Texte : Jean ii Riolan
Première Responsio (1652) aux
Experimenta nova anatomica
de Jean Pecquet (1651).
1. Préface, note 23.
Note [23]

Le chapitre iii, libellus i, De venis [Sur les veines], de l’Anatomia reformata (Leyde, 1651) de Thomas Bartholin, {a} contient cette curieuse relation {b} (page 421) :

Ego in Anatome, Orbis piscis, quem nostri vocant Steenbüd, Gesnerus Leporem marinum, Clusius orbem ranæ rictu, Islandis Roemassue à colore ventris, tam maris quam fœminæ, sæpius hic Hafniæ à me repetita, Dosctissimis Viris Wormio, Sperlingero, Simone Paulli, Fuirenio, Pouchio aliisque spectantibus, inveni monstravique non solum multos post dies lacteas copiosissimas et lacteo humore turgidas, sed verum insuper insertionis locum. Is erat tertius hepatis lobus, minor ille molliorque à Spigelio descriptus, quem ramus lacteus satis magnus ing ediebatur à glandula magna non procul collocata, lacteoque humore turgida proveniens, ad quam glandulam pleræque lacteæ ex mesenterio et appendicibus ventriculi commeabant. Quin idem in homine reliquisque animalibus eveniat, dubitandum non est, ita natura dividente, ut singulis lobis sui trunci assignentur. Ab hoc autem ulterius pergunt cum portæ ramis ad reliquos lobos interius, eorumque parenchyma. Et notandum circa hunc lobum tertium, ubi lacteæ venæ inseruntur, appositam esse vesiculam felleam, sive ut concoctionem sanguinis, cujus ibi initium, adjuvet, sive ut excrementum biliosum in chyli concoctione separatum excipiat.

[En disséquant, ici à Copenhague, le poisson rond que nous appelons Steenbüd, qui est le lièvre marin de Gesner, le poisson rond à bouche de lotte de Clusius, la roemassue des Islandais, pour la couleur de son ventre, {c} tant mâle que femelle, j’ai moi-même très souvent trouvé, et montré aux très savants MM. Wormius, Sperlingerus, Simon Paulli, Fuirenius, Pouchius et autres, {d} que, plusieurs jours après avoir été pêchés, ils ont de très nombreux lactifères remplis d’humeur laiteuse, et surtout, j’ai vu le lieu de leur insertion. Il s’agit du troisième lobe du foie, celui qui est plus petit et plus mou, et qu’a décrit Spigelius, {e} que pénètre un assez grand rameau lacté provenant d’une grosse glande placée non loin de lui ; elle est remplie d’une humeur laiteuse qui lui vient des très nombreux lactifères issus du mésentère et d’appendices de l’estomac qui s’y abouchent. {f} Il n’y a pas à douter qu’il en aille de même chez l’homme et les autres animaux, car la nature répartit les structures vers les autres lobes hépatiques de manière que chacun soit destinataire de son propre tronc, lequel poursuit ensuite sa route en profondeur, avec les branches de la veine porte, vers les autres lobes et leur parenchyme. Il faut aussi noter que la vésicule biliaire est située auprès de ce troisième lobe, où s’insèrent les veines lactées, de manière que l’excipient bilieux intervient pour sa propre part dans la digestion du chyle]. {g}


  1. V. note [5] de la lettre d’Adrien Auzout.

  2. Le chyle n’a franchement l’apparence du lait que chez les mammifères (plus nettement encore chez les carnivores que chez les herbivores) : c’est une lymphe incolore chez la plupart des autres vertébrés, mais il est souvent d’un blanc limpide chez les poissons, avec une intensité qui varie selon la qualité de l’alimentation.

  3. Le nom français courant de ce poisson malacoptérygien (à nageoires molles) est la lompe, lump ou grosse poule de mer, dont on ne consomme que les œufs. Vnote Patin 7/09 pour Conrad Gesner. Clusius est le nom latin du médecin et naturaliste flamand Charles de L’Écluse (1526-1609).

  4. V. notes Patin 6/1044 pour Olaüs Wormius, et 4/616 pour Henrik Fuiren. Otto Sperling et Simon Paulli ont correspondu avec Guy Patin. V. note [8], Historia anatomica de Bartholin, chapitre xv pour Ludovicus Pouchius.

  5. Cité plus haut dans la préface, le « petit lobe hépatique », porte le nom d’Adriaan van de Spiegel (Spigelius, v. note [8‑3], Historia anatomica, chapitre iii) : situé à la face postérieure du foie, il forme la partie arrière de son hile, entre la veine porte et la veine cave inférieure.

  6. Tout cela est représenté dans la figure iv, page 419. La figure v, page 423, reproduit la figure ii de Gaspare Aselli (chez le chien, v. supra note [21]).

  7. Cette description et son commentaire provoquaient le légitime scepticisme de Jean ii Riolan. Son principal intérêt est de montrer à quel point Bartholin était éloigné de la retentissante découverte que Jean Pecquet a publiée la même année.

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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Première Responsio (1652) aux
Experimenta nova anatomica
de Jean Pecquet (1651).
1. Préface, note 23.

Adresse permanente : https://numerabilis.u-paris.fr/editions-critiques/pecquet/?do=pg&let=1000&cln=23

(Consulté le 08/12/2025)

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