présenté par le Pr. Pierre Morel
Le 23 septembre 1858, Marie Pauline Baillière, âgée de dix-neuf ans, fille de l’éditeur, épousait Auguste Félix Voisin , de dix ans son aîné. Ancien interne de Delasiauve et de Moreau de Tours , le jeune marié, qui a soutenu sa thèse quelques mois plus tôt, se destine à une carrière d’aliéniste qui va l’amener en 1865 à Bicêtre, où il succède à son oncle Félix Voisin , avant de venir, deux ans plus tard, occuper le poste de J.P. Falret à la Salpêtrière. Il y restera jusqu’à son décès en 1898. Affaire de famille en quelque sorte, puisque son cousin germain, Jules Voisin, sera lui aussi médecin de ces deux établissements et médecin-adjoint de l’Infirmerie Spéciale de la Préfecture de Police (notons au passage que le frère cadet d’Auguste fut préfet de Police en 1876 et 1877 ; procureur de Melun en 1870, son attitude énergique envers l’occupant lui avait valu d’être arrêté et envoyé en Allemagne…).
Si les publications d’Auguste Voisin sont nombreuses, il faut aller les chercher dans divers périodiques, car il n’est pas l’homme des grandes synthèses si l’on excepte un volumineux Traité de la paralysie générale des aliénés paru en 1879, dans lequel il refuse d’ailleurs l’idée de l’étiologie syphilitique de la maladie.Mais dès son arrivée à la Salpêtrière en 1867, il a inauguré un cycle de conférences cliniques dont les textes parus d’abord dans l’Union médicale seront réunis en 1876 en un volume, Leçons cliniques sur les maladies mentales, publié chez Baillière. La préface éclaire d’emblée sur les orientations de l’auteur : «Convaincu que l’avenir appartient…à ceux qui cherchent à constater les modifications organiques dont les maladies mentales sont les conséquences», il désire transmettre «dans l’étude de l’aliénation mentale les méthodes scientifiques apportées par l’école de Paris».
L’ouvrage de 190 pages est accompagné de trois planches lithographiques en couleur d’anatomo-histologie et d’une planche en photoglyptie représentant des aliénées parmi lesquelles figure un cas de folie mélancolique « guérie par le chlorhydrate de morphine après trois mois de traitement ». Encouragé par le succès de cette 1ère édition, Voisin en publie en 1883 une seconde au titre un peu modifié : Leçons cliniques sur les maladies mentales et sur les maladies nerveuses.Très argumentée, cette seconde édition reprend dans ses 766 pages l’ensemble du texte initial complété et enrichi surtout de nouveaux chapitres, tels ceux qui sont consacrés à la folie tuberculeuse ou à la thérapeutique. L’iconographie elle aussi s’est accrue de deux lithographies et de trois planches de photographies. L’une d’elles, qui montre des patients de l’asile Moristan du Caire atteints de «folie haschischique», a été prise, précise l’auteur, par un de ses anciens internes.
Faut-il voir, dans ce second volume, l’aboutissement de la période «organiciste» de Voisin ? Sans doute pas, mais il n’en demeure pas moins qu’à partir de 1884, nombre de ses publications vont témoigner d’un intérêt nouveau pour les phénomènes d’hypnose et de suggestion. Et en 1889 il sera vice-président du 1er Congrès international de l’hypnotisme expérimental et thérapeutique.