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"Consilia medica" (manuscrit Ms 5056)
1632-1678
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Joël Coste Université Paris Descartes / Ecole Pratique des Hautes Etudesjoel.coste@parisdescartes.fr Juin 2012 Description générale
Le manuscrit Ms 5056 est un in-quarto (22,5 × 17 cms) de 402 pages incluant quatre textes : une Chirurgia methodus per magistrum Simonem Pietre, anno 1598 » (86 pages), des Commentarii in libros Hippocratis du même Simon Piètre[1] de 1599 (143 pages), un traité Necessitas, definitio, divisio et usus anatomes (69 pages) et des Consilia medica (104 pages). Les consilia latins sont au nombre de 50 et d’une autre écriture que celle des trois premiers textes. Le Ms 5056 doit être rattaché à deux autres manuscrits conservés à la BIU Santé qui présentent la même reliure et en partie la même écriture : le manuscrit Ms 5034, qui comprend un cours sur les médicaments simples et composés donné par Simon Piètre en 1597, associé à des commentaires des œuvres pharmacologiques de Galien, également de Simon Piètre ;[2] et le manuscrit Ms 5052, qui comprend un commentaire de Simon Piètre sur le Methodo medendi de Galien et une analyse de thèses soutenues à la Faculté de médecine de Paris de 1543 à 1628. A la fin du cours sur les médicaments du manuscrit Ms 5034 on peut lire l’annotation Decerpta ex scriptis M. Fournier, medici serenissimi ducis Lotharingiae[3] De La Vigne.
Datation et attribution
La collection de consilia comprend trois dates : 13 février [16]32, 11 septembre 1663 et 20 juin 1664. Par ailleurs, une feuille volante sortant de part et d’autre de la page 1 et de la page 100 du recueil – insérée entre les cahiers reliés et de ce fait antérieure ou contemporaine de la reliure – porte la date du 16 mars 1678.[4] En tête de cette feuille se trouve la mention : « On a placé cette feuille avant les conseils car l’auteur de cette feuille et du manuscript parle des eaux minérales dans ses conseils ». Quatre des 50 consilia portent un nom (Vignolles, Rassan, De Vardes et Catalauni) et indiquent ainsi la diversité de provenance consilia de la collection. L’écriture unique et uniforme indique en revanche une rédaction d’un seul jet, après 1664 et peut-être vers 1678. Un certain nombre de ratures, d’espaces laissés blancs et de corrections (par exemple pages 33 et 37) suggère d’ailleurs que le rédacteur (ou la rédactrice) a recopié des textes plus ou moins lisibles. La mention « De La Vigne » dans le Ms 5034, ainsi que le contenu des trois manuscrits 5034-5052-5056 orientent vers la famille de Michel de la Vigne (1588-1648), médecin de Louis XIII et doyen de la Faculté de médecine de Paris en 1644. Il est possible que la collection de consilia ait été réunie par le fils de ce dernier, également médecin.
Contenu
Les 50consilia sont répartis en 5 sections clairement affichées, suivant en partie l’ordre traditionnel a capite ad calcem : une première section consacrée aux maladies céphaliques (10 consilia) avec des cas d’épilepsie, d’apoplexie, de céphalées, d’« intempérie » cérébrale ; une deuxième section consacrée aux fièvres (11 consilia) avec des cas de phtisie et de fièvres causées par des intempéries viscérales ; une troisième section consacrée aux maladies de l’œil et du thorax (10 consilia) avec des cas de baisse de la vue, d’asthme, de palpitations, de mélancolie ; une quatrième section principalement consacrée aux maladies de l’abdomen et aux affections uro-génitales (16 consilia) avec des cas d’hydropisie et d’ascite, de diarrhée, de calculs, d’anéjaculation, de mole, d’hystérie, de rhumatisme ; et une cinquième section de 3 consilia portant sur un cas de mélancolie, un autre de manie et un autre d’asthme. Si la collection semble complète et former un tout délibérément rassemblé, et la division retenue apparaît somme toute classique, on remarque néanmoins une moindre structuration et une plus grande hétérogénéité des dernières sections.
Malgré la multiplicité des auteurs, le contenu doctrinal et formel des consilia est relativement homogène : les textes sont courts mais savants, comprenant de nombreuses expressions grecques, et recélent des raisonnements physiopathologiques élaborés. En revanche les indications thérapeutiques précises sont rares, et les traitements prescrits relativement conventionnels, comprenant beaucoup de saignées et de purgations (notamment avec le séné), mais aussi des eaux thermales, notamment métalliques, dont les auteurs semblent partager l’attrait. De nombreux consilia ont à l’évidence été édités et raccourcis, et quatre d’entre eux sont présentés avec un court résumé du « mémoire » (pages 18, 20, 43 et 81).
Portée et intérêt du manuscrit
Malgré l’origine imprécise et composite de la collection, rattachable toutefois à des médecins proches ou issus de la Faculté de Paris, et l’édition d’une partie des textes, le manuscrit n’en est pas moins intéressant pour documenter la pratique médicale et les pathologies motivant les consultations à une période – le milieu du XVIIe siècle – relativement pauvre en consilia conservés. Outre le recours fréquent aux eaux thermales métalliques déjà mentionné, on remarquera la finesse de certaines analyses cliniques (par exemple celle d’un cas d’éjaculation rétrograde, pages 85-6), appuyées sur des examens cliniques où l’on touchait les malades (par exemple signe du flot dans l’ascite page 61 et impression du doigt [signe du godet] pour des œdèmes des membres inférieurs page 67).
[1] Sur Simon Piètre le jeune dit le Grand Piètre (1565-1614), une des grandes figures de la Faculté parisienne et du Collège Royal de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle, voir la notice de J. Vonshttp://cour-de-france.fr/article655.html et les références indiquées dans celle-ci. [2] « Tractatus in libros de simplicium medicamentorum facultatibus, de necessitate medicamentorum per dominum Simonem Pietre, doctorem medicum parisiensem, anno 1597 », « In Galeni librum de remediis paratu facilibus, per Simonem Pietre, ... anno 1598, finitum vero 6 aprilis 1599 », « In libros Galeni de compositione medicamentorum secundum locos commentarii Simonis Pietrei ». [3] Fournier est le nom d’une famille de médecins lorrains dont plusieurs membres ont été au service des ducs de Lorraine. Le Registre de la Faculté mentionne effectivement un étudiant du nom de Fournier étudiant la chirurgie en 1599 et soutenant une thèse quodlibétaire en 1602. [4] Cette feuille volante présente, sur son extrémité page 1, une liste d’eaux thermales et de leurs propriétés, commençant par les eaux d’Auteuil et de Passy, et sur son extrémité page 100, une évocation brève de la mort en couche de la première marquise de Seignelay, Marie-Marguerite d’Alegre, le 16 mars 1678, un évènement retentissant, notamment commenté par Madame de Sévigné dans une lettre à Bussy-Rabutin. La relation mentionne deux médecins parisiens (Bellay et Braier) mais rien n’indique que le rédacteur de la feuille volante ait été consulté à cette occasion.