur liquide comme dans une cavité ; [38][82] ensuite et de là elles poursuivent leur route vers les veines axillaires [83] dans un canal qui est presque toujours simple, et rarement double. Il a jadis semblé à Aselli, de Wale [84] et même à moi qu’elles s’en allaient à la porte [85] et au foie, mais en y regardant de plus près, Pecquet a depuis présagé que c’était faux, et en y mettant toute ma diligence, j’ai découvert que si de magnifiques [Page 184 | LAT | IMG] conduits gagnent bien le foie, ce ne sont pas des lactifères, mais des lymphatiques qui tirent leur liquide hors du foie, sans l’y apporter en aucune façon. [4] J’admets que les lactifères fourmillent dans le pancréas d’Aselli ou dans la glande médiane du mésentère, et ce en permanence : cela leur sert de relais avant qu’ils n’aillent se vider dans le réceptacle ; de même que dans les racines des plantes, des nouures saillent souvent à intervalles réguliers, le pancréas, le réservoir, etc. regroupent les rameaux lactés épars en troncs. Le thymus, quand il est gonflé de lait, renvoie ce qu’il a reçu dans les lactifères thoraciques voisins, mais cela s’observe plus rarement chez les adultes, où il est fort petit, que chez les enfants, où il conserve la trace du lait ou du chyle dont ils se sont nourris dans l’utérus. Il est donc constant que dans tous les cas les lactifères ne s’insèrent pas dans le foie, mais dans les veines axillaires, par l’intermédiaire du réservoir du chyle, et qu’ils y délivrent la totalité du chyle.
- « Chez maints animaux, on ne trouve absolument aucun chylifère et ils ne s’observent en permanence chez aucun d’entre eux. De tels vaisseaux nourriciers devraient pourtant être obligatoirement présents chez tous les animaux et à tout moment. »
– Réponse. J’abuserais de votre confiance en moi, mon cher Horst, si ces vaisseaux ne se trouvaient chez tous les animaux, grands comme petits, et même chez les poissons, comme je l’ai naguère montré dans l’exemple du lompe. [39][86] S’ils semblent absents dans les petites espèces, c’est qu’ils échappent à nos yeux et non que la nature a omis de les en pourvoir. À moins qu’on ne les regarde de trop loin, il n’est pas obligatoire qu’ils soient remplis de chyle à tout instant car ils servent à le distribuer, et non à assurer la totalité de la nutrition des parties : il s’agit d’un phénomène ininterrompu, puisque leur consommation est continue, mais le sang suffit à y pourvoir car il leur est délivré continuellement ; le chyle y contribue par intermittence [Page 185 | LAT | IMG] chaque fois que l’estomac reçoit des aliments ; néanmoins, même vides, les lactifères sont toujours présents, ne se chargeant de véhiculer la nourriture que quand l’estomac leur en envoie. Un animal ne doit pas s’alimenter continuellement, son estomac ne digère qu’un repas à la fois et l’aliment contenu dans le sang peut suffire à le restaurer entre-temps ; je ne vois pas comment s’en sortir autrement grâce aux veines mésaraïques ordinaires, car l’estomac ne leur délivre pas du chyle plus fréquemment qu’à nos lactifères. Nodi hi sunt in scirpo quæsiti. [40]
- Il blâme « leur maigre capacité et leur structure inadaptée. Il faudrait en effet que leurs plus minces rameaux se terminent dans de plus larges, lesquels convergent en un très gros collecteur dont le volume corresponde à celui de tous les autres canaux. »
– Réponse. Les partisans des veines lactées ont jusqu’ici débattu entre eux sur la question de savoir pourquoi ils n’ont pas de tronc, et s’il leur manque, mais elle semble résolue depuis que j’ai trouvé, comme Pecquet, ce tronc dans le thorax ; ceux qui ne s’en contentent pas mettent pourtant en cause son étroitesse par comparaison avec l’étendue des veines lactées mésentériques, ainsi que la capacité inadaptée de cet ensemble à nourrir le corps entier. Bien qu’aucun besoin de la nature n’impose de règle établissant une égalité de grandeur entre tous les rameaux quand de petites branches convergent en de plus grandes, puis finalement en un tronc, nous aborderons ce point et le débrouillerons. Le mésentère contient de fins rameaux lactés qui sucent le chyle des intestins, de plus grands leur succèdent, s’intercalent ensuite une cavité puis enfin une très grande branche thoracique, égale à un tronc qui a la taille d’un uretère et évacue la cuvée que le réservoir a engloutie. Ce canal est certes unique, mais suffisamment gros et bien visible pour être capable d’égaler en capacité celle de multiples petits rameaux ; et bien que son calibre n’équivaille pas à la somme de tous les leurs, elle [Page 186 | LAT | IMG] suffit à transporter la totalité du chyle qui y parvient après sa digestion par l’estomac et sa distribution par les lactifères. L’examen direct nous enseigne qu’il en est capable puisque nous ne voyons pas de chyle se répandre quand nous le lions, et qu’absolument tout le chyle y passe pour se rendre dans les veines axillaires. Plus haut, j’ai réfuté l’argument fondé sur le besoin de la nature et, dans la mesure où la qualité de ces canaux n’est pas la même que celle des veines sanguines, il n’est guère opportun d’assimiler leur structure à celle de la veine porte. [41] Elle s’emplit en permanence du sang qui reflue de la rate, de l’estomac, du mésentère, des intestins, etc., et son tronc doit donc en recueillir chaque goutte qui lui vient de toutes ses plus petites veinules, qui le reçoivent des artères. Ce sang s’écoule sans interruption dans la veine porte, tandis que le chyle ne se distribue que par intermittence pour alimenter le cœur. Le parallèle avec la proportion existant entre le tronc d’un arbre et ses racines est de plus mal choisi ; il est certes communément appliqué aux veines chylifères, mais est à mon avis peu pertinent : d’abord, les racines des plantes sont dépourvues de cavité, et puisent le suc de la terre à l’aide de leurs fibres d’une manière qui n’est pas perceptible par les sens, tandis que la cavité des lactifères saute aux yeux de tout le monde et la comparaison qu’on tire de leurs nombres respectifs est futile ; ensuite, les racines des végétaux ne sont pas à assimiler aux seuls lactifères sans y inclure leur voisinage, que forment l’œsophage, la bouche, la langue, etc., car Aristote [87] dit qu’une racine est l’analogue de la bouche et du ventre, Cardan, De la Subtilité, [88] a proclamé qu’elle correspond au ventre, mais Scaliger, essai cxli, § 3, [89] l’assimile plutôt à la bouche, en se référant à Théophraste, Histoire des plantes, livre i, chapitre ii, [90] pour qui la racine est ce qui puise l’aliment. Néanmoins, en se fondant sur la sentence du philosophe, Scaliger concilie les deux points de vue : « Puisqu’elle reçoit, la racine est une bouche, et un ventre aussi, puisqu’elle digère. » [42] Aux racines des arbres correspondent donc, [Page 187 | LAT | IMG] chez les animaux, la bouche, l’estomac, les intestins, les veines lactées, et même le canal thoracique, qu’on compare improprement au tronc des arbres, parce qu’il doit être compté parmi ce qui est distinct du chyle et que ce serait, selon Théophraste, la tige dans laquelle est conduit l’aliment. Les racines ne se contentent pas de puiser l’aliment, elles le digèrent aussi, non seulement pour les branches de l’arbre, mais pour la plante entière qu’il forme ; Harvey ne veut pourtant en dire autant des lactifères qui ne transportent pas le chyle pour leur propre avantage mais pour celui du corps entier. Si donc nous poussons le raisonnement, ce qu’il faut comparer à la racine des plantes chez les animaux, ce sont tous les viscères qui produisent du chyle, le reçoivent, le transportent et le transforment en sang, soit aussi, pour embrasser tout l’ensemble, le cœur lui-même : ainsi l’assimile-t-on au tronc, et les artères à la tige qui nourrit les autres parties des plantes. Évaluez maintenant la proportion qui existe entre, d’un côté, les racines des arbres, et de l’autre, la bouche, l’œsophage, l’estomac, les intestins, les lactifères du mésentère, le canal thoracique et le cœur : la différence vous saute aux yeux, car tout cela est à inclure dans les racines des arbres. Théophraste, livre i, chapitre i de L’Histoire des plantes fait justement remarquer que tous leurs caractères ne doivent pas être interprétés comme semblables à ceux des animaux, [43] et il n’est pas constamment vrai que chez les végétaux le tronc ou la tige est proportionnellement égal à leurs racines. Examinez soigneusement les oignons, les orchis, les caras du Brésil et d’autres racines de cette espèce dont les racines surpassent de loin la petite taille de leur tige. Prenez en exemple l’alsine, les anagallis, les lentilles palustres, qui poussent profusément à partir d’une grêle racine, voire sans racine du tout. [44] Dans le genre des arbres, je mets en avant le cyprès, qui monte très haut à partir d’une mince racine. L’observation établit que le canal thoracique supporte bien la comparaison avec un uretère dilaté qui, en cas de nécessité, peut distendre sa membrane, comme par exemple quand [Page 188 | LAT | IMG] l’absorption d’une très grande quantité d’eaux exige d’être rapidement évacuée, ou en cas de lithiase urinaire, [91][92] où nous voyons les uretères atteindre le calibre d’une anse intestinale.
- « Puisque les composants de l’urine empruntent copieusement cette voie, il ne voit pas du tout comment ces veines (lactées) peuvent conserver leur couleur laiteuse, ni comment l’urine peut n’en être absolument pas teintée. »
– Réponse. Quand elles s’écoulent très copieusement par ces lactifères, les urines sont composées de sérum, [93] qui leur donne la couleur de la lymphe et non du lait. Si du sérum s’est mélangé à du chyle blanc dans les lactifères, il sera filtré dans les reins et le sérum sera séparé des autres substances d’origines diverses ; à moins que le chyle, ayant rompu la barrière de ses voies, ne rende l’urine laiteuse, ce qu’on voit rarement, [45][94] mais dont j’ai publié ailleurs des exemples.
- « Ces vaisseaux, s’ils transportent ce chyle, ne peuvent en permanence (bien qu’ils le fassent temporairement) contenir un liquide blanchâtre, mais ils devraient prendre par moment une teinte jaune, verte ou autre. »
– Réponse. S’il faut s’en tenir aux décrets des Anciens, tout le chyle doit être blanc parce que c’est la couleur qu’il acquiert à l’origine dans l’estomac et les intestins, mais cela requiert des nuances : le chyle qu’on trouve dans l’estomac n’est pas toujours blanc, sa couleur varie selon les aliments ingérés, devenant vert quand ils sont verts, rouge quand ils sont rouges, et ainsi de suite. Dans les veines lactées, il se signale pourtant toujours par sa blancheur, sans qu’on puisse aisément l’expliquer. La blancheur prévaut peut-être sur d’autres teintes plus faibles, dont ces vaisseaux ne pourraient donc pas s’imprégner ; ou aussi parce que ce qui n’est pas blanc sédimente dans les intestins avec les détritus plus épais ; ou encore parce que l’étroitesse des lactifères blanchit le chyle, comme sous l’effet d’un crible ou d’une digestion supplémentaire, en éliminant les autres couleurs, comme font les lis blancs qui extraient de la terre noire une sève de teinte semblable à la leur ; ou enfin parce qu’il est rare de disséquer des animaux qui ingèrent des aliments de couleurs bigarrées, mais si on les ouvre après qu’ils ont mangé de la rhubarbe [95] ou des asperges, [96] il n’y a pas de doute que [Page 189 | LAT | IMG] la couleur du chyle changera dans leurs lactifères, sans toutefois que leurs parois en soient modifiées au point que la blancheur cesse d’y prédominer. Si le lait est teinté, le chyle l’est bien plus encore. Dans les veines ordinaires du mésentère le sang n’est pas imprégné par la couleur de la nourriture parce que le rouge l’emporte, contrairement à ce qui se passe dans les lactifères où abonde le chyle. Ce dont les animaux se nourrissent, comme le fourrage, la viande, etc., [97][98] ou bien abandonne sa couleur dans les excréments qui verdissent souvent, car la digestion naturelle sépare aisément la verdeur des herbes, puisque le suc de la terre tire beaucoup plus sur le pâle que sur le vert ; ou bien la blancheur atténue ces couleurs dans les lactifères. Le rouge du sang est pareillement modifié par la digestion des viandes, et les fibres carnées résiduelles blanchissent naturellement. Les choses sont différentes pour les médicaments comme la rhubarbe, la casse, [46][99] qui passent rapidement et ne sont pas aisément digérés ou transformés par l’estomac ; mais la couleur jaune ou noire qu’ils confèrent à l’urine tient moins au médicament qu’à l’humeur qu’il purge. Quelque sentence qu’on choisisse de porter sur le lait ou le chyle, on peinera à se sortir autrement de cette difficulté.
- « Si cette matière blanchâtre tirée des intestins était passée dans ces canaux, ce liquide aurait certainement dû se répandre partout dans lesdits intestins ou dans leurs parois spongieuses. »
– Réponse. Cette objection attaque une hypothèse ancienne avec plus de véhémence que nous ne le faisons, car elle suppose que le chyle blanc s’écoule dans les intestins avant qu’il n’ait été absorbé par les veines mésaraïques. Il est hors de doute qu’on trouve du suc blanc dans les intestins puisque le chyle y passe, quelque hypothèse qu’on suive, mais les excréments obscurcissent sa blancheur ; et il y a une bonne raison pour qu’il n’apparaisse pas lors des dissections, puisque les lactifères puisent par transfert rapide la partie la plus déliée et utile de la substance chyleuse et que le résidu [Page 190 | LAT | IMG] est éliminé dans l’excrément. Les préparations et les extractions qu’on effectue tous les jours dans les cuisines et dans les pharmacies enseignent comment on purifie les substances par filtration, et je ne parle pas des reins qui séparent le sérum du sang sans le teinter en rouge.
- « Le chyle », ou le lait, « devrait alors conserver quelque trace de son ancienne nature, et sentir la pourriture. »
– Réponse. Tout va bien, puisque voilà le chyle débarrassé des exhalaisons méphitiques [100] des excréments, après qu’il a été filtré par les lactifères ; mais pourquoi, selon l’ancienne opinion, le sang qui est dans les veines mésaraïques ne dégage-t-il pas cette puanteur, comme il devrait partout faire ? La substance chyleuse intestinale sent mauvais par son mélange à des déchets qui sentent ainsi quand ils sont longtemps retenus car ils pourrissent sous l’effet d’une chaleur excessive dans un lieu clos, mais ils ne sentent rien s’ils sont trop rapidement déféqués, faute d’une force suffisante pour les retenir. Les résidus de la substance chyleuse ne sont pas seuls en cause, les excréments de la masse sanguine, venus du corps entier, se purgent dans le ventre par les artères et expliquent la très grande puanteur des fèces dans les corps malades. Le chyle intestinal offense les narines, mais une élaboration plus poussée dans les lactifères lui fait perdre sa mauvaise odeur, de la même façon que les plantes changent d’odeur, passant rapidement de celle de l’herbe dans leur tige et de la terre dans leur racine, à un agréable parfum dans la fleur. L’opium [101] a une odeur désagréable, mais la perd quand il a été convenablement digéré ; quand on brûle des scories de fer et de cuivre, elles dégagent l’odeur de leur métal d’origine ; les paysans amendent la terre avec du fumier sans qu’elle sente fort mauvais ; certains font présent de déjections de civettes, [102] comme Virgile [103] cherchait de l’or dans celle d’Ennius, [104] mais laissons-là ces délices fécaux. [47]
[Page 191 | LAT | IMG] En grand expert de la physiologie, Harvey s’attaque ensuite au passage du chyle dans le cœur et insiste sur quelques difficultés qu’il convient de résoudre brièvement pour donner plus de lustre à notre chyle car nous avons grande confiance dans la vérité de la nature.
- Puisque le chyle se mélange au sang dans les veines axillaires, « chacun demandera à juste titre pourquoi il ne passe pas dans la veine porte, puis dans le foie et la veine cave, comme l’ont, dit-on, observé Aselli et d’autres ».
– Réponse. Je dirai d’un mot qu’on ne peut légitimement s’interroger de la sorte pour la bonne raison que la nature ne l’a pas voulu ainsi ; et en prétendant la consulter, on peut énoncer maints principes semblables, mais tout aussi faux les uns que les autres. Si, comme il se doit, nous suivons ses règles, nos yeux nous font voir que les lactifères transportent le chyle dans les axillaires, mais jamais dans le foie ni dans la veine porte, à moins de vouloir contredire la nature en disant qu’elle se joue de nous. Suivant le même raisonnement, nous aurions dit que le sang peut sortir de la porte et de la cave pour nourrir les parties, mais la dissection enseigne que le sang venu des parties du corps emprunte la cave pour gagner le cœur, et la porte pour gagner le foie.
- « Le chyle peut entrer dans les racines des veines mésaraïques, pour y être digéré par la chaleur du sang, puisque le cœur n’est la source de la chaleur, de la vie et de la perfection que dans la mesure où il contient une énorme quantité de sang. »
– Réponse. Le chyle ne peut simplement pas pénétrer dans les veines mésaraïques car nul ne l’y a jamais vu, la nature ne l’a jamais voulu et il n’y dispose d’aucun accès. Voici une expérience prouvant qu’il n’y entre vraiment pas : la ligature de la veine mésaraïque n’empêche pas le chyle de passer dans les lactifères, qui s’en gonflent peu à peu ; mais quand on lie les veines lactées, le chyle stagne et cesse de sortir de l’estomac ou des intestins, ou de progresser par les orifices des lactifères. Il pourrait se mélanger au sang porte si la nature avait choisi ces voies, mais nous ne la conformons pas aux caprices de notre cerveau. En médecine, il ne faut pas imaginer les hypothèses, [Page 192 | LAT | IMG] mais les extraire de la nature, et nous dépravons ce métier de la pire façon quand, sans l’assentiment de la nature, nous faisons prévaloir la théorie sur l’expérience. Nous croyons que le chyle ne passe pas dans la veine porte mais dans les axillaires parce que c’est ce que voient nos yeux, et tous ceux qui veulent vraiment scruter la nature doivent croire les leurs. Il ne m’incombe pas ici d’entreprendre la défense du cœur, que j’ai revendiquée dans mon Anatomie réformée, [48][105] et me contenterai d’avoir depuis démontré que tout le chyle se rend au cœur comme en un océan, d’où, mêlé au sang et copieusement baigné par la chaleur du cœur, il s’écoule dans tout le corps avec le sang artériel. Si le cœur ne méritait pas d’être appelé la source du sang, je serais mortifié qu’on attribue cette fonction au foie, car il en est bien moins capable et digne que le cœur, à quelque aune qu’on les évalue. [106][107]
- « Plus d’artères et de veines irriguent les intestins que toute autre partie du corps, et ce de la même manière que les vaisseaux se développent dans l’utérus pendant le temps de la grossesse. »
– Réponse. Je n’oserais me ranger à l’idée que les veines sanguines sont si nombreuses dans le mésentère pour emporter le chyle, tout en sachant que tel a été le verdict de presque tous les anatomistes avant la publication d’Aselli. Je prouverai qu’il n’en est pas ainsi car il demeure que les vaisseaux lactés sont également nombreux, mais évanescents : pour évacuer cette petite fraction de chyle pendant un temps limité, de si grands vaisseaux sanguins et un tel amas d’artères et de veines n’était pas requis. Je ne veux pas répéter les arguments tirés de l’observation, qui montrent l’inutilité des veines et des artères mésaraïques dans le transport du chyle car il est difficile de pardonner à celui qui nie le témoignage des sens. Jamais on ne voit de chyle dans ces vaisseaux sanguins, et ni leur existence ni leur nombre ne pourra tenir lieu d’argument valide. La circulation harvéenne révèle leur véritable fonction : les artères [Page 193 | LAT | IMG] sont très nombreuses dans le mésentère parce que les parties froides, exsangues et fangeuses avaient besoin d’une grande quantité de sang chaud, c’est-à-dire artériel ; de même, les branches de la veine porte sont très nombreuses pour être capables de conduire au foie le sang qui reflue depuis les intestins, l’estomac, la rate, le péritoine, le mésentère, etc. Cela explique la vaste porte qui s’ouvre à lui, comme on le voit aussi dans les grosses veines jugulaires qui drainent le sang du cerveau, [108] qui est aussi un organe froid. Cela ne se compare pas avec la situation dans l’utérus gravide, car le fœtus se nourrit d’une grande abondance de sang qui assure sa croissance. [49]
- « Tous les animaux pourvus de sang ont besoin de se nourrir, ils possèdent à cette fin des veines mésaraïques, ainsi que des veines lactées, mais ces dernières sont en bien moindre nombre et n’ont qu’une existence temporaire. »
– Réponse. Je rangerai à jamais parmi les monstres tous les animaux pourvus de sang qui ne possèdent ni lactifères, pour assurer la distribution du chyle dont ils sont remplis, ni autres fins conduits blancs qui la permettent. Autrement dit, je souhaiterais qu’on me nommât une seule espèce animale qui soit naturellement dépourvue de lactifères.
- « Dans la vie fœtale, nous sommes nourris par les vaisseaux ombilicaux et tout l’aliment passe par le foie, et il en irait de même à l’âge adulte. » [109][110]
– Réponse. Bien des particularités du fœtus se modifient après la naissance : le mouvement de leur sang se fait de manière entièrement différente et la conformation de leurs organes est singulière. Après l’expulsion, le fœtus cesse d’être nourri par les vaisseaux ombilicaux, quand le placenta se détache de l’utérus et le cordon est coupé ; alors l’enfant tète à la mamelle et seul son estomac digère et distribue l’aliment par les voies que la nature a établies, c’est-à-dire par les lactifères et le réceptacle. Le sang maternel traverse le foie du fœtus, mais le foie ne fabrique pas le sang, il se contente de le préparer et purger, de la même façon que chez les adultes le sang de la veine porte gagne le foie pour être purifié avant de se rendre dans le cœur : ainsi donc les [Page 194 | LAT | IMG] lois de la circulation ne sont-elles pas enfreintes par les nouveaux lactifères, et la fonction du foie ne s’en trouve-t-elle pas modifiée. Néanmoins, nul n’affirmera que les veines lactées du fœtus ne puisent pas un peu de liquide chyleux pour le transporter au cœur, puisqu’on voit des traces de lactifères chez les nouveau-nés et que, selon Hippocrate, le fœtus tète du chyle laiteux dans l’utérus, [5] et il dit aussi que la plus grande partie de son aliment lui vient des vaisseaux ombilicaux. Il paraît donc vraisemblable que, chez le fœtus, une anastomose détourne une petite partie du chyle qui lui vient en abondance du foie, comme cela se fait chez l’adulte.
- « Chez le fœtus humain, le thymus se trouve à tel point enflé de lait qu’il m’est arrivé de suspecter qu’il s’agissait à première vue d’un abcès. »
– Réponse. Le fait n’est guère surprenant puisque, la plupart du temps, le thymus est bien plus petit chez l’adulte que chez le fœtus, étant donné la grande quantité de matière humide et de lait dont il se nourrit dans l’utérus. On retrouve cette abondance chez les animaux nouveau-nés, à tel point que maintes gens se régalent de ris de veau. Il n’y a là rien qui contredise Pecquet quand il déclare que les lactifères constituent un genre particulier de vaisseaux lactés, car du chyle laiteux s’observe bien ailleurs dans le fœtus. On sait que le sang cherche souvent des échappatoires quand il s’épanche par ecchymose et rupture d’anévrisme, ou en maintes occasions qui lui sont données de sortir des veines. Chez une honnête femme qu’on considérait comme enceinte, j’ai récemment vu une si grande quantité de sérosité sanguinolente et de sang grumeleux s’écouler par en haut et par en bas qu’elle a rempli six de nos pintes, s’étant entièrement vidé les veines, sans que lui reste une goutte de sang dans le cœur. Il est parfaitement établi qu’une sérosité lactée s’écoule des mamelons des petits enfants et même parfois des adultes. J’ai noté maints exemples qui démontrent ainsi l’abondance du chyle laiteux et la richesse de ses voies. [50][111]
[Page 195 | LAT | IMG] Je cesse pourtant de tremper ma plume dans le chyle, plutôt que dans l’encre, pour vous montrer la candeur de mon esprit et mon empressement à vous servir. Recevez avec bienveillance mon avis sur la sentence d’un si éminent homme, qui fait la fierté de la république anatomique, et les amicales réponses que j’y ai ajoutées pour vous débarrasser de tout souci. Je vous ai présenté, comme au monde entier, des observations que la nature a ordonnées et que les anatomistes sincères approuveront, dont fait partie le très brillant Pecquet. Dans la récente réédition de ses Experimenta, il a honoré mes Vasa lymphatica d’un éloge, et m’a dédié sa dernière Dissertatio de thoracis lacteis, [112] mais peut-être n’est-elle pas encore parvenue entre vos mains. Il y défend courageusement ses arguments en faveur des lactifères thoraciques contre Riolan, et ses expériences confirment mes vaisseaux lymphatiques. Je me félicite d’avoir pour défenseur de mes travaux un si soigneux interprète de la nature, que j’opposerai aux autres Zoïles, [113] dont les jaloux assauts tentent de révoquer en doute la vérité de ma description et mes autres découvertes. [51] Il ouvre aussi une nouvelle voie pour purger la lymphe par le canal de Wirsung [114] et recourt opportunément aux lymphatiques pour concevoir l’utilité des lactifères et de leur réservoir lors du jeûne et chez le fœtus. Vale, très distingué Horst, vivez longtemps pour l’avantage de la république médicale et continuez, comme vous l’avez fait jusqu’ici, à être mon ami et celui de la vérité. Écrit à la hâte, au milieu de mes occupations publiques, à Copenhague, le 31 mars 1655. [52]
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