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< Thomas Bartholin Historia anatomica sur les lactifères thoraciques (1652) chapitre xiii > |
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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
Texte. Thomas Bartholin, Historia anatomica sur les lactifères thoraciques (1652), chapitre xiii
Adresse permanente : https://numerabilis.u-paris.fr/editions-critiques/pecquet/?do=pg&let=1033 (Consulté le 27/03/2025) | ||||||||||||
Les fonctions des lactifères thoraciques [2] et mésentériques [3] sont identiques, et ils ne diffèrent que par leur origine et leur terminaison : ceux qu’on a récemment découverts dans le thorax mènent le chyle depuis les nouvelles glandes lactées lombaires, ou réservoir, [4][5] jusqu’aux subclavières, [6][7] tandis que les lactifères mésentériques le mènent des intestins soit au foie, soit au réservoir. Dissections et ligatures prouvent manifestement qu’ils transportent du chyle. Leur insertion montre qu’ils déversent leur liquide laiteux dans les veines subclavières, l’injection d’air la rompt et si vous levez la ligature, il arrive parfois que les rameaux de la veine cave les bleuissent et que la cavité du thorax se colore en blanc. [1] D’ailleurs, du lait peut s’écouler quand on saigne les veines des bras ; et même quand le sang est louable, le sérum de celui qu’on puise lors de la phlébotomie m’est très souvent apparu semblable à du lait. Chez une jeune fille de Copenhague qui souffrait d’aménorrhée depuis quelques années, [8] j’ai conseillé la saignée périodique de la saphène [9] aux dates habituelles des règles, et en l’alternant avec celle du bras ; dernièrement, avant de subir la phlébotomie, elle avait bu du lait mêlé aux friandises ordinaires et au lieu de sérum, son sang a produit du lait ; [10] j’ai d’abord interprété cela comme une putréfaction du sang, mais bientôt changé d’avis en voyant que la jeune fille ne présentait aucun signe fâcheux, et elle a guéri depuis. [2][11] Tout à fait semblable à celle du pus, une teinte laiteuse mêlée au sang indique en revanche l’extinction de la chaleur native [12] et la menace d’une mort imminente, comme le note, parmi d’autres, Fr. Joel au livre iv, [Page 40 | LAT | IMG] section v, de sa Pratique. [13] Actuarius, au livre i, chapitre xv, sur les Causes des urines, [14] prévient à juste titre qu’on voit la teinte du sang virer au blanc selon les lois de la nature, qui modifient sa couleur quand il est altéré et transformé, comme en attestent le lait, [15] conformément à la doctrine de Galien, [16] et le sperme. [3][17] Le sang qu’on tire aux malades atteints de cacochymie [18] et de scorbut [19] engendre volontiers un sérum laiteux, comme Olaüs Wormius, qui est la fierté de notre patrie et du monde entier, m’a raconté l’avoir très souvent vu à Copenhague. [4][20] Les Annales Ecclesiastici [21] relatent une histoire merveilleuse, que beaucoup ont jusqu’ici tenue pour une fable ou pour un miracle, sur le lait qui a jailli du cou de saint Paul [22] quand il a été décapité sous le règne de Néron. [23] Maints auteurs l’ont contée, dont Baronius a rapporté et approuvé les propos, au § xi de l’an 69e suivant la naissance du Christ : Actes des saints Nérée et Achillée, [24] sermon 68 de saint Ambroise, [25] Jean Chrysostome. [5][26] Si ce récit est vrai, nous lui avons trouvé une explication simple avec les lactifères thoraciques que nous avons découverts : la hache a tranché les branches axillaires, ou plutôt l’insertion des lactifères qui s’y ouvre. D’autres n’admettent pas que du lait pur se soit écoulé, mais de l’eau douce issue de trois sources, qu’on voit encore entre la Via Ostiensis et la Via Ardeatina, et qui ont donné leur nom à une église et à un monastère : voyez entre autres là-dessus Blondus, trois livres de Roma instaurata, [27] Onuphrius Panvinus, de Basilicis Romanis, [28] et Schottus, à la 2e partie du Voyage d’Italie. [6][29] Quelques auteurs ajoutent que quand on lui eut coupé la tête, Paul proclama trois fois le nom de Jésus. Si c’est de l’eau qui s’est écoulée, il faut savoir que nous avons aussi vu sortir des veines axillaires, par les lactifères thoraciques, du sérum, [Page 41 | LAT | IMG] lequel gonflait pareillement ceux de l’abdomen et du thorax : le corps de ce saint homme, profondément affaibli par une longue captivité, de nombreux voyages et les maladies qu’il avait endurées, avait accumulé une abondance de chyle et de sang séreux. [7][30] Quant au fait qu’il ait proclamé le nom de Jésus après avoir eu la tête coupée, il s’explique de la même façon que pour cet homme, dont parle Fr. Verulamius, article 15 de son Hist. Vit. et Mort., § 32, à qui on avait infligé le genre de supplice que les Anglais réservent aux traîtres, et qu’on entendit prononcer trois ou quatre mots de prière après avoir été éviscéré, alors que le bourreau tenait dans sa main le cœur qu’il lui avait arraché. [8][31] | |||||||||||||
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Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr | |||||||||||||
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