Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
2e de 6 parties, note 52.
Note [52]

Jean ii Riolan injectait Thomas Bartholin dans le débat, en se référant à ses Vasa Lymphatica et leurs Funérailles du foie (1653), et surtout à ses « Doutes anatomiques » sur les lactifères thoraciques (même année). La première Responsio de Riolan à Jean Pecquet est longuement analysée dans leurs chapitres iii‑iv (pages 9‑27). {a} Le cinquième et dernier chapitre (pages 28‑29) contient ce déroutant aveu de Bartholin, dont Riolan faisait ses choux gras :

Ipse pro dignitate illius pugnaui quoad per veritatem licuit, et ne inuentis Pecquetianis ductibus planè in nihilum recideret, aliquam officij veteris partem concredidi ; Sed Lymphatica nostra vasa, nuper reperta, actionem tutelæ contrariam mihi ildulgent. Nec dubito maiori iam de iure plures amicitiæ illius et defensioni renunciaturos, etiam qui feruide causam illius tituati sunt.

Riolanus antiquarum traditionum propugnatur strenuus, sed in nouis inuentis examinandus arripiendisve nunquam pertinax, vbi Naturæ vidit consilium, pro Hepate tanquam Deus Stator contra Pequetum stetit. Et omnino Pecqueti inuentum Hepati non potuit omnem sanguificationis dignitatem facere ambiguam, vt in Hist. de Lact. Thor. demonstraui.

[Je me suis battu pour l’honneur de Pecquet autant que le respect de la vérité m’a autorisé à le faire, et je me suis fié en partie à mes anciennes convictions afin que les canaux qu’il a découverts ne tombent pas entièrement dans le néant. Néanmoins, les vaisseaux lymphatiques que j’ai récemment mis au jour me conduisent à inverser ma bienveillance à son égard, et je ne doute pas que beaucoup de ceux qui ont amicalement pris sa défense, et même ceux qui ont ardemment soutenu sa cause, y renonceront désormais fort légitimement.

Riolan est un infatigable défenseur des traditions anciennes, mais ne s’entête jamais à examiner et à empoigner les nouvelles inventions ; il invoque la sagesse de la nature quand, tel Jupiter Stator, {b} il défend fermement le foie contre Pecquet, dont la découverte n’est en aucune façon parvenue à mettre hors de doute le fait que ce viscère assure en partie la sanguification, comme je l’ai démontré dans mon Historia anatomica de Lacteis thoracis]. {c}


  1. Riolan avait sur-le-champ opposé ses Dubia resoluta (v. note [19], Brevis Destructio, chapitre v) aux Dubia Anatomica de Bartholin (Copenhague et Paris, 1653, v. note [26] de sa lettre à Johann Daniel Horst).

    Leur chapitre iv, Alia contra Lacteas Thoracicas argmenta ejusdem Riolani soluuntur [Résolution d’autres arguments de Riolan contre les lactifères thoraciques], se concluait sur ce vœu de Bartholin (page 27) :

    Alia Viri doctissimi momenta, temporis operisque parcus, transmitto. De singulis experientia judicet, cui fasces ex merito submittimus.

    [Soucieux d’épargner mon temps et ma peine, je passe sous silence les autres arguments de ce très savant homme. L’expérience aura raison de chacun d’entre eux et nous nous soumettrons de bonne grâce à son verdict].

  2. Surnom de Jupiter lié à son pouvoir d’arrêter les fuyards.

  3. Dans son Historia anatomica (1652), Bartholin n’a pas suivi Pecquet, en se montrant partisan d’une sanguification mixte, hépatique et cardiaque (v. note [2] de son chapitre xv). Je ne parviens pourtant pas à comprendre comment, en 1653, il pouvait tenir ces propos ambigus et condamner Pecquet à l’oubli, après avoir célébré les Funérailles du foie, et quelques pages avant d’énoncer, dans la 4e conclusion du chapitre d’où provient cet extrait (page 35) :

    Nihil sanguinis ex Hepate ad Mesenterium derivari ex Circulationis principiis, nec vllum chlylum ad Hepar peruenire, ex obseruationibus Vasorum nostrorum Lymphaticorum.

    [Aucune goutte de sang ne s’écoule du foie vers le mésentère, suivant les principes de la circulation, et aucune goutte de chyle ne parvient au foie, suivant notre découverte des vaisseaux lymphatiques].

    Il me semble que, déloyalement et contre toute logique, Bartholin voulait dénigrer les mérites de Pecquet, qui l’avait bel et bien précédé sur la supposée sanguification cardiaque exclusive, et ne pas s’attirer les foudres de Riolan : belle preuve de la puissante influence qu’il exerçait encore sur l’anatomie européenne.


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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
2e de 6 parties, note 52.

Adresse permanente : https://numerabilis.u-paris.fr/editions-critiques/pecquet/?do=pg&let=1055&cln=52

(Consulté le 07/12/2025)

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