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Les "combats" de Paré

La dignité de la chirurgie

Illustrer la chirurgie

"J'ai par tous moyens possibles mis la Chirurgie plus au net que jadis, soit pour la rudesse des siècles passés, ou envie de ceux qui en faisaient profession. Je dis que je l'ai mise au net, augmentée, et enrichie non seulement de raisons et préceptes propres à la chose que je traite, ains de plus de trois cents planches que j'ai fait tailler, et esquelles je comprends plus de cinq cents figures et portraits, tant de l'Anatomie que des instruments propres pour l'opération de notre art Chirurgique : à chacun desquels j'ai donné nom propre, et déclaré l'usage de chacun, à fin que les figures ne soient vainement représentées." (Au Roi, Œuvres, 1585)

Paré ne suit pas Jacques Sylvius dans sa défiance de l’image ; à l’exemple de Vésale ou de Charles Estienne, il choisit d’illustrer abondamment ses livres. La methode de traicter les playes de 1545 contient déjà les figures des instruments chirurgicaux. Mais, à partir de 1’Anatomie universelle de 1561, s’élabore une stratégie de l’image qui accompagne l’affirmation d’un auteur et d’une méthode. L’épître au lecteur met l’accent sur la fonction didactique des 49 figures. Empruntées à Vésale, elles ont été retaillées, car le but de Paré est d’être clair et précis pour l’enseignement du "chirurgien apprenti". Si l’illustration joue un rôle majeur dans l’enseignement de l’anatomie, elle est tout aussi nécessaire pour "montrer comment le chirurgien doit procéder".

Les figures n’ont pas seulement vocation pratique, elles s’adressent à un public plus vaste qui peut y admirer l’ingéniosité du praticien et plus encore celle de la Nature. Déjà, dans ses Dix livres de chirurgie de 1564, Paré présentait au roi ces figures d’instruments que le prince se plaisait "à manier et voir". L’intention s’affirme dans les Œuvres de 1579 qui s’achèvent par un album de toutes les images insérées dans le texte.

Les illustrations, dont la dédicace souligne le coût, participent du projet général : bien plus qu’une juxtaposition des traités publiés en trente ans, la somme de 1575 se veut "chef-d’œuvre" qui, dans sa composition, atteste la maîtrise d’un chirurgien et celle d’un auteur, en même temps que le prestige d’une science où les autres disciplines peuvent puiser.

 
[BIUM 8773]