« Monsieur Mentel veut absolument que nous en soyons redevables à un de ses ancêtres, nommé comme lui Mentel ou Mentelin ; [3] mais comme nous n’avons aucun passage formel dans les auteurs contemporains pour vider ce différend des auteurs ou inventeurs de l’imprimerie, je me suis tenu jusqu’à cette heure à ce qui est du fait et j’ai cru, laissant la question du droit à Messieurs Mentel, Mallinckrodt, Boxhornius et autres, [2][4][5] que, puisque nous n’avons point de plus anciens livres imprimés, il y a environ cent quatre-vingt-dix ans que Jean Fust [6] nous donna en 1459 le Durandus de Ritibus Ecclesiæ, le Catholicon Ianuensis qui était le Calepin de ce temps-là, en 1460, et la Bible en 1462, qui sont les trois premiers livres imprimés que l’on ait jusqu’à cette heure vus dans l’Europe, il fallait aussi que Jean Fust et Pierre Schoeffer, [7] qui les ont imprimés, fussent [Page 145 | LAT | IMG] les premiers qui ont mis en exécution et en pratique ce que ou eux-mêmes (comme il est très probable) ou Mentel, ou Gutenberg, [8] ou quelque autre avait trouvé ; [3] et que par conséquent, on pouvait soutenir avec raison qu’ils étaient les premiers imprimeurs de l’Europe. Pour moi, je pense qu’il ne faut, pour mettre Jean Fust en possession du droit qui lui appartient d’être inventeur de l’imprimerie, que produire les premiers livres qui ont été imprimés, puisqu’ils sont tous de son impression ; car il y a bien de l’apparence que si d’autres eussent eu meilleure part que lui en l’invention d’une chose si belle et si nécessaire, ils ne lui auraient pas permis de se l’attribuer à lui seul, et à son gendre Schoeffer, comme il a fait quasi en tous les livres qui sont sortis de sa presse, sans que personne ait osé faire de même, ou le contredire. Et puisque Salmuth, en son addition au chapitre de Typographia de Pancirole, [4][9][10] n’apporte que quatre de ces témoignages, et que Monsieur Bernard de Malinckrodt, l’un des doctes polygraphes qui soit aujourd’hui en Allemagne, se vante à bon droit d’y en avoir ajouté trois, je te veux bien avertir que j’en ai remarqué six autres, desquels je ne dirai maintenant toutes les dates, puisque les inscriptions en sont trop longues pour en avoir chargé ma mémoire ; et aussi que les ayant communiqués à Naudé, il m’a promis de les insérer, dans son Addition à l’Histoire de Louis xi lorsqu’on la réimprimera, et de dire qu’il les tient de moi. Or entre ces nouvelles épigraphes, la première est celle du Catholicon, [Page 146 | LAT | IMG] de l’an 1460, que le R.P. Romuald m’a montré dans la bibliothèque des feuillants de cette ville. [5][11] Et quoique les noms de Fust ni de son gendre n’y soient pas exprimés, il est constant néanmoins que c’étaient eux qui l’avaient imprimé ; réservé cela, tout est semblable aux autres Inscriptions rapportées par Salmuth et Malinckrodt. La seconde est de la Bible de 1462, dont les exemplaires se trouvent à Sainte Croix de la Bretonnerie, aux Carmes de la place Maubert, et chez Monsieur de Harlay, et dont l’inscription a déjà été rapportée par Naudé en l’Addition susdite. [6] La troisième est d’autres Bibles toutes pareilles de 1472, que l’on peut voir chez le Cardinal Mazarin. La quatrième, du saint Augustin, de la Cité de Dieu, avec les commentaires de Thomas Valois de 1473, que j’ai vu chez le sieur Claude Garasse de Pridiane ; la cinquième, du Mercure Trismégiste, de Potestate et Sapientia Dei, in‑4o (car tous les autres ci-dessus sont in‑fo) de 1503, que le même Garasse m’a montré, aussi bien que la sixième, qui est le Tite-Live de 1518, auquel, bien qu’il y ait quelque différence, elle est néanmoins plus avantageuse à Iean Fust que toutes les précédentes inscriptions, qui le publient auteur et inventeur de l’impression, car ce n’est plus lui ni son gendre, ni ses petits-fils, Jean et Ivo Schoeffer, qui parlent ; et en effet, il n’y a sur la fin du dit Tite-Live que ces mots : Moguntia, in ædibus Joannis Scoëffer, mense Nouembris, anno 1518 ; mais au commencement, il y a un privilège que l’empereur Maximilien donne au [Page 147 | LAT | IMG] dit Schoeffer, qu’on ne puisse contrefaire ledit Tite-Live de dix ans, ni tous les autres livres que le susdit Schoeffer imprimera de six, sous peine de confiscation, et ce en reconnaissance de ce que son oncle, Jean Fust, avait trouvé l’invention d’imprimer. Cùm sicut docti et moniti sumus fide dignorum testimonio, Ingeniosum Chalcographiæ, Authore Auo tuo, inuuentum felicibus incrementis in vniuersum orbem promanauerit, etc. Ce privilège est en date de 1518 ; après quoi on trouve au feuillet suivant, une Épître d’Érasme, [12] dans laquelle il parle premièrement des obligations qu’on a à ceux qui ont trouvé l’imprimerie, puis il ajoute : Quorum princeps fuisse fertur totius aui memoriâ celebrandus Ioannes Faust, Auus eius, cui Liuium hunc, etc. debemus. Et puisque, comme dit Quintilien, en ses Déclamations, non satis videri potest probatum quod duo sciunt. [13] Ajoutons-y pour troisième témoin, un Nicolaüs Carbachius, [14] dans l’Avertissement, qu’il a mis sur la fin dudit livre, et dans lequel il dit toutes les mêmes choses que le privilège impérial et la lettre d’Érasme. [7] Après quoi, si tu mets les six témoignages que je te viens de rapporter avec les sept cotés par le sieur Malinckrodt, tu auras treize occasions bien remarquables, auxquelles Jean Fust et les siens ont publié à tout le monde que l’imprimerie était née dans leur maison, sans que jamais Gutenberg ni d’autres s’y soient opposés : ce qui me fait croire qu’ils ne faisaient en cela tort à personne qui se soit plaint de leur procédé. Or si tu ajoutes à ces preuves essentielles qu’il [Page 148 | LAT | IMG] est encore à naître qui puisse dire avoir vu des livres imprimés par Gutenberg ou par Mentel auparavant ou au même temps que ceux de Jean Fust ; que tout ce que l’on dit des autres inventeurs de l’imprimerie n’est fondé que sur des rapports, des conjectures, des vraisemblances, des autorités forcées, des jalousies de villes les unes contre les autres ; que tous ceux qui donnent cette invention à d’autres qu’à Fust s’embrouillent, se contredisent, et se suivent l’un l’autre, font des ignorances grossières ; et finalement que Salmuth, en son addition sur le chapitre de Typographia de Pancirole, [4] cite un instrument public, par lequel il appert que Fust, après avoir longtemps lui seul soutenu la dépense, associa avec lui Gutenberg pour contribuer à une partie de tant de frais qu’il lui fallait faire, à cause principalement du parchemin sur lequel il tirait la plupart de ses livres ; après, dis-je, toutes ces preuves si légales, si peu forcées, si convaincantes et assurées pour Jean Fust, je ne sais pas comment il est possible qu’on le veuille tanquam septuagenarium de ponte deijcere, pour en mettre d’autres à sa place. Car s’ils ont recours aux témoins, outre qu’ils s’accordent fort mal les uns avec les autres et que peut-être ne sont-ils pas en si grand nombre que l’on s’imagine, et s’ils veulent établir leur opinion sur l’expérience, comme c’est le meilleur et le plus assuré moyen de terminer le différend dont il est question, qu’ils m’en donnent de meilleures que les miennes, que celles de [Page 149 | LAT | IMG] Salmuth et de Malinckrodt, et non seulement je quitte la partie, mais agello cedo parterno. » [8][15]Qui voudra voir un plus ample discours sur cette matière, il le trouvera aux Additions que le même Monsieur Naudé a faites sur la vie de Louis xi.
Afin de ne pas passer pour un Suffenus, [16] je prie mon cher lecteur de me pardonner et excuser si je cite les éloges de très savants hommes qui brillent par leur science et qui ont recommandé les ouvrages de Riolan : chacun saura ainsi que de doctes personnages ne m’ont pas jugé aussi méprisable que mes adversaires le proclament, et que je suis capable d’en procurer la preuve.En tout premier, je citerai Gabriel Naudé, docteur en médecine de Padoue, qui a brillé par l’étendue de son érudition : dans ses livres, il n’a jamais parlé de Riolan sans le glorifier, et l’a appelé le prince des médecins de notre siècle à la page 174 de son livre de Studio militari ; et dans son Additio à l’histoire de Louis xi, roi de France, page 102 et ailleurs, il le dit être hæc ætate sine controversia Principem. [9]
Si de me vir bonus bene sentit, eodem loco sum, quo si omnes idem sentirent, par illis, idemque iudicium est, dit Sénèque ; et Vir bonus bonum nunquam odit, dit Ménandre. [10][17][18]
[Page 150 | LAT | IMG] Gaspar Bachot, très savant médecin de Moulins dans sa continuation de Joubert sur les Erreurs populaires touchant la médecine, qualifie Riolan de « miracle du monde », pour son habileté et son érudition en anatomie. [11][19][20]
Caspar Hofmann, en ses Commentaires sur les livres de Galien de Usu partium, [21][22] cite en maints endroits l’autorité de Riolan comme celle d’un juge et arbitre en anatomie.
Dans sa Médecine pratique, Daniel Sennert loue Riolan dans le chapitre sur le Mésentère et l’épiploon. [23]
Dans son livre iii, Zacutus : [24] « Riolan dans son Anthropographie, [25] ouvrage dont le style est tout à fait excellent, la science remarquable et l’éloquence admirable, a débattu sur les cotylédons [26] plus subtilement que tous les anatomistes, il est digne d’être comparé aux plus doctes Anciens. » [12]
Joannes Antonides Vander Linden, [27] très savant médecin et professeur de Leyde, [28] parle ainsi de Riolan à la page 33 de sa Physiologie : « Quand Hippocrate a écrit son livre des Lieux dans l’homme, [29] bonus Senex id habuit consilij, quod nuper non minus eleganter, quàm vtiliter exequutus est Ioannes Riolanus filius, cuius
Crescit occulto velut arbor auo
Fama Primani, micat inter ignes omneis
Gallicum sidus velut inter ignes Luna minores. » [13][30]L’Anglais Harvey, outre les compliments dont il a honoré à Riolan dans ses deux Essais anatomiques sur la Circulation du sang, [31] a qualifié Bauhin [32] et Riolan de « très savants hommes et très compétents anatomistes » dans son Essai anatomique sur le Mouvement du cœur et du sang. [14][33]
[Page 151 | LAT | IMG] Dans sa Réponse à Harvey, le Français Jacques Primerose, docteur de Montpellier, qui habite en Angleterre, a écrit : Anatomicam Disciplinam Ioannes Riolanus, Præceptor olim meus, multis et nouis inuentis, et elegantioribus explicationibus ita locupletauit, vt vltimum ei complementum addidisse videatur. [15][34]
Simon Paulli, natif de Rostock, médecin du roi au Danemark, [35] dans son opuscule sur l’Arthrite, appelle Riolan « son précepteur et un anatomiste incomparable qu’il faut vénérer éternellement ».
Gregorius Nymmanus dit de Riolan que c’est un « savant homme et le plus éminent anatomiste de ce temps ». [36]
Après avoir visité 54 universités en 14 ans et soigneusement observé leurs professeurs, Fridericus Monavius, médecin natif de Breslau, est enfin rentré dans sa patrie, puis a publié un écrit où il déclare franchement que l’École de Paris est inégalable, la meilleure, la plus grande et la plus auguste de toutes ; et non sans l’honorer d’un éloge, il a dédié ses premiers travaux anatomiques à son maître Riolan. [16][37]
Le très savant médecin hollandais Christiaen Utenbogard, [38] professeur de l’Université d’Utrecht, a écrit, dans sa lettre du 8 janvier 1650 à Guy Patin, docteur en médecine de Paris et professeur royal : [39] « Pour vous donner mon avis sur l’Anthropographie de Riolan, je vous dirai que j’en avais beaucoup entendu sur le renom de ce grand homme, mais l’empreinte que je vois dans ses livres dépasse la rumeur. L’Anthropographie du grand Riolan est le fruit d’une profonde érudition, d’une très riche expérience, [Page 152 | LAT | IMG] d’une inépuisable science médicale et d’une très grande intelligence. Vesling [40] avait coutume de dire que, parmi tant d’anatomistes, Riolan était le seul à qui on dût faire confiance, car il avait toujours été fort assidu à disséquer les corps humains (ce que peu font), comme à lire les auteurs. »
Dans une lettre à M. Guy Patin datée du 25 avril 1653, Johann Georg Volckamer, très brillant médecin de Nuremberg, [41] écrit : « Je prie Dieu de tout cœur pour que M. Riolan, qui a très hautement mérité de la république médicale, jouisse encore longtemps de sa vigoureuse vieillesse, sans jamais perdre sa vigueur. J’aurais souhaité que notre Schlegel, médecin natif de Hambourg et mon très cher ami, [42] atteignît le terme de ses jours et quittât la scène de la vie avec plus de félicité, mais il a été emporté au mois de février dernier par une fièvre pétéchiale [43] tandis qu’il accomplissait ses tâches médicales et anatomiques, dans l’immense tristesse et chagrin des plus savants hommes. J’aurais tant souhaité que Schlegel ne nous eût pas été arraché par une mort si prématurée et nous fût resté comme fait le très énergique Riolan, dont il admirait l’audace anatomique en dépit de son âge avancé, comme il me l’a écrit dans la dernière lettre qu’il m’a adressée avant de mourir. » [17]
Dans une lettre qu’il a écrite à M. Jean-Alcide Musnier, [44] très célèbre médecin de Gênes, Cecilio Folli, [45] médecin de Venise et très expert professeur d’anatomie, écrit : « J’ai lu avec immense avidité ce remarquable livre que votre intime ami M. Guy Patin vous a envoyé de Paris, et ne parvenant pas à en trouver de meilleur, parmi les nombreuses louanges que je puis répandre, je choisis de n’en dire qu’une, c’est qu’il est l’œuvre de Monsieur Riolan à qui la louange est due parce qu’il a remporté tous les suffrages [Page 153 | LAT | IMG] pour son talent à joindre l’utile à l’agréable ; mais les livres de Riolan ne souffrent pas d’être loués car ils sont au-dessus de cela et n’admettent plus de l’être, sauf à vouloir lasser tout le monde. Je garde donc pour moi, au fond du cœur, les nombreuses louanges que mérite cet éminent homme, car je ne viendrai jamais à bout de les chanter, même en n’y prenant aucun répit. À Venise le 7 décembre 1652. » [18]
Markward Schlegel, disciple de Riolan, et très docte médecin et habile anatomiste de Hambourg, loue admirablement le talent et l’adresse de son ancien maître en anatomie, et recommande ses livres à tous. [17]
Guiffart, très docte médecin de Rouen et anatomiste accompli, reconnaît Riolan pour son vénérable maître : « par ses nombreuses dissections et ses lectures d’auteurs divers, par la longue suite d’années qu’il a consacrées à pratiquer et à raisonner sur l’examen très attentif des corps, Riolan s’est montré le plus perspicace de tous ceux qui l’ont précédé. » [19]
Tous ceux qui ont daigné lire son Opuscule sur les Veines lactées ont remarqué les éloges que Charles Le Noble, [46] très savant médecin de Rouen et anatomiste fort compétent, y adresse à Riolan. [20]
Dans son Introduction à l’art de remédier, parue en 1654, Hermann Conring écrit : « Riolan le Jeune a trouvé plus grande gloire que celle dont on m’honore avec sa grandiose et si célèbre Anthropographie, ainsi que par son Manuel anatomique qui est plus digne d’être lu avant les autres, en raison de son contenu pathologique. » [21][47][48]
Voici encore le jugement du noble Monsieur Charles Artur du Plessis, [Page 154 | LAT | IMG] docteur en médecine à Avranches, sur Riolan : [22][49][50] « Hippocrate a le premier sculpté l’anatomie, qui est l’œil de la physiologie, et le principe et fondement de la médecine, puis Galien l’a considérablement éclairée. Néanmoins, ces derniers temps, nous disposons presque de ses ultimes contours car voici environ quarante-cinq ans, sous les auspices du très heureux roi Henri le Grand, [51] et sous le nom d’Anthropographie, vous avez entrepris d’embellir cette Sparte, [23] en la pétrissant une troisième fois, en gommant ses rides, en y ajoutant des réflexions et observations nouvelles, et vous l’avez si élégamment polie que vient tout juste de se lever enfin en pleine lumière, comme le faîte de l’art, un ouvrage parfaitement achevé : c’est l’abrégé le plus riche et complet, où les adeptes de notre métier, tant vieux que jeunes, puiseront à l’envi, ainsi que d’un trésor ; et pour que rien ne manque au si éminent prix de votre œuvre, vous y avez encore ajouté le Manuel anatomique et pathologique, pour promouvoir les opérations de l’art et les diriger très utilement, si bien que chacun doit vous exprimer les remerciements publics qui vous sont dus à tant de titres. Nul non plus ne manquera de reconnaître les mérites que vous avez accumulés, en recevant la claire approbation de tous les savants car vous avez dirigé l’anatomie durant tant d’années, non seulement depuis les chaires et les amphithéâtres des Écoles, mais aussi par tous ces brillants livres que vous avez publiés, à l’intention des Français, nos compatriotes, comme à celle des étrangers, Anglais, Hollandais, Allemands, Italiens, Espagnols, car vous êtes partout recommandé avec éloges. Pour moi, qui suis un homme d’esprit sincère et candide, je les répands très librement, [Page 155 | LAT | IMG] et vous vénère et admire comme presque le seul de tous les auteurs de notre temps qu’il faut hautement célébrer. Qu’y a-t-il en effet de plus brillant et glorieux que de recevoir de son vivant cet hommage que post cineres rari habent Poëtæ, pour parler comme Martial, [24][52] dont, me dit-on, vous prisez fort le sel ? Courage donc, Monsieur ! vous êtes à l’abri des jugements capricieux, vous avez acquis la commune admiration de quiconque se voue aux études anatomiques : c’est par cet éloge que le très savant Duret [53] a conclu ses louanges d’Hippocrate. [25] Continuez à enfoncer un bonnet sur vos cheveux blancs, et prenez exemple non seulement sur l’unique Fabrice d’Aquapendente [54] s’appliquant à écrire des livres en sa quatre-vingtième année d’âge, mais aussi sur d’autres qui ont très heureusement couronné leur vie en luttant dans l’arène littéraire. Le dernier de juin 1651. » [26]
Alethophilus est soumis à Pecquet, et donc contraint de s’opposer à Riolan et d’en dire du mal, comme il a cherché à le faire en divers endroits de sa lettre. [55] Voici toutefois comment Adrastée [56] le pousse à parler de moi : « Quoi qu’on en pense, je crois qu’il faut pardonner à un vieillard qui n’a pas démérité de la république des lettres, qui a parsemé son Anatomie des fleurs qu’il a tirées avec un louable soin des meilleurs ouvrages classiques, qui a fort élégamment habillé et orné des faits fort rebattus et vulgaires, et qui a surtout eu le souci non négligeable de rappeler leur intérêt dans la pratique médicale. »
Pexatus pulchrè, rides mea, Zoïle, trita,
Sunt hæc trita quidem, Zoïle, sed mea sunt. [27][57]J’ai dressé un modeste relevé ou inventaire de mes travaux dans mon Anthropographie de 1626, afin de faire savoir au lecteur ce que j’ai découvert ou corrigé. [28][58] Si Alethophilus avait pris la peine de le consulter et s’y connaissait bien en anatomie, il n’aurait pas prononcé un jugement si hardi et mal avisé [Page 156 | LAT | IMG] sur mes recherches ; mais il faut pardonner à ce parasite et sycophante qui vend sa plume au plus offrant. Écoute donc bien ceci, cher Alethophilus :
Miserum est aliena viuere quadra. [29][59]
Un inepte poétereau et rimailleur merdeux, qui se donne le nom d’Alethophilus dans une lettre impie et abominable qu’il a écrite à Pecquet, a composé des vers ridicules et insensés contre notre médecine et les médecins de Paris, sur l’anagramme de Riolanus, Lanius ore insano ; [30] mais il n’a pas bien considéré que son patron, le susdit Pecquet, armé de sa secespita (le couteau en fer que les Anciens utilisaient pour immoler les victimes qu’ils offraient en sacrifice), a massacré des centaines de chiens ; [61] c’est donc lui qui est le Lanius ore insano, le canicide, l’euiscerator canum rabidus, en français « l’écorcheur de chiens enragés ». [31] Riolan, quand il anatomisait publiquement, revêtu d’une longue robe de soie, disséquait avec tant de dextérité et d’adresse, sans presque aucune effusion de sang, qu’il n’avait besoin ni de tablier ni de manchettes, comme il l’a déclaré à la page 62 de son Anthropographie : Ne medici secantis actio sit horrida et sordida, partes omnes peritè ac solerter secabit, [Page 157 | LAT | IMG] vt vitet largas sanguinis effusiones, aut eas citissimè spongiabit ; quæ si præstiterit eleganter, non indigebit eo vestitu, qui lanij pecudes mactantis speciem redolet. Propterea soleo tunica eadem sericea talari indutus secare, et demonstrare Anatomen, qua suggestum ascendo ad docendum. Appositè Soranus, cap. 4, [62] ad nostrum institutum : Ipsa Natura interdum indoctis, etiam peritorum tribuit efficaciam : sed ipsa operatio et ipsius honesta tractatio longè in eo apparet, qui peritus est, et facile improbat imperitum. [32][63] On m’a depuis longtemps reproché d’exercer la boucherie quand je dissèque les cadavres de mes propres mains, en disant que j’accomplis là une tâche qui est dévolue au chirurgien, car c’est à lui qu’incombe la charge d’exécuter et de monter l’anatomie ; le docteur régent se contente de la commenter et de discourir publiquement sur ce qu’il en connaît, comme s’il n’était qu’un physicien. [64] Ai-je exercé la boucherie et donné la torture en spectacle quand j’ai moi-même disséqué des cadavres ? Je conviens certes que cette tâche a été bien plus profitable pour nos élèves et nos auditeurs, que glorieuse pour moi, mais un médecin peut-il parfaitement discourir sur les structures anatomiques s’il ne les a pas soigneusement examinées de ses propres yeux et explorées de son adroite main ? Où donc cherchera-t-il à obtenir leur connaissance et leur représentation ? Est-ce d’un dessin inutile et trompeur ? Est-ce désormais le chirurgien qui sera le précepteur du médecin, dont dépendront son discours, sa main et son savoir ? Vous en lirez plus sur ce sujet dans le chapitre xvii, livre i de l’Anthropographie. [33]Si je n’avais pas disséqué moi-même, je n’aurais pas enseigné la manière de le faire facilement, ce qui m’a valu les louanges des médecins et des bons anatomistes : Schlegel, dans son livre sur la Circulation contre Riolan et Michael Kirsten [65] dans le très élégant poème qu’il lui a dédié,
Accedit causæ consors Riolanus, et ingens
Affert momentum, Phœbi Riolanus amicus,
Cui faciles Pallas cultros, ritúsque secandi
Felices dedit : hinc partis ex arte tropæis,
Eminet ante alios, et vertice pulsat Olympum. [34][66][67]Après tant d’éclatants éloges, que je n’ai pas mendiés en écrivant des lettres, comme quelques-uns ont coutume de le faire, j’ai de quoi me réjouir en mon for intérieur et bien espérer de mes travaux anatomiques. Je puis enfin employer ce vers de Virgile, qui va contre le gré des suppôts pecquétiens et de Pecquet lui-même :
Fortunate senex, ergo tua rura manebunt. [35][68]
Dans ce livre anonyme de 718 pages, autrement intitulé Mascurat, {a} Gabriel Naudé, bibliothécaire du cardinal Mazarin, prenait la défense de son maître contre la première vague des libelles frondeurs qu’on a plus tard appelés mazarinades. {b} Pour attaquer Jacques Mentel, Jean ii Riolan en citait les pages 173‑179, en omettant ce court préambule :
« S. {c} Je croyais tantôt, lorsque tu as parlé de la bibliothèque de Monsieur Mentel, que tu étais de ses amis, mais maintenant que tu soutiens une opinion contraire à la sienne, touchant l’invention de l’imprimerie, je ne saurais plus qu’en dire ; car il veut absolument que nous en soyons redevables à un de ses ancêtres nommé comme lui Mentel ou Mentelin.M. {c} Cette diversité d’opinion n’empêche pas que nous ne soyons bons amis […]. {d} J’ai toutefois lu avec plaisir et satisfaction ce qu’il nous a donné pour établir cette sienne opinion, et j’avoue qu’il écrit avec non moins de jugement que d’éloquence […]. » {e}
- Paris, 1650, v. note Patin 127/166.
- V. note Patin 22/166.
- Le livre de Naudé a la forme d’un dialogue entre deux Parisiens imaginaires, le libraire Saint-Ange (S.) et l’imprimeur Mascurat (M.), auquel est attribuée la suite du texte repris par Riolan.
- Naudé, intime ami de Mentel, se cachait derrière Mascurat.
- Parænesis de Jacques Mentel (Paris, 1650, v. infra note [2]).
Riolan a beaucoup abrégé et discrètement retouché cet extrait. J’en ai modernisé l’orthographe et la ponctuation, mais je n’ai rien osé faire contre la longueur et la confusion des phrases de Naudé.
Le droit est à prendre ici au sens d’argumentation qu’on bâtit autour d’un fait incontesté ; sur les querelles historiques touchant à l’invention de l’imprimerie au xve s., v. notes :
V. notes [27], Responsio ad Pecquetianos, 3e partie, et Patin 13/1040, pour l’association de Johannes Gutenberg, Johann Fust (Fustius) et Peter Schoeffer dans l’invention de l’imprimerie à Mayence en 1440.
Outre la Bible, les premiers livres imprimés par Fust ont été :
Guidonis Pancirolli Rerum Memorabilium sive Deperditarum, Pars prior Commentariis illustrata et locis prope innumeris postremum aucta ab Henrico Salmuth Ambergensium Syndico Emerito.
[Première partie des Choses mémorables ou perdues de Guido Pancirollus, {a} enrichie par les commentaires et les additions presque innombrables de Henricus Salmuth, {b} syndic émérite d’Amberg]. {c}
- Guido Pancirole (1523-1599), professeur de droit à Turin.
- Heinrich Salmuth (1559-1634), juriste allemand.
- Francfort, Godefridus Schonwetterus, 1646, in‑4o : Appendix ad titulum xii. de Typographia. De Typographia sive Artis impressioræ inventione, verissima historia [Appendice au titre xii sur l’imprimerie. Histoire parfaitement véridique de l’invention de la typographie ou art de l’impression], livre ii, pages 311‑313.
V. notes Patin :
Les épigraphes étaient les « sentences ou devises que quelques auteurs mettent au frontispice de leurs ouvrages et qui en indiquent l’objet » (Dictionnaire de l’Académie française). Dans les premiers livres imprimés (incunables), il s’agissait de l’incipit (début du texte).
V. notes Patin 19/469 pour Achille de Harlay, deuxième de ce prénom, qui détenait en 1650 la riche bibliothèque de cette famille de hauts magistrats parisiens, et 8/133 pour la place Maubert où se trouvait le couvent des grands carmes de Paris.
Gabriel Naudé, alias Mascurat, avait en effet parlé du troisième exemplaire parisien de la Bible imprimée en 1462 dans son Addition à l’Histoire de Louis xi, {a} pages 289‑290 :
« Mais pour revenir à nos trois premiers et principaux auteurs de l’impression, {b} je me persuade, et il est bien à croire qu’ils firent une infinité d’épreuves et maculatures {c} auparavant que d’avoir tout justifié et assemblé leurs instruments ; après quoi, ils commencèrent enfin d’en composer non les Offices de Cicéron, comme ont voulu […] tous les auteurs sans en excepter aucun, au moins que j’ai vus, mais une grande Bible in folio, qui fut achevée l’an 1462, comme il est porté par cette inscription mise sur la fin d’icelle, Præsens hoc opusculum finitum ac completum, et ad eusebiam dei industriæ in ciuitate Maguntina per Johannem fust ciuem, et Petrum schoiffer de Gernsheim clericum diocesis eiusdem, est consummatum anno Incarnationis Dominicæ M.cccc.lxij. in vigilia assumptionis gloriosæ virginis mariæ. {d} Sur quoi nous devons premièrement remarquer que le caractère dont fut composée cette Bible (que j’ai vue et considérée diligemment en cette ville dans la bibliothèque de Sainte-Croix de la Bretonnerie, {e} où elle est imprimée sur vélin et reliée en deux volumes in folio) était si semblable à l’écriture de main que l’on faisait en ce temps-là […]. »
- V. supra note [5].
- Johannes Gutenberg, Johann Fust et Peter Schoeffer.
- Maculature : « feuille d’imprimerie mal imprimée, ou mal sèche, dont les caractères sont pochés ou peu lisibles, soit qu’elle soit mal tirée, ou trop tôt battue [pressée pour l’assembler aux autres] » (Furetière).
- J’ai retouché ce texte (où ne figure pas le nom de Gutenberg) {i} pour le rendre conforme à la reproduction mise en ligne par la Plateforme ouverte du patrimoine (ministère français de la Culture) :
« Le présent ouvrage a été fini et complété pour le pieux service de Dieu en la cité de Mayence par Johann Fust, qui en est citoyen, et Peter Schoeffer, natif de Gernsheim, clerc du susdit diocèse, et il a été achevé en 1462e de l’Incarnation du Seigneur, la veille du jour de la glorieuse Assomption de la Vierge Marie. » {ii}
- La Bible dite de Gutenberg a été le tout premier livre jamais imprimé, en 1455, mais Naudé a ignoré cette édition. En 1462, Fust et Schoeffer s’étaient brouillés avec Gutenberg et travaillaient pour leur propre compte.
- Le 14 août.
- Chez les carmes du couvent des Billettes, v. note Patin 9/380.
Quintilien, Déclamations mineures, cccxii : « on ne peut tenir pour suffisamment prouvé ce dont deux personnes témoignent. »
Dans tout ce qui précède, je ne me suis acharné ni sur La Cité de Dieu de saint Augustin {a} avec les commentaires de Thomas Waleys (Valois), théologien dominicain anglais du xive s., ni sur le traité « de la Puissance et Sagesse de Dieu » attribué à Mercure Trismégiste, {b} ni sur l’obscur bibliophile nivernais Claude Garasse de Pridiane. En revanche, j’ai été impressionné par la qualité typographique du :
T. Livius Patavinus Historicus. Duobus libris auctus cvm L. Flori Epitome, indice copioso, et annotatis in libros vii. Belli Maced. Cum privilegio decennii.[Tite-Live, historien natif de Padoue, augmenté de deux livres avec l’abrégé de L. Florus, {c} un copieux index et des annotations sur les 7 livres de la guerre de Macédoine. Avec privilège de dix ans]. {d}
- En dehors du fait qu’en ancienne typographie, il a donné son nom au saint-augustin, « sorte de caractère de la force de 13 points, qui est entre le gros romain (16 points) et le cicéro (11 points), ainsi nommé parce qu’on s’en servit en 1467 pour imprimer la Cité de Dieu de saint Augustin » (Littré DLF).
- V. note Patin 9/9078.
- V. note Patin 4/435.
- Moguntiæ in ædibus Ioannis Scheffer, mense Novembri An. mdxviii [Mayence, en la maison Scheffer, novembre 1518], in‑fo.
Le privilège de l’empereur Maximilien ier, daté de Wels, le 9 décembre 1518, énonce en effet que :
Honesto nostro, et sacri imperij fideli nobis dilecto Ioanni Scheffer Chalcographo Moguntino gratiam nostram Cæsaream, et omne bonum. Cum, sicut docti et moniti sumus fidedignorum testimonio, ingeniosum chalcographiæ, authore auo tuo, inuentum felicibus incrementis in uniuersum orbem promanauerit […].[(Accordons) notre grâce impériale à notre honorable (sujet) Johann Schoeffer, {i} imprimeur de Mayence, bien aimé de nous pour sa fidélité au Saint-Empire. Le témoignage de personnes dignes de foi nous a appris et avisé que l’ingénieuse invention de l’imprimerie, dont l’auteur a été son grand-père, s’est répandue et heureusement accrue dans le monde entier (…)]. {ii}
- Johann Schoeffer était fils aîné de Peter, et donc petit-fils de Johann Fust ; cité par Naudé, Ivo Schoeffer était neveu de Johann.
- Suit l’attribution d’une exclusivité de dix ans pour le Tite-Live et de six ans pour tous les autres livres que Schoeffer imprimera ensuite.
Les deux pièces mentionnées par Naudé sont postérieures à l’achevé d’imprimer du susdit Tite-Live.
Atque huius quidem laudis præcipua portio debetur huius pœnè dicerim diuini opificij repertoribus, quorum princeps fuisse fertur, totius æui memoria celebrandus, ioannes faust, auus eius, cui Liuium hunc, tum auctum duobus uoluminibus, tum innumeris locis ex codice uetustissimo castigatum debemus, ut hoc egregium decus partim ad ioannem scheffer, uelut hæreditario iure deuolvatur, partim ad Moguntiaci ciuitatis, et aliâs multis nominibus inclytæ, gloriam pertineat.[La gloire de ce progrès, que je dirais presque divin, revient principalement à ses inventeurs, dont le premier, dit-on, a été jean fust, d’immortelle mémoire. Il est le grand-père de johann schoeffer, celui à qui nous devons, comme par héritage, ce Tite-Live augmenté de deux volumes et corrigé en d’innombrables endroits sur la plus ancienne copie manuscrite ; {a} le mérite de ce splendide ouvrage revient aussi à la cité de Mayence, dont la célébrité tient en outre à maints autres titres de gloire].
« je renonce à l’humble domaine de mes aïeux », Juvénal, Satire vi, vers 56.
V. note [19], Brevis Destructio, chapitre ii, pour tanquam septuagenarium de ponte deijcere [jeter du pont comme un septuagénaire].
Après Gabriel Naudé, les historiens ont établi que la Bible de Johannes Gutenberg a été le premier livre jamais imprimé (1455, v. supra note [6], notule {d‑i}). Aucun n’a retenu la contribution de Jean Mentelin à cette invention qui a changé la face du monde.
« sans conteste le premier de ce siècle » : pour entamer la longue énumération {a} des éloges qu’on lui a dressés, Jean ii Riolan invitait ses lecteurs à consulter deux ouvrages de Gabriel Naudé.
atque vt maximi viri auctoritate concludam, negat anatomicorum princeps Riolanus exempto liene viuere animalia posse.[et pour conclure sur l’autorité d’un très grand homme, Riolan, le prince des anatomistes, nie que les animaux puissent vivre sans rate]. {c}
« Bref, le grand désir et affection qu’il {e} avait au progrès et à l’avancement des sciences était tel qu’encore bien que Celse ait dit incidere virorum corpora et crudele et superuacaneum esse, {f} et que même beaucoup de lois défendent aux médecins et chirurgiens l’ouverture et dissection des corps exécutés par justice, il ne laissa toutefois de leur permettre qu’il pussent ouvrir le corps vif d’un franc archer {g} condamné à la mort, pour reconnaître les causes et la génération de la pierre, comme a curieusement remarqué M. Riolan, {h} le plus docte et célèbre médecin et anatomiste qui soit maintenant en Europe […]. » {i}
- On pourra la trouver fastidieuse mais elle renseigne sur la mentalité de Riolan et n’est pas dénuée d’intérêt historique.
- Rome, 1637, v. note Patin 10/1037.
- Ce qui, comme chacun sait, est faux : v. note Patin 20/322.
- Paris, 1630, v. supra note [5].
- Louis xi.
- De Re medica, fin de la préface : « Il est à la fois cruel et parfaitement inutile d’ouvrir les corps des hommes. »
- Homme de guerre que son service auprès de la Couronne exemptait d’impôts.
- Référence marginale : lib. 1 Anthropogr. cap. 10, Anthropographia, Paris, 1626, page 70, chapitre intitulé An vivum hominem secare sit necessarium et liceat [S’il est nécessaire et permis d’ouvrir les hommes en vie] ; la cystotomie de l’archer, sans doute la première en France, fut réalisée en 1474.
- Suit (pages 103‑105) le rapport donné par « l’auteur du Rosier des guerres » (Pierre Choisnet, médecin de Louis xi) : souffrant de lithiase urinaire, l’archer fut condamné à en être opéré vivant, sa pierre vésicale fut extraite ; non seulement il y aurait survécu, mais en aurait guéri.
Pour amplifier le bon avis de Gabriel Naudé sur sa personne, Jean ii Riolan citait, en les mélangeant, deux fragments antiques que j’ai remis en bon ordre.
« Si un honnête homme pense du bien de moi, c’est pour moi comme si tous les honnêtes gens en faisaient autant et partageaient le même jugement » vient de Sénèque le Jeune, Lettres à Lucilius, cii :
Quia si de me bene uir bonus sentit, eodem loco sum quo si omnes boni idem sentirent ; omnes enim, si me cognouerint, idem sentient. Par illis idemque iudicium est, æque uero inficiscitur. Dissidere non possunt ; ita pro eo est ac si omnes idem sentiant, quia aliud sentire non possunt.« Qu’un seul homme vertueux pense du bien de moi, c’est pour moi comme si tous les gens vertueux pensaient de même, ce qui aurait lieu si tous me connaissaient. Leur jugement est pareil, identique ; or, c’est toujours tenir la même voie que de ne pouvoir se partager ; c’est donc comme si tous avaient le même sentiment, puisqu’en avoir un autre leur est impossible. » {a}
V. note Patin 13/1389 pour ce livre de Gaspar Bachot (Lyon, 1626), qui continuait celui de Laurent Joubert sur le même sujet. {a} Bachot y honore les Riolan quand il s’attaque vigoureusement aux médecins chimiques (spagiriques), à la 47e page de sa préface :
« […] pour les expulser et confondre en leurs principes, il les faut seulement renvoyer à ces beaux esprits qui les ont entrepris de nouveau à poil et à crin, {b} et à cette censure de Paris de feu Monsieur Riolan, {c} notre maître, et à son fils, miracle des anatomistes de ce temps […]. »
- Bordeaux, 1578, v. note Patin 8/137.
- Leur ont arraché poils et cheveux.
- Jean i Riolan.
V. notes Patin :
Iohannis Antonidæ Vander Linden… Medicina Physiologica, nova curataque Methodo ex optimis quibusque Auctoribus contracta, et propriis Observationibus locupletata [Médecine physiologique de Johannes Antonides Vander Linden… condensée en une nouvelle et soigneuse méthode, tirée de tous les meilleurs auteurs, et enrichie par des observations personnelles], {a} livre ii, chapitre ii, De Partibus [Parties du corps], § 3, page 33 :
Vbi bonus Senex id habuit consilii, quod nuper non minus eleganter, quàm vtiliter exequutus est Ioannes Riolanus F. (cujusCrescit, occulto velut arbor auo, Fama Primani : micat inter ignes omneis Gallicum sidus, velut inter ignes Luna minores).edito Encheiridio Anatomico et Pathologico, eoque sic instituto, ut post enarrationem constitutionis naturalis cujusque partis attexuerit ejusdem constitutionem contra naturam, quo facilior sit morborum et sympromatum cognitio, quæ partibus inhærent.
[Dans ce livre, notre bon vieillard {b} a eu pour dessein celui qu’a récemment poursuivi, de manière non moins élégante qu’utile, Jean Riolan le Fils (dont
Le renom de soldat de la première légion a augmenté, comme l’arbre pousse d’une souche cachée : il est l’astre français qui brille parmi toutes les étoiles, comme la Lune parmi les plus petites étoiles) {c}en publiant son Manuel anatomique et pathologique, et en l’ordonnant de manière que la description de chaque partie normale précède celle de ses états contre nature, pour faciliter la connaissance des symptômes et maladies qui l’affectent].
- Amsterdam, Ioannes a Ravestein, 1653, in‑4o de 884 pages.
Johannes Antonides Vander Linden a copieusement correspondu avec Guy Patin.
- Hippocrate dans son livre des Lieux dans l’homme.
- Vander Linden est l’auteur de ces vers dont la facture est aussi pompeuse que boiteuse.
Ma traduction a corrigé la confusion du propos de Jean ii Riolan sur les deux références aux ouvrages de William Harvey qu’il citait.
Quod Caspar Bauhinus et Iohannes Riolanus viri doctissimi et Anatomici pertitissimi obseruarunt et admonent, quod si in viua sectione alicuius animalis cordis motum studiose obserues, quatuor motus loco, et tempore distinctos aspicies : quorum duo sunt proprii auricularum, ventriculorum duo.[Caspar Bauhin et Jean Riolan, {b} très savants hommes et très compétents anatomistes, ont observé et font bien remarquer que si vous examinez soigneusement le battement du cœur chez tout animal que vous ouvrez vivant, vous verrez quatre mouvements {c} se produire en des endroits et à des moments distincts : deux intéressent les oreillettes et deux, les ventricules].
- Fac-similé (Florence, 1928) de l’édition originale (Francfort, 1628) : v. note Patin 12/177.
- Une note marginale renvoie aux :
- livre ii, chapitre xxi, De substantia, ventriculis et auriculis Cordis [Substance, ventricules et oreillettes du cœur], Theatrum anatomicum de Bauhin, Francfort, 1621, pages 220‑225 ;
- livre vii, chapitre i, Viventis animalis Obseruationes Anatomicæ [Observations anatomiques de l’animal vivant], l’Anthropographia de Riolan, Paris, 1626, pages 657‑659.
- Systoles suivie de diastoles.
Iacobi Primirosii Doctoris Medici Exercitationes, et Animadversiones in Librum Guilielmi Harveii, Medici et Anatomici in Collegio Londinensi Regii, de Motu Cordis et Circulatione Sanguinis [Essais de Jacques Primerose, docteur en médecine, et ses Animadversions contre le livre de William Harvey, médecin et anatomiste du roi, membre du Collège de Londres, sur le Mouvement du cœur et la Circulation du sang], {a} Salutem [Salut] à William Harvey, page 7 :
Sane qui alias recentiorum libros parcissime legere soleo, anatomicamque disciplinam iam nulla re magis quam magnitudine sua laborare videbam, eamque Iohannes Riolanus præceptor olim meus, et novis inventis, et elegantioribus explicationibus ita locupletasset, ut ultimum illi complementum addidisse videretur, inutile ad bene medendum esse iudicabam quicquid insuper accessisset.[Mon habitude est en outre de ne lire qu’avec extrême parcimonie les livres des auteurs récents et je voyais que la principale difficulté de l’anatomie était sa vaste étendue, mais que Jean Riolan, qui fut jadis mon maître, l’avait tant éclairée de découvertes nouvelles et de fort élégantes explications, qu’il semble l’avoir menée à son ultime perfection ; {b} et pour bien soigner, je jugeais inutile d’y ajouter quoi que ce fût].
- Londres, Gul. Iones, 1630, in‑4o de 84 pages ; v. note Patin 41/104 pour Jacques (James) Primerose (Jacobus Primerosius).
- Mise en exergue du passage repris par Jean ii Riolan.
Jean ii Riolan citait les témoignages de trois de ses autres élèves allemands.
Cujus rei causam qui scire volet, incomparabilis Dn. Johannis Riolani Parisiensis, Præceptoris mei, ætatem colendi scripta evolvat, et optimam inveniet.[Qui voudra en connaître la cause lira les écrits de l’incomparable M. Jean Riolan, natif de Paris, qui a été mon précepteur, qu’il faut vénérer éternellement, et y trouvera la meilleure description]. {b}
- Wittemberg, Salomo Auerbach, 1630, in‑4o.
- Je n’ai rien trouvé de mémorable sur l’arthrite dans les écrits de Jean ii Riolan.
Guy Patin avait fait lire à Jean ii Riolan, son mentor, des lettres que lui avaient adressées deux de ses correspondants, mais elles sont aujourd’hui perdues.
Comme en atteste le Sylloge d’Alcide Musnier, la première Responsio de Jean ii Riolan devait être le livre que Guy Patin lui avait envoyé en 1652. Ma traduction de son compliment a voulu respecter ses répétitions et son emphase, dont Riolan se gargarisait.
Très intéressé par le chyle et la formation de la graisse, Cecilio Folli (v. note [3‑2], Experimenta nova anatomica, chapitre vi) avait aussi dû dévorer la première Responsio de Riolan avec passion.
Ce propos ne figure pas dans le Cor vindicatum de Pierre Guiffart, {a} seul ouvrage qu’il ait, à ma connaissance, publié en latin avant 1655. Néanmoins, Jean ii Riolan aurait pu effrontément détourner à son profit ce qu’on y lit dans la préface Ad Lectorem, 3e‑4e pages :
Restabant harum lactearum caudex et eius iuneviendi rami, quod Pecquetus feliciter absoluit ; unde Aristotelis doctrina omninò confirmata est : quod ante quadraginta circiter annos doctissimus Ioannes Riolanus exquisitissimus Anatomiæ Professor Regius, mihi olim sed semper venerandus Præceptor, quasi prophetici spiritus afflatu vaticinatus erat, quippe Anatomiam Peripateticorum quæ in viuentium animantium dissectione versabatur commendans, lib. i. Anthropographiæ, c xj. dixerat, Intelligant omnes Philosophi Aristotelem præstantissimum fuisse Anatomicum, nec lanionum operâ et manibus vsum fuisse in secandis animalibus, sed oculatissimâ manu corporum minutissima perscrutatum fuisse, ac sanè desertus fuit Aristoteles in rebus Anatomicis, quia non fuit intellectus : sed venient tandem tempora, quibus rediuiua fiet et florebit hæc Anatomia peripatetica.[Il restait à découvrir la souche et la branche de ces lactifères, {b} et c’est ce que Pecquet a heureusement résolu, en confirmant entièrement la doctrine d’Aristote. {c} Voilà environ quarante ans, comme inspiré par un souffle prophétique, le très savant Jean Riolan, très distingué professeur royal d’anatomie, que je vénère toujours pour avoir jadis été mon précepteur, avait prédit cela quand il recommandait l’anatomie des péripatéticiens qui avaient coutume de disséquer les animaux vivants, en disant, dans son Anthropographie, livre i, chapitre xi : {d} Tous les philosophes comprennent qu’Aristote a été un très éminent anatomiste et qu’il n’a pas recouru au service et aux mains des bouchers pour ouvrir les animaux, mais qu’il a lui-même fouillé leurs corps de sa propre main qui était parfaitement experte. Ses études anatomiques ont pourtant été tout à fait négligées parce qu’Aristote n’a pas été compris, mais viendront enfin des temps où cette anatomie péripatétique sera ressuscitée et fleurira]. {e}
- Rouen, 1652 : v. note [10], Brevis Destructio, chapitre i ; Guiffart y défendait la théorie nouvelle de Jean Pecquet sur la sanguification.
- Les lactifères mésentériques d’Aselli.
- Le cœur produit le sang, v. note [10], Experimenta nova anatomica, chapitre i.
- Deuxième édition, Paris, 1626 (v. supra notule {g}, note [9]), chapitre v (et non xi) du livre i, page 55 ; je n’ai pas trouvé ce passage dans la première édition de 1618, mais il est présent dans la troisième (1649).
- La remarque de Guiffart était très pertinente et on comprend que Riolan ne l’ait pas citée ; je peine pourtant à imaginer qu’il l’ait estropiée au point de s’attribuer les qualités qu’il avait lui-même vantées chez Aristote.
Cet opuscule figure dans notre édition sous le titre de Lettre de Charles Le Noble sur les veines lactées ; ses trois premières pages dégoulinent de louanges si dithyrambiques sur Jean ii Riolan qu’elles ont failli me décourager d’en lire la suite, qui brille par l’éclat de sa clairvoyance anatomique.
Jean ii Riolan malmenait le titre et méconnaissait l’auteur de l’Introductio in universam Artem medicam que Sebastian Scheffer a extraite des leçons publiques de son maître Hermann Conring. {a} En revanche, Riolan y citait fidèlement le début du § xxxiii, chapitre iv, thèse i, page 108, tout en omettant la phrase moins flatteuse qui suit :
Idem nuper novam sententiam de circulatione sanguinis introducere est conatus : sed hanc doctissime refutavit Slegelius noster.[Le même s’est récemment efforcé d’introduire un avis nouveau sur la circulation du sang, mais notre Schlegel l’a très savamment réfuté]. {b}
- Helmstedt, 1654, v. note Patin 26/484.
- V. supra note [17] pour Paul Markward Schlegel. C’était la tige après la fleur de la rose.
La lettre de Charles Artur du Plessis (Carolus Arturus Plesseus), médecin d’Avranches, à Jean ii Riolan, qui en donnait ici un long extrait, est imprimée à la fin de l’Encheiridium anatomicum et pathologicum de 1658, pages Qq ij ro‑Qq ij ro ; elle est aussi transcrite, mais non traduite dans l’édition française de 1661, pages 773‑779.
Ce distingué gentilhomme normand a plus tard publié un Promptuarium Hippocratis, in locos communes ordine Alphabetico… [Abrégé d’Hippocrate, sous la forme de citations rangées dans l’ordre alphabétique…] (Rouen, veuve de Iacobus Lucas, 1683, in‑4o) ; il contient un portrait de l’auteur, orné de ses armes, qui a été dessiné en 1660 dans sa 68e année d’âge.
V. note [9], lettre de Jacques Mentel à Jean Pecquet, pour le sens d’« embellir Sparte » (ici l’anatomie) ; mais Charles Artur du Plessis allait faire très peu de cas des grands anatomistes du xvie s. (André Vasale, Jérôme Fabrice d’Aquapendente ou Bartolomeo Eustachi), et ignorer les brillants contemporains de Jean ii Riolan.
La première Anthropographia de Riolan (Paris, 1618) était dédiée au roi Louis xiii, et non à Henri iv dit le Grand, son père (mort en 1610).
« de rares poètes possèdent après leur mort », Épigrammes, livre i, ii, vers 6.
Je suis revenu penaud, mais pas entièrement bredouille de mes recherches dans les ouvrages de Louis Duret. Les pièces liminaires de son édition commentée des Prænotiones Coacæ [Prénotions coaques] d’Hippocrate {a} contiennent un poème latin de 21 vers que Henri i Blacvod {b} adressait à Jean Duret, {c} fils de Louis (mort en 1586), et qui commence ainsi :
Macte animi iuvenis, multos vigilata per annos,
Qui patris monumenta tui das luce potiri.[Courage, jeune homme ! toi qui mets au jour les ouvrages de ton père, car tes soirées vont y être occupées pendant nombre d’années]. {d}
- Paris, 1588, v. note Patin 10/11.
- V. note Patin 29/390.
- V. note Patin 3/149.
- Je conviens humblement que cette explication du Macte igitur animi [Courage donc Monsieur !] de Charles Artur du Plessis est bancale car elle supposerait son incapacité des plus improbables à comprendre ce qu’il lisait.
Datée de Pontorson, la lettre se continue sur cinq pages, en racontant comment Jean ii Riolan avait convaincu Charles Artur du Plessis de se faire inciser le col de la vessie pour être soulagé d’une dysurie opiniâtre. L’intervention fut un plein succès et l’opéré en fut profondément reconnaissant à son sauveur.
Martial, Épigrammes, livre ii, lviii (complète), contre Zoïle, allégorie du poète jaloux qui prend ses vers aux autres : « Joliment habillé de neuf, Zoïle, tu ris de mes nippes. Ce sont certes des nippes, Zoïle, mais elles sont à moi. »
L’emprunt de Jean ii Riolan à la lettre de Sebastianus Alethophilus vient de sa page 178 ; il s’amusait du parallèle entre Alethophilus (l’« amoureux de la vérité ») et Adrastée (Némésis, déesse de l’indéniable vérité, v. note [41], première Responsio, 6e partie).
L’Anthropographie de 1626 (v. supra notule {h}, note [9]) possède un sommaire très détaillé (59 pages), intitulé Index capitum et præcipuorum articulorum, atque præsertim eorum quæ a Ioann. Riolano vel reperta sunt, vel illustrata [Index des chapitres et principaux articles, et surtout de ce que Jean Riolan a soit trouvé, soit éclairé]. Son préambule en donne la clé de lecture :
[Sachez que les articles marqués du signe † sont de mon invention, c’est-à-dire qu’ils exposent une opinion nouvelle ou quelque chose que les autres anatomistes n’ont pas dit, observé ou tiré d’un autre auteur].
[Les articles marqués du signe * éclairent grandement le sujet traité, ou l’expliquent autrement que le reste des anatomistes l’a fait].
L’arcade (ou anastomose) artérielle colique dite de Riolan (v. note [21], Responsio ad Pecquetianos, 4e partie) n’y figure pas.
« Il est misérable de vivre du pain d’autrui », adage tiré de Juvénal, Satire v, « Les parasites », vers 2 : ut bona summma putes aliena viuere quadra [si bien que tu considères comme un bien suprême de vivre du pain d’autrui].
V. note [24], seconde Responsio de Jean ii Riolan, première partie pour la conversion de Samuel Sorbière (Sebastianus Alethophilus) au catholicisme et sa charge d’aumônier auprès de François Fouquet, évêque d’Agde ; un sycophante est un imposteur qui calomnie en dénonçant faussement les autres.
« Boucher à la bouche folle » ; le nom d’Alethophilus n’apparaît nulle part dans l’Anagramma, adressé à Jean Pecquet, qui conclut la seconde édition de ses Experimenta nova anatomica (1654) ; mais après l’avoir copieusement étrillé, Jean ii Riolan lui attribuait ces vers féroces, signés « F.I.P. ». Je ne partage pas son avis et les attribuerais bien plus volontiers à Jacques Mentel : v. leur note [2].
Jean ii Riolan commettait un surprenant solécisme : sa version française correspond à euiscerator canum rabidorum (cas génitif pluriel), et non rabidus (nominatif singulier), pour « l’écorcheur enragé de chiens ».
Anthropographia, Paris, 1649, loc. cit., fin du chapitre De apparatu anatomico veteri, et novo [L’Outillage anatomique ancien et nouveau] :
« Pour que sa dissection ne soit pas horrible et répugnante, le médecin découpera toutes les parties avec art et adresse pour éviter les grands épanchements de sang ou sinon, les éponger très rapidement. {a} S’il procède avec élégance, il n’aura pas besoin de ce vêtement qui le fait ressembler à un boucher qui tue le bétail. Mon habitude est donc de disséquer et de démontrer l’anatomie habillé de ma longue robe, qui est la même que celle que je porte pour enseigner du haut de la chaire. {b} Soranos, chapitre iiii, a établi fort à propos que : Ipsa Natura interdum indoctis, etiam peritorum tribuit efficaciam : sed ipsa operatio et ipsius honesta tractatio longè in eo apparet, qui peritus est, et facile improbat imperitum. » {c}
- Jean ii Riolan parlait donc de vivisection animale, qui n’était pas son exercice favori.
- La tunica talaris était la robe longue des docteurs régents qui descendait jusqu’à la cheville (talus).
Comme Riolan allait ensuite l’expliquer dans sa réponse à l’Anagramma, le professeur chargé du cours d’anatomie commentait ordinairement depuis sa chaire la dissection accomplie par un chirurgien qui opérait dans la fosse de l’amphithéâtre.
- In artem medendi Isagoge [Introduction à l’art de remédier] de Soranos d’Éphèse, médecin grec du iie s., traduction latine de Bâle, 1528 (v. notule {b}, note Patin 53/8215), chapitre intitulé Quod operatio, medici peritiam aut imperitiam prodit [L’opération du médecin révèle sa compétence ou son incompétence] page 2 ro :
« La nature attribue même parfois aux ignorants une efficacité égale à celle des savants ; mais l’art et l’honnête opération se font bien mieux voir chez celui qui connaît le métier, et dénoncent aisément celui qui ne le connaît pas. »
Chapitre intitulé Conditiones Doctoris Anatomici [Qualités de celui qui enseigne l’anatomie] (Paris, 1649, pages 55‑59).
Pour Jean ii Riolan, comme pour toute la Compagnie des docteurs régents de la Faculté parisienne, les chirurgiens devaient être les laquais des médecins, et il était absolument inconcevable d’inverser la situation. Cela ne valait pourtant que pour les chirurgiens-barbiers ; les autres, dits de robe longue, qui formaient à Paris la Compagnie de Saint-Côme, luttaient âprement pour conserver leur indépendance et s’organiser en collège : v. notes Patin 1/6 et 22/6.
L’absence d’illustrations est une particularité des ouvrages anatomiques de Riolan. La seule exception est la réédition de son Manuel anatomique et pathologique parue à Leyde en 1649, que l’imprimeur a enrichie de planches empruntées à Johann Vesling (v. notes Patin 25/150 et [4], biographie de Riolan).
Cinq premiers vers de la 5e page du poème de Michael Kirstenius Silesius {a} Claris. excellentissimoque Medico et Anatomico, D.D. Paulo Marquarto Slegelio, de sanguinis motu scribenti [Au très célèbre et brillant M. Paul Markward Schlegel, médecin et anatomiste qui écrit sur le mouvement du sang] dans le commentaire de Paul Markward Schlegel de sanguinis motu, contre Jean ii Riolan : {b}
« Riolan prend part au débat et y contribue par un immense ouvrage. Il est l’ami de Phébus, à qui Pallas {c} a donné de maniables couteaux et d’heureux rites qui permettent de disséquer : ainsi a-t-il surpassé les autres en recueillant les trophées qu’enfante l’art, et secoue-t-il l’Olympe à son sommet. » {d}
- Michael Kirsten (1620-1678), médecin silésien qui professa les mathématiques, la physique et la poésie à Hambourg.
- Hambourg, 1650, v. notule {a}, note [9], Responsio ad Pecquetianos, 2e partie.
- V. notes [23], lettre de Samuel Sorbière, alias Sebastianus Alethophilus, pour Phébus (Apollon, dieu de la médecine) et [5], lettre de Charles Le Noble à Riolan, première partie, pour Pallas (Minerve, déesse du savoir).
- L’Olympe est la résidence de Jupiter, c’est-à-dire William Harvey, dans l’allégorie de Kirsten.
« Réjouis-toi vieillard, car tu garderas tes pâtures ! », Bucoliques, églogue i, vers 47 : les dieux rendent ses champs au vieux berger Tityre après qu’il les a délaissés pour aller voir Rome.
Page 144, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
extraict d’vn livre
de feu Monsieur Naudé, imprimé à Pa-
ris, l’an 1649. intitulé, Iugement de tout
ce qui a été imprimé contre le Cardinal Ma-
zarin, depuis le 6. de janvier, iusques à la
Declaration du 1. Avril, 1649. tiré de la
page 173. et suivantes.
Monsieur Mentel, veut absolu-
ment que nous en soyons redeuables
à un de ses Ancestres, nommé comme
luy, Mentel ou Mentelin : Mais
comme nous n’auons aucun passage formel dans
les Autheurs Contemporains, pour vuider ce
different, des Autheurs, ou Inuenteurs de l’Im-
primerie, ie me suis tenu iusques à cette heure,
à ce qui est du Fait, et i’ay crû laissant la que-
stion du Droit à Messieurs Mantel, Malinc-
krot, Boxhornius et autres, que puisque nous
n’auons point de plus anciens Livres imprimez
il y a environ cent quatre-vingt dix ans, que
Iean Fust nous donna en 1459. le Durantus de
Ritibus Ecclesiæ, le Catholicon Ianuensis, qui estoit
le Calepin de ce temps-là, en 1460. et la Bible
en 1462. qui sont les trois premiers Liures im-
primez, que l’on ait iusques à cette heure veus
dans l’Europe : Il falloit aussi que Iean Fust, et
Pierre Scoëffer, qui les ont imprimez, fussent
Page 145, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
les premiers qui ont mis en execution et en pra-
tique ce que ou eux mesmes (comme il est tres-
probable) ou Mentel, ou Gutemberg, ou quel-
que autre auoit trouvé ; et que par consequent,
on pouuoit soustenir auec raison, qu’ils estoient
les premiers Imprimeurs de l’Europe. Pour moy
ie pense, qu’il ne faut pour mettre Jean Fust,
en possession du droit qui luy appartient d’estre
Inuenteur de l’Imprimerie, que produire les pre-
miers Liures, qui ont été imprimez, puisqu’ils
sont tous de son impression : Car il y a bien de
l’apparence, que si d’autres eussent eu meilleure
part que luy, en l’inuention d’vne chose si belle
et si necessaire, ils ne luy auroient pas permis
de se l’attribuer à luy seul, et à son gendre
Scoëffer, comme il a fait quasi en tous les Liures,
qui sont sortis de sa Presse, sans que personne
ait osé faire de mesme, ou le contredire. Et puis
que Salmuth, en son Addition au Chapitre de Ty-
pographia, de Pancirole, n’apporte que quatre
de ces tesmoignages, et que Monsieur Bernard
de Malinkrot, l’un des doctes Polygraphes,
qui soit aujourd’huy en Allemagne, se vante à
bon droit, d’y en auoir adiuousté trois : Ie te veux
bien aduertir, que j’en ay remarqué six autres,
desquels ie ne diray maintenant toutes les dattes,
puis que les Inscriptions en sont trop longues,
pour en auoir chargé ma mémoire, Et aussi que
les ayant communiquez à Naudé, il m’a promis
de les inserer, dans son Addition à l’Histoire de
Louys XI. lors qu’on l’imprimera, {a} et de dire,
qu’il les tient de moy. Or entre ces nouuelles
Epigraphes, la première est celle du Catholicon,
- Sic pour : la r’imprimera (souce citée).
Page 146, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
de l’an 1460. que le R.P. Romualde m’a mon-
tré dans la Bibliothèque des Feuillans de cette
Ville. Et quoy que les noms de Fust ny de son
Gendre n’y soient pas exprimez, il est constant
neantmoins, que c’estoient eux, qui l’auaient
imprimé ; Reservé cela, tout est semblable aux
autres Inscriptions rapportées par Salmuth et
Malinkrot. La seconde est de la Bible de 1462.
dont les Exemplaires se trouuent à Sainte Croix
de la Bretonnerie, aux Carmes de la Place Mau-
bert, et chez Monsieur de Harlay, et dont l’In-
scription a desia esté rapportée par Naudé en
l’Addition susdite. La troisième est d’autres Bi-
bles toutes pareilles de 1472. que l’on peut voir
chez le Cardinal Mazarin. La quatrième, du
S. Augustin, de la Cité de Dieu, auec les Com-
mentaires de Thomas Valois de 1473. que i’ay
veu chez le sieur Claude Garasse de Pridiane :
La cinquième, du Mercure Trismegiste, de po-
testate et sapientia Dei, in 4. -Car tous les au-
tres ci-dessus sont in-folio) de 1503. que le
mesme Garasse m’a montré aussi bien que la si-
xième, qui est le Tite-Liue de 1518. auquel bien
qu’il y ait quelque difference, elle est neant-
moins plus auantageuse à Iean Fust, que toutes
les precedentes Inscriptions, qui le publient Au-
theur et Inuenteur de l’Impression ; Car ce n’est
plus lui, ni son Gendre, ni ses petits fils, Jean et
Iuo Scoëffer, qui parlent, et en effet, il n’y a sur
la fin dudit Tite-Liue, que ces mots : Moguntia,
in ædibus Joannis Scoëffer, mense Nouembris, an-
no 1518. Mais au commencement il y a un Pri-
uilege, que l’Empereur Maximilian donne au-
Page 147, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
dit Scoëffer, qu’on ne puisse contrefaire ledit
Tite-Liue de dix ans, ny tous les autres Liures
que le susdit Scoëffer imprimera de six, sous pei-
ne de confiscation, et ce en reconnoissance de
ce que son Oncle Iean Fust auoit trouué l’inuen-
tion d’imprimer. Cùm sicut docti et moniti su-
mus fide dignorum testimonio, Ingeniosum Chal-
cographiæ, Authore Auo tuo, inuuentum felicibus
incrementis in vniuersum orbem promanauerit, etc.
Ce Priuilege est en datte de 1518. Apres quoy
on trouue au feuillet suiuant, vne Epistre d’E
rasme, dans laquelle il parle premierement des
obligations, qu’on a à ceux qui ont trouué l’Im-
primerie, puis il adjouste : Quorum princeps fuisse
fertur totius aui memoriâ celebrandus Ioannes
Faust, Auus eius, cui Liuium hunc, etc. debemus.
Et puisque, comme dit Quintilian, en ses De-
clamations, non satis videri potest probatum quod
duo sciunt ; Adioustons-y pour troisième tes-
moin, un Nicolaus Carbachius, dans l’Aduertis-
sement, qu’il a mis sur la fin dudit Liure, et dans
lequel il dit toutes les mesmes choses, que le
Priuilege Imperial, et la Lettre d’Erasme. Apres
quoy, si tu mets les six tesmoignages, que ie te
viens de rapporter auec les sept cottez par le
sieur Malinkrot, tu auras treize occasions bien
remarquables, esquelles Jean Fàust et les siens,
ont publié à tout le monde, que l’Imprimerie
estoit née dans leur maison, sans que iamais
Guttemberg, ny d’autres s’y soient opposés. Ce
qui me fait croire, qu’ils ne faisoient en cela tort
à personne, qui se soit plaint de leur procedé.
Or si tu adioustes à ces preuues essentielles, qu’il
Page 148, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
est encor à naistre, qui puisse dire auoir veu des
Liures imprimes par Guttemberg, ou par Men-
tel, auparauant, ou au mesme temps, que ceux
de Iean Fust : que tout ce que l’on dit des autres
Inuenteurs de l’Imprimerie, n’est fondé que sur
des rapports, des conjectures, des vraysemblan-
ces, des authoritez forcées, des jalousies de
Villes les vnes contre les autres : Que tous ceux
qui donnent cette Inuuention à d’autres qu’à
Fust, s’embrouillent, se contredisent, et se sui-
vent l’vn l’autre, font des ignorances grossieres.
Et finalement que Salmuth, en son Addition sur
le Chapitre de Typographia, de Pancirole, cite vn
instrument public, par lequel il appert, que Fust
apres auoir long-temps luy seul soutenu la despence,
associa auec luy, Guttemberg, pour contribuer à
vne partie de tant de frais qu’il luy falloit faire,
à cause principalement du parchemin, sur le-
quel il tiroit la plus part de ses Liures : Apres
dis-ie, toutes ces preuues si legales, si peu for-
cées, si convainquantes, et assurées pour Iean
Fust, ie ne sçay pas comme il est possible, qu’on
le vueille tanquam septuagenarium de ponte de-
ijcere, pour en mettre d’autres à sa place. Car
s’ils ont recours aux tesmoins, outre qu’ils s’ac-
cordent fort mal les vns auec les autres : et que
peut estre ne sont ils pas en si grand nombre
que l’on s’imagine, et s’ils veulent establir leur
opinion sur l’experience, comme c’est le meil-
leur et le plus asseuré moyen de terminer le dif-
ferent dont il est question, qu’ils m’en donnent
de meilleures que les miennes, que celles de
Page 149, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
Salmuth, et de Malinkrot, et non seulement ie
quitte la partie, sed agello cedo parterno.Qui voudra voir vn plus ample Discours sur
cette matiere, il le trouuera aux Additions que
le mesme Monsieur Naudé a faites sur la vie de
Louys XI.
——————————————
iudicia doctissimorum
Medicorum de Ioanne Riolano.Ne Suffenus videar, veniam et excusatio-
nem peto à Lectore meo, si elogia Doctis-
simorum virorum doctrina cluentium profero,
ad commendationem Operum Riolani, vt agno-
scant mei Aduersarij : me non adeo despectum
esse viris doctis, vt isti proclamant, nec vllum
possim proferre testimonium.In primis producam Gabrielem Naudæum, vi-
rum eruditissimum, in omni genere scientiarum,
et Medicum Doctorem Patauinum, qui nun-
quam in suis libris loquitur de Riolano, nisi cum
Præfatione honoris, quem appellat Medicorum
nostra ætate Principem : sed libro de Studio mi-
litari, pag. 174. Et in Additionibus ad Histo-
riam Regis Francorum Lud. XI. præstantiorem
et doctiorem Anatomicum Europæ vocat,
pag. 102. et alibi Riolanum vocat, hæc ætate
sine controversia Principem.Si de me vir bonus bene sentit, eodem loco
sum, quo si omnes idem sentirent, par illis,
idemque iudicium est. Vir bonus, ait Menan-
der, bonum nunquam odit, inquit Seneca.
Page 150, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
Joannes {a} Bachot, doctissimus Medicus Moli-
nensis, in Continuatione Errorum popularium Iou-
beti, in medicina : Riolanum propter eximiam
peritiam et eruditionem in rebus Anatomicis,
Orbis miraculum vocat.Caspar Hofmannus, in suis Commentariis ad
libros Galeni de vsu partium, passim adducit Au-
thoritatem Riolani, tanquam iudicis et arbitri
in rebus Anatomicis.Daniel Sennertus, in suis Operibus practicis,
capite de Mesenterio et Omento, et alibi passim,
audat Riolanum, et plurima ab eo deprompsit.Zacutus, lib. 3. Riolanus in Athropographia,
præexcellenti stylo, eximia doctrina, et facun-
dia mira, de Cotyledonibus inter omnes Anato-
micos subtilius disceptauit, dignus cum pri-
scis Doctoribus {b} comparetur.Joannes Antonides Vander Linden, eruditissi-
mus Medicus et Professor Leidensis, in Physio-
logia, pag. 33. sic loquitur de Riolano. Cùm
scripsit Hippocrates librum de locis in homine, bo-
nus Senex id habuit consilij, quod nuper non mi-
nus eleganter, quàm vtiliter exequutus est Ioan-
nes Riolanus filius, cuiusCrescit occulto velut arbor auo
Fama Primani, micat inter ignes {c}
Gallicum sidus velut inter ignes Luna minores.Harueus Anglus, præter laudationes, quas tri-
buit Riolano, in secunda Exercitatione de Circu-
latione sanguinis, in Præfatione primæ Exercita-
tionis de motu Cordis et Sanguinis, {d} Bauhinum et
Riolanum appellat viros doctissimos et Anatomi-
cos peritissimos.
- Sic pour : Gaspard (source citée).
- Sic pour : doctissimis (source citée).
- Sic pour : inter ignes omneis (source citée).
- Sic pour : in duæ Exercitationes de Circulatione sanguinis, et in Exercitatione de motu Cordis et Sanguinis (cohérence avec les sources citées).
Page 151, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
Jacobus Primerosus, Doctor Monspeliensis,
Gallus, qui habitat in Anglia, in sua Responsione
ad Harueum, sic loquitur. Anatomicam Disci-
plinam Ioannes Riolanus, Præceptor olim meus,
multis et nouis inuentis, et elegantioribus ex-
plicationibus ita locupletauit, vt vltimum ei
complementum addidisse videatur.Simon Pauli, Rostochiensis, Medicus Regis in
Dania eruditissimus, libello de Arthritide, vocat
Riolanum suum Præceptorem, Anatomicum in-
comparabilem, ætatem colendum.Gregorius Nymmanus sic loquitur de Riolano :
Vir Doctus, Anatomicus hoc tempore excellens.Petrus {a} Monauius, Medicus Vratislauiensis,
perlustratis 54. Academiis intra 14. annos, et
diligenter obseruatis earum Professoribus, tan-
dem redux in patriam, ingenuè professus est
scripto publico, Scholam Parisiensem Acade-
miarum esse Optimam et Maximam, et Augu-
stissimam, nulla intercedente : tanquam Anato-
micorum Primicerio suorum laborum primitias non
sine honorifico elogio consercrauit Riolano, suo Præ-
ceptori.Christianus Vtembogardus, Medicus eruditis-
simus Hollandus, et in Vltraiectina Academia
Professor, octauo Ianuarij 1650. scribens ad
D. Guidonem Patinum, Doctorem Medicum Pa-
risiensem et Professorem Regium. Vt meam de
Anthropographia Riolani sententiam feram, di-
co multa me famâ de tanto viro Audiuisse, sed
quæ video in libris superant vestigia famam. Mul-
tæ lectionis, experientiæ plurimæ, inexhaustæ
- Sic pour : Fridericus (respect de la chronologie).
Page 152, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
Doctrinæ, et Ingenij maximi fœtus est Magni
Riolani Anthropographia. Et quod Veslingius di-
cere solitus erat in tot Anatomicis, vni Riolano
fides adhibenda est : ille enim tam sedulus in dis-
secandis corporibus (quod pauci faciunt) quàm
in euoluendis Authoribus semper fuit.Ioannes Georgius Volcamerus, præstantissimus
Medicus Norimbergensis, scripta Epistola ad
D. Guidonem Patinum, 25. Aprilis, 1653. Rio-
lano viro de re Medica meritissimo viridem
etiamnum senectutem et vires nunquam mar-
cescentes animitus precor : Consimilem ætatis
feliciter peractæ scenam terminúmque optas-
sem optimo nostro Slegellio, Hamburgensi Me-
dico mihi amicissimo, qui exacto Februarij men-
se, inter Medicas Operationes Anatomicas fe-
bre Petechiali extinctus est, cum maximo vi-
rorum doctissimorum mœrore et cordolio.
Vtinam hunc immatura fata non abripuissent,
stetisset grauissimo Riolano, cuius insignes in
Anatomicis ausus est progressus in senili hac æ-
tate admiratus est in suis ad me datis ante obi-
tum literis.Ex Epistola Cæcilij Folij, Medici Veneti et
Professoris Anatomici peritissimi, ad D. Ioan-
nem Alcidium Musnier, Medicum Genuen-
sem præstantissimum : Eximium illum librum,
quem amicus tuus singularis D. Guido Patinus
misit Lutetiâ Parisiorum, animo percurri auidis-
simo, nec quidquam nisi optimum offendens, è plu-
rimis laudibus, quas effundere possem, hanc vnam
eligo potissimam dicere, Domini Riolani opus est,
nam quod omne tulerit punctum, dulci vtile ad-
Page 153, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
miscens, laus est Riolano debita : sed Riolani ope-
ra nec laudem patiuntur, quia excedunt, nec lau-
datorem admittunt, quia omnino defatigant : Qua-
re eius in me animum meritáque plurima hac exi-
mij viri laudatione nunquam satis exhibitâ peren-
ne exsoluenda conseruo. Venetiis, die 7. Decem-
bris, 1652.Marquartus Slegelius, Discipulus Riolani, do-
ctissimus Medicus et peritissimus Anatomicus
Hamburgensis, miris laudibus deprædicat indu-
striam et peritiam Anatomicam Riolani, eiús-
que libros omnibus præfert.Guiffartus, Medicus Rothomagensis doctissi-
mus et exercitatissimus Anatomicus, agnoscit
Riolanum pro suo Præceptore venerando. Rio-
lanus plurimis dissectionibus, varijsque Autho-
rum lectionibus, longa annorum serie, exer-
citatione et ratiocinatione in perscrutandis cor-
porum visceribus, omnium qui eum præcesse-
runt oculatissimus euasit.Laudationes, quas tribuit Riolano Carolus le
Noble, Medicus Rothomagensis doctissimus, et
peritissimus Anatomicus, in suo Opusculo de Ve-
nis Lacteis, sunt omnibus notæ, qui librum eius
lectione dignum sibi compararunt.Hermannus Conringius, in Introductione ad
Artem medendi, edita anno 1654. sic loquitur de
Riolano. Maiorem gloriam nostrâ memoriâ in-
uenit Riolanus Junior, cum grandi Opere An-
thropographiæ longè præclarissimo, tum etiam
Encheiridio Anatomico, præ cæteris lectu dignis-
simo, Pathologicæ etiam doctrinæ gratiâ.Nobilis Viri Caroli Arturi Plessij, Doctoris
Page 154, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
Medici Abrincensis iudicium de Riolano. Quod
Anatomem Physiologiæ oculum, totiúsque Me-
dicinæ principium ac fundamentum ab Hippo-
crate primùm excultam, à Galeno summopere
illustratam : nostris verò temporibus vltimis pro-
pè lineamentis habemus affectam ; debemus id
Tibi, Vir, inter paucos numerande ; Etenim,
cùm à quadrigninta quinque circiter annis, sub
felicissimi Principis Henrici Magni auspiciis,
Anthropographiæ nomine hanc Spartam exor-
nandam suscepisses, tot veluti tertiationibus
hunc laborem retractasti, lituris castigasti, no-
uis tum Meditationibus, tum Obseruationibus
auxisti, tam concinnè perpoliuisti, vt tandem
veluti artis Apotelesma assurgat, nouissimè in
lucem absolutissimum Opus : Ex quo ceu am-
plissimo refertissimóque promptuario, tum ve-
teres, tum noui Artis thesauri depromuntur v-
berrimè. Atque vt nihil tam eximio operæ pre-
tio deesset, addidisti Auctarij vice, Encheiridium
Anatomicum et Pathologicum, Artis operibus
promouendis, dirigendisque vtilissimum, qui-
bus nominibus publicas tibi deberi gratias, ne-
mo est, qui non fateatur : Nemo etiam, qui cu-
mulatè peractas non agnoscat, clara illa doctio-
rum omnium approbatione, dum à tot annis pro
summo Anatomes Dictatore, non modo è Scho-
larum suggestis, theatrisque, sed tot præclaris
etiam libris, tum à nostratibus Gallis, tum ab
exteris quoque, Anglis, Batauis, Germanis,
Italis, Hispanis in lucem editis passim commen-
daris cum elogio, quæ cùm à me ingenui can-
didique animi viro liberiùs expenduntur, Te
Page 155, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
fere vnum inter tot literatos nostro æuo peril-
lustrem suspicio, mirórque. Quid enim adeo
præclarum, gloriosúmque, quàm viuenti con-
cedi id decus, quod post cineres rari habent Poëtæ,
vt cum Martiale loquar, cuius salibus te dele-
ctari animaduerto. Macte igitur animi, vir de
Iudiciorum alea secure, quique de arte Anato-
mica admirationem communem sustulisti. Quo
elogio ipsius Hippocratis laudes compleuit Do-
ctissimus Duretus : Perge canitiem tuam galeâ
premere, nec modò unum Fabricium ab Aqua-
pendente, octuagesimo anno scribendis libris in-
cumbentem tibi pro æmula exercitatione pro-
pone : sed etiam alios, qui in literarum palæstra
vitam coronarunt felicissimè. Die vltima Iunij ;
anno Domini 1651.Alethophilus, quamuis addictus Pecqueto,
ideóque adstrictus Riolano obstrepere ac ma-
ledicere, quo variis in locis suæ Epistolæ exe-
quutus est ; Attamen Adrastea cogente, sic de
Riolano loquitur.Ignoscendum arbitror Seni de re literaria
non malè merito, qui adeo trita et vulgaria ele-
gantissimo ornatu conuestiuit, imò et ad pra-
xim non spernendâ curâ reuocauit.Pexatus pulchrè, rides mea, Zoïle, trita,
Sunt hæc trita quidem, Zoïle, sed mea sunt.Modestam indicaturam mei laboris, siue in-
uentorum, consignaui in Editione anni 1626. vt
Lector cognosceret, quæ à me reperta vel cor-
recta sunt. Si Alethophilus istam Editionem
consuluisset, et calleret Anatomen, non adeo
temere et inscienter de meis laboribus suum
Page 156, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
iudicium protulisset. Sed condonandum huic
Parasito et Sycophantæ, qui vænalem habet
summ calamum. Audi Alethophile.Miserum est alienâ viuere quadrâ.
———————————
Responsio
ad Anagrammatismum
Riolani.
Ineptus quidam Poëtaster, et ster-
coreus versificator, qui se nuncupat
Alethophilum, in nefaria et abominan-
da quadam ad Pecquetum scripta Epi-
stola, contra Medicinam nostram et Medicos Pa-
risienses, versus composuit ridiculos et insulsos
super Anagrammatismo Riolani, qui talis est :
Lanius ore insano : nec considerauit suum Patro-
num, nempe Pecquetum, secespitâ suâ armatum,
(est culter ferreus, quo veteres utebantur in
sacrificiis ad mactandas victimas,) plusquam
centenos canes mactasse. Ac proinde Lanius est
ore insano, Canicida, euiscerator canum rabidus,
Gallice, escorcheur de chiens enragés. Riolanus
quando publicè administrabat Anatomica, ve-
ste talari sericeâ indutus, tam dextrè et artificio-
se diuidebat partes sine vlla, aut parcâ sanguinis
effusione, vt non indigeret linteaminibus, nec
brachialibus lineis. Id declarauit in Athropogr.
pag. 62. Ne medici secantis actio sit horrida et
sordida, partes omnes peritè ac solerter secabit,
Page 157, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
vt vitet largas sanguinis effusiones, aut eas citis-
simè spongiabit ; quæ si præstiterit eleganter, non
indigebit eo vestitu, qui lanij pecudes mactan-
tis speciem redolet. Propterea soleo tunica eadem
sericea talari indutus secare, et demonstrare
Anatomen, qua suggestum ascendo ad docen-
dum. Appositè Soranus, cap. 4. ad nostrum in-
stitutum : Ipsa Natura interdum indoctis, etiam
peritorum tribuit efficaciam : sed ipsa operatio
et ipsius honesta tractatio longè in eo apparet,
qui peritus est, et facile improbat imperitum.
Iamdudum id mihi exprobratum, quod Lanie-
nam exercerem, dum propriis manibus secarem
cadauera, dum me Chirurgi partes obire dice-
bant, cui ex officio incumbit, Anatomen admi-
nistrare, atque demonstrare ; sufficere Doctori,
si de rebus Anatomicis ex commentario, et de
re sibi ignota publicè, Physici more concione-
tur. An lanienam et theatricam carnificinam
exercui, dum propriâ manu secui cadauera ?
Fateor quidem hoc opus nostris Discipulis et
auditoribus magis fructuosum fuisse, quàm no-
bis gloriosum. Potéstne Medicus de rebus Ana-
tomicis perfectè disserere, nisi eas oculis dili-
genter contemplatus fuerit, et solerti manu in-
dagauerit ? Vndenam cognitionem et inspe-
ctionem repetet ? an ex pictura inani et fallaci ?
An à Chirurgo, qui tunc Medici Præceptor
erit ? ex cuius ore et manu pendebit, et sapiet ?
Plura leges hac de re, lib. 1. Anthropog. cap. 17.Nisi manum admouissem operi Anatomico,
non docuissem artem facilem administrandi Ana-
tomem, quam docti Medici et periti Anatomi-
Page 158, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos.
ci in Riolano laudarunt : Slegelius, in suo libro de
Circulatione contra Riolanum, et Michaël Kir-
stenius, Medicus Vratislauiensis, in suo Poëma-
te elegantissimo ad Slegelium :Accedit causæ consors Riolanus, et ingens
Affert momentum, Phœbi Riolanus amicus,
Cui faciles Pallas cultros, ritúsque secandi
Felices dedit : hinc partis ex arte tropæis,
Eminet ante alios, et verticce pulsat Olympum.Post tot encomia præclara, non emendicata
per litteras, vt nonnulli solent, est quod in sinu
meo gaudeam, et bene sperem de eis labori-
bus Anatomicis : possúmque meritò illud Vir-
glij vsurpare, inuitis Pecquetianis asseclis, et
ipso Pecqueto.Fortunate senex, ergo tua rura manebunt.finis.
"Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron." est mis à disposition selon les termes de la
licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale 4.0 International.