«Soin et Compassion – Le Care comme concept transformateur de l’éthique»
Au carrefour de la philosophie morale et politique, de la théorie du genre et de la relation soignant-soigné, le concept de Care sera au centre de la conférence donnée par la philosophe et professeure de philosophie, Sandra Laugier, à l’Hôtel-Dieu, jeudi 19 janvier 2017, dans le cadre du séminaire :
«Soin et Compassion : Le sujet, l’institution hospitalière et la Cité».
L’éthique du care, ou éthique de la sollicitude, a été théorisée récemment en France, à partir d’une réflexion marquée, dans les pays anglo-saxons, par les recherches féministes.
Traditionnellement, ce sont les femmes, dans la société, qui incarnent les valeurs de soin, de prévenance, d’attention éducative, de compassion.
La psychologue Carol Gilligan en analysant les discours moraux féminins, à partir de l’échelle de développement moral conçue par Lawrence Kohlberg en 1982, où les femmes se situaient dans les stades inférieurs, conçut la notion de sollicitude, souci éthique, enraciné dans la complexité du réel et fondé sur la délibération, le soin et la conservation de la relation avec autrui.
En contestant le bien-fondé d’une identité morale dévalorisée, parce que rattachée à un seul genre, l’éthique du care ou éthique de la sollicitude s’efforce de remettre en cause le discours dominant des pouvoirs publics, longtemps apanage des hommes, et d’introduire de nouveaux enjeux éthiques dans le politique.
Dépendance et vulnérabilité peuvent être considérées comme la condition de tout individu, mais affectent en particulier certaines catégories : malades, personnes âgées, dépendantes, migrants, victimes de catastrophes…
Les éthiques pratiques du Care partent de problèmes moraux concrets, du sujet sensible, des valeurs du particulier et demandent aux politiques une attention plus forte aux professions de soins en général, mais aussi aux aidants qui portent une attention spécifique à leurs proches, y compris au travers de professions invisibles.
En cela, et dans la priorité qu’elles accordent à la vulnérabilité, elles s’opposent aux valeurs du libéralisme, qui privilégient la liberté, l’action, l’autonomie du sujet.
Dans Le souci des autres. Éthique et politique du care, de Patricia Paperman et Sandra Laugier (2006), un article s’intitule «Les gens vulnérables n’ont rien d’exceptionnel».
Cette éthique s’est étendue à des préoccupations plus globales : les négligences envers les humains et leur environnement, les grands désastres collectifs, la gestion des déchets, le travail de maintien et de réparation de la vie tel que le définit Joan Tronto, proposant le Care comme alternative, recentrée sur la notion de vulnérabilité, aux concepts de risque ou de catastrophe, prétendument inéluctables…
Pour accompagner cette conférence, nous vous proposons une bibliographie sur le thème du Care, établie avec l’aide de Sandra Laugier (présentation chronologique d’ouvrages pour la plupart consultables à la BIU Santé ou gratuitement en ligne).
Emmanuelle Prevost
Bibliographie
- Lovell AM, Pandolfo S, Das V, Laugier S. Face aux désastres : une conversation à quatre voix sur le «care», la folie et les grandes détresses collectives. Montreuil-sous-Bois: Ithaque; 2013. (Philosophie, anthropologie, psychologie). À consulter sur place au pôle Médecine, cote 234264-4
- Paperman P, Molinier P. L’éthique du care comme pensée de l’égalité. Travail, genre et sociétés. 4 nov 2011;(26):189‑93. Accessible en ligne sur Cairn.
Hôtel-Dieu, 1, place du Parvis-de-Notre-Dame, salle Marie-Curie, au troisième étage, escalier B1
Paris, Île-de-France
75004
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