Texte
Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
2e de 6 parties  >

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Riolan a eu de légitimes raisons d’écrire contre Harvey, Highmore, Gassendi, Pecquet, Guiffart, Schlegel ou Bartholin dans ses Opuscules anatomiques[1][1][2][3][4][5]

Quand il a eu en mains mon Manuel anatomique[6] Harvey a écrit son premier Essai anatomique sur la Circulation du sang, contre Riolan[7] Au début du livre, il « complimente cet homme pour avoir heureusement achevé un ouvrage parfaitement digne des plus hautes louanges car il fait voir les sièges de toutes les maladies, ce qui ne peut être accompli sans un divin génie. Un tel dessein convient au prince des anatomistes, car il n’y a pas de science sans connaissance préalable, ni de savoir solide et sûr qui ne tire son origine des sens. En une si importante matière, il ne faut en effet pas négliger l’opinion d’un homme d’une telle valeur (que les pecquétiens en prennent bonne note) qu’on estime sans peine être le prince et le coryphée de tous les anatomistes de ce siècle, et dont le seul avis, qu’il soit favorable ou défavorable, doit être considéré et avoir plus de poids que les approbations ou les blâmes de tous les autres. » Et [Page 70 | LAT | IMG] Harvey conclut ainsi son essai : « Puisse votre remarquable livre vivre éternellement et, plus impérissable que le marbre, exposer votre gloire à la postérité. Vous avez su avec admirable élégance y unir l’anatomie à la pathologie, et très généreusement enrichir l’ostéologie avec des faits nouveaux et extrêmement utiles. Courage donc, très éminent Monsieur, et aimez-moi ! Je vous souhaite une longue et heureuse vieillesse, avec le vœu que tous vos excellents écrits vous assurent une gloire éternelle. » [2]

Voyez donc de quels glorieux titres Harvey honore Riolan. Je lui ai répondu avec la plus grande amabilité et modestie. [8] Pendant mon séjour en Angleterre, Harvey m’a très souvent invité à lui faire part de mon opinion sur la circulation du sang. Je n’ai pas pu lui présenter librement mes raisons de douter parce que j’y étais alors réfugié avec la sérénissime reine que je servais et accompagnais dans son exil, [9] et que ce pays est ennemi des Français : comme dit Pline, in Seripho insula mutæ sunr ranæ, aliò translatæ canunt[3][10]

Quand Harvey, dans son livre sur la Reproduction des animaux, page 154 de l’édition anglaise, a fermement affirmé que « nul n’a pu rejeter l’admirable mouvement circulaire du sang, que j’ai découvert voilà déjà longtemps, ni s’y opposer en quelque manière qui mérite réponse », [11] j’ai plus attentivement relu le premier de ses deux Essais sur la circulation du sang, et cela m’a incité à réécrire contre lui car je voyais qu’il avait négligé ma réponse. [4][12]

L’Anglais Highmore [13] a écrit une Anacephalæosis sur la circulation de la totalité du sang dans l’ensemble du corps, jusqu’à ses plus petites parties. Quiconque est peu [Page 71 | LAT | IMG] aguerri en anatomie tiendrait pour parfaitement vrai tout ce que Highmore raconte sur les anastomoses des veines et des artères, [14] qu’il a soigneusement explorées et fort diligemment illustrées de figures, en vue de prouver la circulation du sang, car c’est à la demande du « sérénissime médecin », M. Harvey, qu’il a publiquement exposé sa Disquisitio anatomica à la censure, ce qui montre que ce très savant homme ne l’a pas jugée indigne de voir le jour. Pour ma part, j’ai néanmoins très manifestement prouvé que tout cela est tout à fait faux sur bien des points et n’a pas été décrit à partir du livre de la nature, c’est-à-dire du corps humain, mais a été entièrement copié des figures de Vésale[5][15]

Je suis franchement et sincèrement de même avis que le très brillant Liceti, excellent philosophe et très savant médecin, disant que la recherche sur la circulation du sang est « un pur et simple mystère de l’anatomie et de la médecine » ; [6][16] et puisque je vois M. Gassendi, professeur royal qui est très savant philosophe et éminent mathématicien, s’égarer profondément quand il explique la circulation à sa manière, « en espérant qu’un autre l’éclaircira grandement pour lui », j’ai publié, pour répondre à son vœu, des Notationes sur ses écrits. [7][17]

Pecquet a ensuite disserté sur la circulation du sang dans le même esprit qu’Harvey, mais avec insigne ignorance, [18] et a proposé son paradoxe sur les veines lactées du thorax [19] qui confère au cœur le premier rôle dans la sanguification du sang, [20][21] en l’ôtant au foie, contrairement à ce que tous les médecins et les autres explorateurs des œuvres de la nature ont su et confirmé depuis que le monde est monde. J’ai exposé [Page 72 | LAT | IMG] mes arguments contraires dans la préface de la première Réponse que je lui ai faite. [22]

Tandis que je confiais à l’imprimeur ladite réponse aux Experimenta nova anatomica de Pecquet sur les veines lactées, M. Pierre Guiffart, très savant médecin de Rouen, [23] m’a fait cadeau de son livre, en y joignant une lettre qui m’invitait à l’examiner. Après l’avoir lu et évalué, je n’ai pu garder le silence, et c’est la raison de mon Avertissement à Pierre Guiffart sur la nouvelle fonction du cœur. [8]

Enfin, quand Schlegel a su de Riolan, dont il reconnaît avoir été disciple en anatomie, qu’il allait écrire sur la circulation du sang et répondre à Harvey, il a dû attendre pendant dix-sept ans ma Dissertation sur ladite circulation, qu’il avait apprise de la bouche même d’Harvey. Le zèle de ce maître a convaincu tout le monde, chacun adhère à sa doctrine, la loue, l’imite, et face à elle, tous les dogmes des autres se glacent et perdent toute valeur. Schlegel a donc épousé la cause de Harvey, mais avec une préface qui honore Riolan, qu’il appelle « prince de l’anatomie » et à maintes reprises « le monarque, le phénix des anatomistes » ; et il lui adresse ces louanges à la page 6 : « J’ai toujours fait le plus grand cas de Riolan et de son mérite, car il m’est impossible de ne pas répéter ici ce que j’ai dit ailleurs. Quiconque a lu les autres livres d’anatomie où Riolan n’a pas été cité, aura encore beaucoup à apprendre ; et quiconque voit Riolan disséquer seul et de ses propres mains, n’a pas besoin d’autres maîtres pour devenir un habile anatomiste. » [9][24] Prenez bonne note de ces mots, Messieurs les acolytes pecquétiens[25][26]

J’ai été contraint de déclarer tout cela pour faire voir que mes adversaires sont des imposteurs et [Page 73 | LAT | IMG] de très insignes menteurs. Au livre iii des Épidémies, Hippocrate a porté un brillant jugement sur la correction des écrits récents : « Je regarde comme une partie importante de l’art de la médecine l’habileté à porter un juste jugement sur ce qui est écrit. Celui qui en a la connaissance et qui sait en user ne commettra pas, à mon sens, de graves erreurs dans la pratique. » [27] Il y a aussi ce passage mémorable dans son lire i du Régime : « Si, parmi ceux qui ont écrit sur le régime à suivre pour la santé, quelqu’un me paraissait, prenant la droite voie, avoir traité de tout complètement, autant que le peut concevoir l’entendement humain, il me suffirait, profitant du travail d’autrui, de reconnaître ce qui est bien et de m’en servir suivant l’utilité apparente de chaque chose. Il arrive toutefois que beaucoup se soient occupés de ce sujet, mais qu’aucun n’ait su exactement quel devait être l’objet de son travail : les uns ont traité une partie, les autres une autre ; aucun des devanciers n’a embrassé l’ensemble. Certes, il ne faut alors blâmer aucun d’eux de n’avoir pu faire la découverte ; il faut plutôt les louer tous d’avoir entrepris la recherche. Ainsi je ne me prépare pas à relever ce qui n’a pas été bien dit, mais je suis disposé à m’associer à ce qui a été judicieusement reconnu. Il n’est pas possible que j’écrive bien sur les choses que les devanciers ont bien dites, si je veux en écrire autrement. Quant aux choses mal dites, si je les réfute, montrant qu’il n’en est pas ainsi, je n’aurai rien obtenu. Cependant, si j’explique en quoi chaque chose me paraît bonne, j’aurai démontré ce que je veux démontrer. Je me sers de ce préambule pour montrer que beaucoup, s’ils ont entendu une explication antérieure sur un objet, ne veulent plus entendre sur le même objet une explication postérieure, ne sachant pas que l’intelligence est la même à connaître ce qui est bien dit et à découvrir [Page 74 | LAT | IMG] ce qui n’a pas encore été dit. Ainsi donc, comme je l’ai annoncé, je m’associerai aux bonnes choses ; je montrerai, pour les mauvaises, ce qu’il en est ; et pour celles que nul des devanciers n’a essayé d’exposer, je ferai voir ce qu’il en est aussi. » [10][28]

Le même Hippocrate a jugé qu’en médecine il est permis et honnête de relever les erreurs des autres : pour s’opposer aux médecins de Cnide, il a écrit contre son gré le livre du Régime dans les maladies aiguës, et je dis contre son gré parce que, explique-t-il, « les désaccords des médecins entre eux rendent leur art incertain, comme est celui des devins. » [11][29] Au livre i des Fractures[30] particule 9, il a aussi blâmé les médecins qui réduisaient mal les fractures du bras et présenté l’argument d’un autre qui se fonde sur la position des archers. Dans ses commentaires, Galien remarque : « Emprunter ainsi l’exemple des archers doit être considéré comme tout à fait stupide, et Hippocrate aurait mieux fait de ne pas le citer que de le critiquer avec la plus grande vigueur, car ce qui est complètement idiot doit plutôt inciter à rire qu’à en écrire une réfutation. Je n’interdis pourtant pas le moins du monde que, de leur vivant, on argumente contre les auteurs, surtout quand l’un d’eux convainc ceux qui l’écoutent en leur contant des sornettes, afin qu’ils se consacrent à mieux soigner la personne humaine. Il nous arrive même parfois de nous contredire aussi quand nous attaquons les sottes opinions que nous voyons bien des gens tenir pour vraies. » [12][31] Prenez bonne note de ce passage, Messieurs les acolytes pecquétiens.

Sur l’exemple d’Hippocrate, Galien a relevé et corrigé les innombrables erreurs des médecins au début de son livre sur la Dissection des muscles, où il expose ce qu’il pense des ouvrages anatomiques de Marinus[32] Ælianus[33] Pelops[34] Lycus ; [35] plus que celles de tous les autres, [Page 75 | LAT | IMG] il a corrigé les erreurs de ce dernier, parce que ses écrits étaient communément tenus pour absolument parfaits. [13][36] Il remarque, dans le livre ii de l’Utilité des parties, que les œuvres de ceux qui se disent anatomistes sont emplies d’erreurs, sur lesquelles il promet un livre. [14][37]

Riolan a donc suivi les conseils d’Hipocrate et Galien sur la nécessité de lire et examiner les écrits des anatomistes.

———— Stulta est clementia cùm tot
Occurras scriptis, perituræ parcere chartæ.
Quid Romæ faciam ? mentiri nescio, librum
Si malus est nequeo laudare et poscere
[15][38]

Je n’ai composé mes ouvrages anatomiques ni en mettant sous mon nom ce que j’aurais emprunté à d’autres, ni en blâmant injustement les découvertes d’autrui dont j’ai établi que je les approuvais. J’ai une reconnaissance infinie envers les auteurs éprouvés parce que, grâce à l’admirable ingéniosité qu’ils ont déployée en leur temps, il ont rendu nos plumes plus fécondes et plus alertes ; et que grâce à la confiance que de tels auteurs nous inspirent, nous avons osé fonder et mettre au jour une nouvelle description du corps. Pour tisser la mienne, j’ai lu tous les anatomistes qui m’ont précédé, j’ai médité sur leurs livres et les ai comparés entre eux, pour cueillir, colliger et convertir en ma propre sève ce qui m’y semblait utile et conforme à la vérité.

     Quod verum atque decens curo, et rogo, et om-
nis in hoc sum,
     Condo et compono, quæ mox depromere possim
[16][39]

Sachez que quand j’ai examiné Du Laurens [40] et Bauhin[41] j’ai cherché à savoir si tous les autres anatomistes avaient ou non écrit comme eux ; et Baptista Carcanus a loué au plus haut point cette manière de faire dans [Page 76 | LAT | IMG] la préface de son petit livre sur l’Union des vaisseaux chez le fœtus. C’était un très remarquable anatomiste, élève de Vésale, qui a rédigé un admirable commentaire du livre d’Hippocrate sur les plaies de la tête : [42] « Après, dit-il, que les travaux assidus de Vésale et Fallope [43] ont exposé toute l’anatomie au grand jour, et qu’il ne reste rien à découvrir, il est meilleur et plus utile de dépenser son labeur et son industrie à étudier ce qu’ils ont découvert que de perdre son temps et sa peine à chercher des nouveautés. » [17][44] Ainsi le très éminent anatomiste Hérophile [45] a-t-il jugé utile de relever et corriger les erreurs de son maître Praxagore[46] afin qu’elles ne trompent pas la postérité comme elles l’avaient lui-même trompé. Ainsi Vésale a-t-il fait des remarques sur les œuvres anatomiques de Galien, et Fallope, dans ses Observations anatomiques, a-t-il sévèrement examiné et repris son maître Vésale. Après la multitude des dissections que j’ai assidûment et laborieusement accomplies de mes propres mains, j’ai donc usé de mon autorité à faire des critiques et des remarques sur les livres des anatomistes. Je l’ai fait en toute modestie et avec politesse, pour ne pas paraître crever les yeux des corneilles ni lutter avec les morts comme contre des fantômes. Je n’ai nommé et cité que ceux qui ont traité de l’anatomie avec subtilité et adresse, et l’ont décrite à l’aide de leur scalpel et de leur plume. [18]

Quant à mes propres travaux, je laisse au lecteur le soin d’en juger, s’il est impartial, instruit et habile anatomiste : indicio de meipso ero, vos eritis iudices ; [47] [Page 77 | LAT | IMG]

Rara coronato plausere Theatra Menandro,
Et sua riserunt sæcula Mæonidem
[19][48][49][50]

Je dirai pourtant librement, sans arrogance mais en grondant contre l’envie de ceux qui jalousent ma gloire, et tout particulièrement contre les deux pecquétiens, qu’aucun auteur vivant n’a vu ses commentaires si souvent imprimés, et que pascitur in viuis liuor, post fata quiescit[20][51]

Je ne recherche et espère pourtant ni louange ni applaudissements pour ce travail, où j’ai mis l’utilité devant la grâce de plaire ; et s’il ne s’y trouve pas de génie, je me contenterai d’avoir mérité qu’on reconnaisse tout le soin que j’y ai consacré. Posteris an aliqua cura nostri futura sit nescio, nos certè meremur, vt sit aliqua, non dico ingenio, id enim superbum, sed studio et labori[21][52] Je dirai donc hardiment, mais sans fierté ni arrogance, que bien des auteurs ont disséqué et décrit le corps humain, mais nul ne l’a fouillé, examiné et dépeint plus méticuleusement que moi. Si je n’ai pas tout vu dans le microcosme, je ferai valoir l’argument auquel Pline a recouru pour solliciter l’indulgence quand il a entamé sa description de l’univers entier : Haud vllo in genere venia iustior est, si modò minimè mirum est, hominem genitum, non omnia humana nouisse[22][53]

Page 183, [54] à votre citation de saint Jérôme[55] je répondrai que le patriarche Photius [56] a lu et examiné une infinité d’auteurs, comme en témoigne sa Bibliothèque, où il a loué ce qu’ils avaient dit de juste, mais relevé ce qu’ils avaient dit de faux et de ridicule ; et il a reproché au médecin Oribase [57] d’avoir omis la chirurgie, qui était la principale partie de la médecine, dans l’ouvrage où il voulait la décrire tout entière à l’intention de l’empereur Julien[23][58] [Page 78 | LAT | IMG]

Galien a élégamment blâmé ceux qui choient les nouveautés et s’en délectent : « Certains ont certes entrepris d’innover en médecine, sans pourtant pouvoir trouver mieux que leurs prédécesseurs, mais parce qu’ils tiennent ce qu’Hippocrate a dit pour des trivialités. Il est néanmoins commun de louer beaucoup plus hautement ce qui est nouveau et inédit, même quand cela n’a pas encore d’utilité avérée, que ce qui est connu de longue date et déjà fort utile » (chapitre 1 d’Hippocrate sur les Fractures et premier commentaire de Galien sur Hippocrate, du Régime dans les maladies aiguës, chapitre 17). [24][59]

Page 183, Riolan dit que « chacun juge bien de ce qu’il connaît et en est bon arbitre » : cela vient d’Aristote, mais vous l’avez passé sous silence. [25][60] « Riolan est donc le seul à bien raisonner, les autres anatomistes sont des ignorants » : jamais je n’ai tenu un tel propos, mais j’ai dit qu’ils n’y ont pas vu clair ou qu’ils se sont mépris parce qu’ils n’ont pas disséqué de leurs propres mains, par manque de cadavres, [61] et s’ils en avaient disposé peut-être auraient-ils surpassé Riolan en anatomie. Voilà ce que j’ai déclaré dans mes écrits, et depuis lors, aucun anatomiste ou autre médecin ne s’en est plaint, hormis ces deux médecins de Paris, acolytes pecquétiens qui ne connaissent absolument rien à l’anatomie.

Dans son épître dédicatoire, Pecquet [62] a eu l’audace de dire que « depuis des siècles les anatomistes, même les plus renommés, se sont jusqu’ici fourvoyés, et que, non sans lourd préjudice pour le genre humain, ceux qui ont professé l’histoire naturelle ont été profondément aveuglés, hormis le seul et unique Aristote. » [26][63]

Pecquet ne blâme-t-il pas tous les médecins, depuis qu’il en existe, à l’exception d’Aristote, « sans le moindre préjudice pour le genre humain » ? [Page 79 | LAT | IMG] Cela veut-il dire que l’ignorance des veines lactées a mis la vie des hommes en danger ? « Pourquoi, dit-il, me hasarderai-je, seul et nain que je suis, à m’insurger contre les géants qui accordent presque plus de valeur à leurs erreurs qu’à des oracles, ou qui, pour ne pas sembler avoir pu se tromper, refuseront obstinément de se soustraire à leurs rêveries ? » Tous les écrits des anatomistes ne sont donc qu’erreurs et rêveries ! « Bien que tout petit, bien que seul, aura-t-il l’audace de défier tant d’éminents hommes sans devoir redouter les vives attaques de ceux qui le contrediront ? » Il a l’audace d’avouer être tout petit, un nain qui provoque tous les anatomistes, sans rien redouter : d’où tant d’audace et d’insolence lui viennent-elles donc ? « La particularité de ce petit livre est d’en appeler plus aux sens qu’à la raison, à laquelle il ne cède à peu près rien que le suffrage des sens n’ait établi. » Il bafoue la raison sans être capable de l’utiliser pour démontrer l’utilité de sa découverte !

« Tandis que je m’attarde à recommander mon petit livre, les moribonds vous appellent à l’aide, et attendent anxieusement le bouillonnement de l’eau salvatrice qui tarde à venir. » Louant son propre ouvrage, Pecquet est donc l’Ange qui a révélé l’eau salvatrice de la piscine ! [64] « Puissiez-vous donc avoir la bonté de lui épargner le préjudiciable ajournement de son affranchissement, qu’il vous supplie instamment de lui accorder pour ne pas contrarier les vœux de cette foule de malheureux. » Tous les moribonds attendent donc son petit livre, dont il serait périlleux d’ajourner la parution, et « ainsi se réjouiront-ils que ce qu’ils n’ont pas jusqu’ici su être en l’homme ait trouvé grâce à vous et à vos largesses un avantage dont le monde entier, rendu plus sain, vous sera reconnaissant ». [27] Ce nouveau Prométhée [65] a donc procuré au monde un nouvel homme, ou l’a régénéré, et le monde entier saura gré à Jean Pecquet de cette résurrection, car c’est ainsi que son épître a recommandé son livre, [Page 80 | LAT | IMG] grâce auquel toute la Terre jouira d’une meilleure santé. La médecine a donc été dans l’erreur depuis Adam jusqu’à ce jour ! [66] Aucun auteur n’a encore parlé de lui-même avec autant d’orgueil et d’arrogance, [67] mais les anatomistes pecquétiens louent et célèbrent ces étonnants propos. Écoutez, Pecquet, ces vers que j’emprunte à Properce en riposte à votre découverte :

O prima infelix fingenti terra Prometheo !
Ille parum cauti pectoris egit opus :
Corpora disponens, mentem non vidit in arte :
Recta animæ primùm debuit esse viæ
[28][68]

Pecquet poursuit ses insultes contre les grands anatomistes dans son chapitre i :[69] « Aselli [70] a découvert les veines lactées, un point c’est tout. Ce n’est pas un fait à dédaigner, bien qu’il ne soit pas d’une importance considérable. Wale [71] dit que, depuis les intestins, certaines des veines lactées se terminent dans la branche mésentérique [72] par un canal unique et ininterrompu, certaines, directement dans la veine porte, [73] certaines, dans la concavité du foie, [74] et un tout petit nombre, dans la veine cave, [75] près des veines rénales. [76] Ainsi pensent des anatomistes dont la compétence est hors du commun : Harvey, Vesling[77] Conring[78] Bartholin, et Riolan en personne ne vaut pas mieux. » Pecquet ne blâme-t-il et ne corrige-t-il pas là des anatomistes non est dignus soluere corrigias calceamento-
rum
 ? [29][79] « Après avoir acquis, par la dissection des cadavres, une science qui est pour le moins muette et froide, dit-il, j’ai pris plaisir à acquérir une véritable connaissance de l’harmonie qui règne chez les animaux vivants. [80] Et puisqu’ils ne diffèrent presque des cadavres que par le mouvement, dont le siège principal se situe dans le cœur, j’ai décidé de le dégager de ses attaches, puis de le retirer du corps pour les scruter plus commodément. » [81] Tous les anatomistes professent donc un savoir muet et froid. Qu’est-ce là d’autre que de rejeter l’anatomie commune ? Pour sa part, il se délecte de la chaude et hurlante tuerie de chiens aux abois, car cette manière de disséquer ressemble au massacre [Page 81 | LAT | IMG] que les bourreaux exécutent dans les villes d’Allemagne en été, par crainte de la rage, [82] ce qui oblige les citoyens à garder leurs chiens chez eux ; et les tueurs tirent profit des peaux qu’ils récupèrent, lesquelles permettent de faire de petits étuis de livre en cuir bien façonnés qu’ils envoient chez nous. Pecquet, le canicide, a vraisemblablement tiré grand profit de ces centaines de chiens et de la quantité d’autres animaux qu’il a disséqués. L’éviscération de bêtes vivantes m’a profondément déplu parce que le chapitre 37 des Hiéroglyphes d’Horapollon [83] m’a appris que « la plupart de ceux qui embaument les chiens devront leur mort à une maladie de la rate, car ils sont souillés par cette exhalaison ou vapeur qui émane d’un chien dont on ouvre et dissèque le cadavre. » [30]

Page 183, notre médecin pecquétien se plaint du très rude langage dont Riolan s’est servi pour accueillir le livre de Pecquet, pensant qu’à la manière don on s’adresse aux rois, il devait employer des mots plus doux et soyeux[31] N’est-ce pourtant pas ce qu’a fait Riolan : « Je conviens que ce jeune homme, qui ne manque pas de science, a découvert ces deux canaux lactifères qui montent dans le thorax, mais qu’il ignore entièrement à quoi ils servent, et qu’il a maladroitement dépouillé le foie de la sanguification pour l’attribuer à tort au cœur. Je loue néanmoins son discernement anatomique et le soin avec lequel il a mené sa recherche sur les lactifères » ?

Le conseil de saint Paul vient à mon aide, Objurga, obsta, increpa hæreticos[32][84] La découverte de Pecquet fait-elle autre chose qu’introduire une hérésie en médecine ? Il aurait suffi, dit le pecquétien, aliis lampadem tradere[33]

Page 184, Riolan, en enseignant et écrivant l’anatomie, a-t-il fait autre chose que lampadam tradere [Page 82 | LAT | IMG] à ses disciples, pour qu’ils en augmentent l’éclat ? J’ai si diligemment cultivé la Sparte qu’on m’a remise, [34][85] qu’après les innombrables cadavres que j’ai disséqués dans les Écoles, [86] avec l’approbation unanime de mes collègues, j’ai été le seul depuis 1614 et pendant 40 ans à qui on a confié la charge de professer et de pratiquer l’anatomie pour l’apprendre manuellement aux étudiants de Paris et des autres universités qui l’ont voulu ; et je ne l’ai pas fait sans gloire ni profit pour les autres, comme maints médecins de cette ville et d’ailleurs peuvent en attester. Leurs mains et leurs plumes l’ont déjà montré par leurs pratiques et leurs écrit anatomiques, et surtout les Allemands qui sont fort reconnaissants envers leurs maîtres et proclament volontiers les noms de ceux qui les ont fait progresser. J’avais alors plus de soixante auditeurs originaires d’ailleurs que Paris, qui y séjournaient pendant cinq ou six mois pour apprendre l’anatomie. [35][87]

Désirant former en anatomie πολλοις βουλομενοις σωζονται ιατροις, comme dit Hippocrate[36] j’ai enseigné avec grand plaisir le moyen et la méthode à suivre pour progresser dans sa pratique et son exploration. J’ai suivi là le conseil de Platon dans Clitophon : la principale ambition du meilleur médecin est d’enseigner et instruire les autres, pour qu’il ait des successeurs dans l’exercice de l’art ; son autre ambition est de rendre la santé aux malades. [37][88]

Page 184, « Riolan offre-t-il maintenant de tendre la main pour aider Pecquet dans ses recherches ? » Je l’ai tendue quand il est venu chez moi pour solliciter mes conseils en anatomie et je lui ai montré [Page 83 | LAT | IMG] mon Manuel anatomique avant qu’il ne paraisse, mais jamais il ne m’a parlé des veines lactées du thorax, et il était fort éloigné de me demander ce que j’en pensais, alors que je lui en aurais volontiers et sincèrement donné mon avis.

Je peux m’appliquer ce qu’Ausone disait de son père, qui était médecin :

Obtuli opem cunctis poscentibus artis inemptæ,
Consiliúmque meum cum pietate fuit
[38][89]

Ce pecquétien qui s’est occupé de faire paraître leur livre, en l’absence de Pecquet, bien qu’il feigne de l’amitié à mon égard, ne m’en a jamais rien montré, comme si je n’étais pas digne de ces secrets d’Éleusis. [90] Au moins Pecquet devait-il exposer publiquement sa découverte, à l’instar d’Apelle [91] et Protogène, [92] qui exposaient au grand jour leurs tableaux ou leurs portraits, tenant un burin et un marteau, afin de les détruire sur-le-champ si s’y voyait quelque chose de blâmable. [39][93]

Page 184, le docteur pecquétien s’enflamme parce que j’aurais couvert Pecquet d’injures, mais lui-même le renvoie au paradoxe que je lui ai reproché, quand il dit : « À quelle pire peine aurait-on pu condamner Pecquet, tenu pour un prodige de scélératesse et de perversité, s’il avait pissé sur les cendres de ses pères, s’il avait enseigné comment empoisonner les fontaines ou fabriquer la peste ? » On punit pourtant celui qui a empoisonné les fontaines plus lourdement que s’il avait agi de même façon à l’encontre d’un individu particulier, car son crime est d’autant plus grave qu’il a visé une communauté, et de la même façon les lois sont plus sévères à l’encontre de ceux qui, par un écrit public, répandent de fausses opinions dans le peuple, qu’à l’encontre de ceux qui les auraient hardiment proférées dans des entretiens privés. Les édits et les arrêts des princes ont donc [Page 84 | LAT | IMG] veillé à ce que nul ne publie des livres de théologie et de médecine sans qu’ils aient d’abord été examinés et approuvés par des censeurs qu’ont désignés les facultés garantes de ces deux disciplines. Certaines cités condamnaient jadis à la potence quiconque proposait de nouvelles lois, et il est souhaitable qu’on soumette de même à un procès public ceux qui énoncent des dogmes nouveaux, mais aussi dangereux que détestables. Galien l’écrit finement dans son livre contre Julianus : « J’ignore comment il est permis de poursuivre les insultes en justice, car aucune loi n’a été promulguée contre ceux qui médisent en employant des arguments mensongers. Je juge qu’un très malhonnête homme ne peut oser attaquer impunément d’excellents personnages. Jadis en Égypte, toute découverte que n’avait pas approuvée une assemblée publique de savants était inscrite sur des colonnes placées dans certains lieux sacrés. Nous devrions procéder de la même manière : après avoir examiné les écrits récemment publiés, un collège d’honnêtes et doctes hommes promouvrait ceux qui sont bons, mais éliminerait tous les mauvais, ce qu’ils se contenteraient de faire sans même connaître le nom de l’auteur, comme c’était le cas dans l’Égypte antique, étant donné qu’on supprime ainsi grandement la compétition entre ceux qui sont trop avides de gloire. Partout aujourd’hui n’importe qui a le droit d’écrire et d’exposer publiquement son avis, et le plus audacieux est celui qui reçoit le plus de louanges. » [40][94]

Page 185, « Il n’y a pas de monstres en Gaule », a dit saint Jérôme, mais bien que Riolan l’ait cité, il dit que Pecquet en est un, puisque Platon, outre les défauts du corps, a qualifié de monstrueux ceux de l’esprit, [95] et puisque, pour Sénèque, fœtus extinguimus, liberos quoque si debiles [Page 85 | LAT | IMG] monstrosique editi, simul mergimus, quia non ira, sed ratio est à sanis inutilia secernere[41][96]

Même page, « Il a voulu marquer au fer rouge de l’infamie, en les flétrissant si ignoblement, des hommes innocents (quant à l’utilité que je concède aux lactifères thoraciques), tout en parlant si glorieusement de sa propre personne » : tout ce qu’il a dit d’honorable sur Riolan, lui répliquant sur le même ton, est de l’avoir qualifié de très célèbre et savant homme, bien qu’il soit indigne d’une telle louange et s’en glorifie indûment. Le même me juge bouffon, c’est-à-dire ridicule, pour avoir écrit mes doutes sur la transposition des parties dans le corps humain. [42][97]

Même page, « Ils ont pourtant commis le crime nouveau, encore jamais ouï, d’avoir, grâce à leurs yeux perçants, diligemment mis au jour certains secrets du chyle que la nature avait enfouis et cachés dans son sanctuaire, et réservés jusqu’à ce siècle aux découvertes du plus brillant et fécond des arts. » Il se réfère à Sénèque[98] comme avait fait Riolan avant lui dans la préface de son Anthropographie[43][99] Si la lecture de Sénèque vous était familière, vous auriez pu y substituer cette autre citation qui vous est moins favorable : Optimum est priorum sequi vestigia, si rectè processerint : qui enim ante nos nouerunt ista, non sunt Domini nostri, sed Duces[44][100] Il est évident que toute la vérité ne nous a pas encore été révélée, et qu’il en reste beaucoup à découvrir dans les prochains siècles ; mais j’ai déjà expliqué cela à Pecquet dans la préface de ma première Responsio, page 144.

Page 185, « Notre vieux professeur aurait pourtant plus scrupuleusement modéré la virulence et l’atrocité de son discours en méditant assidûment sur son très prochain départ pour les cieux, et en ayant examiné de plus près ce [Page 86 | LAT | IMG] précepte du Christ, notre Seigneur : “ Quiconque se fâche contre son frère en répondra au tribunal. ” » La source grecque y ajoute le mot εικη, qui signifie « injustement et sans raison ».  [45][101] Celui qui se met en colère avec justice et raison est très loin de pécher, et l’autorité des Pères de l’Église en fait foi, comme Basile dans son homélie x contre ceux qui se courroucent, [102] Grégoire dans le chapitre xxxi, livre iii de ses Morales[103] et Chrysostome dans son homélie 21 sur saint Matthieu, où il écrit : [104] « C’est péché de ne pas se mettre en colère quand il le faut. En effet, si elle dépasse la mesure, la patience est plutôt une sorte d’engourdissement de l’esprit. Celui qui s’enflamme opportunément fait preuve d’une très éminente vertu, car sa colère ne naît pas du désordre de son esprit, mais de l’exercice de son jugement ; on ne dit pas alors qu’il s’emporte, mais qu’il juge. Ainsi la colère qui, aux autres âges de la vie, confine souvent au péché, est-elle une marque de sagesse durant la vieillesse, quand son ardeur est employée à bon escient et quand la maturité lui est de bon conseil. » [46][105]

Page 186, « Riolan aurait dû apprendre de Sénèque, très rigoureux maître en sagesse, mollioribus verbis ingenia esse curanda, qui homine nil mitius, nil amantius, parce qu’il n’y a rien de plus doux et de plus aimable pour l’homme. » En vérité homo homini Deus, mais parfois homo homini lupus. Sénèque dit : Illud potius cogitabis, non esse irascendum erroribus, etc. Corrigendus est, qui peccat, et admonitione, et vi, et molliter, et asperè, meliórque tam sibi, quàm aliis faciendus, non sine castigatione, sed sine ira, quis enim cui medetur irascitur ? [47] Ce passage me fait savoir qu’un troisième auteur a participé à votre apologie : il s’agit d’Alethophilus[106] ministre hérétique et gymnasiarque qui se prétend médecin, insigne défenseur de Pecquet, dont il attend beaucoup car il a changé de religion, [Page 87 | LAT | IMG] moyennant une certaine somme d’argent, et appâté par l’espoir de quelque opulent bénéfice ; voilà comment on caresse les hérétiques pour les attirer dans la religion catholique, plutôt que par de douces paroles ou par des menaces. En attendant, grâce à Pecquet, il jouit d’une petite rente auprès d’un illustrissime évêque. [48][107] Bien qu’ils soient trois, je ne crains rien de ces conjurés, car je ferai aisément et vigoureusement front à tout le venin qu’ils vomissent, même s’ils en rajoutent.

« Par mépris, Riolan appelle Pecquet un enfant » : Riolan n’a rien dit de tel, c’est Pecquet en personne qui en est convenu dans son épître dédicatoire, où il s’est qualifié de « tout petit » et même de « nain ». L’anatomiste pecquétien a sottement appliqué à Pecquet ce vers de Virgile, à propos d’Achille et Troïlus : [108][109][110]

Infelix puer, ac impar congressus Achilli[49]

Castigatio leuis lege concessa est docenti[111] c’est pourquoi Riolan a puni Pecquet et ses défenseurs en suivant ce qu’a dit Sénèque dans sa lettre xciv : Nemo præceptis curat insaniam, ergo nec malitiam quidem Dissimile est, nam si insaniam sustuleris, sanitas reddita est : si falsas opiniones exclusimus, non statim sequitur despectus rerum agendarum, et vt sequatur, tamen admonitio corroborabit rectam de bonis malisve sententiam. Illud quoque falsum est nihil apud insanos proficere præcepta ; nam quemadmodum sola non prosunt, sic curationem adiuuant, Et denvnciatio et castigatio insanos coercvit. [50] Le lecteur reconnaîtra que leurs effets ne sont pas inutiles puisque les zélateurs et suppôts de Pecquet ont en grande partie renoncé à le défendre.

[Page 88 | LAT | IMG] « Riolan s’est imaginé que les opinions de Pecquet sont monstrueuses pour ne pas manquer de matière à combattre et ne pas sembler avoir sévi contre lui sans quelque apparence de bon droit » : il blâme Riolan pour avoir dit que l’opinion de Pecquet est monstrueuse, il lui invente donc des opinions monstrueuses. « Le très ingénieux Pecquet met maintenant son énergie à défendre la cause de ces lactifères, afin de rendre parfaitement inutile d’y ajouter quoi que ce soit et d’en disserter plus longuement. Il n’a pas réagi à tout ce que contient la première Responsio de Riolan, mais j’ai décidé, dans les quelques courts chapitres de remarques qui suivent, de la corriger et raturer. » Vous avez donc eu communication du livre de Pecquet avant sa parution, puisque vous avez écrit en même temps et dans le même volume que lui, mais ni vous ni lui n’avez répondu à l’infinité d’erreurs anatomiques que Riolan avait dénoncées dans ladite première Responsio, car tout le savoir que vous partagez en ce domaine ne va pas plus loin que les veines lactées, les vaisseaux lymphatiques [112] et la circulation du sang, tout en ne comprenant pas ce qu’en ont expliqué leurs auteurs, et en montrant votre incapacité à les interpréter.

Votre quatrième chapitre [113] est tiré de Bartholin et eandem crambem recoquis[51] car vous lui aviez envoyé vos misérables objections pour lui remettre en mémoire celles que vous aviez remarquées dans la Réponse de Riolan à Pecquet ; mais Bartholin s’est sagement abstenu de défendre des erreurs que nul anatomiste ne peut soutenir, s’il a quelque compétence en cet art. Cela sautera aux yeux de quiconque lira ses Dubia anatomica [114] car, après avoir examiné ce que Riolan a répondu au chapitre iv du livre de Pecquet[115] il y dit que les arguments contre les lactifères thoraciques [Page 89 | LAT | IMG] seront résolus ailleurs. [116][117] Outre que Riolan a démontré que les Dubia de Bartholin étaient futiles et sans valeur, ils ont déplu aux pecquétiens, qui s’efforcent de retisser plus subtilement la même toile. Leur erreur délirante les possède à tel point que, s’ils pouvaient, ils appelleraient les démons à leur secours pour qu’ils nuisent à Riolan[52][118]


1.

La première partie de la Responsio ad Pecquetianos, contre Jean Pecquet et ses défenseurs, a exposé les critiques de Jean ii Riolan contre Caspar et Thomas Bartholin. Cette deuxième partie va s’occuper des cinq autres.

2.

Ces deux citations de William Harvey sont tirées du premier de ses deux Exercitationes anatomicæ de Circulatione Sanguinis ad J. Riolanum (Rotterdam, 1649, v. note [14], première Responsio, 2e partie), pages 1‑2 et 5‑6, et pages 45‑46.

Charles Richet les a traduites un peu différemment de moi dans La Circulation du sang, des Mouvements du cœur chez l’homme et chez les animaux (Paris, 1879), pages 181‑184, et page 201.

V. note [8], Experimenta nova anatomica, chapitre i, pour l’Encheiridium anatomicum et pathologicum (Paris, 1648, et Leyde, 1649) de Jean ii Riolan, qui affectait de ne pas percevoir une nuance d’ironie dans l’emphase de Harvey.

3.

Rana Seriphia [Une grenouille de Sériphos], Βατραχος εκ Σεριφου, est un adage antique qu’Érasme a commenté (no 431), {a} après Pline l’Ancien (Histoire naturelle, livre viii, chapitre lxxxiii, Littré Pli, volume 1, page 356) :

Cyrenis mutæ sunt ranæ, illatis e continente vocabulis durat genus earum. Mutæ sunt etiam nunc in Seripho insula. Eædem alio translatæ canunt : quod accidere et in lacu Thessaliæ Sicendo tradunt.

« À Cyrène, les grenouilles étaient muettes, et cette espèce persiste, bien qu’on y ait transporté du continent des grenouilles coassantes : elles sont muettes encore aujourd’hui dans l’île de Sériphe, et, transportées ailleurs, elles coassent ; ce qui arrive aussi, dit-on, dans le Sicendus, lac de Thessalie. »


  1. In homines mutos et canendi dicendique prorsus imperitos dicebatur. Inde natum, quod Seriphiæ ranæ in Scyrum deportatæ non edebant vocem.

    [Se disait des gens peu causants, tout à fait incapables de chanter et de déclamer. Cela est venu des grenouilles de Sérifos qui, une fois transportées à Syros, n’émirent plus un son].

    Sérifos et Syros sont deux îles des Cyclades.


Jean ii Riolan recourait à cette circonlocution pour prétexter que son service auprès de Marie de Médicis lui imposait une obligation diplomatique de réserve. Il avait été le premier médecin de la reine déchue depuis son bannissement (1632) jusqu’à sa mort (1642). Ses errances européennes la menèrent à Londres de 1638 à 1641, auprès de sa fille, Henriette-Marie, épouse du roi Charles ier de Grande-Bretagne. Cela avait sûrement donné à Harvey l’occasion de rencontrer Riolan, dont les idées hostiles à la circulation n’étaient probablement pas encore fixées. Les vives critiques qu’il avait exprimées dans son Encheiridium anatomicum et pathologicum (1649) avaient dû surprendre Harvey qui y riposta par ses deux Exercitationes (même année, v. supra note [2]). Riolan y avait répondu en 1652 (v. note [14], première Responsio, 2e partie).

4.

J’ai traduit entre guillemets le passage que Jean ii Riolan a extrait des Exercitationes de Generatione Animalium de William Harvey, {a} essai 51, De Sanguine, prout est pars principalis [Du Sang, étant donné qu’il est la partie principale], page indiquée (dernier paragraphe) :

Circuitum sanguinis admirabilem, à me jampridem inventum, video propemodum omnibus placuisse : nec ab aliquo quippiam hactenus objectum esse, quod responsum magnopere mereatur.

[Je constate que l’admirable mouvement circulaire du sang, que j’ai découvert voilà déjà longtemps, a beaucoup plu à tous et que personne ne s’y est encore opposé d’une manière qui mérite réponse].

L’attaque imprimée de Riolan contre la circulation, à laquelle il estimait qu’Harvey n’avait pas répondu dans ses Exercitationes, {b} avait paru dans son Liber de Circulatione sanguinis. {c} Harvey jugea inutile de riposter à la Responsio de Riolan parue en 1652, {d} ce qui était une manière de marquer son mépris pour les arguments de son adversaire.


  1. Édition anglaise (Londres, Du-Gardianis, 1651, in‑4o), v. note [10], première Responsio de Riolan, 4e partie, pour celle d’Amsterdam, parue la même année.

  2. Rotterdam, 1649, où Harvey répondait à l’Encheiridium anatomicum [Manuel anatomique] de Riolan (Paris, 1648, et Leyde, 1649) : v. supra note [2].

  3. Opera anatomica vetera et nova (Paris, 1649, vBibliographie), en 25 chapitres, pages 543‑603, commençant par la thèse que Riolan a avait présidée en 1645 contre la circulation (v. note [32], Brevis Destructio, chapitre v).

  4. V. note [14], première Responsio, 2e partie.

5.

Nathaniel Highmore avait dédié sa Corporis humani disquisitio anatomica [Exploration anatomique du corps humain] {a} Excellentissimo et Ornatissimo Viro, Do. Doctori Harveo, Collegii Medicorum Londinensium Socio dignissimo, Anatomiæ Professori Oculatissimo, Regiæ Majestatis nuperrime Medico Serenissimo, et Amico suo singulari [à son ami particulier, l’excellent et très honoré M. le docteur William Harvey, très éminent sociétaire du Collège des médecins de Londres et très perspicace professeur d’anatomie, qui a tout récemment été le sérénissime médecin de Sa Majesté le roi], le 4/14 décembre 1650 (calendrier julien/grégorien). Jean ii Riolan y remarquait :

6.

Fortunio Liceti, {a} De Motu Sanguinis… Quarto-Quæsitis per Epistolas Clarorum Virorum Responsa medico-philosophica, {b} chapitre ii, page 2, réponse non datée, adressée à Johann Vesling :

[…] hic autem sanguinis cursus et recursus Harueianus longe magis abest a sensu ; nec, nisi multis amotis impedimentis, in conspectum vtcumque se dedat ; contradicentemque sentiat vniuersam fere Medicorum, Galeni doctrinam sequentium, scholam. Immo vero, quid me Philosophum in Peripato spatiantem, ad id muneris vocas Medicus et Anatomicus egregius, quod purum putum est Anatomes et Medicinæ mysterium ?

[(…) ce déplacement harvéen du sang dans les deux sens est très éloigné de l’entendement, et ne se conçoit en aucune façon sans faire abstraction de multiples empêchements, car il contredit la pensée de presque toutes les écoles médicales qui suivent la doctrine de Galien. En tant que philosophe adhérant au péripatétisme, {c} je me demande même pourquoi vous, qui êtes excellent médecin et anatomiste, m’interrogez sur ce qui est un pur et simple mystère de l’anatomie et de la médecine]. {d}


  1. V. note [10], lettres de William Harvey sur le chyle.

  2. « Sur le mouvement du sang… Quatrième série des Réponses médico-philosophiques aux questions que de brillants hommes lui ont soumises par lettre » (Udine, Nicolaus Schirattus, 1647, in‑4o).

  3. Aristotélisme.

  4. Mise en exergue du passage emprunté par Jean ii Riolan.

7.

Dans ses Opuscula anatomica de 1652, Jean ii Riolan a publié des Notationes in tractatum clarissimi D.D. Petri Gassendi, Mathematices professoris Regii in Academia Parisiensi, de circulatione sanguinis [Remarques sur le traité du très illustre Pierre Gassendi, professeur royal de mathématiques en l’Université de Paris, sur la circulation du sang]. {a} Il citait ici les Petri Gassendi Animadversiones in decimum librum Diogenis Lærtii, qui est de Vita, Moribus Placitisque Epicuri, tome ii, Appendix, page iij : {b}

Nam quod præsertim quidem spectat ad Sanguinis circulationem, ea mihi potiùs sic arridet, vt perparum absit, quin habeam indubiam. Etenim, est aliquid etiam, quod ipse mihi ad meas illas difficultates respondeo ; tametsi non ita mihi satisfacio, quin sperem mihi maiorem quandam ab aliquo alio affulsuram lucem.

[Quant à ce qui touche surtout à la circulation du sang, elle me ferait plutôt sourire car je suis fort éloigné de la tenir pour indubitable. Pour répondre aux difficultés qui s’y présentent à moi, mais sans en être pleinement satisfait, j’espère qu’un autre l’éclaircira grandement pour moi]. {c}


  1. V. fin de la note Patin 28/152.

  2. « Remarques de Pierre Gassendi sur le dixième livre de Diogène Laërce qui traite de la vie, des mœurs et des maximes d’Épicure » (Paris, 1649, v. note [6], Dissertatio anatomica, chapitre xii), Appendix adressé à Barancus (François de Barancy, vnote Patin 3/211).

  3. Mise en exergue du passage emprunté par Riolan.

8.

La critique de Jean ii Riolan sur le Cor vindicatum de Pierre Guiffart (Rouen, 1652) a paru dans les Opuscula anatomica varia et nova (Paris, même année) : v. note [55], Brevis Destructio d’Hyginus Thalassius, chapitre iv.

9.

Pour achever la revue des anatomistes qu’il avait critiqués, Jean ii Riolan se référait à deux passages du De sanguinis motus Commentatio, in qua præcipue Riolani V.C. sententiam inquiritur de Paul Markward Schlegel. {a}

V. note [20], Brevis Destructio, chapitre ii, pour la Defensio que Riolan a publiée pour répondre à Schlegel dans ses Opuscula anatomica varia et nova de 1652.

10.

Préambule du livre i Du Régime, traduction de Littré Hip, volume 6, page 467 (avec de minimes modifications) ; v. notule {a}, note [12], Brevis Destructio, chapitre i, pour la plus courte citation qui précède, tirée des Épidémies, livre iii, chapitre 16.

11.

Chapitre 3 du livre indiqué, Littré Hip, volume 2, pages 241‑243 :

« Et cependant, il en rejaillit, dans le public, une grande défaveur sur toute la profession médicale, à tel point qu’on s’imagine qu’il n’existe réellement pas de médecine ; car, dans les maladies aiguës, les praticiens différeront tellement entre eux que la prescription faite par l’un comme la meilleure sera condamnée par l’autre comme mauvaise. À ce point, on est disposé à comparer la médecine avec l’art des devins : les devins regardent le même oiseau comme de bon augure s’il vole à gauche, comme de mauvais augure s’il vole à droite ; et semblablement, de l’inspection des entrailles ils tirent des inductions différentes suivant les différents cas ; mais d’autres devins ont sur les mêmes choses des avis diamétralement opposés. »

Dans son Argument, ibid. page 193, Émile Littré a expliqué l’allusion à Cnide (ancienne ville de Carie, au sud-ouest de l’Anatolie) :

« Hippocrate débute par attaquer les médecins cnidiens : il leur reproche de s’attacher à décrire les détails des maladies sans s’occuper des choses importantes à l’interprétation des signes ; d’omettre, dans l’application même de cette interprétation à la thérapeutique, ce qu’il regarde comme essentiel ; et de prescrire trop peu de remèdes, au moins dans les maladies chroniques. »

12.

Le traité d’Hippocrate des Fractures n’est pas divisé en plusieurs livres, mais en 48 paragraphes ; la citation de Jean ii Riolan correspond au § 2, pages 417‑423, avec cette note 4 d’Émile Littré, volume 3, page 416‑417 :

« Là-dessus Galien dit dans son commentaire : {a} “ Généralement les blessés présentent au médecin le bras dans la position convenable ; mais quelques-uns, par excès de zèle, dépassent le but naturel, qui est l’absence de douleur, pensant que la pronation est une position meilleure ; mais jamais blessé ne présente au médecin la main dans la supination, car cela l’éloigne trop de la position qui ne cause pas de douleur. De leur côté, quelques médecins, à la fois par ignorance et par prétention à l’habileté, adoptent la supination ; et pour cela, ils donnent au bras une position semblable à celle que prennent les archers quand ils décochent une flèche, c’est-à-dire qu’ils le mettent soit dans une supination complète, soit dans une position très rapprochée. ” […] Galien dit que les médecins que blâme ici Hippocrate placent le bras fracturé dans la supination ou dans une position rapprochée de la supination ; mais plus loin […], Hippocrate, blâmant la pratique d’autres médecins, dit qu’ils placent le bras dans la supination : voilà donc deux modes de faire condamnés par Hippocrate, le premier mettant le bras fracturé dans la position d’un archer tirant à l’arc, le second dans la supination. Il en résulte nécessairement que le premier n’est pas relatif à la supination. »


  1. Premier commentaire de Galien sur le livre d’Hippocrate des Fractures, chapitre ix (ce qui correspond à la référence donnée par Riolan) : Kühn, volume 18b, page 345, dont la traduction latine (conforme à celle du Galien paru à Venise en 1565, vnote Patin 1/716) est strictement la même que celle de Riolan, mais Littré ne l’a pas citée dans sa note.

13.

Jean ii Riolan résumait le début du livre de Galien sur la Dissection des muscles, à l’intention des débutants (Kühn, volume 18b, pages 926‑927), où sont cités quatre médecins gréco-romains :

14.

Jean ii Riolan brodait sur un passage du chapitre iii, sur les muscles de la main, dans le livre indiqué (Daremberg, volume 1, pages 173‑174) :

« Je voulais poursuivre le présent traité sans faire mention de ceux qui se sont trompés, j’avais même formé ce projet en commençant ; mais dans l’exposition de ce sujet, j’ai craint que mes futurs lecteurs, en me voyant en dissentiment avec les autres anatomistes, ne viennent à supposer que c’est moi qui suis dans l’erreur, et non pas eux ; car il est plus raisonnable, ce me semble, de supposer un seul individu que tout le monde dans l’erreur. Cette opinion se formera encore plus volontiers chez les personnes qui ne sont pas du reste familiarisées avec nos autres traités d’anatomie, dans lesquels, après avoir indiqué en quoi nos prédécesseurs s’étaient trompés dans la dissection, nous avons encore expliqué les causes de leurs erreurs, causes qui entraînent dans les mêmes fautes ceux qui voudront disséquer s’ils ne se tiennent pas en garde. »

15.

Juvénal, Satires :

16.

Horace, Épîtres, i, i, vers 11‑12 : « Je me soucie et suis en quête de ce qui est vrai et honnête, je m’y consacre tout entier, je cultive et rassemble ce qui pourrait bientôt me servir. »

17.

Jean ii Riolan formulait différemment le propos de Johannes Baptista Carcanus, {a} aux pages 2 vo‑3 ro de l’Autor ad Lectorem [L’auteur au lecteur] de son livre de Cordis vasorum in fœtu unione pertractatur, ostenditurque hac in re explicanda, solum Galenum veritatis scopum attigisse, reliquos omnes Anatomicos lapsos fuisse [explorant attentivement l’union des vaisseaux du cœur chez le fœtus, et démontrant que, pour l’expliquer, Galien est le seul à avoir touché la cible de la vérité, et que tous les autres anatomistes se sont trompés] : {b}

Paucitatis autem rerum nouarum inuentionis, atque ideo magnæ eius difficultatis rationem duplicem ego statuo. Altera est, quum maiores, vtiliores, ac arti magis necessariæ partes à multis præstantibus Anatomicis, inter quos Andreas Vesalius, necnon Fallopius, præceptor meus Excellentissimus, primas sibi vendicare videntur, iam adinuentæ fuerint ; adeo ut pauca arti conferentia nobis, quæ inueniri possint, restent perquirenda..

[Je déclare pourtant qu’il y a deux raisons au petit nombre des découvertes nouvelles et à leur très grande difficulté. La première est que maints anatomistes, dont André Vésale et mon excellent maître Fallope, semblent se prévaloir d’avoir déjà trouvé ce qui est le plus important, le plus utile et le plus nécessaire à la pratique de l’art, à tel point que notre contribution se limite au peu de choses qu’il nous reste à explorer pour progresser encore].


  1. V. note [10], première Responsio de Jean ii Riolan, 6e partie.

  2. Pavie, 1574, vnote Patin 22/348.

Riolan saluait au passage la qualité d’un autre livre de Carcanus De vulneribus Capitis [Sur les Plaies de la tête] (Milan, Petrus Tinus, 1583, in‑4o), sujet auquel Hippocrate a consacré un traité (Littré Hip, volume 3, pages 182‑261).

18.

V. notes :

19.

Jean ii Riolan mettait deux poètes latins à sa sauce :

20.

Ovide, Les Amours, i, xv, vers 39 : « vivant on sert de pâture à l’envie, elle s’apaise après la mort. »

La syntaxe latine de ce paragraphe est boiteuse : ma traduction et une interprétation.

21.

Pline le Jeune, Lettres, livre ix, xiv :

« J’ignore si la postérité aura pour nous quelque considération ; à vrai dire, nous la méritons un peu ; sûrement pas pour notre génie (ce serait de l’orgueil), mais pour notre application, pour notre labeur, pour notre respect envers ceux qui nous suivront. »

22.

Pline l’Ancien, Histoire naturelle, livre iii, introduction sur la complexité des études portant sur les parties de l’univers (Littré Pli, volume 1, page 153) :

« Cependant, nulle part l’indulgence n’est plus de mise, si l’on veut bien ne pas s’étonner qu’un homme ne connaisse pas toutes les choses humaines. »

Jean ii Riolan a emprunté ce paragraphe au livre i, chapitre iv, de son Anthropographie (1649) : v. note [9], Brevis Destructio, chapitre i.

23.

Après son long développement sur les mérites relatifs des anatomistes qui l’avaient précédé, Jean ii Riolan entamait ses réponses détaillées à Hyginus Thalassius, alias Pierre De Mercenne.

V. note [13], Brevis Destructio, chapitre i, pour les propos amers de saint Jérôme sur le pédagogue Brunnius. {a} Plutôt hors de propos et pour faire étalage de son érudition, Riolan esquivait l’attaque en citant la Bibliothèque de Photius, patriarche de Constantinople au ixe s., qui est un recueil de notices sur 99 auteurs profanes et sur la littérature religieuse chrétienne. La section concernant les Oribasii Medici Opera [Ouvrages du médecin Oribase] {b} occupe les colonnes 555‑563 dans l’édition que j’ai consultée ; {c} la critique sur l’omission de la chirurgie porte sur les dix livres du Compendium ad Eustathium, {d} et non sur le Galeni Compendium ad Iulianum Imp. {e}


  1. Écrits au début du ive s.

  2. Vnote Patin 9/1094 pour Oribase de Sardes.

  3. Photii Myriobiblon sive Bibliotheca librorum quos Photius Patriarcha Constantinopolitanus legit et censuit [Myriobilon (Milliers de livres) de Phorius ou Bibliothèque des livres que Photius, patriarche de Constantinople, a lus et jugés] (Genève, Oliva Paulus Stephanus, 1611, in‑fo).

  4. « Abrégé à l’intention d’Eustathius », fils d’Oribase : Ceterum chirurgiæ speciem omnem hisce collectaneis penitus prætermisit [Il a d’ailleurs entièrement omis toute la chirurgie dans cette compilation] (bas de la col. 558).

  5. « Abrégé de Galien à l’intention de l’empereur Julien », que les chrétiens ont surnommé l’Apostat et qui a régné de 361 à 363 (vnote Patin 15/300).

24.

Pour ce passage du premier commentaire de Galien sur le traité hippocratique du Régime dans les maladies aiguës, {a} Jean ii Riolan a emprunté la traduction latine de Ioannes Vassæus ; {b} qui est distincte de celle donnée par Kühn. {c}

V. supra note [12] pour le traité d’Hippocrate sur les Fractures, dont le premier chapitre dit : {d}

« Il ne faut pas de longues études pour traiter un bras cassé, et tout médecin, pour ainsi dire, en est capable ; néanmoins, je me sens forcé de m’étendre sur ce sujet parce que je sais que les médecins se sont fait une réputation d’habileté par les positions qu’ils donnaient au bras dans la déligation, {e} positions qui auraient dû leur faire une réputation d’ignorance ; mais dans notre art, bien d’autres points sont jugés de la sorte : le nouveau, dont on ignore encore l’utilité, est loué plus que la méthode habituelle dont la bonté est déjà connue, et les choses étranges le sont plus que les choses évidentes de soi. Il faut donc exposer les erreurs des médecins que je veux rectifier, soit les points faux qu’ils croient vrais, soit les points vrais qu’ils croient faux, au sujet de la manière d’être du bras. »


  1. V. supra note [11].

  2. Lyon, Gulielmus Rouillius, 1549, in‑8o, chapitre 17, page 32.

  3. Volume 15, chapitre xvi, page 450.

  4. Littré Hip, volume 3, page 415.

  5. Application du bandage.

25.

V. note [12], Brevis Destructio, chapitre i, pour cette citation qu’Hyginus Thalassius avait tirée de l’Anthropographie de Jean ii Riolan et pour sa source dans l’Éthique d’Aristote.

26.

V. note [3], Experimenta nova anatomica, épître dédicatoire.

27.

Tous les passages traduits entre guillemets sont extraits de l’épître dédicatoire de Jean Pecquet à François Fouquet ; v. sa note [8] pour l’allusion à l’ange qui faisait bouillonner l’eau de la piscine miraculeuse de Béthesda dans l’Évangile de saint Jean.

28.

Properce, {a} Élégies, iii, v, vers 7‑10 : {b}

« Ô terre malheureuse qui ne faisait que de naître, quand Prométhée la pétrit de ses mains ! {c} Certainement son ouvrage fut fait avec bien peu de prévoyance car, en façonnant le corps, il ne considéra pas l’entendement dans l’art industrieux qui le faisait agir, quoique la droite voie pour se bien démêler d’une si rare entreprise, était premièrement de travailler à l’esprit. »


  1. Vnote Patin 55/152.

  2. Traduction de Michel de Marolles, abbé de Villeloin (vnote Patin 72/183), qu’on pourra trouver verbeuse, mais qui est dans l’esprit du temps (Paris, 1655) et reflète élégamment la pensée de Jean ii Riolan.

  3. V. notule {c}, note [15], Brevis Destructio d’Hyginus Thalassius, chapitre i.

29.

« dont il n’est pas digne de délacer les souliers », Évangile de saint Marc (1:7), prédication de Jean-Baptiste sur la venue du Messie :

Venit fortior me post me cuius non sum dignus procumbens solvere corrigiam calciamentorum eius.

« Voici que vient derrière moi celui qui est plus puissant que moi ; je ne suis pas digne de me courber à ses pieds pour délier la courroie de ses chaussures. »

V. note [6], Experimenta nova anatomica, chapitre i, pour la citation qui précède sur Jan de Wale.

30.

V. note [1], Responsiones duæ, préface au lecteur pour ce mythe égyptien.

Jean ii Riolan était passé à la critique du chapitre ii des Experimenta nova anatomica. Je n’ai trouvé de source ni à la « chaude et hurlante tuerie de chiens aux abois » (que j’ai traduite en italique), ni à l’anecdote sur la prévention de la rage en Allemagne, qu’il avait peut-être apprise d’un de ses étudiants venus de là-bas. Il a néanmoins consacré le chapitre i, livre vii (pages 413‑417) de son Anthropographie (Paris, 1649) aux vivisections, Viventis animalis Observationes Anatomicæ [Observations anatomiques de l’animal vivant], sans en nier les mérites, notamment dans la découverte des lactifères mésentériques par Gaspare Aselli (v. note [5‑2] de sa première Responsio, 3e partie).

31.

J’ai torturé la syntaxe latine de cette phrase pour aboutir à une traduction cohérente, et n’ai pas mis en italique la partie qui l’est dans le texte imprimé, bien qu’elle ne figure pas dans la Brevis Destructio du « médecin pecquétien » (Hyginus Thalassius, alias Pierre De Mercenne).

32.

« menace, bride, exhorte les hérétiques ! », Deuxième Épître à Timothée, ii, 4:2, s’adressant implicitement aux « hérétiques » (ceux qui refusent le Dieu chrétien) :

Prædica verbum, insta opportune, importune : argue, obsecra, increpa in omni patientia, et doctrina !

[Proclame la parole, insiste à temps et à contretemps, réfute, menace, exhorte, avec une patience inlassable et le souci d’instruire !]

33.

« de passer le flambeau aux autres » : v. note [15], Brevis Destructio, chapitre i.

34.

Vnote Patin 2/1298 pour Spartam nactus es, hanc orna [Le sort t’a remis Sparte, fais-la resplendir], adage antique qu’Érasme a commenté.

35.

Aucun des docteurs régents de la Faculté de médecine de Paris n’avait la charge exclusive de professer l’anatomie (vnote Patin 5/8182). Jean ii Riolan voulait donc parler de la chaire d’anatomie, botanique et pharmacie du Collège de France qu’il a occupée comme titulaire actif de 1604 à 1654 (en omettant ses années de service auprès de la reine Marie de Médicis, de 1632 à 1642, v. supra note [3]). Par commodité, ses dissections anatomiques avaient probablement lieu dans l’amphithéâtre de la Faculté de médecine, plutôt qu’au Collège de Cambrai où il donnait ses leçons.

36.

« beaucoup de médecins désireux de ne pas tuer » : je n’ai pas trouvé ces mots dans le corpus hippocratique, mais l’idée s’en rapproche du fameux ωφελεειν, η μην βλαπτειν [être utile ou du moins ne pas nuire] (Épidémies, livre i, vnote Patin 2/8014), dont la forme proverbiale est devenue le très célèbre primum non nocere.

37.

Dialogue cité (traduction de Victor Cousin, 1840) :

« Ainsi la médecine est un art ; mais elle a un double objet : d’abord de former de nouveaux médecins par les soins de ceux qui le sont déjà, et puis de guérir. De ces deux choses, l’une ne peut pas être appelée l’art ; mais l’œuvre de l’art, soit qu’on l’enseigne, soit qu’on l’apprenne, c’est la santé. »

On oublie communément aujourd’hui que le mot « docteur », qui est synonyme de « médecin » dans la langue populaire, vient du latin docere, « enseigner », devoir qui n’appartient pas aux seuls professeurs.

38.

Idylles d’Ausone, Épicède {a} de Julius Ausonius, son père, {b} vers 11‑12 :

« J’ai offert gratuitement le secours de mon art à tous ceux qui l’ont réclamé, et mes soins n’allaient pas sans charité. »


  1. Chant funéraire.

  2. Ausone, Decimus Magnus Ausonius (vnote Patin 9/335), était fils de Julius Ausonius, premier médecin de l’empereur Valentinien ier.

Le médecin à qui Jean ii Riolan disait avoir généreusement « tendu la main » n’était pas le philiatre Jean Pecquet, mais le docteur régent Pierre De Mercenne.

39.

Apelle et Protogène étaient deux peintres grecs du ive s. av. J.‑C., dont Pline l’Ancien a abondamment parlé dans le livre xxxv de son Histoire naturelle, chapitre xxxvi. Sur Apelle, il y écrit (Littré Pli, volume 2, page 476) :

Idem perfecta opera proponebat in pergula transeuntibus, atque ipse post tabulam latens, vitia quæ notarentur auscultabat, vulgum diligentiorem judicem, quam se præferens.

« Quand il avait fini un tableau, il l’exposait sur un tréteau à la vue des passants, et, se tenant caché derrière, il écoutait les critiques qu’on en faisait, préférant le jugement du public, comme plus exact que le sien. » {a}


  1. Je n’ai rien lu de semblable sur Protogène et ignore d’où Jean ii Riolan a tiré le détail du marteau et du burin.

    Suit l’adage du cordonnier dont la science ne monte pas plus haut que la chaussure (v. note [10], Nova Dissertatio, Expérience iii).


Au début de ce paragraphe, Riolan parlait de la seconde édition des Experimenta nova anatomica, parue à Paris en 1654, alors que Pecquet n’y vivait plus depuis quatre ans. On apprend ici qu’il aurait chargé Pierre De Mercenne d’en superviser l’impression ; sa Brevis destructio n’exprime qu’hostilité envers son collègue Riolan, avec qui il avait, semble-t-il, d’amicales relations au sein de la Compagnie des docteurs régents de la Faculté de médecine de Paris.

40.

Julianus d’Alexandrie est un médecin du iie s. qui avait consacré 48 livres à critiquer les Aphorismes d’Hippocrate. Ce propos de Galien se lit au début de son petit livre Contre ce que Julianus a dit sur les Aphorismes (Kühn, volume 18a, pages 246‑247). Jean ii Riolan a recouru au Galien latin qui a été publié à Venise en 1565 (v. supra notule {a}, note [12]), volume 9, page 66 ro.

Les auteurs pouvaient solliciter l’avis de la Faculté de médecine de Paris sur leur livre, et elle pouvait aussi prendre elle-même l’initiative d’en donner un (alors généralement défavorable). La Compagnie confiait à deux ou trois de ses docteurs régents le soin d’examiner l’ouvrage. L’approbation de la Faculté était imprimée au début du livre, mais sa désapprobation n’interdisait en aucune façon l’impression (sauf censure de l’autorité royale). Aucun des ouvrages qui composent notre édition (pas même les Responsiones duæ de Riolan) ne contient d’imprimatur académique.

41.

Sénèque le Jeune, De la Colère, livre i, chapitre xv : « nous étouffons les monstres à leur naissance, nous noyons même nos propres enfants trop débiles ou difformes. Ce n’est pas la colère, mais la raison qui veut qu’on retranche de ce qui est sain ce qui ne l’est pas. »

Dans son dialogue intitulé Euthydème, Platon attribue ironiquement au personnage éponyme une σοφιαν τερατωδεσιν αθρωποις [une sagesse monstrueusement surhumaine].

V. note [21], Brevis destructio, chapitre i, pour la citation de saint Jérôme qu’Hyginus Thalassius avait relevée dans la première Responsio de Jean ii Riolan.

42.

En dépit des mises en exergue qui figurent dans le paragraphe imprimé, ma traduction n’a mis des guillemets qu’au passage qui est présent mot pour mot dans la Brevis Destructio.

V. note [30] de son chapitre iv pour la fugace allusion d’Hyginus Thalassius à l’inversion des viscères (situs inversus viscerum), sur laquelle Jean ii Riolan, à propos du cas observé à Paris en 1650, a écrit la Disquisitio de transpositione partium naturalium et vitalium in corpore humano [Recherche sur la transposition des parties naturelles et vitales dans le corps humain] qui figure dans ses Opuscula anatomica varia et nova [Opuscules anatomiques divers et nouveaux] (Paris, 1652, vnote Patin 11/254).

43.

V. note [22], Brevis Destructio, chapitre i, pour Sénèque le Jeune (Questions naturelles), sur les mystères de la nature, cité par Hyginus Thalassius. Jean ii Riolan avait en effet déjà emprunté cette citation dans la préface de son Anthropographie de 1649, page a iij ro.

44.

« Le mieux à faire est de suivre les traces de nos prédécesseurs s’ils ont marché droit, car ceux qui ont connu ces choses avant nous ne sont pas nos maîtres, mais nos guides » ; adaptation de Sénèque le Jeune, Lettres à Lucilius, livre iv, fin de l’épître xxxiii :

Quid ergo ? non ibo per priorum uestigia ? ego uero utar uia uetere, sed si propiorem planioremque inuenero, hanc muniam. Qui ante nos ista mouerunt non domini nostri sed duces sunt. Patet omnibus ueritas ; nondum est occupata ; multum ex illa etiam futuris relictum est.

[Quoi ! l’on ne doit pas marcher sur les traces de nos prédécesseurs ! Sans doute prendrai-je l’ancienne route, mais pour la quitter si j’en trouve une plus courte et plus commode. Nos devanciers sont nos guides, et non pas nos maîtres. Tout le monde peut prétendre à la vérité, nul ne se l’est encore appropriée, et les siècles à venir auront aussi une grande part dans cet héritage].

45.

Hyginus Thalassius avait cité le verset 5:22 de l’Évangile de saint Matthieu à la page 185 de sa Brevis Destructio (chapitre i) : omnis qui irascitur fratri suo… Jean ii Riolan y revenait pour se référer au texte grec et remarquer que le latin de la Vulgate avait omis l’adverbe εικη, eikê, « à la légère », après irascitur, « se fâche ».

46.

Je n’ai pas trouvé ces propos dans les traductions françaises de la référence indiquée à Jean Chrysostome. {a} Il me semble que Jean ii Riolan n’est pas remonté à cette source, mais a emprunté mot pour mot son latin au livre De Bono Senectutis [Sur la Bonté de la vieillesse] de Gabriel Palæotus, deuxième partie, page 103‑104 : {b}

Hincque auctor operis imperfecti sensit, eum qui cum debet irasci, non irascitur, peccare. Patientia enim præter rationem suscepta, inquit ille, est potius stupor quidam mentis, qui vitia seminat, negligentiam nutrit ; et non solum malos, sed etiam bonos inuitat ad malum : qui autem opportune excandescit, virtutem exercet præstantissimam ; illius enim ira non ex perturbatione exoritur, sed ex iudicio ; nec tunc irasci dicitur, sed iudicare. […]

Vnde iracundia, quæ alijs ætatibus sæpe in peccatum vergit, Senectuti laudem comparat, cum illius feruore bene vtitur, prout ætatis maturitas, et consilium ei suadere deberet.

[L’auteur d’un ouvrage inachevé {c} pense donc que c’est péché de ne pas se mettre en colère quand il le faut. {d} “ En effet, dit Chrysostome, si elle dépasse la mesure, la patience est plutôt une sorte d’engourdissement de l’esprit qui sème le vice et nourrit la négligence, et qui invite non seulement les mauvaises gens, mais aussi les honnêtes gens au mal. Celui qui s’enflamme opportunément fait preuve d’une très éminente vertu, car sa colère ne naît pas du désordre de son esprit, mais de l’exercice de son jugement. ” On ne dit pas alors qu’il s’emporte, mais qu’il juge. {e} (…)

Ainsi la colère qui, aux autres âges de la vie, confine souvent au péché, est-elle une marque de sagesse durant la vieillesse, quand son ardeur est employée à bon escient et quand la maturité lui est de bon conseil].


  1. V. notule {h}, note [5], Experimenta nova anatomica, chapitre xx ; je n’ai pas fouillé les homélies de Basile de Césarée (Père grec du ive s.) et les Morales sur Job de Grégoire le Grand (pape et Père latin du ve s.).

  2. Ouvrage du cardinal Gabriele Paleotti, Rome, 1595, v. note [20], Responsio ad Pecquetianos, troisième partie.

  3. Renvoi à l’homélie de Jean Chrysostome citée par Riolan.

  4. Mise en italique des passages repris par Riolan.

  5. Thomas d’Aquin.

47.

Le latin de ce paragraphe vient de diverses sources.

48.

V. notes :

Riolan n’a pas honoré Sorbière du titre de « docteur pecquétien » car il n’était pas gradué de la Faculté de médecine de Paris, mais avait obtenu son doctorat en Hollande dans les années 1640. Revenu en France en 1650, il avait été « ministre » (pasteur) et « gymnasiarque » (principal) du collège « hérétique » (calviniste) d’Orange (principauté alors rattachée aux Provinces-Unies, vnote Patin 8/62).

49.

« Malheureux enfant engagé dans un combat inégal avec Achille » : v. notes [8], préface de la première Responsio de Jean ii Riolan, pour ce vers de L’Énéide, et [17], Responsio a Pecquetianos, première partie, pour Troïlus (trop jeune adversaire d’Achille dans L’Iliade).

À la page 186, chapitre i de sa Brevis Destructio, Hyginus Thalassius, sans employer ce vers, a simplement reproché à Riolan d’avoir qualifié Jean Pecquet de juvenis, « jeune homme ».

50.

Sénèque le Jeune dans la lettre citée à Lucilius :

« “Personne ne guérit la folie par des préceptes ; donc ils ne guériront pas davantage la méchanceté. ” {a} C’est assimiler deux choses différentes : en guérissant la folie, nous rendons la santé ; mais en délivrant les esprits des préjugés, on ne lui donne pas de suite le discernement pour bien agir ; le lui donnerait-on, les avis n’en fortifieront pas moins le jugement qu’on doit porter sur ce qui est bien ou mal. Il est encore faux de dire que les préceptes ne servent pas aux hommes en démence : ils ne servent pas seuls, mais ils contribuent à la guérison. Souvent on a vu les menaces, les châtiments contenir les insensés. » {b}


  1. Propos d’Ariston de Chios, philosophe stoïcien du ive s. av. J.‑C.

  2. Traduction française de Charpentier et Lemaistre, 1889.

Ulpien a énoncé le précepte qui précède cet extrait : « La loi a accordé une punition légère pour éduquer. »

51.

« vous y recuisez le même chou » : Crambe bis posita, mors [Du chou resservi, et c’est la mort], adage antique équivalant à « réchauffer la même soupe » (vnote Patin 9/9061).

Le chapitre iv de la Brevis Destructio est sous-titré « Les principaux arguments de Riolan contre les lactifères thoraciques sont démolis ».

52.

Jean ii Riolan injectait Thomas Bartholin dans le débat, en se référant à ses Vasa Lymphatica et leurs Funérailles du foie (1653), et surtout à ses « Doutes anatomiques » sur les lactifères thoraciques (même année). La première Responsio de Riolan à Jean Pecquet est longuement analysée dans leurs chapitres iii‑iv (pages 9‑27). {a} Le cinquième et dernier chapitre (pages 28‑29) contient ce déroutant aveu de Bartholin, dont Riolan faisait ses choux gras :

Ipse pro dignitate illius pugnaui quoad per veritatem licuit, et ne inuentis Pecquetianis ductibus planè in nihilum recideret, aliquam officij veteris partem concredidi ; Sed Lymphatica nostra vasa, nuper reperta, actionem tutelæ contrariam mihi ildulgent. Nec dubito maiori iam de iure plures amicitiæ illius et defensioni renunciaturos, etiam qui feruide causam illius tituati sunt.

Riolanus antiquarum traditionum propugnatur strenuus, sed in nouis inuentis examinandus arripiendisve nunquam pertinax, vbi Naturæ vidit consilium, pro Hepate tanquam Deus Stator contra Pequetum stetit. Et omnino Pecqueti inuentum Hepati non potuit omnem sanguificationis dignitatem facere ambiguam, vt in Hist. de Lact. Thor. demonstraui.

[Je me suis battu pour l’honneur de Pecquet autant que le respect de la vérité m’a autorisé à le faire, et je me suis fié en partie à mes anciennes convictions afin que les canaux qu’il a découverts ne tombent pas entièrement dans le néant. Néanmoins, les vaisseaux lymphatiques que j’ai récemment mis au jour me conduisent à inverser ma bienveillance à son égard, et je ne doute pas que beaucoup de ceux qui ont amicalement pris sa défense, et même ceux qui ont ardemment soutenu sa cause, y renonceront désormais fort légitimement.

Riolan est un infatigable défenseur des traditions anciennes, mais ne s’entête jamais à examiner et à empoigner les nouvelles inventions ; il invoque la sagesse de la nature quand, tel Jupiter Stator, {b} il défend fermement le foie contre Pecquet, dont la découverte n’est en aucune façon parvenue à mettre hors de doute le fait que ce viscère assure en partie la sanguification, comme je l’ai démontré dans mon Historia anatomica de Lacteis thoracis]. {c}


  1. Riolan avait sur-le-champ opposé ses Dubia resoluta (v. note [19], Brevis Destructio, chapitre v) aux Dubia Anatomica de Bartholin (Copenhague et Paris, 1653, v. note [26] de sa lettre à Johann Daniel Horst).

    Leur chapitre iv, Alia contra Lacteas Thoracicas argmenta ejusdem Riolani soluuntur [Résolution d’autres arguments de Riolan contre les lactifères thoraciques], se concluait sur ce vœu de Bartholin (page 27) :

    Alia Viri doctissimi momenta, temporis operisque parcus, transmitto. De singulis experientia judicet, cui fasces ex merito submittimus.

    [Soucieux d’épargner mon temps et ma peine, je passe sous silence les autres arguments de ce très savant homme. L’expérience aura raison de chacun d’entre eux et nous nous soumettrons de bonne grâce à son verdict].

  2. Surnom de Jupiter lié à son pouvoir d’arrêter les fuyards.

  3. Dans son Historia anatomica (1652), Bartholin n’a pas suivi Pecquet, en se montrant partisan d’une sanguification mixte, hépatique et cardiaque (v. note [2] de son chapitre xv). Je ne parviens pourtant pas à comprendre comment, en 1653, il pouvait tenir ces propos ambigus et condamner Pecquet à l’oubli, après avoir célébré les Funérailles du foie, et quelques pages avant d’énoncer, dans la 4e conclusion du chapitre d’où provient cet extrait (page 35) :

    Nihil sanguinis ex Hepate ad Mesenterium derivari ex Circulationis principiis, nec vllum chlylum ad Hepar peruenire, ex obseruationibus Vasorum nostrorum Lymphaticorum.

    [Aucune goutte de sang ne s’écoule du foie vers le mésentère, suivant les principes de la circulation, et aucune goutte de chyle ne parvient au foie, suivant notre découverte des vaisseaux lymphatiques].

    Il me semble que, déloyalement et contre toute logique, Bartholin voulait dénigrer les mérites de Pecquet, qui l’avait bel et bien précédé sur la supposée sanguification cardiaque exclusive, et ne pas s’attirer les foudres de Riolan : belle preuve de la puissante influence qu’il exerçait encore sur l’anatomie européenne.


a.

Page 69, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

In Opusculis Anatomicis causas legitimas ha-
buit Riolanus scribendi aduersus Harueum,
Highmorum, Gassendum, Pecquetum, Guiffar-
tum, Slegelium, Bartholinum
.

Harueus vbi peruenit ad eius manus meum
Encheiridium Anatomicum, scripsit Exercitatio-
nem Anatomicam de Circulatione sanguinis ad-
uersus Riolanum : Initio libri gratulatur felicitati
eius viri, quod institutum maxima dignissimum
laude perficiendum susceperit, omnium morborum
sedes ante oculos ponere opus est nonnisi diuino ingenio
exantlandum. Decent hæc conamina Anatomico-
rum Principem, nulla enim est scientia, quæ non ex
præexistente cognitione oritur, nullaque certa et ple-
nè cognita notitia, quæ non ex sensu originem duxit.

Non enim parui faciendum de re tanta viri iudi-
cium, (notate Pecquetiani,) qui omnium quot-
quot sunt huius sæculi Anatomicorum facilè Prin-
ceps et Coryphæus existimatur, sed plusquam alio-
rum omnium vel apllaudentium, vel repugnan-
tium ducenda huius vnius viri sententia, in glo-
riam aut censuram respicienda, et pensitanda
. Et

b.

Page 70, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

sub finem libri. Viuet in æternum celebris libellus,
nominisque tui gloriam pereunte etiam marmore,
posteris enarrabit : Nam Anatomem Pathologiæ
summa cum gratia coniunxisti ; Osteologiâ nouâ
vtilissimâ magno cum fructu locupletasti. Macte
esto 
{a} virtute vir Insignissime, et me ama, qui te fe-
licem simul et longæuum, et vt omnia tua cele-
berrima scripta, sempiternæ laudi tuæ sint, exoptat
.

Vides quibus titulis, et quàm honorificis
Riolanum exornat Harueus. Cui respondit Rio-
lanus
cum summa humanitate et modestia. An-
te meum reditum in Galliam dum in Anglia de-
gerem, sæpius interpellatus fui ab Harueo, vt
meum sensum de Circulatione sanguinis, illi
aperirem.

Non potui meas dubitandi rationes liberè
proferre, quia extorris et transfuga in Angliam
cum Serenissima Regina mea Domina, quia
Gallis inimica est Anglia : in Seripho insula mutæ
sunr ranæ, aliò translatæ canunt : ex Plinio.

Quum autem Harueus confidenter asseueras-
set, libro de generatione Animalium, pag. 154.
Editionis Anglicanæ, circuitum sanguinis admi-
rabilem à se iampridem inuentum, neminem refel-
lere, vel quidpiam opponere potuisse, quod respon-
sum mereatur, accuratiùs relegi eius exercitationes
Anatomicas primas de motu sanguinis Circulato-
rio
 ; Atque hæc causa fuit iteratæ scriptionis ad-
uersus Harueum, quod viderem meum Respon-
sum neglectum.

Highmorus Anglus Anacephaleosim scripsit, de
Circulatione totius sanguinis, in quauis particula
per vniuersum corpus
. Crederet forsan aliquis in


  1. Sic pour : ista (texte source).

c.

Page 71, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

rebus Anatomicis parum exercitatus, quæcum-
que de Anastomosibus Venarum et Arteriarum
narrantur ab Highmoro, ad probandam Circu-
lationem sanguinis, esse verissima, et ab eo di-
ligenter inuestigata, et picturis diligentiùs ex-
pressa fuisse, quia iussu D. Haruei, Medici Se-
renissimi, publicæ censuræ suam Disquisitionem A-
natomicam exposuit
, ac proinde non indignam
luce, atque talem ab eruditissimo Harueo iudi-
catam fuisse. Ego verò manifestissimè demon-
straui, cuncta hæc in plurimis esse falsissima,
nec ex libro Naturæ, id est ex corpore Humano
fuisse descripta, sed ex Vesalij picturis omnia
desumpta.

Cùm ingenuè et sincerè fateatur clarissimus
Licetus, eximius Philosophus, et eruditissimus
Medicus, disquisitionem de Circulatione sangui-
nis, purum putum esse Anatomes mysterium
 ; atque
viderem doctissimum Philosophum et præstan-
tissimum Mathematicum, ac Professorem Re-
gium, D. Gassendum, in explicanda suo more,
Circulatione sanguinis, multùm aberrrasse, et
sperare sibi maiorem quandam ab aliquo alio afful-
suram lucem
, idcirco amicas Notationes appo-
sui, vt eius votus responderem.

Postea sese obtulit Pecquetus, qui disseruit
de Circulatione sanguinis ex mente Haruei, sed
inscienter admodum, et proposuit suum Para-
doxum de Venis Lacteis Thoracicis
, et sanguinis
prima confectione in Corde solo, destructa He-
patis actione sanguifica quæ ab initio mundi co-
gnita et confirmata fuit ab omnibus Medicis, et
aliis operum Naturæ scrutatoribus. Causas meæ

d.

Page 72, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

primæ Responsionis ad Pecquetum proposui in
Præfatione Responsionis
.

Dum Responsio ad Experimenta noua Ana-
tomica Pecqueti de Venis Lacteis
, typis manda-
retur, peruenit ad manus meas liber D. Petri
Guiffarti, eruditissimi Medic Rothomagensis
, ip-
sius dono oblatus, cum Epistola ad examen libri
inuitante : eóque viso et examinato, non potui,
nec debui silere. Atque hæc est causa admoni-
tionis ad Petrum Guiffartum, de Cordis officio
nouo.

Tandem Slegelius cùm resciuisset à Riolano,
dum fuit in Anatomicis eius Discipulus, vt fate-
tur, ipsum scripturum de Circulatione sanguinis,
et Responsurum Harueo, expectauit septem-
decim annis meam Dissertationem de Circulatio-
ne sanguinis
, quam ipse didicit ex ore Haruei ;
cui quisque studio deuinctus adhæret, hunc lau-
dat, hunc imitatur, præ hoc omnia aliorum do-
gmata ipsi frigent, et sordent. Ideóque causam
suscepit Haruei, cum Præfatione honoris ad
Riolanum, quem appellat Anatomiæ Principem,
et sæpius Monarcham, Phœnicem Anatomico-
rum
 : et pag. 6. sic laudat Riolanum. Maximi
semper à me factus est Riolanus, et merito suo ;
nam hoc alibi non possum non hic repetere : Si quis
legerit alios libros Anatomicos insalutato Riolano,
multum sciat adhuc sibi defuturum ; si quis verò
solum Riolanum, vnáque diligenter manum operi
adhibuerit, sine aliis peritum anatomicum eua-
surum
. Notate verba ista Pecquetiani asseclæ.

Istam declarationem coactus fui facere, vt
redderem meos aduersarios impostores et men-

e.

Page 73, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

dacissimos : Præclarum est Hippocratis iudicium
de scripturis Recentiorum emendatis, lib. 3.
Epidem. Magnam artis partem esse arbitror de his
quæ scripta sunt rectè posse considerationem facere,
atque iudicare ; qui hoc nouit, et his rectè vtitur,
non videtur mihi multum in arte falli posse
. Me-
morabilis est locus apud eundem Hippocratem,
lib. 1. de diœta ; Si qui mihi ex prioribus, qui de
diæta humana ad sanitatem conferente scripserunt,
rectè cognouisse, ac omnia per totum, quantum hu-
manæ menti possibile est conscripsisse videretur, sa-
tis esset mihi aliorum laboribus, quos nossem rectè
habere, vti ; prout singula vtilia esse viderentur :
Nunc verò multi quidem iam scripserunt, nullus
autem rectè nouit, quidnam fuerit ipsis scriben-
dum, et alij quidem aliud assequuti sunt ; verùm
totum nullus adhuc ex prioribus : Immeritò autem
aliquis ipsorum reprehendatur : Propterea quod
inuenire non potuereunt, imò laudandi potiùs omnes,
quod inuestigare conati sunt minimè institui, Verùm iis
quæ sufficienter cognita sunt testimonium præbere
animus est. Quæcumque igitur à prioribus rectè di-
cta sunt, vt non sit possibile me aliter conscribere,
rectè conscribam : quæcunque verò non rectè dixe-
runt siquidem redarguam hæc, quod non sic se ha-
bent, nihil perfecero ; Verùm exponendo qua de
causa sungula ipsorum rectè habere mihi videntur
declarare volo. Propterea vero hunc sermonem præ-
pono, quod multi homines, vbi audierint aliquem
priùs de eo aliquid exposuisse, eum qui de hic po-
steriùs disserit non recipiunt, non cognoscentes, quod
eiusdem intelligentiæ est ea, quæ rectè dicta sunt

f.

Page 74, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

posse iudicare. Ego igitur evlut dixi, rectè quidem
dictis testimonium præbebo, quæ verò non rectè di-
cta sunt, ac cognita, qualia sint declarabo. Quæ
autem nullus ex prioribus explanare tentauit, ea
etiam ipsa qualia sint declarabo
.

Idem Hippocrates, in Medicina liberum et
honestum esse iudicauit, aliorum Medicorum
errores notare : Contra Medicos Cnidios inuitus
scripsit librum de diœta acutorum : inuitus dico,
quia dissensiones Medicorum inter se, dubiam et
incertam instar Aruspicinæ reddunt Medicinam
,
inquit Hippocrates. Idem lib. 1. de fracturis, par-
ticula 9.
reprehendit Medicos, qui malè vincie-
bant fracta brachia : et producit rationem alte-
rius Medici, qui sagittarios testes adduxit. Ga-
lenus in commentarios notat
 : huc transferre sagitta-
riorum exemplum, existimari debet prorsus fa-
tuum, satiúsque fuit ab Hippocrate nullo modo
commemorari, quàm acerrimè refelli, Nam quæ
prorsus stulta sunt, deridenda potius, quàm à scri-
ptoribus confutanda. Non tamen prohibeo, quomi-
nus dum viuentes agunt redarguantur, ac præser-
tim vbi, qui hæc nugatur audientibus persuadet, vt
sibi ipsi hominis curationem committant. Fit etiam
interdum, vt nos quoque in scribendo stultis opinio-
nibus contradicamus, vbi multos videmus ipsis cre-
dere quasi veræ sint
. Asseclæ Pecquetiani notate
hunc locum.

Exemplo Hippocratis, Galenus infinitos Me-
dicorum errores notauit et emendauit, initio li-
bri de dissectione musculorum
. Quid sentiret de
scriptis Anatomicis Marini, Æliani, Pelopis,
Lyci
, proposuit : præ cæteris Anatomicis Lyci

g.

Page 75, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

errores emendauit, quod eum perfectissimè de
rebus Anatomicis scripsisse vulgò ferebatur. Et
lib. 1. 
{a} de vsu partium, libros eorum, qui se Ana-
tomicos vocant, multis erroribus abundare notat,
de quibus librum pollicetur
.

Itaque Riolanus sequutus est Hippocratis et
Galeni
consilia de legendis et examinandis Ana-
tomicorum scriptis.

———— stulta est clementia cùm tot
Occurras scriptis, perituræ parcere chartæ.
Quid Romæ faciam ? mentiri nescio, librum
Si malus est nequeo laudare et poscere
.

Neque alienis indicibus mutatis interposito no-
mine meo, mea opera Anatomica composui, ne-
que aliorum inuenta iniquè vituperans institui
ex eo me approbare : sed peritis scriptoribus in-
finitas egi gratias, quod egregiis ingeniorum
solertiis ex æuo collocatis, fœcundiores et ex-
peditiores ad scribendum facultates nobis reli-
querint, talibusque confidentes authoribus, au-
si fuimus nouum Corpus Anatomicum, conde-
re, et in lucem proferre : In eo contexendo om-
nes Anatomicos quotquot erant, legi, consului,
inter se comparaui, vt quod vtile et consenta-
neum veritati mihi videbatur, decerperem, col-
ligerem et in meum succum conuerterem.

   Quod verum atque decens curo, et rogo, et om-
nis in hoc sum,
   Condo et compono, quæ mox depromere possim
.

Dum Laurentium et Bauhinum examinaui
scito me quidquid ab aliis Anatomicis rectè vel
perperam scriptum fuerit, examinasse. Atque
hoc scribendi genus plurimùm laudauit Baptista


  1. Sic pour : 2.

h.

Page 76, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

Carcanus, in Præfat. libelli de vnione vasorum
in fœtu
.

Is erat præstantissimus Anatomicus, Disci-
pulus Vesalij, qui scripsit admirabilem commen-
tarium, in lib. Hippocratis de vulneribus Capitis.
Cùm, inquit, Vesalij et Fallopij labore et stu-
dio tota fuerit Anatome patefacta, nihilque su-
persit inueniendum, eorum labor et industria me-
liùs et utiliùs impenditur in iis examinandis, quæ
ab ipsis inuenta sunt, quàm si tempus et operam
inutiliter perderemus in rerum nouarum indaga-
tione
. Sic Herophilus, Anatomicus præstantissi-
mus non dubitauit Praxagoræ, Præceptoris sui
errores annotare et castigare, ne posteritas iis-
dem erroribus deciperetur, quibus fuerat ipse
deceptus. Sic Vesalius in opera anatomica Ga-
leni
animaduertit, Vesalium Fallopius eius Dis-
cipulus seuerè castigauit in suis Obseruationibus
Anatomicis
, quæ sunt examen seuerum Vesalij.
Itaque post multas Anatomicas dissectiones
mea manu sedulò et laboriosè administratas, in
Libros et Authores Anatomicos, censuræ et
animaduersionis authoritatem vsurpaui, quod
effeci cum omni modestia et humanitate, ne
cornicum oculos configere viderer, et instar
Laruarum cum mortuis luctari : Eos tantùm A-
natomicos nominaui et produxi, qui solerti in-
genio, manúque accuratâ tractarunt Anatomi-
ca cultro et calamo descripta.

Quod ad me attinet, de meis laboribus Ana-
tomicis iudicium æquo Lectori et perito, Ana-
tomico solerti relinquo : indicio de meipso ero,
vos eritis iudices ;

i.

Page 77, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

Rara coronato plausere Theatra Menandro,
          Et sua riserunt sæcula Mæonidem
.

Dicam tamen liberè, sine fastu, etiam fremen-
te inuidia, duorum præsertim Pecquietianorum,
qui gloriæ meæ iuident : Nullum Authorem
viuum vidisse
suos Commentarios tam sæpe edi-
tos : Nam pascitur in viuis liuor, post fata quiescit.

Attamen non ego laudem et applausum ex
hoc labore spero et affecto : Vtilitatem iuuandi
prætuli gratiæ placendi, et si ingenio non est lo-
cus, saltem curæ testimonium promeruisse con-
tentus ero. Posteris an aliqua cura nostri futura sit
nescio, nos certè meremur, vt sit aliqua, non dico
ingenio, id enim superbum, sed studio et labori
.
Audacter igitur dicam, citra fastum et arrogan-
tiam, Corpus humanum à multis dissectum et
descriptum fuisse, sed à nemine tam accuratè se-
ctum, examinatum, et descriptum. Quod si
omnia non fuerimus assequuti in Microcosmo,
excusationem Plinij prætexeram, qui terrarum
vniuersam orbem descripturus, his verbis ve-
niam precatur. Haud vllo in genere venia iustior
est, si modò minimè mirum est, hominem genitum,
non omnia humana nouisse
.

Pag. 183. Opponam tuæ relationi ex D.
Hieronymo
, Patriarcham Photium infinitos Au-
thores legisse et examinasse, ut testatur in Bi-
bliotheca sua
 : quæcumque rectè dicta, laudauit ;
quæ falsa et ridicula notauit : atque in Oribasio
Medico
reprehendit, quod præcipuam Medici-
næ partem nempe Chirurgiam miserit, in ope-
re quo vniuersam Medicinam describit ad Ju-
lanum Imperatorem
.

j.

Page 78, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

Eleganter Galenus reprehendit eos qui nouis
inuentis delectantur ; et qui eis fauent, Quidam
in arte Medicinali res quidem nouas sunt aggressi,
cùm tamen rebus prioribus melius quidpiam inue-
nire nequirent, sed vulgi affectionem, quam Hip-
pocrates dixit, cùm intelligerent, nempe vulgus quod
nouum inusitatúmque est, et nondum si vtile est
intellectum, laudat magis quàm assuetum quod
vtile est cognitum. Lib. 1. de fracturis, et lib. 1.
de diæta acutorum, particula 17
.

Pag. 183. Vnusquisque bene iudicat ea, quæ
nouit, et eorum bonus est arbiter, ait Riolanus
. Id
desumptum ex Aristotele, quod subticuisiti. Er-
go solus sapit Riolanus, Reliqui Anatomici sunt
ignari
. Nunquam id à me prolatum, sed cæcu-
tiisse, vel hallucinatos fuisse dixi, propter de-
fectum administrationis Anatomicæ propriis
manibus celebrandæ, et cadauerum inopiam.
Quæ duo si illis obtigissent, forsan Riolanum su-
perassent in rebus Anatomicis. Id scriptis meis
pronunciaui, et nullus Anatomicus ab eo tem-
pore, vel alius Medicus ea de re conquestus est,
præter istos duos Medicos Parisienses, asseclas
Pecquetianos, rei Anatomicæ ignarissimos
.

Licuit Pecqueto audacter, in Epistola præli-
minari proferre, errauisse hactenus omnium retro
seculorum etiam præstantioris notæ Anatomicos, et
eos, qui Physicam professi sunt, vno excepto Aristo-
tele in animantium natura, non leui hominum di-
scrimine cæcutiisse
.

Nonne Pecquetus omnes Medicos ab inuen-
ta et condita Medicina reprehendit, nullo ex-
cepto nisi Aristotele ? non leui hominum discrimine,

k.

Page 79, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

quid hoc significat, nisi in discrimen vitæ addu-
ctos fuisse homines, ex ignorantia Venarum La-
ctearum ? Cur vnus ipse Pumilio aduersus tot
annorum Gigantas tentem insurgere, qui errores suos
oraculis propemodum anteponunt, aut ne videan-
tur hallucinari potuisse, à somniis obstinatè re-
spuentes 
{a} vindicari. Ergo quæcumque scripta sunt
ab Anatomicis, sunt errores et somnia. Ipse par-
uulus, etsi solus tot et tantos audeat prouocare ?
Non est quod venientium incursus vehementer de-
beat expauescere
. Audacter fatetur, se paruu-
lum, pumilionem prouocare omnes Anatomi-
cos, et nihil expauescere. Quænam hæc fiducia
et insolentia ? Nam eius naturæ libellus est, vt
multa sensibus deferat, pauca ratiocinio, quidquam,
ni sensuum fuerit stabilitum suffragio
. Respuit
rationem, nec potest vsum inuenti sui, nisi ra-
tiocino probare.

Sed dum immoror in libelli commendatione,
inuocant interim languidi opem tuam, anxieque
lentum expectant salutaris aquæ motum
. Ergo
Pecquetus laudator sui Operis, Angelus est, qui
Piscinæ salutarem aquam indicauit. Parcat tua
benignitas tot miserorum votis, periculosa manu-
missionis dilatione obsistere
. Ergo omnes languidi
expectant istum libellum, cuius dilatio pericu-
losa est, quem hucusque hominem non habuerunt,
in te commodum inuenisse se gaudeant, Et tuis mu-
neribus sanior vniuersus Orbis gratuleretur
. Ergo no-
uus iste Prometheus noum hominem dedit or-
bi, vel renouauit, et pro ista renouatione vni-
uersus Orbis gratulabitur Ioanni Pecqueto, qui
talia scripsit ad sui libri commendationem, quia


  1. Sic pour : respuent (texte source).

l.

Page 80, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

sanior erit vniuersus Orbis ; Ergo ab Adamo
vsque ad hæc tempora, erronea fuit Medicina.
Nullus vnquam Author tam superbè et arro-
ganter de seipso loquutus est : Et tamen Pecque-
tiani Anatomici
mirabilia ista laudant, et com-
mendant. Audi, Pecquete, pro tuo Inuento tibi
repono illud Propertij.

O prima infelix fingenti terra Prometheo !
     Ille parum cauti pectoris egit opus :
Corpora disponens, mentem non vidit in arte :
     Recta animæ primùm debuit esse viæ
.

Persequitur Pecquetus peritis Anatomicis in-
sultare. Cap. 1. Aperuit primus Asellius Venas
Lacteas ; sufficit non spernendum eius iudicium, vt
vt sit exiguum : Valæus Venarum quasdam ab
intestinis vno et continuato ductu in ramum Me-
sentericum, quasdam in ipsam Portæ venam, in
Caua Hepatis, quasdam ; paucissimas quandoque
in Venam Cauam prope emulgentes desinere : Ita
sentiunt non vulgaris peritiæ Anatomici Medici,
Haueus, Veslingius, Conringius, Bartholinus,
nec meliùs ipse Riolanus
. Nonne Pecquetus casti-
gat et reprehendit istos Anatomicos, quorum
non est dignus soluere corrigias calceamento-
rum ? Sed ille post acquisitam ex cadauerum se-
ctione sapientiam, mutam alioqui frigidámque
placuit ex vigenti viuarum animantium harmonia
veram scientiam exprimere
. Ergo omnes Ana-
tomici mutam, firgidamque sapientiam profitentur.
Quid hoc aliud, nisi explodere vulgarem Ana-
tomem, quoniam ipse delectatur calente et cla-
mosa latrantium canum laniena
. Ac sanè istud
exercitium Anatomicum simile est carnificinæ,

m.

Page 81, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

quam exercent in Germania ciuitatibus carnifi-
ces, æstatis tempore, metu rabiei, quo tempo-
re ciues debent canes suos domi continere. Sic
pellibus detractis fruuntur carnifices, ex quibus
manualia pellicea conficiuntur decenter appa-
rata, quæ ad nos deferuntur. Verisimile est Pec-
quetum
canicidam ex istis centenis canibus,
et aliis quampluribus quos dissecuit, magnum
quæstum fecisse. Mihi valde displicuit ista eui-
sceratio canum viuentium, quoniam didici ex
Hieroglyphicis Horapollinis, cap. 39. 
{a} Eos, qui ca-
nium funus procurant, vbi morituri sunt, magna ex
parte spleniticos fieri, siquidem graui illo halitu et
vapore, qui ex inciso dissectóque cane expirat, in-
ficiuntur
.

Pag. 183. Conqueritur Medicus Pecquetia-
nus, quod asperioribus verbis Pecquetum Riolanus
exceperit, blandioribus et sericeis
verbis vtendum
erat, vti Regibus fieri assolet. Nonne id fecit
Riolanus ? Fateor istud Iuuenem non indoctum, istos
duos tubulos lacteos ad superna repentes inuenisse,
sed vsum verum prorsus ignorare, atque imperitè
sanguificationem Hepatis eripuisse, vt tribuere Cor-
di. Laudo tamen eius scrutinum Anatomicum
et diligentiam in ista perquisitione Venarum La-
ctearum
.

Sed mihi succurrit consilium D. Pauli : Ob-
jurga, obsta, increpa hæreticos
. Quid aliud istud
inuuentum Pecqueti quam hæresis in Medicinam
introducta ? Satis fuisset, inquit Pecquetianus,
aliis lampadem tradere.

Pag. 184. Quid aliud egit Riolanus scriben-
do et docendo Anatomen, quàm lampadem tra-


  1. Sic pour : 37 (source citée).

n.

Page 82, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

dere suis Discipulis Anatomiæ studiosis, de lu-
mine suo aliud accendens, et Spartam, quam na-
ctus eram, ita diligenter excolui, vt post innu-
meras in Scholis Medicorum cadauerum disse-
ctiones, palam administratas, vniuerso Medi-
corum Collegarum consensu, prouincia docen-
di et administrandi Anatomem per quadrien-
nium mihi soli demandata fuerit, anno 1614, uti
Scholæ alumnos, cæterósque qui vellent En-
cheirises Anatomicas tractare edocerem ; quod
non sine laude, et aliorum profectu perfeci, vt
multi in hac vrbe Medicinam profitentes, nisi
fuerint ingrati et inuidi, et alij alibi commoran-
tes testari possunt : atque iam publicè demon-
strârunt et manu, et calamo suis scriptis Ana-
tomicis, at præsertim Germani, qui valdè gra-
ti sunt erga suos præceptores, et libenter pro-
fitentur per quos profecerint. Habebam tum
Exteros auditores plusquam sexaginta, qui per
quinque vel sex menses Lutetiæ commoraban-
tur, ad discendam Anatomem.

Itaque cupiens quamplures Anatomicos fieri
πολλοις βουλομενοις σωζονται ιατροις, ex Hippocrate,
qua viâ et methodo sit progrediendum in re-
bus Anatomicis administrandis et inuestigandis,
lubenter edocui. In hoc sequutus sum consi-
lium Platonis, in Clitophonte : Optimi Medi-
ci præcipuus scopus est, edocere, et instruere
alios, vt habeat successores in operibus artis :
alter est scopus restituere sanitatem ægris.

Pag. 184. Dicat nunc Riolanus, an iuuandi studio,
Pecquetum namum porrexit ?
Porrexi cùm me de re-
bus Anatomicis consuluit domi, eique demon-

o.

Page 83, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

straui meum Encheiridium Anatomicum non-
dum editum, sed nunquam de Venis Lacteis Tho-
racis
mecum colloquutus est : tantum abest, vt
meum iudicium postularit, quod illi lubenter et
candidè impertiissem.

De me profiteri possum, idem illud quod Pa-
ter Ausonij de se Medico dicebat :

Obtuli opem cunctis poscentibus artis inemptæ,
      Consiliúmque meum cum pietate fuit
.

Ille Pecquetianus, qui curam suscepit editio-
nis, absente Pecqueto, quamuis simularet mecum
amicitiam, nunquam ea de re mihi quidquam
communicauit, quasi indignus essem sacris istis
Eleusiniis. Saltem Pecquetus debebat suum in-
uentum instar Apellis et Protogenis, publico ex-
ponere : Illi enim suas tabellas, siue imagines,
celte et malleum tenentes in lucem proferebant,
vt si quid reprehensione dignum deprehendere-
tur, confestim deleretur.

Pag. 184. Excandescit Doctor Pecquetianus,
quod iniuriis affecerim Pecquetum
. Quod dictum
de Paradoxo, id conuertit ad ipsum Authorem :
Si minxisset Pecquetus in patrios cineres, si docuis
set venenis violare fontes, quo monstri, quàm dete
standi, facinorosi, et perniciosi nomine damnari
potuisset ?
Sed quemadmodum, qui publicum fon-
tem veneno infecit, graviùs punitur, quàm si
priuatum hominem eodem sustulisset, quia ma-
lum quò communius, eò deterius, ita seueriùs
Leges in eos animaduertunt, qui scripto publico
falsas opiniones spargunt in vulgus, quàm si in
priuatis colloquiis eas temere effutirent. Pro-
pterea Principum edictis et Senatusconsultis

p.

Page 84, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

cautum est, ne quis Theologiæ aut Medicinæ li-
bros in lucem emittat, qui priùs non fuerint re-
cogniti et probati à Censoribus, quos alterutra
Facultas nominârit. Olim collo gestabat la-
queum quicumque in quibusdam Ciuitatibus
nouas leges proponebat : Vtinam hoc modo pro-
dirent in publicum, qui noua dogmata pernicio-
sa et detestanda proponunt. Eleganter Galenus
libro contra Iulianum
scribit. Nescio quo pacto in-
iurias persequi iudicio licet : Lex autem falso con-
tradicentibus nulla statuta est ; Arbitror non imme-
ritò in optimos viros impurissimum quemque inue-
hi audere, 
{a} sicuti in Ægypto {b} artium inuentum v-
numquodque à communi eruditorum consessu pro-
batum columnis inscribebatur quibusdam in sacris
locis positis. Eodem modo apud nos factum opor-
tuit : Collegium proborum simul Doctorúmque ho-
minum, qui examinatis Recentiorum scriptis in
publicum, quæ bona sint exponant : mala verò quæ-
cumque fuerint perdant ; Satius autem esset, si ne
scribentis quidem ab iis nomen reciperetur ; Quem-
admodum antiquitus ne in Ægypto quidem, hoc
enim pacto nimiæ gloriæ contentioni apud istius cu-
pidos obuiam maximè iretur. Nunc cùm et pas-
sim, omnibus scribere liceat, et vnicuique senten-
tiam ferre apud vulgus, audacissimus quisque ma-
ximè commendatur
.

Pag. 185. At Riolanus non solùm monstrum
appellat Pecquetum, cùm tamen monstris careat
Gallia
, testante D. Hieronymo, quod desumpsit
ex Riolano ; Sed Plato, vt corporum, sic ingenij
vitia monstra appellauit Portentosos, inquit Se-
neca, fœtus extinguimus, liberos quoque si debiles


  1. Sic pour : audere. Siquidem,… (source citée).

  2. Sic pour : Ægypto olim (source citée).

q.

Page 85, Ioannis Riolani Responsiones duæ (1655).
2. Ad Pecquetianos
.

monstrosique editi, simul mergimus, quia non ira,
sed ratio est à sanis inutilia secernere
. Propterea
liber Pecqueti de sanguificatione in Corde, mon-
strum ingenij
meritò appellari et eliminari debet.

Ibidem. {a} Viris innocuis turpissimam ignorantiæ
notam
(fateor in vsu Lactearum Thoracicarum)
imò de ipso honorificentissimè loquutis inurere vo-
luit
 : Vnus duntaxat honorificè de Riolano lo-
quutus est, eique parem gratiam retuli, dum cum
eruditissimum et nobilissimum vocaui, quamuis
eo nobilitatis titulo
indignus sit, et falsò glorie-
tur. Ille idem me facetum, id est ridiculum vo-
cat, si dubitando scripsi, de permutatione situs par-
tium in corpore humano
.

Pag. 189. {a} Sed nouum crimen, et ante hunc diem
inauditum commisere, valuere siquidem oculorum
acie, inspexere diligenter vasa quædam Chyli arcana,
quæ Natura huiusce seculi artium inuentis claris-
simi ac fœcundissimi notitiæ reseruaret
. Citat Se-
necam
, quem Riolanus primus in Præfatione An-
thropographiæ proposuerat. Si tibi nota esset
lectio Senecæ, poteras alium textum substituere,
non minùs tibi fauentem. Optimum est, inquit
ille, priorum sequi vestigia, si rectè processerint :
qui enim ante nos nouerunt ista, non sunt Domini
nostri, sed Duces
 : Patet omnibus veritas, non-
dum est occupata, multum ex illa etiam futuris
seculis est relictum.

At verò hanc gratiam retulit Pecqueto Rio-
lanus
, pag. 144. in Responsione ad Experimenta.

Pag. 185. Sanctius tamen à virulentis et tam
atrocibus verbis sibi temperasset senex, de cælesti
profectione assiduè cogitans, si seriò expendisset hoc


  1. Sic pour : 185.

r.

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2. Ad Pecquetianos
.

Christi Domini præceptum, Omnis qui irascitur
fratri suo, reus erit iudicio
. In Græco codice ad-
ditur dictio, εικη, immeritò ac sine causa. Quan-
do igitur iræ affectus ordine et ratione exerce-
tur, tantum abest, vt peccatum contineat, vt
actus sit veritatis, authoritate Sanctorum Pa-
trum : Basilij homilia 10. contra Irascentes ; Gre-
gorij, lib. 3. Moralium, cap. 31. Chrysostomus,
homilia 21. in S. Matthæum
, scribit, eum, qui
cùm debet irasci, non irascitur, peccare : patien-
tia præter rationem suscepta, est potiùs stupor
quidam mentis ; qui opportunè excandescit vir-
tutem exercet præstantissimam : Illius ira non
ex perturbatione oritur, sed ex iudicio ; Vnde
ira quæ aliis ætatibus sæpe in peccatum verti-
tur, senectuti laudem comparat, cùm illius fer-
uore bene vtitur, prout ætatis maturitas et con-
silium eis suadeat.

Pag. 186. Debebat tamen discere Riolanus à
Seneca, seuerissimo sapientiæ Magistro, mollioribus
verbis ingenia esse curanda, qui homine nil mitius,
nil amantius
. Verum est, homo homini Deus, in-
terdum homo homini lupus : Illud potius cogitabis,
non esse irascendum erroribus, etc. Corrigendus est
,
inquit Seneca, qui peccat, et admonitione, et vi,
et molliter, et asperè, meliórque tam sibi, quàm
aliis faciendus, non sine castigatione, sed sine ira,
quis enim cui medetur irascitur ?
Ex hoc loco co-
gnosco ad compositionem tuæ Apologiæ tertium
accessisse, scilicet Alethophilum, Ministrum hæ-
reticum et Gymnasiarcham, qui fingit se Me-
dicum, insignem fautorem Pecqueti, à quo mul-
tùm expectat, ideóque mutauit Religionem sti-

s.

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2. Ad Pecquetianos
.

pendio quodam allectus, alicuius opimi benefi-
cij spe inescatus ; Sic enim hæretici demulcen-
tur, et ad Religionem Catholicam trahuntur,
potiùs quàm mollioribus verbis, et admonitio-
nibus. Interim sportulâ nunc fruitur apud Il-
lustrissimum Episcopum, quam ei procurauit
Pecquetus. Sed ab his nil metuo, quamuis sint
tres coniurati, nam suum Venenum totum euo-
muere, et si nouum adornent, facilè et fortiter
resistam.

Riolanus Pecquetum per contemptum puerum
vocat
. Id non dixt Riolanus. At ipse se talem
prædicat in Epistola præliminari : imò paruuli no-
mine vtitur, et pumilionis : sed ineptè Pecquetia-
nus Anatomicus
, versum Virgilij ad Pecquetum
traducit, de Troïlo certante cum Achille.

Infelix puer, ac impar congressus Achilli.

Castigatio leuis lege concessa est docenti ; atque
ea de causa Riolanus Senecæ
consilium sequutus,
Epist. 94. castigauit Pecquetum, eiúsque fauto-
res. Nemo præceptis curat insaniam, ergo nec ma-
litiam quidem. Dissimile est, nam si insaniam su-
stuleris, sanitas reddita est : si falsas opiniones ex-
clusimus, non statim sequitur despectus rerum agen-
darum, et vt sequatur, tamen admonitio corrobo-
rabit rectam de bonis malisve sententiam. Illud
quoque falsum est nihil apud insanos proficere præ-
cepta ; nam quemadmodum sola non prosunt, sic
curationem adiuuant
, Et denvnciatio et
castigatio insanos coercvit
.
Quorum effectus non inanes fuisse agnoscet Le-
ctor, quia Pecqueti fautores et Asseclæ magna
ex parte ei renunciarunt.

t.

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2. Ad Pecquetianos
.

Finxit Riolanus opinionum portenta, ne de-
esset pugna materia, nec absque aliqua recti specie
in Pecquetum sæuiisse videretur
. Reprehendit
Riolanum, qui dixit opinionem Pecqueti porten-
tum ; ac proinde Riolanus fingit opinionum por-
tenta. Nunc earum Lactearum causam agit in-
geniosossimus Pecquetus, vt postmodum superua-
canea foret noui cuiuspiam ac longioris operis ac-
cessio. Itaque quidquid in Riolani responsione inta-
ctum reliquit, hisce aliquot capitum breuibus litu-
ris emendare institui ac expungere
. Ergo tibi com-
municatus fuit liber Pecqueti ante editionem,
quum vterque simul eodem volumine et eodem
tempore editus fuerit, nec tamen respondisti ad
infinitos errores Anatomicos, notatos à Riolano,
in prima Responsione ad Experimenta, quia tua
scientia Anatomica cum Pecqueto consistit in La-
cteis Venis, vasis Lymphaticis, et Circulatio-
ne sanguinis, nec plus vltra extenditur, quæ ta-
men omnia non intelligis ex mente Authorum,
et inscienter explicas.

Tuum caput quartum ex Bartholino de prom-
ptum est, atque eandem crambem recoquis, vel
ad Bartholinum tuas obiectones miseras, vt ei
refricares memoriam eorum, quæ à vobis obser-
uata fuerant in Riolano Responsione ad Pecquetum.
Sed prudenter abstinuit à defensione errorum
Anatomicorum, quos nemo in arte Anatomica
quantumvis peritus, tueri potest ; qui attentè le-
get Dubia Anatomica Bartholini, id manifestè
deprehendet ; Nam postquam examinauit Re-
sponsionem Riolani ad librum Pecqueti, cap. 4.
sic
loquitur. Alias argumenta contra Thoracicas La-

u.

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2. Ad Pecquetianos
.

cteas soluuuntur. Illius responsiones cùm eis non
placuerint, et Riolanus futiles et inanes demon-
strarit, eandem telam subtiliùs retexere conan-
tur. Tantus eos possidet Lymphaticus error,
vt si possent, Dæmones in auxilium inuocarent,
vt nocerent Riolano.


Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte. Jean ii Riolan Responsiones duæ (1655), Responsio ad Pecquetianos, 2e de 6 parties

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(Consulté le 09/12/2025)

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